180,1 – Culture

– Occupation des agriculteurs, pour l’autre regarder les séries américaines, la télé-réalité ou le blog de BHL.

– On ne se cultive plus, on achète des produits culturels, des biens culturels. Ces nouvelles expressions des média définissent parfaitement la vulgarité actuelle et sa marchandisation ; de Beethoven on a glissé au Rap.

– « Quand il n’y a pas de culture, on appelle culture ce qu’il y a. » (Renaud Camus) – Voir nos média !

– Dans les milieux Bobos, on parle souvent de Capital culturel. Rien n’échappe à la terminologie du fric.

– Une forme de culture, la culture générale (comme l’adjectif l’indique) n’est pas située. Ce qu’il faut savoir, ce que l’on n’a pas le droit d’ignorer. Savoir minimum et commun, partagé par tous, en deçà des spécialités. L’idée d’honnête homme de jadis … Rien à voir avec ces fictions vides et ridicules qu’on appelle : culture de rue, d’entreprise, de génération, de ghetto, de cité, culture jeune….

C’est une ambiance, un climat, l’air que l’on respire. Elle est l’adoption d’un sens, la reconnaissance d’une intelligibilité partageable. Elle consacre une façon d’être et de se comporter, une éthique. Elle implique un système de préférences et de hiérarchies personnellement élaborées. « La culture est dangereuse car elle encourage le développement de l’esprit critique et forme de vrais citoyens des hommes et des femmes libres là où l’on voudrait des électeurs bien conditionnés. » (Alain Morvan) –  « Elle est l’instrument par excellence de la liberté de penser, c’est-à-dire d’opérer des liaisons, de rapprocher des éléments épars, de sauter d’un champ d’études à un autre, d’exercer une réflexion globale, par définition critique. » (Renaud Camus) – C’est bien pourquoi de l’école jusqu’à la bassesse des émissions dites de distraction, le groupuscule politico-médiatique fait tout pour anéantir le peu qu’il en reste – « La distinction entre ce qui est profond et ce qui est superficiel, base des études sérieuses, n’a guère résisté à la tendance démocratique naturelle qui consiste à demander ‘à quoi ça sert ?’ » (Allan Bloom)

-La culture littéraire, générale, permet de s’adapter à tous les environnements, fussent-ils techniques, alors que les formations purement techniques (bac pro, etc.) sont souvent déjà dépassées à le sortie d’école.

Au sujet de cette forme de culture on peut reprendre la distinction de Platon sur la différence qu’il faut tenir entre opinion et réflexion, entre émotion et argumentation. La culture générale relève des termes seconds. Elle entraîne la juste appréciation des gens et des choses, la capacité de s’élever du particulier au général (savoir s’extraire de l’anecdote, s’élever au-dessus, en comprendre la portée éventuelle), de discerner l’essentiel de l’accessoire,  et implique le délaissement de « l’écume légère des événements » (Paul Valéry). Elle suscite une compréhension plus large, elle permet de rapprocher des éléments, des faits, des idées apparemment isolés, de susciter parfois une émotion intellectuelle ou esthétique.

Elle n’est pas consommation, elle est intégration en soi, appropriation d’autre, d’inconnu, élaboration d’une vision, façonnement de soi. Ce qui est d’abord transmis par cette culture là est un rapport équilibré au monde, des éléments de construction de la personne et la perception de son rôle ; elle génère l’intégration à la société.

Elle suppose temps, calme, réflexion, lectures, contacts, recul, approfondissement, liberté d’esprit… Elle ne se guide pas de l’extérieur ( elle est donc inaccessible au lecteur abêti du même journal pendant quarante ans). Elle résulte d’un effort désintéressé, d’un goût, d’un désir, d’une curiosité personnelle. Sauf exceptions, elle refuse la pression mondaine et marchande qui clame : Qu’il faut avoir vu tel film, tel clip, lu tel livre…, à plus forte raison l’absurde zapping.

– L’objectif de tout ce qui relève de l’animation culturelle (pour public inanimé) est d’empêcher cette intériorité, puisqu’elle mène à la liberté. C’est là toute l’œuvre bruyante d’un boursouflé comme Malraux, suivi de son sosie, seulement superficiellement différent, Jack Lang. – On va vous faire découvrir… On va vous faire aimer… On va vous dévoiler… On va vous initier… On va surtout vous prendre pour des abrutis, on même temps qu’on va aider nos petits copains et copines qui se disent artistes.

– Il est bien rare qu’une solide culture technique, professionnelle, n’entraîne pas d’elle-même et fort heureusement un niveau certain de culture générale. L’une comme l’autre sont les meilleurs garde-fous contre la dépression.

– L’anti-culture : « Du passé faisons table rase. » (Eugène Pottier, couplet de l’Internationale)

– Les termes d’activités culturelles, d’industrie culturelle, de sphère culturelle, de biens culturels, l’existence d’un ministère de la culture, le fameux tout est culturel… en même temps que le mépris dans lequel sont tenues les réalités que recouvrent les expressions d’héritage, de patrimoine, de transmission… nous en disent beaucoup sur la décrépitude de ce qu’évoquait le terme de culture. Le bouffon et lamentable pèlerinage mitterrandien au Panthéon.

– Historiquement, en 1959, de Gaulle, imitant, mais de manière éléphantesque, des initiatives  d’avant guerre plus opportunes (Jean Zay) et des débuts nationalistes du régime de Vichy (le mouvement Jeune France et l’école d’Uriage), ayant surtout besoin de caser Malraux auquel il fallait d’urgence enlever l’Information où il devenait dangereux, laissait créer un monstre, le ministère de la culture donc tuait celle-ci, « Ce que l’Etat encourage dépérit, ce qu’il protège meurt. » Ses successeurs socialistes n’ayant fait, suivant leur doctrine, qu’imposer l’abêtissement général et, suivant leur penchant, que jeter judicieusement l’argent par les fenêtres afin qu’il tombe dans les poches des copains. Sur le plan des grandes œuvres, qu’a-t-on produit depuis ? Où sont les Rodin, les Monet, les Renoir, les Proust… (considérations dues, sauf l’aspect polémique, à Marc Fumaroli)

– Ne pas confondre la Culture et le culturel, qui n’est qu’abrutissement des citoyens-électeurs et enrichissement des amis bien-pensants.

– L’exception culturelle française : des étudiants qui ne savent ni lire ni écrire ni s’exprimer, une école et une université en déroute, une langue massacrée, des commandes d’Etat comme en URSS, des copinages, des privilèges et des sinécures, des artistes américains pour enlaidir nos places et nos rues, des maisons, des lieux, des espaces, des centres, des actions, des événements, du street art, de l’imprégnation culturelle, de l’animation culturelle, de la diffusion culturelle, des buts culturels, de la démocratisation culturelle, des salons, des fêtes, des foires, des commémorations et des hommages, des journées… ; du vent, du tintamarre, de l’esbroufe, du fric, de la poudre aux yeux, des faire-valoir et des tribunes pour politicards incultes et journalistes au service de l’autosatisfaction béate, de l’exhibitionnisme et du voyeurisme touche-à-tout et frivole imposé au populo, des réalisations immondes… La culture de Babel.  

« Comment un pays qui nivelle à ce point sa culture, méprise ses talents et se soucie aussi peu  de sa langue peut-il en même temps revendiquer une prétendue ‘exception culturelle’ ? » (Jean-Marc Chardon). En fait, le terme ne sert qu’à justifier une politique de fiscalisation et de quotas protectionnistes qui permet à l’Etat de remercier les copains et d’orienter les choses comme il l’entend, c’est-à-dire toujours au pire.

– Véritable épidémie, au moins de mots, tout le monde fait du culturel : les caisses de retraite, les mutuelles, les entreprises, les associations, les municipalités et les innombrables organismes politiques, (y compris les intellectuels et les milliardaires)… si bien que tout le monde se pavane et que personne ne fait le travail qu’il est d’abord censé faire. Le maquis est gigantesque, la fraude probablement en proportion, sans compter la dépense d’énergie de ces  institutions. Quand tout le monde fait tout, personne ne fait rien, si ce n’est se valoriser comme bien-pensant et gaspiller efforts et argent.

– On peut en dire autant que du social, tout le monde fait du social. Prodigieuse vacuité.

– On ne regarde ou ne lit plus une œuvre, on la revisite ; parfois on l’interroge.

-Les forcené(e)s de la diversité font semblant d’ignorer que les brassages imposés de cultures différentes ne conduisent qu’au ‘melting pot’ à l’américaine et nous forcent à adopter la culture économiquement dominante, soit la culture américaine (si on peut parler de culture à son sujet). Et c’est bien parce qu’ignares et inconscients, ils œuvrent pour l’avènement de ce monde qu’ils sont si bien vus par celui-ci.

-Goering n’aurait plus besoin de sortir son révolver en entendant le mot culture, les média (télévision, radio,  journaux, réseaux sociaux, tweets en tout genre) se sont parfaitement bien chargés de la tuer.

– « N’avoir plus aucun imaginaire, ni de l’origine, ni de la fin, la culture qui vient. » (Jean Baudrillard)

– « Il n’y a pas de choc des cultures, plutôt choc des incultures. » (François-Xavier Bellamy) – Vu le niveau, ça nous en promet de belles !

– « La culture du guichet. » – Caractéristique française.

– « Politique culturelle, expression terrifiante. » (Jean-François Lyotard)

« Une demi-culture détruit l’instinct sans lui substituer une conscience. » (Maurice Barrès) – On reconnaîtra nos Bobos.

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« ’La culture n’avait plus … un sens patrimonial (au sens de son vieux répertoire) … et son objet principal, de nos jours, c’était l’actualité, le décryptage de l’actualité, grâce à la parole et aux commentaires des experts, sociologues, intellectuels, journalistes, hommes politiques, syndicalistes, hommes de terrain’ … Elton John, cité parmi les plus grands musiciens de tous les temps. » (Laure Adler, directrice de France Culture – citée par Renaud Camus) – On voit l’entreprise d’asservissement du troupeau.

« L’industrie culturelle est modelée sur la régression mimétique, sur la manipulation d’impressions mimétiques refoulées. Pour ce faire sa méthode consiste à anticiper l’imitation des spectateurs par eux-mêmes et à faire apparaître l’approbation qu’elle veut susciter comme déjà existante. C’est d’autant plus facile que , dans un système stable, elle peut compter sur une telle approbation et qu’il lui reste plutôt à la répéter sur le mode du rituel qu’à vraiment la susciter. » (Theodor Adorno) – Voir les éloges dithyrambiques de toute la presse soumise le jour même de la sortie  de n’importe quel navet filmé.

« L’orthographe est de respect, c’est une sorte de politesse. » (Alain)

« Tout à son mépris du peuple, le ‘beauf de gauche’ pose à priori qu’une œuvre grand public est nécessairement consternante. Le vulgaire ne s’enticherait que de balourdises. A l’inverse le talent ne s’exprimerait que dans la confidentialité. » (Hervé Algalarrondo)

« Le seul critère authentique … pour juger des choses spécifiquement culturelles est leur permanence relative, et même leur éventuelle immortalité. Seul ce qui dure à travers les siècles peut finalement revendiquer d’être un objet culturel. » (Hannah Arendt)

« La personne cultivée serait quelqu’un qui sait choisir sa compagnie : parmi les hommes, les choses, les pensées, dans le présent comme dans le passé. » (Hannah Arendt)

« Bien des grands auteurs du passé ont survécu à des siècles d’oubli et d’abandon, mais c’est une question que de savoir s’ils seront capables de survivre à une version divertissante de ce qu’ils ont à dire. » (Hannah Arendt) – Sur les objets culturels modifiés (réécrits, abrégés, condensés, digérés…) pour qu’ils deviennent objets de loisir, de consommation… réduits à l’état de pacotille.

« Seul ce qui dure à travers les siècles peut revendiquer d’être un objet culturel. » (Hannah Arendt) – Et non un objet de consommation, ou de spéculation, telles les ‘horreurs’ d’un Jeff Koons

« Tendance à l’homogénéité culturelle. La communication entre les couches sociales s’établit trop facilement (au moins dans la civilisation urbaine) … pour que se maintienne ou se reconstitue une culture spécifiquement populaire, ouvrière ou paysanne. » (Raymond Aron) – D’où il n’y a plus que ce qu’on appelle culture aujourd’hui, la vulgarité médiatique, le rap…

« L’ère de la culture est close. Seul le carnaval anodin et ennuyeux se poursuit. » (Kostas Axelos) – Ne restent que les innombrables fêtes pour combler le vide des veaux.

« De l’agriculture à la haute mathématique tout est censé être culture … En englobant tout la culture a fini par se diluer. Elle est devenue ce fourre-tout … Elle succombe à l’incessante rotation de la production-consommation … Tout devient intéressant, plaisant, superficiellement ludique, pour être vite oublié … Nous vivons avec la nausée du déjà dit, du déjà  lu, déjà entendu, déjà vu … La culture, diffuse et diffusée, cultive l’anodin. » (Kostas Axelos)

« Par un paradoxe intelligible, le raffinement culturel favorise l’inculture …Nos ancêtres maitrisaient un savoir empirique personnellement vérifié par chacun, alors que nous adhérons à des corpus immenses de savoirs, dont nous ne vérifions jamais, au mieux, qu’une fraction négligeable. » (Jean Baechler)

« La peur, la catastrophe, l’apocalypse hantent les scènes de la modernité à la façon de vieux monstres de retour. Une culture de l’effroi se greffe sur le corps mouvant de la culture actuelle. »   (Georges Balandier)

« Ce qui est proprement hallucinant c’est la rapidité avec laquelle cet effondrement culturel a eu lieu, en fait une grosse quinzaine d’années. » (Olivier Bardolle) – Il est vrai que dirigeants et média y travaillaient nuit et jour depuis longtemps.

