215,4 – Enfer, Diable

– Notre indestructible part d’ombre. Le Christ vrai homme et vrai Dieu, abaissé dans l’Incarnation, lui-même est allé aux enfers avant de remonter au Ciel.

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« L’enfer existe, il est la part du plus grand nombre . » (Louis Aragon)

« Il est difficile d’apprécier correctement l’origine politique, non religieuse, de la doctrine de l’enfer … C’est Platon, plus que les premières spéculations chrétiennes sur une vie après la mort, qui est le vrai précurseur des minutieuses descriptions de Dante … Platon fut le premier à comprendre dans quelle mesure ces doctrines (jugement dernier, châtiments, récompenses, séparation géographique des uns et des autres) pouvaient être utilisées comme des menaces dans ce monde tout à fait indépendamment de leur valeur spéculative quant à une vie future … Quand les hommes des révolutions mettaient en garde contre l’élimination de la peur de l’enfer de la vie publique, ces paroles n’avaient pas pour origine une fois dogmatique dans le ‘Dieu vengeur’, mais une défiance à l’égard de la nature de l’homme. » (Hannah Arendt)

« Ce qui caractérise l’enfer, c’est qu’on y discerne tout, jusqu’à la moindre chose, avec la dernière netteté. » (Jean Baudrillard)  – La transparence obligée. 

« Il est bien connu que le ciel est plus pâle. A cela, une bonne raison : l’enfer est le lieu de nos désirs, c’est là que chutent notre agressivité et notre sexualité. Nous ne pouvons que secrètement préférer l’enfer (d’où la nécessité de la peur) ; et le diable est du côté de nos désirs, il porte les puissances de vie : c’est lui que nous voudrions avoir pour Dieu … Voici revenir la fatale équivoque : puisque Dieu nous a créé comme il a créé le diable et qu’il a la toute-puissance, c’est donc lui, Dieu, qui est en vérité le destructeur, l’odieux, le diable. » (père Maurice Bellet – le Dieu pervers)

« On parle toujours du feu de l’enfer, mais personne ne l’a jamais vu, l’enfer c’est le froid. » (Georges Bernanos)

« Je savais bien, fit-elle. Tu ne crains pas l’enfer et tu crains ta femme. Es-tu bête ! » (Mouchette, un personnage de Georges Bernanos – Sous le soleil de Satan)

« L’enfer se hait lui-même. » (Georges Bernanos)

« L’enfer c’est de ne plus aimer. » (Georges Bernanos – Journal d’un curé de campagne)

« La Damnation ne serait-elle pas de se découvrir trop tard, beaucoup trop tard, après la mort, une âme absolument inutilisée, encore soigneusement pliée en quatre, et gâtée comme certaines soies précieuses, faute d’usage ? » (Georges Bernanos) – Tous ceux auxquels, sur le tard, reviennent les importunes et déplaisantes réminiscences d’une vie manquée faute d’aimer comprennent ce que dit Bernanos.

« L’Enfer est presque toujours varié, à grand spectacle, paroxystique, personnalisé enfin ; le Ciel, à peu près immanquablement monochrome … monocorde, en tout cas sans discordance ; monotone, par conséquent menacé par l’ennui, anonyme … sans félicité particulières appropriées aux mérites acquis comme sont les châtiments aux fautes commises … Autre contraste, la béatitude de confection récompense une vie entière d’irréprochable vertu, tandis que les tortures spécifiques punissent le plus souvent un forfait unique mais éclatant. » (Roger Caillois)

« Depuis peu de temps, cette croyance aussi vieille que l’histoire est en train de s’effacer et même de s’évanouir, à un point tel que si l’on s’en tient à l’Occident, ce siècle peut passer pour celui de la disparition, au moins pour celui de l’éclipse ou de la métamorphose, de l’Enfer. » (Roger Caillois)

« A-t-on jamais vu une personne descendre en enfer pour y remplacer une autre ? Jamais, on l’y voit l’y faire descendre, c’est tout. » (Louis-Ferdinand Céline)

« Vous m’avez dit, mon Dieu, de croire à l’enfer. Mais vous m’avez interdit de penser, avec certitude, d’un seul homme, qu’il était damné. » (Père Teilhard de Chardin)