« Une demi-culture détruit l’instinct sans lui substituer une conscience. » (Maurice Barrès – sur certains prétendus intellectuels, les excités de l’indignation)

« La forme bâtarde de la culture de masse est la répétition honteuse : on répète les contenus, les schèmes idéologiques, le gommage des contradictions, mais on varie les formes superficielles : toujours des livres, des émissions, des films nouveaux, des faits divers, mais toujours le même sens. » (Roland Barthes) – Voir les inépuisables : La traversée de Paris, La grande vadrouille, Le Père Noël est une ordure….

« Le culturel soudoie mes instincts. » (Jean Baudrillard – sur le culturel impérieux actuel)

« Production des leurres, des placebos, du faux dans l’art, de l’info., tout cela est le signe que nous entrons dans un monde déceptif, où toute une culture travaille allègrement à sa contrefaçon. Ce qui veut dire aussi qu’elle ne se fait plus d’illusion sur elle-même. » (Jean Baudrillard)

« C’est cette proximité et cette ubiquité des images, cette contamination virale des choses par les images qui sont la caractéristique finale de notre culture. » (Jean Baudrillard)

« Celui qui est le maître des symboles universels de l’altérité et de la différence, celui-là est le maître du monde. » (Jean Baudrillard) – Jadis, les puissances coloniales européennes, aujourd’hui, pour un temps, le monde anglo-saxon de la démocratie.

« Les autre cultures n’ont jamais prétendu à l’universel, ni à la différence (au moins avant qu’on ne la leur inocule, dans une sorte de guerre de l’opium culturelle). Elles vivent de leur singularité, de leur exception, de l’irréductibilité de leurs rites, de leurs valeurs. Elles ne se bercent pas de l’illusion meurtrière de réconcilier tout cela, de cette illusion qui les anéantit… Elles ne vivent pas de l’illusion d’une loi universelle. » (Jean Baudrillard – sur des cultures passées ou réussissant à subsister à l’écart de la mondialisation, malgré et contre)

« Toute culture digne de ce nom se perd dans l’universel. Toute culture qui s’universalise perd sa singularité et meurt. Il en est ainsi de celles que nous avons détruites en les assimilant de force, mais il en est ainsi de la nôtre aussi dans sa prétention à l’universel. La différence est que les autres sont mortes de leur singularité, ce qui est une belle mort, tandis que nous mourons de la perte de toute singularité, de l’extermination de toute nos valeurs, ce qui est une male mort. Nous pensons que le destin de toute valeur est son élévation à l’universel, sans mesurer le danger mortel que constitue cette promotion … réduction, élévation au degré zéro. » (Jean Baudrillard)

« Toutes les autres cultures sont extraordinairement hospitalières. Elles ont une possibilité fantastique d’absorption. Alors que nous oscillons entre la proie et l’ombre de l’autre, entre la prédation pure et la reconnaissance idéale, les autres cultures gardent la possibilité de recycler ce qui leur vient d’ailleurs. Justement parce qu’elles ne vivent pas de l’illusion d’une loi universelle, elles ne sont pas fragilisées comme nous le sommes, toujours sommés d’intérioriser la loi et d’être à l’origine de nous-mêmes et de nos actes, de nos goûts et de nos plaisirs. Les cultures sauvages ne s’embarrassent pas d’une telle prétention. Être soi-même n’a pas de sens, tout vient de l’Autre. Rien n’est soi-même et n’a lieu d’être. » (Jean Baudrillard)

« Il est aussi impossible de calculer en termes de beau ou de laid, de vrai ou de faux, de bien ou de mal, que de calculer à la fois la vitesse et la position d’une particule. Le bien n’est plus à la verticale du mal, rien ne se range plus en abscisses et en ordonnées. Chaque particule suit son propre mouvement, chaque valeur, ou fragment de valeur, brille un instant dans le ciel de la simulation, puis disparaît dans le vide. C’est le schéma même du fractal, et c’est le schéma actuel de notre culture. » (Jean Baudrillard)

« Agiter le thème de l’exception culturelle français, c’est chercher à se réhabiliter comme on sauverait les meubles. » (Jean Baudrillard) – Vu l’état de notre prétendue culture, on avoisine l’escroquerie et l’étranger rigole.

« Les autres cultures pouvaient être violentes et conquérantes, mais elles ne visaient pas à cette annihilation, à ce décervelage mondial … C’est ce qu’on voit dans les récentes guerres, l’extermination de l’ennemi en tant qu’ennemi, sa disqualification en tant qu’adversaire … Destruction des cultures singulières et de tout ce qui résiste à l’ordre mondial et à l’échange généralisé » (Jean Baudrillard – sur la modernité)

« Le marché ne reconnaît d’autre hiérarchie culturelle que l’aptitude à se vendre ; les listes des meilleures ventes constituent les seuls ordres reconnus de préférence culturelle, et, de fait, les seuls critères d’excellence. » (Zygmunt Bauman)

« S’il est une expression qui a largement imprégné l’inconscient collectif, c’est bien celle du ‘capital culturel’ : culture, quelque chose qu’il faut posséder , ‘bagage culturel’, socle de compétence, ‘équiper’ les gens, acquis ; vocabulaire de ‘l’avoir’. Décrire la culture comme un bagage suppose d’affirmer l’existence autonome et autosuffisante du propriétaire de ce bagage … Mais la culture est au contraire le passage nécessaire par où s’accomplit notre personnalité. Elle n’augmente pas ce que nous avons, mais ce que nous sommes. » (François-Xavier Bellamy)

« La culture est le seul héritage qui s’accroît à mesure qu’il est transmis. » (François-Xavier Bellamy)

« Contrairement à l’animal, qui possède ses aptitudes dés l’instant de sa naissance, l’homme n’est pas un être d’immédiateté. L’homme se distingue par le fait qu’il a besoin de l’autre pour accomplir sa propre nature, besoin d’une médiation. » (François–Xavier Bellamy)

« L’homme est par nature un être nécessiteux. Ce qui est augmenté par la transmission de la culture ce n’est pas l’acquis, le savoir, le ‘capital culturel’ de l’individu mais son être même … L’illusion absolue que constitue l’utopie numérique lorsqu’elle nous fait croire qu’il n’est plus besoin d’apprendre, puisque tout le savoir est désormais stocké et partout accessible. Quelle incroyable erreur … avoir appris un poème et savoir le trouver sur le Web n’est pas du tout la même chose … pouvoir trouver de grandes dates ne dispense pas d’apprendre la chronologie de notre histoire… » (François-Xavier Bellamy)

« Lien entre culture et transmission : l’héritage culturel est constitué dans l’acte même qui le transmet. Il ne se stocke pas, il ne se garde pas pour soi, il n’est protégé que lorsqu’il est partagé … ce qui le rend infiniment fragile. » (François-Xavier Bellamy)

« L’œuvre insensée du XIX° siècle, qui s’est mis à élever la spontanéité au-dessus de la réflexion, l’invention au-dessus de l’ordre, l’originalité au-dessus de la vérité. » (Julien Benda)

« On entrevoit le jour où la bonne société française répudiera encore le peu qu’elle supporte aujourd’hui d’idées et d’organisation dans l’art et ne se passionnera plus que pour des gestes de stars, des impressions de femmes ou d’enfants, des rugissements de lyriques, pour des extases de fanatiques. » (Julien Benda) – Ce jour est arrivé.

« Depuis quelque temps, la France s’est dressée contre elle-même pour condamner son attachement aux régions claires de l’être. La nuit peut être fière ; elle a obtenu que la lumière ait honte d’être la lumière et n’admire plus que la nuit. » (Julien Benda – sur la décadence de la culture, de l’ancienne clarté française) – Que dirait-il depuis 1933 !

« Nous sommes devenus pauvres. Nous avons sacrifié bout après bout le patrimoine de l’humanité … Nous avons dû le mettre en dépôt au mont de piété pour recevoir en échange la petite monnaie de l’actuel … Que vaut en effet le patrimoine culturel s’il n’est pas lié à l’expérience ? Pauvreté de nos expériences privées, mais aussi celles de l’humanité. Et c’est en cela une nouvelle forme de barbarie … Car la pauvreté d’expérience, où mène-t-elle le barbare ? Elle le mène à recommencer depuis le début : recommencer à nouveau, s’en sortir avec peu, reconstruire avec peu, sans regarder ni à droite ni à gauche. » (Walter Benjamin – sur la nouvelle incapacité de raconter, d’échanger des expériences, et même d’avoir une expérience, de transmettre…)

« ‘Je distingue l’idée d’une culture de sa réalisation historique. J’oppose la première à la seconde comme l’âme au corps’ … les cultures sont définies comme de véritables ‘organismes’. Les civilisations, elles, n’en sont que les formes ultimes, décadentes et figées. » (Alain de Benoist – évoquant Oswald Spengler)

Distinction civilisation et culture : « La civilisation correspond aux efforts d’amélioration du milieu social, et la culture aux efforts d’amélioration de la personnalité intérieure … La triple opposition : culture-âme-vie / civilisation-intellect-raison … Le long  binôme oppositionnel entre culture allemande et civilisation française … les civilisations ne sont que les formes ultimes, décadentes des cultures, que le dernier moment, celui qui précède la fin … la civilisation tue sa culture … La culture est la manifestation originale/ originelle, libre et spirituelle, d’une communauté historique de vie ; la civilisation, la manifestation d’ordre intellectuel et impersonnel qui aboutit au machinisme et à la mécanisation totale de la vie humaine … L’opposition qui se développe chaque jour sous nos yeux entre une pluralité de cultures (organiques) et une civilisation (mécanique) unique. » (Alain de Benoist – s’inspirant de divers auteurs, notamment Oswald Spengler)

« Dans l’onirisme que constitue la culture contemporaine, le sens manifeste est celui d’une agression. Celle qu’opère contre le logos philosophique les prétendus savoirs spécialisés, les sciences humaines, les disciplines de la division et du maniement des hommes, avec leurs complices, les média, qui ont oublié leur sens de transport ou de vecteurs pour devenir des candidats à la fonction de donneurs de sens, de fondateurs du message» (Jean-Marie Benoist –Tyrannie du logos)

« Lorsque la soif de ‘vivre’ se répand trop dans l’humanité, une culture spirituelle supérieure cesse d’être recherchée, car elle est toujours aristocratique, qualitative et non quantitative ; on désire uniquement la ‘vie’ … on ne veut plus de contemplation, de connaissances désintéressées … la culture est impuissante à se maintenir en tant que phénomène qualitatif et succombe au pouvoir du principe quantitatif. » (Nicolas Berdiaeff) – D’autant plus que, par jalousie et conscience de leur médiocrité, les incultes au pouvoir politique et médiatique font tout pour écarter les rares personnes cultivées et indépendantes du juteux système de copinage.

« Le trait le plus apparent et le plus incontestable de la culture occidentale, c’est qu’elle oppose l’homme au monde. Elle tire l’homme de la nature, pour qu’il puisse la dominer et la transformer. » (Emmanuel Berl) – Hélas, la culture occcidentale (qui avait aussi sa grandeur) a déteint en Asie, et partout.

« La culture désigne l’effort de l’homme vers ce qu’il croit être la perfection. Il y eut une culture spartiate dont le but était le héros et une culture chrétienne dont le but est le saint … Il ne s’agit pas tant de pousser l’individu au plus haut de ses facultés que de l’intégrer à un certain groupe. La première fonction de la culture est de fournir des mots de passe. Elle suppose qu’on connaît un certain ensemble de signes. » (Emmanuel Berl)

« La culture consiste en une adaptation aux systèmes de valeurs qu’une société découpe dans le chaos luxuriant que la nature lui propose. Elle choisir de préférer … la vie sédentaire à la vie nomade … Elle établit par là des hiérarchies … La même politesse qui nous fait dire : ‘Que vous avez l’air jeune !’ fera dire au Chinois (celui d’hier, soucieux du culte des ancêtres) : ‘Que vous semblez donc vieux !’ … Dans l’Europe médiévale la noblesse tient à la possession de la terre, une telle hiérarchie aurait paru aberrante dans le monde turco-mongol … La parole et la plume ont remplacé l’épée. La fortune mobilière ne compte pas moins que la fortune immobilière … Jadis, ici, on était disqualifié si on ignorait Mithridate, mais non pas Tamerlan. » (Emmanuel Berl)

« Notre civilisation ne tend pas vers une culture dépravée, mais vers une totale absence de culture. » (Emmanuel Berl) – Ecrit il y a quarante ans.

« La  culture sert à la bourgeoisie à accéder à l’aristocratie et à se séparer du peuple. » (Emmanuel Berl – Mort de la morale bourgeoise)

« On n’arrivera pas à faire aimer sincèrement Racine par une brocheuse. On arrivera seulement à ce qu’elle cesse d’être une brocheuse. » (Emmanuel Berl – Mort de la morale bourgeoise)

« On dit qu’un enfant doit apprendre à parler à un âge précis, et que, s’il a manqué ce passage … il ne parlera jamais. Je n’ai pas appris assez d’Histoire, au bon moment, je n’ai pas lu assez de bons livres, je ne me suis pas exercé dans les exercices de la parole et  de l’écriture quand il le fallait.  Tout l’effort … fourni depuis ne pourra jamais remettre en culture ces zones d’infertilité, ces plaques de latérite, que j’ai laissé s’étendre en moi. » (Alain Besançon – Une génération)

« Je suis un non-violent : quand j’entends le mot ‘revolver’, je sors ma culture. » (Francis Blanche)

« Les sociologues et ceux qui diffusent leurs idées, journalistes … baptisent du nom de culture absolument n’importe quoi : la culture de la drogue, du rock, des loubards… » (Allan Bloom) – Cela correspond parfaitement à l’immense inculture et vulgarité de la non moins immense majorité des journalistes.

« La culture et l’intelligence sont de deux ordres différents. On peut avoir l’une et être dépourvu de l’autre. On peut être cultivé et d’une bêtise épouvantable. L’intelligence ne s’apprend pas, elle s’exerce ; la culture, cela s’apprend. La culture privée d’intelligence est une maladie de l’accumulation. » (Christian Bobin) – L’auteur pensait-il à certaine bourgeoisie ?

« Point de culture sans l’acquisition d’un sens de la mesure autorisant à hiérarchiser les faits et les œuvres. » (Françoise Bonardel)

« Une nouvelle pornographie a vu le jour depuis que des hordes de touristes débraillés peuvent tranquillement, au nom de la culture, défiler en mâchant leur chewing-gum devant la momie d’un pharaon. » (Françoise Bonardel)

« Renoncer à la thésaurisation des savoirs offerts à la convoitise au profit de la formation de soi (‘bildung’) nommée en Europe culture … Qu’est-ce que se cultiver si ce n’est édifier sa propre identité à partir d’affectations assumées et d’altérations surmontées. » (Françoise Bonardel)

« Tout, ou presque, devenant en fait accessible, l’individu postmoderne est un Tantale repus… condamné à une boulimie consumériste en matière de culture et souvent contraint à un syncrétisme hâtif pour ne pas paraître dépassé. » (Françoise Bonardel)

« Spengler disait déjà qu’il viendra probablement un temps où personne ne saura plus regarder un portrait de Rembrandt ou entendre la musique de Mozart ‘parce que le dernier œil et la dernière oreille, auxquels leur langage formel était accessible auront disparu.’ » (Françoise Bonardel)

« Le mot ‘culture’ est de même origine que le mot ‘culte’. Tous deux signifient ‘soin’. Pour le premier, son d’un ennoblissement esthétique et moral, d’une élévation de l’individualité intérieure. » (Françoise Bonardel)

 « Si loin que l’on remonte dans le temps on ne découvre aucune culture, fût-ce la plus primitive, qui ne se soit reconnu un fondement spirituel … Rien ne permet d’affirmer, tant l’expérience est nouvelle, qu’une culture radicalement agnostique voire puérilement athée ait une chance de survie durable. » (Françoise Bonardel)

« N’est-ce pas parce que la culture européenne avait cessé d’être ‘grande’ en se compromettant avec l’insignifiance, que la barbarie a pu en devenir la contrefaçon sinistre, Qu’attendre en retour, sinon le pire, de la sous-culture actuelle qui est déjà en soi barbarie ? » (Françoise Bonardel)

« La ‘spiritualité … s’est en quelque sorte évaporée à force d’être exposée à tous vents grâce aux bons soins de la Culture ; et il lui faudra plusieurs décennies d’occultation plus ou moins forcée pour éventuellement retrouver la puissance ‘formatrice’ qui a permis à chacune de ces œuvres d’exister … On tente maintenant de faire dialoguer peuples et cultures dans un espace mental unidimensionnel et préfabriqué – le monde de la Culture  – dont on attend désormais qu’il désamorce les tensions, masque les contradictions… Exhumant sans relâche, exposant à tout-va, expliquant inlassablement, la Culture promue à une fonction pédagogique et largement relayée à cet effet par les médias, est dans le même temps une opération de mise à distance qui se fait fort d’interposer entre les œuvres et le public le filtre du décryptage savant, du distancement critique et d’un scepticisme de bon ton quant à l’engagement réel des hommes qui nous ont livré ces témoignages ‘spirituels’ : peignant comme ils le firent le Christ, Andrea Mantegna…  croyaient-ils vraiment en lui ? … L’estampille’ culturelle’ confirmant l’irrésistible avancée de la sécularisation en invitant à débarrasser les œuvres de leur dimension ‘spirituelle’ pour n’y plus voir que des productions du savoir-faire humain. » (Françoise Bonardel)

 « Cette frénésie démagogique qui estampille du label ‘création culturelle’ le moindre coloriage, un plat cuisiné ou des tissus à carreaux. » (Pierre Boncenne)

« Réflexes idéologiques, impossibilité de penser au-delà de ses habitudes. » (Laurent Bouvet – sur l’incapacité de la gauche de voir ce qu’on appelle l’insécurité culturelle)

« Le ministre socialiste de la culture (Jack Lang) dissout la notion de politique culturelle dans un vitalisme dont l’expression privilégiée culmine dans la compulsion répétitive de la fête. » (Laurent Bouvet) – Nuit de ceci et nuit de cela, vacarme. Circenses, pour panem on verra.

« S’il ne doit pas y avoir d’exclusion, il est inconcevable qu’il n’y ait pas de hiérarchisation des apports sans pour autant que celle-ci soit un jugement de valeur sur les cultures qui ont contribué de façon plus marginale que d’autres à la construction sociale américaine. La difficulté étant que cette hiérarchisation soit perçue comme une volonté de puissance et de domination et non comme un souci d’organisation des connaissances. » (Laurent Bouvet) – Idem pour la France, où le problème est résolu par la promotion de toutes les cultures à l’exception de la culture du pays hôte, la culture française, systématiquement ignorée, niée, salie…

« La culture est l’ensemble des réponses aux questions fondamentales de l’humanité, qu’elles soient banales ou nobles : Qui dois-je épouser ? Que dois-je manger ? Comment dois-je me comporter vis-à-vis de mon environnement ? … La culture fait une distinction entre la bonne et la mauvaise conduite … Il y a aussi quelque chose de plus, non à proprement parler nécessaire, que nous appelons la ‘haute culture’, art, religion, philosophie, science … La culture peut-elle survivre quand le culte n’a pas d’autre objet que l’ego lui-même ? … ce culte qui est devenu (de nos jours) une épidémie … Sommes-nous encore capable de louer, quelque chose pourquoi nous pouvons remercier ? Qu’est-ce que la culture devient sans le louable ? Est-ce que ce qui a  de la ‘valeur’ peut encore valoir sans un fondement métaphysique ? … Nous pouvons nous installer dans la louange, qui est la condition de la culture, si et seulement si quelque chose existe qui est digne d’être loué. » (Rémi Brague)

« Le domaine de ce qui est savoir, et de ce qui n’est que savoir, la science en particulier, n’appartient pas à la culture … Il se peut aussi que l’Université continue sur sa lancée et produise de l’érudition historique, littéraire, artistique. Mais la culture … est un système de normes, qui visent toutes a assurer la pérennité de l’homme et de l’humain. » (Rémi Brague)

« Tout un style de vie est en jeu. Ce qui relève de la culture m’oblige à modifier mon comportement. Être cultivé, c’est ne pas se permettre n’importe quoi … Respecter, suivant la belle formule de Charles E. Merriam, les ‘credenda’, les choses qu’il faut croire, les ‘miranda’, les choses qu’il convient d’admirer, les ‘agenda’, celles qu’il faut faire. » (Rémi Brague)

« Naguère un professeur vous incitait à aimer les œuvres … à en explorer les richesses. Désormais c’est un directeur de  conscience qui vous explique pourquoi vous devez vos méfier des classiques, voire les écarter. » (Pascal Bruckner)

« Cette inflation de romans, de troupes de théâtre, de groupes musicaux, signe d’une extraordinaire effervescence dont la contrepartie pourrait bien être que plus personne ne se lise ou ne s’écoute. » (Pascal Bruckner)

La démocratisation culturelle : « Etendre à tous le privilège d’accéder à des choses qui n’existent plus. » (Robert Calasso – cité par Marc Fumaroli)

« Quand une culture peu sûre d’elle, malléable et relativiste, en rencontre une autre, confiante, bien ancrée et renforcée par des doctrines communes, c’est généralement la première qui s’adapte à la seconde. » (Erskine Caldwelll)

« Sans la culture, et la liberté relative qu’elle suppose, la société, même parfaite n’est qu’une jungle. Toute création authentique est un don à l’avenir. » (Albert Camus)

« Se cultiver, c’est aller voir chez les morts, entre les pins, entre les tombes, ce qu’il en est de nous-même et de la vie. » (Albert Camus) – Perte de temps bien inutile aujourd’hui où si on ne sait pas tout dés le lycée, média et réseaux sociaux nous apportent gentiment leur vide et leur vulgarité.

« Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde. » (Albert Camus)

« L’homme cultivé reconnaît sur trois phrases l’un de ses pairs. » (Renaud Camus)

  « Aller voir chez les morts, entre les pins, entre les tombes, ce qu’il en est de nous-mêmes et de la vie. » (Renaud Camus – la culture)

« Un des maux qui se sont abattus sur elle, et qui menacent de l’achever, c’est que voyagent sous son nom et se produisent à travers le monde, avec grand succès, sous son identité, toute sorte d’hypostases, d’ersatz et d’ectoplasmes qui, par le bruit qu’ils font et par le train qu’ils mènent donnent au public l’illusion qu’elle ne s’est jamais portée si bien, alors que nous la voyons agoniser sous nos yeux. » (Renaud Camus)

«  Si la culture s’est répandue c’est comme le lait de Perette : plus la culture est diffusée, moins il y en a pour chacun et moins elle a de consistance. Lorsque les trois-quarts d’une génération accèdent au baccalauréat, le niveau de connaissance et de maturité qu’implique ce diplôme est à peu près celui qu’atteignaient au même âge les trois-quarts d’une autre génération, quand personne ne songeait à nommer cela baccalauréat, à peine certificat d’études. L’université fait le travail des lycées, les lycées celui des écoles primaires, les classes maternelles celui que les parents ne font pas, ayant eux-mêmes été élevés par l’école de masse, qui a formé la plupart des nouveaux enseignants. Arte, France Culture ou France Musique se consacrent aux tâches jadis dévolues aux chaînes généralistes, celles-ci imitent les postes et stations de divertissement. Tout a baissé d’un cran. C’est la grande déculturation. Et si les journaux n’ont plus de lecteurs, c’est en grande partie parce que leur public potentiel ne sait plus lire, même des phrases de plus en plus simples et de plus en plus fautives, avec de moins en moins de mots. Le paradoxe est que l’objectif quantitatif, qui est au cœur de l’ambition démocratique en sa transposition culturelle, fait partout le lit de l’argent, par le biais de la publicité, des taux d’audience et des lois du marché. C’est ainsi que le Louvre devient une marque, etc. » (Renaud Camus – La grande déculturation) – Il suffit de lire la lettre ou le courriel d’un bac + 8 ou de l’entendre essayer (en vain) d’aligner trois phrases pour savoir que c’est encore bien pire.

Comment abolir la culture ? Proclamer que « la culture est un privilège de classe – qu’il faut abolir ce privilège – et ce faisant on abolit la culture (puisqu’elle est justement ce privilège). » (Renaud Camus)

« Le contenu d’une culture change avec le nombre et la nature de ceux qui la partagent ou sont censés la partager (de même du contenu d’une éducation), elle n’est indépendante ni de leur nombre ni de leurs caractéristiques sociales… La terre ne survivrait pas à un alignement général des niveaux de consommation sur celui des pays les plus riches. Il en va de même, assez étrangement, s’agissant de la culture. » (Renaud Camus) – L’auteur ne cantonne pas la culture à une classe, et prétend qu’y faire accéder ceux qui le peuvent et le veulent n’est pas descendre le niveau de tout le monde par stupidité égalitaire.

« La culture ne se définit pas seulement par ce qu’elle ‘comprend, mais aussi par ce qu’elle ‘exclut’. » (Renaud Camus) – Attitudes, termes … Une bonne bibliothèque se définit autant par les livres qui n’y sont pas, ceux qui la dépareraient.