« L’enfer est le lieu où nous sommes condamnés au temps pour l’éternité. » (Emil Cioran)

« Pour croire à la réalité du salut il faut d’abord croire à celle de la chute : tout acte religieux débute par la perception de l’enfer … le ciel, lui, ne vient qu’après. » (Emil Cioran)

« L’être inféodé aux heures est-il encore un être humain ? A le contempler on entrevoit la nature véritable de l’enfer : n’est-ce point le lieu où l’on est condamné au temps pour l’éternité ? » (Emil Cioran)

« Quand les gens essaient d’imaginer un paradis sur terre, cela fait tout de suite un enfer très convenable. » (Paul Claudel)

 « Vous qui entrez ici, quittez toute espérance. » (Dante – La divine Comédie – inscription à l’entrée de l’enfer) – « Dans la tradition chrétienne, l’enfer est le lieu spécifique de l’inespoir. » (Jean-Claude Guillebaud)

« L’enfer c’est la souffrance de ne plus pouvoir aimer. Une fois, dans l’infini de l’espace et du temps, un être spirituel, par son apparition sur la terre, a eu la possibilité de dire : ‘Je suis et j’aime’. Une fois seulement lui a été accordé un moment d’amour actif et vivant; à cette fin lui a été donnée la vie terrestre, bornée dans le temps; or, cet être heureux a repoussé ce don inestimable, ne l’a ni apprécié, ni aimé, l’a considéré ironiquement, y est resté insensible … Il se dira : ‘Maintenant j’ai la connaissance et, malgré ma soif d’amour, cet amour sera sans valeur, ne représentera aucun sacrifice, car la vie terrestre est terminée’… Soif ardente d’un amour actif et reconnaissant, désormais impossible. » (Dostoïevski – Les frères Karamazov, Entretiens du starets Zosime)

« L’enfer est un vague corridor aux veilleuses bleutées. Il n’existe pas de lieu définitif où déposer son âme, ni rien de semblable d’ailleurs … C’est un lieu de détachement qui ne promet aucun refuge. On s’y fait assez vite. Se déprendre de soi est une autre histoire … C’est un monde sans écho. » (Anne Dufourmantelle)

« L’enfer n’est pas seulement pavé de bonnes intentions, mais aussi de crimes commis au nom de la pureté morale. » (Julien Freund)

« Parmi les services que je vous ai rendus autrefois, la crainte de l’enfer n’était pas la plus mince. La damnation étant seule à redouter, vous n’étiez pas trop effrayé par le reste. Depuis que vous ne craignez plus l’enfer, vous avez peur de tout, et surtout de vous-mêmes. Vous n’avez pas tort. » (André Frossard – faisant parler le diable)

« Enfer n’existe pas. Peux te dissiper. Stop. Gide » (télégramme reçu par François Mauriac le lendemain de la mort d’André Gide)

« La foi ne peut se passer de l’enfer. ‘Une religion qui offrirait des récompenses sûres dans l’autre vie verrait disparaître ses dévots par milliers’. » (Bernard Groethuysen – citant Montesquieu)

« Le ‘luciférianisme’ est le refus de reconnaissance d’une autorité supérieure ; le ‘satanisme’ est le renversement des rapports normaux et de l’ordre hiérarchique. » (René Guénon)

« La terreur de l’au-delà était nécessaire pour ‘émousser l’esprit déchaîné et le dompter jusqu’à ce qu’il devienne calme’. » (tiré de Hegel – sur le rôle de l’Eglise)

« L’enfer, c’est la vérité perçue trop tard. » (Thomas Hobbes) – Combien vrai !