« La culture, sous l’alibi qui n’abuse personne du ‘décryptage’ est chassée par ce qui est le plus contraire à son essence, l’actualité … la dictature du présent. » (Renaud Camus)

« L’hyperdémocratie ne veut pas de hiérarchie, or la culture est toute hiérarchie. L’antiracisme dogmatique ne veut rien savoir de l’origine, or la culture n’est que tâtonnements autour de l’origine, et c’est seulement à travers cette quête toujours déçue … qu’elle accède à l’universel. » (Renaud Camus)

« Au temps où la culture vivait tranquillement dans son coin … elle vivait sur l’acquis et s’en accommodait à merveille, l’acquis étant précisément sa matière constitutive … se renouvelant et s’élargissant naturellement à la marge, ou à la pointe … Mais il faut (aujourd’hui) aux responsables culturels offrir en permanence du nouveau. … ‘Aménager’, voilà le maître mot. » (Renaud Camus) – Exemple les musées…

 « On ne vise plus qu’à la quantité, et voulant cultiver tout le monde, on ne cultive plus personne … Tous les professeurs, y compris ceux de l’enseignement le plus supérieur, disent qu’ils doivent sans cesse simplifier leurs phrases, limiter leur vocabulaire, réduire leurs allusions culturelles, parce qu’elles ne sont pas comprises, la culture générale étant morte … La base culturelle, ce qui servira ensuite à prendre son envol et à aller voir ailleurs, le point de départ, c’est ce qui vient des aïeux, des siens ou de ceux des autres … La petite bourgeoisie est moins qu’une autre classe disposée à entendre cela, parce qu’elle déteste les aïeux. Elle est une classe neuve sans aïeux, sans arbre généalogique (ce qui explique la vogue de ces recherches), qui ne connaît pas le nom de jeune fille de sa mère… La nouvelle loi qui libéralise le choix du patronyme, ou du matronyme, devrait … rendre plus inintelligible s’il se peut le passé familial, mieux couper chacun… Comment de nouveaux venus pourraient-ils accéder à la classe cultivée, puisque classe cultivée, il n’y a plus ? » (Renaud Camus)

« Il ne peut plus y avoir de classe cultivée … réduite comme peau de chagrin, n’osant pas dire son nom, n’osant plus se présenter pour ce qu’elle est et que d’ailleurs elle est de moins en moins, car il lui est difficile d’être en n’ayant pas le loisir de s’assumer étant. » (Renaud Camus)

« L’émiettement de la culture : culture d’entreprise, culture syndicale, bourgeoise, et même petite-bourgeoise, populaire, aristocratique, jeune, rock, rap, tag, rurale, ouvrière, de négociation, de grève, des loisirs et de violence…  » (Renaud Camus) – « Une série de ‘cultures’, sous le nom générique de Culture pose la segmentation en moyen de gouvernement. » (Marc Fumaroli) – Toujours diviser, éclater pour …..

« Le système (éducatif) ne produit, au mieux, que des spécialistes et des experts … au champ de compétence de plus en plus étroit. Sa grande victime est la culture générale. Elle est d’ailleurs presque ouvertement pourchassée par l’idéologie vertueuse, au moyen d’une assimilation rituelle à la culture bourgeoise. » (Renaud Camus) – N’importe quel recruteur en voit les effets terrifiants.

« Par quoi se distinguent les grands moments de culture et de civilisation ? Par la présence d’une classe cultivée … qui est toujours une classe héritière. Aucune culture ou civilisation ne peut atteindre un haut degré de développement si à chaque génération elle doit repartir de zéro. La classe cultivée qui assume la responsabilité de cette culture ou de cette civilisation doit elle-même bénéficier de l’héritage, et doit à son tour en assurer la transmission. Il est donc indispensable qu’elle ait une existence de classe plus longue qu’une seule génération. C’est là une constatation éminemment désagréable, parfaitement déplaisante, même, aussi peu convenable que possible … contredisant l’idéal d’égalité. Qu’une constatation soit désagréable, cependant, n’implique en aucune façon, et n’en déplaise au ‘wishful thinking’ institué, qu’elle ne soit pas juste et fondée. » (Renaud Camus) – Mais dans la déraison où nous sommes, qu’importe la réalité.

« Le Capitalisme, et le Socialisme, son antagoniste, rendent à la longue les arts comme les Lettres impossibles, le premier en les rangeant sous les lois d’un prétendu marché, mortel aux choses de l’Esprit, et le second en les embesognant au lieu de leur laisser libre-carrière. Ni l’un ni l’autre ne sauraient maintenir les bases que nous devons à cet Ancien régime et dont le droit d’aînesse, les rentes et le mécenat avaient constitué l’essentiel … et qui ont suscité de meilleurs livres que les contrats léonins passés avec les éditeurs et les campagnes de publicité … Le commerce avilira toujours les choses de l’Esprit. » (Albert Caraco)

« La culture contemporaine devient de plus en plus un mélange d’imposture ‘moderniste’ et de muséisme. » (Cornelius Castoriadis) 

« Être cultivé, c’est bien de toutes façons être réactionnaire, puisque c’est aimer le passé. » (Jean Cau)

« Le pouvoir culturel n’est plus localisé dans une école. Il s’infiltre dans n’importe quelle ferme et dans n’importe quelle pièce, avec les écrans de télévision … Il se personnalise et se fait intime … Cela change la position de  l’école. Hier, représentante de l’Etat pédagogue, elle avait pour vis-à-vis et adversaire la famille qui jouait le rôle d’un contrôle. Chaque soir jouait le réajustement familial par rapport à la culture enseignée à l’école. Aujourd’hui, l’école se trouve dans une situation presque inversée ; par rapport à la famille envahie par l’image télévisée, elle peut devenir le lieu de contrôle où s’apprenne le mode d’emploi d’une information désormais donnée hors de l’école. » (père Michel de Certeau) – L’école apprenant à réfléchir, à se défaire de l’ endoctrinement, doux rêve.

« Il faut souligner à quel point est intolérable la culture qui combine l’impuissance d’agir avec l’accumulation du savoir. » (père Michel de Certeau – à propos des traumatismes infligés, aux enfants notamment, quand on les informe,  à l’école notamment, sur les malheurs du monde (famines, guerres, violences, catastrophes,…)

« La Culture, la littérature et l’art moderne, qui s’étaient émancipés de la religion, de la morale et même de la raison, sont en train  d’être réintégrés dans l’économie … Sans doute est-ce parce que l’économie est notre nouvelle religion … Quiconque est payé dépend de qui le paye. » (Bernard Charbonneau)

« Le mot culture qui évoquait le raffinement intellectuel et moral, le développement des Arts, désigne maintenant la totalité des comportements de tout un peuple … Ce sont les comportements les plus répandus, et par conséquent les plus vulgaires, qui mériteraient le nom de culture. » (Bernard Charbonneau – sur l’influence des sociologues anglo-saxons)

« ‘Oui, les droits de l’homme existent ! Oui, Dieu est un problème complexe ! Oui, le mal c’est le mal et le bien c’est le bien !…’ selon la régie française des jobards du consensus et son développement fulgurant : le truand culturel à la française est même devenu un produit d’exportation ! » (Gilles Châtelet)

« L’idée même d’un ministère de la culture a quelque chose de totalitaire. » (Bruce Chatwin, écrivain anglais, s’adressant à André Malraux) – Effectivement, la France est le seul pays au monde à disposer d’une telle monstruosité.

« Tous les champs que l’on cultive ne portent pas de fruits. De même tous les esprits qu’on a cultivés ne donnent pas de fruits. Mais un champ, si fertile qu’il soit, ne peut être productif sans culture, et c’est la même chose pour l’âme sans enseignement, tant il est vrai que chacun des deux facteurs de la production est impuissant sans l’autre. » (Cicéron – cité par Alain Finkielkraut)

« ‘Les cultures’, c’est désormais tout et rien, manières de gratter une guitare, de taper dans un ballon, modes vestimentaires éphémères, jargons incompréhensibles, argots violents et pauvres … Il devient désormais indifférent de parler de société ’multi-culturelle’ puisque ce que l’on avait jadis aimé et défendu, la culture, avait perdu tout sens. » (Jean-Clair)

« Puisque ‘tout est culture’, on ne baptise plus culture ce  qu’il faut atteindre mais ce qui est. » (Eric Conan)

« Quand le naturel l’emporte sur la culture, cela donne un sauvage ; quand la culture l’emporte sur le naturel, cela donne un pédant. L’exact équilibre du naturel et de la culture produit l’honnête homme. » (Confucius)

« La double fonction d’une culture : construire une figure collective d’humanité et faire tenir ensemble les membres d’une société. » (Guy Coq) – Compatibilité avec le multiculturalisme ?

« On croyait émanciper les hommes en les affranchissant de leur culture. On les a plutôt condamnés à une forme terrible d’errance et de dépersonnalisation collective. » (Mathieu Bock-Côté)

« La philosophie de la reconnaissance mobilisée par le multiculturalisme repose en fait sur l’oblitération préalable de la culture nationale. Le multiculturalisme entend neutraliser et même déconstruire la notion même d’une ‘culture de convergence’. » (Mathieu Bock-Côté)

« Le père Freud, ce grand trouble-fête, l’a dit et redit … La culture est le nom noble pour l’inhibition des pulsions humaines d’agression et d’autodestruction, le renoncement aux satisfactions infantiles, l’autopunition du moi-plaisir et, ‘chaque progrès de la civilisation est payé en retour par une perte de bonheur individuel’ … On a acquis assez de lumières sur le sujet pour savoir qu’entre deux sacrifices, le refoulement de la bête par sublimation et la tuerie bestiale par désublimation, il faut choisir le moindre. » (Régis Debray)

« Quelque chose d’insolite, avec du ‘gore’ et du ‘trash’ s’est passé dans notre culture pour qu’on doive désormais rendre le plus par le plus … le secret de dégoûter est de vouloir tout montrer … Nos mises en scène de plus en plus corsées témoignent d’une montée aux extrêmes du simili, d’une volonté de forcer la dose… » (Régis Debray) – Des incultes s’adressant à des ignares se croient obligés de souligner, de dire quand il faut rire, applaudir, siffler, de signaler, dans un monde de mauvaise foi, ce qu’il faut comprendre.

« Ce qu’on appelle le goût du public est celui que la caste des hommes de goût mis sur le moment en position d’arbitre lui impose comme naturel, de même que ‘l’opinion publique’ des sondages est un artefact construit par les sondeurs, où les réponses  des sondés sont déjà dans les questions. » (Régis Debray) – La caste des hommes de goût est en fait la caste des hommes de pouvoir (sinon pourquoi y aurait-il un ministère de la culture ?) et des copains.

« Une culture, religieuse ou non, n’est jamais obsolète ; une technique sera désuète un jour, nécessairement. » (Régis Debray)

« Quand Donatello fait penser à une agence de voyage et Vinci à une société de parking, il y a comme un ressort qui se détend. » (Régis Debray)

« C’est sans doute dans l’éducation que la déstructuration du sens critique par le  bruitage communicant qui ‘couvre’ (à tous les sens du mot) l’ordre marchand s’avère la plus nocive … Culture de flux, se substituant à une culture (vraie) de stock. » (Régis Debray)

« Une culture qui donnait à ses enfants des modèles à imiter (Achille, le Christ, les héros et les saints…) est devenue une culture dont l’histoire est habitée de contre-modèles, qui ne présente plus à ses enfants, que des anti-modèles ou des anti-héros. » (Chantal Delsol)  –  Mais sans cesse diffusons la pourriture.

« Rien n’indique que les autres cultures mondiales en aient assez de vivre. Mais nous, si. » (Chantal Delsol)

« La culture occidentale s’adjoint une caractéristique supplémentaire, que les autres n’ont pas, et qui bouleverse la donne, Elle se prend pour la culture universelle (droits de l’homme : principes universels) … Elle se déploie comme une idéologie … qui s’avance masquée … qui se croit légitime à s’étendre partout, au corps défendant des autres civilisations qui, elles, n’aspirent qu’à demeurer elles-mêmes … Universalisme qui n’est autre qu’une arme de guerre … Impérialisme sous couvert de mission humanitaire … ‘Sous couvert du concept des droits de l’homme se cachent le mensonge et l’insulte aux valeurs religieuses et nationales’ (patriarche Kyril de Smolensk). » (Chantal Delsol – évoquant Alexandre Zinoviev)

« Une culture de l’abrutissement, de la massification et de la docilité déferle par tous les canaux, officiels ou non. » (Slobodan Despot) – Télévision en premier.

« L‘Etat désarme le citoyen en l’outillant. Il annihile ou affaiblit son sens critique … en définissant restrictivement le périmètre de la culture qu’il lui est loisible d’acquérir … par exemple, la république française fera lire Voltaire plutôt que Joseph de Maistre et tronquera la pensée d’un Montesquieu ou d’un Rousseau… » (Alexandre Desrameaux)

« Le conformisme du nouveau, le contemporain pour le contemporain, qui n’admet de critique qu’approbative … Vous critiquez tels représentants connus de l’art contemporain, donc vous rejetez tout l’art contemporain, donc vous êtes comme ceux qui autrefois, etc. (ceux qui autrefois refusèrent Manet, les impressionnistes…) A chaque étape du raisonnement, l’aiguille du tourne-disque saute plusieurs sillons. Peu importe, du moment que ça dissuade …  L’effet de crécelle. »  (Jean-Philippe Domecq)

« Quand on est d’avant-garde, on ne doit surtout pas apparaître détenteur du pouvoir, et, comme on le détient aujourd’hui, on doit s’afficher rebelle, solitaire même.  Surtout quand on est partout et dans tous les médias, voyez Sollers, il ne craint pas de se dire marginal. Un marginal et solitaire pilier de milieu. C’est ainsi qu’on tient le pouvoir dans la culture actuelle ; par la rhétorique antipouvoir. » (Jean-Philippe Domecq)

« Une paire de bottes vaut mieux que Shakespeare. » (Dostoïevski, un anarchiste dans Les Démons ou Tolstoï) – Célèbre formule de mépris de la culture et de l’esprit.

« La même ardeur (des autorités, municipales) à remplacer l’art par l’animation, tout en conduisant l’électeur vers les rendez-vous de masse qui marquent l’apothéose de la liturgie culturelle … Du grand, du visible et du bruyant. » (Benoît Duteurtre) – Et surtout du clinquant pour mener à l’abrutissement.

La culture générale : «  ce qui permet à un imbécile de ne pas être, en sus de son imbécillité, un sauvage ignorant et lui donne la possibilité de tenir sa modeste partie dans un échange de propos. » (Jean Dutourd)

« Culture : vaste machination établie pour former des professeurs, qui, à leur tour, fabriqueront des professeurs, qui… » (Georges Elgozy)

« L’importance culturelle de la France fut essentiellement due à la centralisation parisienne (et à la proximité de Versailles du temps de la monarchie). En effet, on pouvait rencontrer sur un même trottoir des personnages comme Diderot, d’Alembert, Beaumarchais… plus tard Victor Hugo, Balzac, les Goncourt et Auguste Comte… créant un climat intellectuel propice à la culture. Elle est due également à la proximité (encouragée par la monarchie pour le service de l’Etat) des classes bourgeoises montantes avec les classes supérieures de la noblesse, créant un milieu et un public plus vaste et plus diversifié. » (Norbert Elias – comparant la situation française de jadis avec la dispersion et la petitesse des principautés allemandes d’alors – citation d’idées, absolument non littérale) – Aujourd’hui, en France, on ne rencontre plus que BHL et Philippe Sollers dans le quartier fort limité de Saint-Germain-des-Prés quand ils ne sont pas en transit dans quelque aéroport et, ailleurs, d’arrogants rappeurs incultes. C’est dire où nous sommes descendus, à la suite aussi des efforts de notre prestigieuse Education Nationale (dite EDNAT)

« Aujourd’hui, avec les plus merveilleux moyens de diffusion possibles, on diffuse une culture dont on peut dire au mieux qu’elle est une absence de culture et produite au hasard. » (Jacques Ellul – Le système technicien)

« Aucune culture n’est apparue ni ne s’est développée qui n’ait été liée à une religion. » (T. S. Eliot)

« C’est une chose qui doit croître ; vous ne pouvez pas fabriquer un arbre, vous pouvez seulement le planter, le soigner et attendre qu’il mûrisse à son heure. » (T. S. Eliot)

« La critique est un des fléaux de la culture moderne … née dans la société bourgeoise parallèlement au développement du ‘publicisme’ et à la commercialisation de la culture … Notre époque a vu apparaître, à égale distance du public et des créateurs, cet entremetteur de la culture, ce parasite impertinent et présomptueux, le ‘critique’ … On assiste au lancement de nouvelles réputations, de nouveaux ‘chefs-d’œuvre’, à grand renfort de battage qui donnent naissance à une vogue et à une mode. » (Julius Evola) – Et à d’abondants profits et ristournes…

« Ne parler de culture qu’au pluriel, en effet, c’est refuser aux hommes d’époques diverses ou de civilisations éloignées la possibilité de communiquer autour de significations pensables et de valeurs qui s’exhaussent du périmètre où elles ont surgi. Cette possibilité, les Temps modernes, loin de la nier, l’avaient transférée de la religion à la culture. » (Alain Finkielkraut)

« Au moment même où la technique, par télévision et par ordinateurs interposés, semble pouvoir faire entrer tous les savoirs dans tous les foyers, la logique de la consommation détruit la culture. Le mot demeure mais vidé de toute idée de formation, d’ouverture au monde et de soin de l’âme. C’est désormais le principe de plaisir – forme postmoderne de l’intérêt particulier – qui régit la vie spirituelle. » (Alain Finkielkraut)

« La barbarie a donc fini par s’emparer de la culture. A l’ombre de ce grand mot, l’intolérance croît, en même temps que l’infantilisme. Quand ce n’est pas l’identité culturelle qui enferme l’individu dans son appartenance et qui, sous peine de haute trahison, lui refuse l’accès au doute, à l’ironie, à la raison, à tout ce qui pourrait le détacher de la matrice collective, c’est l’industrie du loisir, cette création de l’âge technique qui réduit les œuvres de l’esprit à l’état de pacotille (ou, comme on dit en Amérique, ‘d’entertainment’). Et la vie avec la pensée cède doucement la place au face-à-face terrible et dérisoire du fanatique et du zombie. » (Alain Finkielkraut)

« Ce qui est élitiste (donc intolérable) ce n’est pas de refuser la culture au peuple, c’est de refuser le label culturel à quelque distraction que ce soit. Nous vivons à l’heure des ‘feelings’ … il n’y a plus qu’une palette infinie de plaisirs, différents et égaux. La  démocratie qui impliquait l’accès de tous à la culture se définit désormais par le droit de chacun à la culture de son choix (ou à nommer culture sa pulsion du moment) … L’univers de la télécommande nous apparaît comme le meilleur des mondes possibles. » (Alain Finkielkraut)

« Le cultivé disparaît dans le culturel … faculté d’englobement … Cette nouvelle entité ne laisse plus aucune place à la nature, aucune pratique ne lui est extérieure ou antérieure, aucune  d’être ou de sentir ne se situe en-deçà ou au-delà de sa juridiction  … On n’y accède pas … on y est, on est dedans … Plus besoin de s’élever pour s’en approcher …  Il n’est rien qui ne mérite cette appellation naguère encore très contrôlée … ‘Tout est culturel’ … tout dégueulis verbal. » (Alain Finkielkraut)

« Il n’y a pas d’homme cultivé, il n’y a que des hommes qui se cultivent. » (maréchal Foch)

« Qui dira de quelles puissantes défenses nous avons entouré, depuis le XIX° siècle, la ‘culture française’ ? … Voilà bientôt deux siècles que nous sommes en défense. Nous vivons au cœur d’un discours crénelé. » (Michel Foucault) – Sur notre désintérêt pour les autres cultures, notre réticence à traduire des œuvres absolument essentielles, notamment d’origine germanique. Mais consolons-nous en constatant que depuis ce dire de Michel Foucault, il y a quelques cinquante ans, nous n’aurons bientôt plus rien à défendre.

« La culture n’a plus rien à voir avec les dons et les talents de chacun, si inégaux, ni avec l’effort ou l’apprentissage. Elle ne doit pas sentir l’effort, elle est spontanée, ludique et festive. La modernité culturelle c’est la fête. » (Claude Fouquet)

« Un article est jugé sur son nombre de clics. La civilisation progresse. » (Thierry Fremeaux) – Sur internet bien sûr.

La technique est parie intégrante de la culture « les premiers actes culturels furent l’usage d’outils, la domestication du feu, la construction d’habitations. » (Sigmund Freud) – Sans doute aussi, l’organisation de la chasse et la domestication des animaux.

Nous avons tendance à « surestimer l’ensemble de l’aptitude à la culture par rapport à  la vie pulsionnelle restée primitive, c’est-à-dire que nous sommes entraînés à juger les hommes ‘meilleurs’ qu’ils ne sont en réalité. » (Sigmund Freud) – Il s’agit de se rassurer sur l’espèce dont nous faisons partie.

« La seule culture fertile … c’est celle que l’on porte intimement en soi, ce sont les textes classiques inépuisables ensemencées dans la mémoire. » (Marc Fumaroli – à propos de Boèce)

« L’Etat culturel n’est que l’alibi de la démission de l’Etat éducatif. » (Marc Fumaroli)

« ‘Le conseil régional dynamise les arts plastiques’. » (Affiche répandue sur toute une région, citée par Marc Fumaroli) – De quoi je me mêle ! Dynamise !

« En France, la sphère culturelle étant dans son ensemble de la responsabilité de l’Etat, qui jouit d’un monopole de fait sur l’Education, sur la Télévision et qui pratique une politique culturelle ambitieuse, on a affaire à un ‘Etat culturel’ … La culture est un autre nom de la propagande … Foyer d’anesthésie et de servilité … Euphorie de commande (fêtes organisées), criaillerie de compères, débats biaisés … Le music-hall politico-médiatique … Imposition en exemple à tous les citoyens d’un voyeurisme touche-à-tout et frivole … Le vocabulaire de l’illumination culturelle : ‘halo’, ‘bain’, ‘atmosphère’, ‘sensibilité’, participe de l’instantané magico-religieux (beau progrès sur le prétendu obscurantisme) … ‘Vivant’ signifie contemporain … L’Etat culturel n’est plus le culte républicain de la Raison, moins encore celui de la Beauté. C’est celui du coup médiatique … Mairies, conseil régionaux et généraux de province, luttent d’imagination et de munificence pour se pourvoir eux aussi (à l’image du Paris des Bobos) d’un système solaire culturel (et l’imbécile applaudit de voir son argent gaspillé pour contempler des horreurs auxquelles il ne comprend rien, puisqu’il n’y a rien à comprendre) … Certes, plus de bureaucrates culturels que d’artistes … Les commissaires politiques de la Culture, qui sous Malraux étaient devenus les maîtres à penser des metteurs en scène et des comédiens subventionnés par l’Etat (et qui le sont restés) … La récurrence obsessive du mot ‘création’, le surgissement (en nombre infini) de ‘créateurs’ … Le pouvoir ‘aime que les citoyens se réjouissent, pourvu qu’ils ne songent qu’à se réjouir. Il travaille volontiers à leur bonheur, mais il veut en être l’unique agent et le seul arbitre’ (Alexis de Tocqueville) … La littérature avait ses chefs-d’œuvre, ses grands écrivains, la philosophie ses penseurs, la religion ses docteurs et ses saints, la science ses découvreurs ; l’Etat culturel ne saurait avoir que des ministres, des événements, une comptabilité de créateurs et de consommateurs, une addition de pratiques et de leurs ‘animateurs’ … La chape de plomb et de camelote posée sur Paris et sur la France par l’Etat culturel a réduit ce feu (la vraie et l’unique culture, celle consacrée par la distance du temps, qui ne se trompe pas, et par l’être solitaire apaisé) à vivoter quand elle ne l’a pas éteint  … Le but de la culture n’a pas été de faire verdoyer des terres en friche. Il lui parut urgent de substituer au goût moyen et populaire … le goût de  ‘haut niveau’ tel qu’on le définissait alors dans les cafés intellectuels et les appartements enfumés de la capitale. » (Marc Fumaroli – suite de considérations éparses)

« A tout réduire à une affaire de culture, on impose un immense éteignoir sur la lumière naturelle, et l’on est … sur le chemin de la grande confusion contemporaine entre la germination des œuvres de l’esprit et la répartition des marchandises. » (Marc Fumaroli) – Culture business.

« Concerts, théâtre, expositions, spectacles, fêtes, visites guidées, n’ont rien en soi que de louable. Mais présentés comme le fin du fin de la ‘Culture’, assortis d’un label officiel qui en fait autant d’actes civiques, ils deviennent, comme la messe du dimanche, des distractions ‘comme il faut’, qui ne répondent à aucune nécessité intérieure et qui divertissent seulement du courage d’être soi-même. » (Marc Fumaroli)

« Cette culture a été inventée par une oligarchie atteinte d’un complexe où il entre un peu de mythomanie, beaucoup de mégalomanie, encore davantage de paranoïa et très peu de vraie culture … La chape de plomb et de camelote posée sur Paris et sur la France par l’Etat culturel. » (Marc Fumaroli) – Oublie-t-on la distribution de juteuses subventions aux copains bien-pensants ?

« On ne vit pas impunément dans un monde où le vif de l’invention culturelle passe par la déconstruction de la tradition, où la rupture avec l’héritage représente la valeur suprême. » (Marcel Gauchet)

« A ce moment là (les années soixante), se met en place ce que l’on peut considérer comme une aliénation culturelle des élites européennes aux Etats-Unis, ce qui rendait très peu plausible le modèle d’une Europe indépendante … La conversion américaine des élites européennes est un grand phénomène d’histoire culturelle. » (Marcel Gauchet) – Vulgaire trahison qui allait en précéder bien d’autres.

« Le déclassement culturel de ce pays est déroutant. Le pays qui a inventé au XIX° siècle le roman-feuilleton est incapable de faire aujourd’hui un feuilleton télévisé convenable … La psychanalyse avait trouvé en France une seconde patrie. Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? » (Marcel Gauchet) – Pour une fois peut-être un peu sévère.

« Dans le domaine intellectuel, il reste une offre, produite par des individus isolé, mais il n’y a pas de demande. » (Marcel Gauchet) – On ne peut pas se cultiver un minimum et rester courbé, même en marchant, sur sa tablette. Génération d’abrutis.

« De Gaulle permit à tous ces jean-foutre d’être payé à un faux prix. Grâce au ministère de la Culture, créé par de Gaulle pour caser l’agité André Malraux, les intellectuels français capables de s’organiser en groupes de pression, c’est-à-dire les intellectuels de gauche (l’homme de droite étant par définition individualiste) ont réussi à se créer des rentes payées par l’Etat, c’est-à-dire par le payeur d’impôt lambda. » (Charles Gave) – Tout en crachant sur ce dernier beauf qui les abreuve.

« L’état d’indifférenciation, la perte des différences, la non-culture ou l’anticulture caractérisent la modernité. » (René Girard)

« Pourquoi le terme de culture est-il utilisé de manière aussi lâche (dans les deux sens de l’adjectif) … Le culturel a totalement éliminé le cultivé. Il n’y a plus de sous-culture, tout au plus des contre-cultures … dans une société qui a renoncé à l’égalité économique, l’égalité symbolique, qui ne coûte pas cher, est d’autant plus généreusement accordée (la culture jeune…) …. Classique intensification du discours égalitariste pour combler le manque. » (Christian Godin)

« Une foule de pensées naissent et se développent par la culture générale des esprits, comme les rameaux se couvrent de fleurs au printemps. Dans la saison des roses on voit partout fleurir des roses. » (Goethe)

« Le plus grand art en fin de compte est de savoir se limiter et s’isoler. » (Goethe) – soulignant l’impérative nécessité du retrait pour « Se ressaisir et se retrouver soi-même ; façon de se soustraire à la ronde du milieu, à la tyrannie de nuisibles, mesquines habitudes et règles … combat contre le gaspillage de nos forces, pour leur donner le temps de s’accumuler et de redevenir spontanées. » (Nietzsche)

« La culture générale implique un effort et un temps spécifique d’assimilation de connaissances, de formation du raisonnement et du jugement au contact de contenus structurés. » (Jean-Pierre Le Goff) – Comme notre société ne sait plus ce que c’est que des contenus structurés, il n’y a plus de culture générale, ni même de culture tout court.