« Une chute sans fin dans une nuit sans fond, voilà l’enfer. » (Victor Hugo)

« Si l’homme ne comprend pas l’enfer, c’est qu’il n’a pas compris son propre cœur. » (Marcel Jouhandeau) 

« La damnation, c’est être content d’être soi, c’est avoir renoncé à tout dépassement de soi. » (Pierre Jourde)

« Il est curieux de noter que ce sont les gens qui ne croient pas à l’Enfer qui semblent parfois les plus enclins à en fabriquer d’assez bonnes répliques ici-bas. » (Simon Leys) – Les Staline, Trotsky, Mao Tsé Tung, Pol Pot…

« On déclarait un jour que seuls les Enfers ont inspiré les poètes et que les paradis dont assommants. ‘Pour le paradis, fit remarquer une femme d’esprit, on manque de renseignements’. » (Paul Morand)

« Ceux qui ont inventé l’enfer manquent de cœur. Ils ont imaginé un Dieu qui leur ressemble. … Il y a, dans le monde, assez de chagrins, de deuils, de désespoirs pour faire pleurer Dieu lui-même … L’enfer n’a pas suffisamment inspiré les bons. Il n’a pas suffisamment contenu les méchants. Nous avons tous besoin d’être conduits par la persuasion et par l’amour. » (abbé Mugnier)

« L’enfer contemporain est pavé de si bonnes dévotions. » (Philippe Muray)

« …Cet enfer … est rempli de damnés qui ne supportent pas d’être seuls damnés. C’est même à cela que l’on reconnaît le damné : à ce qu’il ne peut pas tolérer de rester seul ; et à ce qu’il va s’efforcer de précipiter tout le monde dans sa damnation… » (Philippe Muray – sur les associations persécutrices et certains militants)

« Auriez-vous l’amabilité de m’indiquer le chemin de l’enfer ? » (Dorothy Parker, phrase appréciée par Louise  Brooks)

« Si l’enfer c’est vouloir être uniquement soi-même, si seul l’homme peut se le donner à lui-même… » (cardinal Joseph Ratzinger)

« L’enfer ce n’est pas les autres, c’est l’avalanche des autres. » (Olivier Rey – Question de taille)

« Je doute parfois de l’existence de l’enfer, mais la lecture des journaux me guérit de cette incrédulité-là. » (Claude Roy)

« L’enfer, c’est quand tout sera parfait. » (Jean Rostand)

« L’enfer est vide et tous les diables sont ici. » (Shakespeare – La Tempête)  -Bien sûr, ils sont où sont les matériaux (nous). Ils ne pratiquent pas le télétravail.

« Le camp repose plutôt sur l’intuition que l’enfer ce sont les autres, dès qu’ils sont forcés d’accepter (de subir) leur promiscuité … Sadisme fondé sur l’entassement … Sartre a simplement échangé le macro-enfer contre le micro-enfer. » (Peter Sloterdijk)

« N’avoir ni paradis, ni enfer, c’est se retrouver intolérablement privé de tout, dans un monde absolument plat. » (Georges Steiner – sur la dualité de la condition humaine)

« Ce qui me fait tressaillir d’amour n’est pas le ciel que tu m’as promis, l’horrible enfer ne me fait pas tressaillir … s’il n’y avait pas de ciel  je t’aimerais et s’il n’y avait pas d’enfer je te craindrais. » (sainte Thérèse d’Avila)

« L’enfer. Ne serait-ce pas le temps réduit à lui-même, à l’état pur, inhabité ? Sans projet, sans divertissement, sans la moindre espérance que demain sera autre chose que le décalque inanimé d’aujourd’hui. ‘Le temps sans passe-temps.’ » (Gustave Thibon)

« L’enfer, ce lieu ne me parlant plus de Dieu. » (Paul Verlaine)

« Damne-toi ! Nous serons heureux à deux. » (Paul Verlaine)

« La descente aux enfers est facile :

« La porte du sombre abîme est béante nuit et jour,

« Mais rebrousser chemin, regagner l’air libre ;

« Voici le vrai travail, le véritable exploit. » (Virgile)

« L’enfer serait du temps pur. » (Simone Weil)

« Dans le christianisme, le bon Dieu semble dire aux hommes : Ne jouez pas de tragédie, c’est-à-dire ne mettez pas le ciel et l’enfer sur la terre. Le ciel et l’enfer, Je me les suis réservés. » (Ludwig Wittgenstein)

« L’enfer est pavé de bonnes intentions. » (proverbe)

« Qui ne souhaiterait l’enfer par certains hivers. » (?)

« Le temps sans passe-temps. » (?)  

« Lieu de l’inespoir. » (?)

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