« Le gauchisme culturel, ou l’hégémonie du camp du bien, a reçu sa consécration définitive dans les années 1980, plus précisément au tournant des années 1983-1984, au moment où la gauche change de politique économique sans le dire clairement et entame la ‘modernisation’, masquant le changement de politique.» (Jean-Pierre Le Goff) – En clair la trahison pour appeler les choses par leur nom. 

« Le gauchisme culturel, modernisme affiché et moralisme masqué, qui répand le soupçon et la méfiance dans le champ intellectuel, dans les rapports sociaux et la vie privée (instaurant la délation) … retrouve les catégories de faute par pensée, par parole, par action, voire par omission, qui faisaient les beaux jours des confessionnaux … Il considère que les ouvriers et les couches populaires sont globalement des ‘beaufs’ et des ‘ringards’ » (Jean-Pierre Le Goff)

« La culture n’est pas tout à fait l’instruction. On peut être instruit et n’être pas cultivé … La culture, c’est une amitié avec les idées … Pour répandre la culture il ne suffit pas d’ouvrir des écoles, de créer des bibliothèques et des musées, voire de simples ‘maisons’. Il faut encore assurer un minimum de liberté intellectuelle et d’impartialité à ceux qui les fréquentent. » (Jean Grenier) – Autant avouer qu’en France le gang politico-médiatique dominant s’oppose à toute forme de culture.

« Alors que les romans nous font comprendre de la vie ce qu’en connaît un confesseur, le cinéma nous découvre de la société ce qu’en sait tout commissaire de police. » (Nicolas Grimaldi)

« La modernité falsifiée impose le narcissisme corporel à la place de l’estime de soi et la jouissance hédoniste comme fin en soi, l’esprit ludique comme mode d’expression majeur et la fête comme norme sociale. » (Henri Guaino)

« Les gens ordinaires n’ont jamais exprimé le désir de rompre le lien qi a toujours uni une fraction du monde culturel et intellectuel à la société populaire. C’est au contraire le monde culturel et intellectuel qui a rompu avec les classes populaires. » (Christophe Guilluy)

« Le divertissement de masse des ‘industries culturelles’ se voit reconnaître la même dignité que la culture véritable … Le ‘tout culturel’, machine de guerre contre la culture … Attribution du ‘label culturel’ aux distributions  des médias techniciens (soit au n’importe quoi) … Refus de toute hiérarchie qualitative (‘culture des bandes, des loubards’, ‘culture d’entreprise’…) … Droit de chacun à nommer ‘culture ‘ sa pulsion du moment … L’égalitarisme culturel ne peut que retrancher, détruire … Le rêve d’une égalisation par le haut d’un Jaurès et la négativité égalisatrice d’un Bourdieu … Contradiction entre culture et démocratie (selon Allan Bloom) : la culture repose sur la transmission privilégiée de la tradition, alors qu’en démocratie la tradition ne se voit reconnaître aucune autorité particulière … Le beau et  l’inutile contre l’efficace et l’utilité … l’éternel et la contemplation contre le présent et l’action … le rare, le raffiné, le supérieur contre l’égalité …  La culture repose sur la transmission privilégiée de la tradition, alors qu’en démocratie la tradition ne se voit reconnaître aucune autorité particulière. » (Jean-Louis Harouel) 

 « La culture est une mise en forme et se constitue par la forme de l’universalité, qui a renoncé à sa particularité, qui agit selon des principes universels … L’homme cultivé est celui qui sait imprimer à toutes ses actions le sceau de l’universalité … Concevoir les aspects séparés dans leur séparation, détailler les circonstances, isoler les points de vue, abstraire … La culture traduit le fait qu’un contenu porte la marque de l’universel. » (Hegel)

« L‘homme seul peut s’abstraire de tous les buts immédiats que lui dicte la Nature … Seul l’homme est capable de se suicider, de se représenter ses propres buts, peut se connaître comme un ‘moi’, comme un ‘je’ … Cette analyse de la différence ente l’animal et l’homme rend compte de la nature de l’Esprit. Celui-ci est précisément l’être qui est capable d’être sujet, de poser ses propres exigences, d’échapper à la détermination extérieure … L’Esprit n’est cependant cette capacité d’autodétermination que parce qu’il est pensant. ‘L’Esprit est la pensée en général et l’homme se distingue de l’animal par la pensée ….C’est dans les formes culturelles qu’édifient les hommes que l’Esprit se manifeste … La succession des cultures permet de suivre la trame du développement de l’Esprit. Celui-ci progresse dans la conscience qu’il a de lui-même en s’inscrivant dans les cultures successives qui marquent le cours de l’histoire universelle. » (tiré de Hegel- La raison dans l’histoire)

« Tandis que nous sommes plongés dans une foire culturelle qui tous les jours crie pour être approvisionnée de ce qu’il y a de plus nouveau, et qui cherche avec avidité ce qui l’excite. » (Martin Heidegger)

« La culture consiste non seulement à édicter des règles mais aussi à parfaire les mœurs. » (Herder)

« Dans le domaine de la culture, une existence axée sur le seul présent et sur les nouveautés du jour est un non-sens insupportable, car la vie de l’esprit a pour condition première une référence constante au passé, à l’histoire, aux réalités anciennes et primitives. » (Hermann Hesse) – Les média, causes de l’inculture, et donc de la sauvagerie actuelle.  

« La culture de masse moderne, bien qu’elle puise à pleines mains dans les valeurs culturelles défraichies, glorifie le monde tel qu’il est. Les films, la radio, les biographies et romans populaires ont tous le même refrain : voilà notre bonne petite ornière … Voilà la réalité telle qu’elle est et qu’elle devrait être et sera. » (Max Horkheimer) – Encore l’auteur n’a-t-il pas connu la télévision.

« L’abolition d’une culture pour privilégiés définitivement bradée n’introduit pas les masses dans les sphères dont elles étaient exclues auparavant, mais entraine justement, dans les conditions sociales actuelles, le déclin de la culture et fait progresser l’incohérence barbare dans les esprits. » (Max Horkheimer et Theodor Adorno) – La barbarie pour tous, à la portée de chacun. Voir faits-divers.

« Les révolutions culturelles sont des destructions de la culture, les révolutions culturelles brûlent les livres, détruisent les monuments … Toutes les révolutions détruisent les bibliothèques d’Alexandrie. » Eugène Ionesco) – La cancel culture actuelle des fanatiques borné(e) ne fait que reprendre ces monstruosités.

« Une armada considérable, dont les effectifs grossissent sans cesse, est au service du tout-culturel qui, à certains égards, détient la fonction de divertissement assignée aux ‘jeux’ dans la Rome antique. » (Claude Jannoud)

« Rien ne s’en va plus vite qu’une culture ; rien ne demande autant de temps que son retour. Faut-il rappeler une fois de plus le coma intellectuel où tomba l’Occident, de la chute de Rome en 476 jusqu’aux temps carolingiens et aux siècles qu’exigea sa réanimation ? » (Lucien Jerphagnon) – Aujourd’hui point n’est besoin de barbares venus des forêts et des steppes, un quarteron de ministres éphémères de l’Education nationale et une poignée d’histrions médiatiques, tous venus des beaux quartiers, suffiront à la tâche, déjà bien entamée.

« C’est à la honte du siècle plus qu’à l’honneur des livres qu’il arrive que des romans exercent un tel ascendant sur les mœurs et les habitudes. » (Joseph Joubert) – Lequel détestait les romans. Il pourrait souvent dire la même chose aujourd’hui, et non seulement des romans mais des productions dites culturelles (films, vidéos…)

« Tout ce qui est culturel est bon en soi, parce que tout discours négatif est tabou …  La loi du marché est de vendre, donc de dire du bien de tout le monde … Fermez-la, ou vous êtes réac. » (Pierre Jourde)

« La croyance extravagante au pouvoir illimité de la culture pour modeler la nature, dont un certain féminisme offre aujourd’hui des illustrations parfaitement ridicules. » (Jacques Julliard)

« Quand je dis ‘ma’ culture, je peux d’autant moins l’entendre sur le mode de la propriété que, le plus couramment, c’est à la rencontre d’une autre culture que l’on prend conscience de la culture ‘d’où l’on vient’, dans laquelle on a été élevé … C’est seulement en sortant de sa propre culture qu’on se rend compte combien on ignore la culture qu’on dit si péremptoirement être la sienne … ‘Le bien connu, est,  justement parce qu’il est bien connu, inconnu’. » (François Jullien – citant Hegel)

« Un péché d’omission dont notre culture tout entière s’est rendue coupable : elle n’a envisagé que la vie extérieure, ne s’est consacrée qu’à elle, n’a tout fait que pour elle ; elle a affiné les sciences à un degré incroyable, perfectionné la technique à l’infini. Et l’homme ? L’homme qui devrait gérer toutes ces merveilles avec sagesse et raison, elle s’est contenté de le postuler tel qu’il devrait être, sans se rendre compte qu’il n’est en rien adapté… » (Carl Jung) – Et même de moins en moins adapté…

« La culture  à un clic n’est la culture de rien ni de personne. » (Hervé Juvin) – Elle suppose un coût d’acquisition.

« Ceux-là seuls ont le droit de parler de culture qui sont prêts à mourir ou à tuer, pour que Notre-Dame de Paris ne devienne pas un parking, ou une mosquée. » (Hervé Juvin) – Allons voir qui chez nos gras animateurs culturels à la télévision.

« Il y avait des cultures … Il y aurait la culture. Point d’arrivée, achèvement, fin réalisée d’un monde sorti de la nature et de l’histoire … sorti de la terre, refusant l’origine… Elles étaient diverses, elle est une … Elle se donne pour mission de réaliser l’unité de l’humanité. Asphyxiant par sa présence et le déferlement de ses moyens toutes les autres cultures et leur prétention à distinguer et à élire … La culture-monde se mêle de tout, de tous et ne respecte rien.   » (Hervé Juvin) – Monde des zombies.

 « Un neutralisme militant, autoritaire, règne sans partage. Il est interdit qu’il y ait du sacré, et qu’il y soit fait référence ; il est interdit que rien dépasse l’intérêt individuel, et tout ce qui suggère qu’il est possible de mourir ou de tuer pour autre chose que sa propre vie est interdit … La culture n’en sort pas indemne. Elle est priée de ne plus déterminer. Elle ne doit plus discriminer. Elle est priée d’abandonner toute prétention à la transcendance, toute fonction verticale, pour devenir un produit comme les autres, livrable à la demande … Culture comme rappel à l’ordre, comme remise en ordre d’un monde confus et désordonné … Moyen d’un autre pouvoir sur le monde, plus économique, plus discret, plus efficace aussi. Culture au moyen de l’oubli et de l’ignorance … qui permettent si bien d’assurer la dictature de l’instant sur les insoumissions du savoir et de l’histoire, qui permettent de liquider le passé et promettent à chacun de fuir la corruption des origines dans la vérité du présent .. Industrie de la conformité. » (Hervé Juvin)

« La subordination de la culture au droit, à la règle et à la conformité au bien utile … Qu’est-ce qu’une culture devenue argument d’une morale, qui en appelle à la censure de tout ne qui ne suit pas les sentiers balisés du beau utile ? … Qui ne sait pas piétiner le bien et le mal au nom du génie, au nom de la folie, au nom du rire ? … Bouffie de positivité … La vieille maxime du clientélisme politique, ‘du pain et des jeux’, semblant devenue le nouvel axe moderne de la culture. » (Hervé Juvin) – Culture de constipés. 

 « Le cycle que parcourt l’individu pour parvenir à la connaissance de lui-même. » (Kierkegaard)

« A proportion que décroît la culture la violence s’accroît. » (Thomas de Koninck)

« La culture n’est plus un élément omniprésent de la vie réelle, elle a été reléguée dans une place particulière. Comme la nature, elle est devenue une réserve, une réserve certes protégée, mais qui a perdu … sa puissance de transformation et d’inspiration. » (Karel Kosik)

« C’est lorsque des spécialistes prennent la parole sur un problème situé hors du domaine de leur compétence que la valeur de la culture se manifeste le plus clairement. » (Karl Kraus)

« La culture disparaît dans une multitude de productions, dans une avalanche de phrases, dans la démence de la quantité. » (Milan Kundera) 

« Les petites nations forment une ‘autre Europe’ dont l’évolution est en contrepoint de celle des grandes. Un observateur peut être fasciné par l’intensité souvent étonnante de leur vie culturelle. Là, se manifeste l’avantage de la petitesse : la richesse en événements culturels est à la ‘mesure humaine’ ; tout le monde est capable d’embrasser cette richesse, de participer à la totalité de la vie culturelle … Participation de tous à tout. » (Milan Kundera – se référant à cette Europe centrale qui fut un joyau de civilisation)

« Pour quelle raison la culture de masse, uniformisée, des sociétés modernes n’engendre en aucun cas une mentalité éclairée et indépendante, mais, au contraire, la passivité intellectuelle, la confusion et l’amnésie collective ? » (Christopher Lasch) – Parce que, il n’y a ni hasard ni fatalité, à l’origine elle a été justement conçue pour cela, après deux générations l’abrutissement marche tout seul puisque dispensé par des laquais déjà formé. Il suffit d’amorcer la pompe.

« L’indifférence de notre culture envers ce qui nous a précédés, qui se mue facilement en refus ou en hostilité militante, constitue la preuve la plus flagrante de notre faillite culturelle. » (Christopher Lasch)

« Pour qu’on puisse parler d’une culture, il faut qu’il y en ait au moins deux … La pluralité des cultures est une condition nécessaire  de leur existence …  Il n’y a pas de culture de toutes les cultures … La culture apporte une solution au défi de l’être pour tous ses membres … Le projet occidental, négatif et uniformisant, n’apportant pas de réponse au problème de l’existence sociale des perdants, est anti-culturel. » (Serge Latouche)

« Dans la société moderne … il ne s’agit plus tant d’un système symbolique qui donne sens à l’existence (dans les sociétés traditionnelles on est ‘culturé’ et non pas cultivé, il n’y a aucun sens à dire de quelqu’un qu’il n’est pas cultivé) que d’un code sélectif de signes de ‘distinction’. Cette culture-là est susceptible d’appropriation privative. » (Serge Latouche)

« Dans les sociétés pré-modernes … le technique est totalement, ou presque, enchassé dans le social. L’anthropologue rencontre la culture comme totalité, et presque pas la technique ni l’économique comme tels … Les pratiques relatives ne sont pas autonomisées ; elles ne constituent pas une sphère à part, valorisée comme telle. Dans la société moderne, à l’inverse, on ne rencontre que du technique et de l’économique, et presque pas ou presque plus de culture. » (Serge Latouche)

« Paradoxalement, l’Occident est à la fois la seule culture qui se soit vraiment mondialisée, avec une force, une profondeur et une rapidité jamais rencontrées, et, en même temps, la seule culture dominante qui échoue à assimiler non seulement les allogènes mais ses propres membres. La raison de ce paradoxe … l’universalité de l’Occident est essentiellement négative. Son prodigieux succès est dans le déchaînement mimétique de modes et de pratiques déculturantes. Il universalise la perte de sens et la société du vide. » (Serge Latouche)

« Avec la mondialisation, c’est à un véritable jeu de massacre interculturel à l’échelle planétaire que l’on assiste. Le démantèlement de toutes les ‘préférences nationales’, c’est tout simplement la destruction des identités culturelles. » (Serge Latouche)

 « Les esprits progressistes conséquents, imbus d’évolutionnisme, ne s’y sont pas trompés. Ils ont le plus grand mépris pour les cultures considérées comme des obstacles au développement … Incompatibilité du progrès et de la diversité des cultures et, par conséquent, de la technique et des cultures. » (Serge Latouche)

« La déculturation n’a de limite que l’explosion … L’aspiration culturelle refoulée fait partout retour, mais le plus souvent, elle revient de manière explosive, dangereuse ou violente … Deux versions de ce ‘retour du refoulé’ : l’explosion identitaire et la montée des intégrismes religieux (ethnonationalismes, islamisme et ses dérives criminelles). » (Serge Latouche) – On l’a bien cherché en voulant stupidement imposer la démocratie par les bombes.

« Avec les droits de l’homme, la démocratie et bien sûr l’économie, les invariants transculturels ont envahi la scène et ne sont plus questionnables … Des flux culturels à sens unique partent des pays du Centre et inondent la planète (images, mots, valeurs morales, normes juridiques, codes politiques, critères de compétence…). L’essentiel de la production mondiale de ‘signes’ se concentre au Nord ou se fabrique sous son contrôle … Le groupe envahi ne peut plus se saisir lui-même autrement que par les catégories de l’autre … C’est par le don et non par la spoliation que le Centre se trouve investi d’un extraordinaire pouvoir de domination … Cette logique asphyxiante du don fonctionne pour toutes les composantes de la culture et pas seulement pour les ‘biens culturels’ au sens étroit. On la retrouve pour l’alimentation comme pour la technologie … Standardisation de l’imaginaire (même le contenu imaginaire très riche de la science, de la technique) … L’organisation pratique fonctionne  sur le système unique (l’année du dragon ou du rat survivent mais ces survivances pittoresques et folkloriques ont peu de prise sur les horaires des avions) … L’humanité vit tout entière dans l’ère chrétienne et sur la base de l’heure GMT … (Au Moyen Âge la datation, le début de l’année…, variait d’un pays à l’autre) … Lorsque le contact ne se traduit pas par un échange équilibré, mais par un flux à sens unique massif, la culture réceptrice est envahie, menacée dan son être propre … Si l’agression n’est que symbolique, le génocide est seulement culturel, c’est l’ethnocide, le stade suprême de la déculturation … ‘Le développement économique d’un peuple sous-développé n’est pas compatible avec le maintien de ses coutumes et de ses mœurs traditionnelles’ (un expert) … Paradoxalement, l’Occident est à la fois la seule culture qui se soit vraiment mondialisée, avec une force, une profondeur et une rapidité jamais rencontrée, et, en même temps, la seule culture dominante qui échoue vraiment à assimiler non seulement les allogènes, mais ses propres membres … Ce parce que son universalité est négative. Son prodigieux succès est dans le déchaînement mimétique de modes et de pratiques déculturantes. Il universalise la perte de sens et la société du vide. » (Serge Latouche – considérations éparses sur culture et mondialisation)

« Tout homme qui appartient réellement à deux cultures y perd son âme. » (Lawrence d’Arabie) – Placé pour le savoir.

« L’illettré est celui qui décode plus ou moins correctement, mais ne comprend pas ce qu’il lit. » (Barbara Lefebvre) – Combien d’adultes ? 

« Dans le lexique (et l’imaginaire) des saccageurs de la rue de Valois, la preuve de la culture, c’est la consommation. » (Elisabeth Lévy _ à propos du démagogique et imbécile pass culture)

« Le pass culture semble avoir été confectionné sur mesure pour les cyber-Gédéons annoncés par Gilles Châtelet, ‘tout ce cyber-bétail de jeunes à baladeur nomades et libres dans leur tête, un peu râleurs mais au fond malléables, facilement segmentables en tranches d’âge et en générations, et donc gibier sociologique idéal pour les modes’. Il se présente (forcément) sous la forme d’une ‘appli’, car ‘en donnant accès à la totalité des propositions culturelles disponibles sur le territoire et en ligne (…) ‘Le pass Culture se veut l’utilisation la plus intelligente du téléphone intelligent’, peut-on lire dans la très distrayante documentation du ministère. Vu que l’intelligence humaine semble être inversement proportionnelle à celle des objets dont elle peuple le monde, si on voulait les rendre cons, ces jeunes, on ne ferait pas autrement. »  (Elisabeth Lévy) – Conscient ou inconscient, tel est bien l’objectif des barbares, dispensateurs de subventions aux copains,  régnant au ministère de la culture.

« Aujourd’hui, on cherche partout à répandre le savoir, qui sait si dans quelques siècles, il n’y aura pas des universités pour rétablir l’ancienne ignorance ? » (Georg Christoph Lichtenberg) – Afin de laisser se rétablir une culture personnelle, instinctive, de retrouver « l’ensemble de connaissances et de valeurs qui ne fait l’objet d’aucun enseignement spécifique et que pourtant tout membre d’une communauté sait. » (?)

« Un homme peut aujourd’hui, en soixante ans, s’approprier ce que le genre humain a mis cinq mille ans à acquérir. Un jeune homme de dix-huit ans peut faire sienne la sagesse d’époques entières. » (Georg Christoph Lichtenberg) – Ecrit il y a plus de deux siècles.

« La culture mass-médiatique a le pouvoir de faire oublier le réel, d’entrouvrir le champ illimité des projections et identifications. Nous consommons en spectacle ce que la vie réelle nous refuse : du sexe … de l’aventure … encourageant les attitudes passives, émoussant les facultés d’initiative et de compréhension, décourageant les activités militantes, la culture de masse ne fait qu’élargir la sphère de la dépossession subjective, agir comme facteur d’intégration au système bureaucratique et capitaliste. » (Gilles Lipovetsky)

« On voit tout, on ne comprend plus grand-chose, y compris à ce qui nous a fait … Si la haute culture n’est en rien découronnée elle n’en suscite pas moins la même attitude décontractée que celle en vigueur dans la consommation des produits les plus communs. Triomphe du code du divertissement touristico-hédoniste. » (Gilles Lipovetsky)

« La ‘valeur esprit’ (la haute culture) a été  remplacée par le fun, le sport, le divertissement des médias et des voyages, la vitesse de l’information (et aujourd’hui par l’extrême vulgarité et méchanceté de la  société médiatique du ricanement) … Plus les hommes se montrent admiratifs des œuvres du monde (Pyramides, ruines mayas…)  et plus leur propre héritage culturel, religieux en particulier, leur devient inintelligible … On voit tout, on ne comprend plus grand-chose, y compris ce qui nous a fait …  La culture-monde est ce qui démocratise l’accès aux œuvres d’art en même temps qu’elle dépossède les individus des repères de leur propre passé culturel … » (Gilles Lipovetsky)

« Une culture monde qui n’est pas le reflet du monde, mais qui le constitue, qui l’engendre, le modèle, le fait évoluer, et cela de façon planétaire … Elle est celle de la compression du temps et du rétrécissement de l’espace … La communication en temps réel créant un sentiment de simultanéité et d’immédiateté transcendant les barrières de l’espace et du temps. » (Gilles Lipovetsky, Jean Serroy)

« La priorité évidente pour une politique qui veut démocratiser la culture et lutter contre … la culture ‘tronquée’ se doit d’être dans l’apprentissage de la lecture. C’est revenir aux fondamentaux que de faire porter l’effort sur une politique de la lecture à l’école : la logique même d’une véritable démocratisation culturelle est de commencer par le commencement. » (Gilles Lipovetsky, Jean Serroy)

« Pour tuer une culture, il suffit parfois de la mettre en contact avec une autre, surtout si cette dernière est plus évoluée (cas habituel des cultures des nations conquérantes) … Ce sont les normes sociales de plus basse valeur (coca-cola, chewing-gum, physique, attitudes…) qui sont les plus faciles à imiter … Les systèmes traditionnels de comportement social peuvent complètement disparaître au cours d’une génération … Ce qui fait une culture ne supporte aucune interruption de sa continuité. » (Konrad Lorenz)

« Interprétation banalement moralisante de ceux qui n’ont pas étudié historiquement le sujet ; interprétation étroitement historiciste de ceux qui ne l’ont pas approfondi spirituellement : il est bien rare qu’un grand sujet ne soit pas livré à l’un ou à l’autre de ces deux genres d’interprétation; à l’une ou à l’autre de ces médiocrités alternantes. » (cardinal Henri de Lubac)

« Le contraste frappant qui apparaît entre le développement rapide des forces productives matérielles et les tendances au déclin dans le domaine de l’art, de la littérature, de la philosophie, de la morale … Cette critique du capitalisme au nom de la culture. » (Georg Lukàcs – reprenant ?) – Critique pertinente pour Lukàcs, mais qualifiée de romantique ! Cependant, il est parfaitement exact que la culture décline avec l’aisance matérielle.

« L’idée même d’activité culturelle, ‘d’animation’ culturelle présuppose que le destinataire (le public, l’usager…) manque de connaissance, de goût, de sensibilité, de moyens d’expression et qu’il faut l’éduquer. Et d’abord le faire venir, donc le séduire … ‘Politique culturelle’ : expression terrifiante … Avec la politique culturelle, l’esprit passe dans la mouvance des bureaux politiques et des cabinets ministériels … Stratégisation … Cette institution (la politique culturelle) consacre la décadence de l’esprit qu’elle est censée combattre … Le pèlerinage au Panthéon (des socialistes vainqueurs en 1981) était inquiétant, à cet égard, ainsi que sa mise en scène par la télévision (pire, s’il est possible, en 1989, le défilé grotesque et indécent de commémoration du bicentenaire de la révolution) … La valeur du livre se juge à son chiffre de vente, d’un enseignement au nombre d’étudiants inscrits, d’une émission au taux d’écoute, d’une invention scientifique à ses retombées technologiques … Socrate, outre qu’il échouerait devant les autorités universitaires supérieures, aurait du mal à obtenir des crédits sur son projet. » (Jean-François Lyotard – Le tombeau de l’intellectuel)

« Il n’y a pas de culture française. Il y  a une culture en France et elle est diverse. C’est une culture parmi d’autres. » (Emmanuel Macron) – Une perle présidentielle de plus. Debussy, Ravel, Berlioz, Bizet et le Rap, ; Yann Moix, Christine Angot avec Marcel Proust. Tous dans le même sac.

« Toute civilisation naissante fait fond sur le grouillement culturel. C’est à partir de celui-ci que s’élaborent peu à peu les grandes œuvres de la culture. Chaque époque se rêve dans une suite d’essais, d’erreurs, dans des laboratoires où ce qui est à l’état naissant, l’instituant, fait la nique à l’institué. » (Michel Maffesoli – rachetant l’effervescence, le bouillonnement chaotique actuel)

« Distinction entre la culture ‘physico-rationaliste’ et une autre ‘populo-mythologique’ … La sensibilité populaire a toujours suscité le mécontentement des clercs (aujourd’hui, ce n’est plus du mécontentement, c’est de la haine) … Paradoxe entre la première qui veut expliquer, régir la vie, qui procède par distinction et analyse (mise à plat) et la deuxième qui préfère la conjonction et la saisie globale des divers éléments du donné mondain, cette vie même qui toujours échappe à l’explication … la première privilégiant la démonstration d’un ordre ‘devant être’ rationnel en oubliant la ‘monstration’ d’un ordre réel qui, lui, est bien plus complexe … le passage d’une logique du ‘devoir être’ à une logique incarnée n’est pas chose aisée quand on connaît le mépris du banal, de l’ordinaire, de la vie quotidienne, sur lequel s’est fondée la culture savante. » (Michel Maffesoli) – Mépris qui garantit le pouvoir des clercs officiels !

« En cette époque dite de culture de masse, ce ne sont pas les masses qui manquent de culture mais plutôt les élites. Il est rare d’entendre dans un autobus des bourdes aussi monumentales que celles qu’on remarque à la télévision ou dans les journaux. » (Claudio Magris) – Comme il est rare d’entendre au bistrot du coin les âneries qu’on peut entendre dans un salon bourgeois.

« La culture est ce qui fait de l’homme autre chose qu’un accident de l’univers … Elle est ce qui lui répond quand il demande ce qu’il fait sur terre … Elle est l’ensemble des formes qui ont résisté à la mort. » (André Malraux)

« La culture ne s’hérite pas ; elle se conquiert. » (André Malraux)

« La culture exige une sublimation continuelle : elle affaiblit par là Eros, le bâtisseur de la culture. Et la désexualisation, en affaiblissant Eros, libère les pulsions destructives. » (Herbert Marcuse)

« La culture telle que le monde moderne la conçoit se propose des fins purement terrestres qui désormais se suffisent à elles-mêmes. C’est un type de culture anthropocentrique. En se repliant sur lui-même l’homme a subi le mouvement d’introversion propre à l’esprit, il est entré au-dedans de soi. » (Jacques Maritain)

« La floraison de nos églises, cette magnifique parure de la terre française, il a fallu, non des générations, mais des siècles, pour qu’elle s’épanouisse … architectes et maîtres de l’œuvre, tailleurs de la pierre et du bois, ferronniers et verriers, des milliers, des centaines de milliers d’artisans, d’artistes inégalables, d’anonymes oublieux d’eux-mêmes ont fait sortir du sol dans les cités et les bourgades perdues, la maison de la foi chrétienne. Ce que le peuple a accompli selon la chair, pour un rêve d’évasion spirituelle, est-il devenu incapable de le recommencer selon l’esprit, pour la réalité de sa libération terrestre. » (Marcel Martinet – prônant une culture populaire distincte de l’infime parcelle de a culture bourgeoise imposée au prolétariat)

« Ce qu’il ne faut pas faire : – La grande réunion : rien ne tue mieux dans l’œuf une tentative de culture prolétarienne que la confiance superstitieuse dans la grande réunion ‘éducative’, ‘qui recrute’, avec ‘des ténors’, traitant le sujet qu’ils connaissent et qui leur convient … Les auditeurs applaudissent et s’en vont … Les ténors se suivent, se répètent ou passent du coq à l’âne, éparpillant la pensée de l’auditoire, qu’il fallait fixer, concentrer … Rien n’est amorcé de l’organisme qu’il faut créer – Les universités populaires : auditeurs et instructeurs se sont quittés après peu d’années, mécontents les uns des autres … le public s’est lassé et dispersé … Un soir il entendait parler de la marche des astres, le lendemain de poésie contemporaine, le surlendemain d’art égyptien ou de linguistique et ainsi de suite … Ceux qui demeuraient n’étaient ni les plus actifs ni les plus clairvoyants … On avait cru que l’enthousiasme suppléerait à tout.   » (Marcel Martinet – Culture prolétarienne)

« Le multiculturalisme, ce lâche renoncement. Ce multiculturalisme n’est qu’un lâche renoncement  aux exigences du sens moral et de la raison puisqu’il met sur le même plan cultures universalistes et cultures tribales, cultures soucieuses de la dignité et de la liberté de l’Homme  et cultures qui rêvent d’un asservissement du monde  à des règles arbitraires, cultures attachées à l’égalité des droits civiques entre femmes et hommes et cultures réifiant les femmes pour en faire des possessions des hommes, ou les enfermant dans une minorité juridique perpétuelle.» (Aurélien Marq)

« La culture relève moins des Maisons où l’Etat les enferme que des champs où elle pousse en toute liberté. » (Jean-François Mattéi)

 « La confiscation moderne des œuvres culturelles par une société de masse qui les consomme au même titre que les objets d’usage, et qui réduit le monde stable des œuvres aux processus éphémères de la vie. ‘Le résultat n’est pas une désintégration mais une pourriture’. … Les sociétés de masse qui confondent la culture véritable, qui exige la pérennité des œuvres … avec l’industrie des loisirs, qui impose la consommation des objets. » (Jean-François Mattéi – s’inspirant de et citant Hannah Arendt)

 « Aujourd’hui tout est culture … culture de l’école et culture de l’entreprise, culture littéraire et culture scientifique, culture des banlieues et culture des beaux quartiers … Tout comme le voyage est devenu tourisme, la culture est devenue loisir et, s’inscrivant dans le processus biologique de la vie, au même titre que le travail et le sommeil, a déserté peu à peu le monde des œuvres … Ce qui menace la culture de destruction, c’est moins l’extension généralisée que son glissement de la sphère du ‘monde’ à la sphère de la ‘vie’. » (Jean-François Mattéi – reprenant Hannah Arendt) – On est passé de la culture à l’entertainment.

« Antoine Compagnon distingue plusieurs paradoxes constitutifs de la modernité culturelle : la superstition du nouveau, la religion du futur, la manie théoricienne, l’appel à la culture de masse et la passion du reniement. » (Jean-François Mattéi)

« On peut distinguer entre les œuvres d’art et les objets de loisir, comme on doit distinguer entre la culture véritable, qui est toujours une culture durable et aristocratique, et la culture de masse qui s’affaire dans la sphère de la consommation passagère. » (Jean-François Mattéi)

« Le cri de Théophile Gautier : ‘Plutôt la barbarie que l’ennui !’ La culture contemporaine  a su trancher avec bonheur le dilemme du siècle précédent : elle nous a accordé les deux. » (Jean-François Mattéi)

« Nous vivons l’époque paradoxale d’une culture qui a abandonné toute référence à une norme, hormis la norme de l’absence de norme, la norme de l’anormalité. » (Jaen-François Mattéi) – Sans doute pour équilibrer la montagne de normes dans tous les autres domaines !

« Le créateur romantique écrit sous la dictée du monde et de sa propre sensibilité, le créateur classique n’écrit qu’au moment où il a fait taire sa sensibilité et le monde. » (Thierry Maulnier – cité par Henri Guaino) – « Cette distance que le classique met entre lui et la nature, cet effort sur lui-même pour dominer ses sens comparés à cette union avec la nature que recherche le romantique, à ce libre cours qu’il laisse à ses sens. Le classicisme expose la tragédie humaine à la pleine lumière, parfois aveuglante, de l’intelligence. Le romantique cherche une communion sensuelle … Il veut communier mystiquement avec la nature tout entière, Dieu pour lui n’est pas transcendant, il est immanent. » (Henri Guaino)

« On n’était plus tenu par le scrupule de choquer une clientèle de gens de goût, et l’on fut stimulé par le désir de ne pas déplaire à un petit monde d’originaux extravagants. » (Charles Maurras – sur la littérature romantique ou la littérature dite de tour d’ivoire commençant au XIX° siècle)

« L’édification méthodique d’une culture de masse, c’est-à-dire d’un ensemble d’œuvres, d’objets et d’attitudes, conçus et fabriqués industriellement, et imposés aux hommes comme n’importe quelle autre marchandise, constitue l’un des aspects les plus spectaculaires du capitalisme moderne … Plus spectaculaire encore, est, à partir des années soixante, le développement, au sein même de la Gauche, de cette culture de masse (ou culture jeune) et des ‘nouvelles technologies de l’information et de la communication’ qui en sont le présupposé matériel immédiat. Cela, au nom de l’idée, banalisée par les média et validée par la sociologie d’Etat, que toute critique radicale du spectacle et de l’industrie culturelle ne pourrait procéder que de l’esprit ‘conservateur’ ou de ‘l’élitisme bourgeois’. » (Jean-Claude Michéa – introduisant l’ouvrage de Christopher Lasch : Culture de masse ou culture populaire ?)  – D’où le culte stupide d’une prétendue culture, culture d’abrutissement.

« Cette disparition (de la culture populaire) s’accomplit sous l’effet principal de la culture de masse qui est précisément la négation organisée de la culture populaire … Il suffit, pour alimenter cette confusion, de présenter comme pratiques populaires nées spontanément … ce qui est en réalité l’écho aliéné de ce qui a été ‘vu à la télé’ et fabriqué selon les lois de l’industrie culturelle … Par exemple, ce que les média appellent ‘culture jeune’, n’est ainsi, la plupart du temps, que l’ensemble des réflexes exigés par la consommation devenue mode de vie. » (Jean-Claude Michéa)

« Une culture est certes toujours en évolution … mais cette évolution s’opère à un rythme qui confère à cette culture une structure nécessairement ‘transgénérationnelle’, ce qui signifie qu’elle définit toujours un espace commun à plusieurs générations et autorise ainsi …  la rencontre et la communication des jeunes et des vieux (dans un stade, une fête de village ou la vie d’un vrai quartier populaire). La mode est, au contraire, un dispositif ‘intra-générationnel’ et dont le renouvellement incessant obéit avant tout à des considérations économiques. Organiser la confusion systématique entre, d’une part, les cultures durables que créent les peuples, à leur rythme propre et, d’autre part, les modes passagères imposées par les stratégies industrielles constitue l’une des opérations de base du ‘tittytainment’. On sait que c’est un art où l’omniprésent Jack Lang a très peu de rivaux. » (Jean-Claude Michéa) – Tittytainment : ‘cocktail de divertissement abrutissant et d’alimentation suffisante permettant de maintenir de bonne humeur la population frustrée de la planète’ (voir à la rubrique Travail, 715, 1, Jean-Claude Michéa : « Dans le siècle à venir… »)

« De même que la croissance économique ne peut exploiter à l’infini les ressources fossiles … de même, la croissance culturelle du capitalisme (ce que les libéraux de gauche vénèrent sous le nom darwinien ‘d’évolution des mœurs’ !) ne saurait exploiter à l’infini le trésor anthropologique accumulé par les générations précédentes sans compromettre … les conditions même de la survie morale de l’humanité. » (Jean-Claude Michéa – Le complexe d’Orphée)

« Une accumulation d’objets, de notions, de textes, d’images voire de sons, de goûts et d’odeurs sans lesquels les termes mêmes de ‘beau’ et de ‘beauté’ n’ont pas de sens. Affaire de patrimoine, de transmission autant que l’histoire de ces hommes qui acquièrent, cultivent, exercent et transmettent aux autres cette ‘antenne intérieure’ intime et partagée. La beauté résulte donc d’un certain rapport au passé … Elle dépend du regard, mais pas du regard tyrannique et capricieux d’un ‘moi’ sans passé ni avenir, plutôt d’un regard collectif, intégrant ceux qui ont habité le monde avant nous et à qui nous sommes redevables. Cela s’appelle la culture. » (Gil Mihaely)

« Il n’y a pas de pluralité des cultures … et ce qui relève du multiculturel ne saurait nous intéresser, parce que trop bas, industriel, ou mensonger … seule existe la culture, qui a besoin d’être sans cesse redéfinie, aujourd’hui, pour n’être pas confondue avec ce qui la nie radicalement ; le culturel, étendu à ‘l’humanité’ politique. » (Richard Millet)

« Jamais les cultures n’ont été si éloignées les unes des autres. Elles ne dialoguent pas pour la simple raison qu’il n’y a plus de cultures ; elles sont le devenir tribal, ethnicisé, idéaliste de la redéfinition démocratique du monde. » (Richard Millet) 

« Que la culture européenne se soit prostituée à la sous-culture américaine au point d’y laisser son âme, voilà une des causes de l’esclavage contemporain qui fait des Européens des sortes de sous-hommes. » (Richard Millet)

« Il ne doit plus y avoir de culture, seulement du culturel. » (Richard Millet)

« Le Culturel étant l’alliance du divertissement et de la propagande, c’est-à-dire d’un conditionnement de masse opérant au nom même du narcissisme individuel. » (Richard Millet)

« Je tiens que le savoir et l’étude n’ont pas de place naturelle dans la société française … L’indice le plus net : l’inlassable conviction qu’on ne peut admettre une pratique de savoir que si elle est strictement subordonnée à quelque service social. Pour les Lettres, il n’en est que deux : ce service social qu’on appelle l’éducation ou cet autre service social qu’on appelle la culture. Faire que les enfants soient sages comme des grandes personnes et faire que les grandes personnes demeurent suffisamment puériles pour qu’elles se contentent de bavarder. Si l’une ou l’autre de ces conditions n’est pas remplie, celui qui se dévoue à l’étude … encourt le blâme silencieux de l’indifférence et bientôt la raillerie … A l’Université, la sentence d’inutilité portait sur tout ce qui ne se bornait pas à refléter le social. » (Jean-Claude Milner) – Il suffit de voir ce que lisent et regardent les Français, Françaises.

« Pour faire place nette à la seule consommation des objets du désir de l’homme nouveau, il faut saper et détruire la culture populaire urbaine, spécifiquement … Le monde des marchandises pour zombis ne saurait seulement s’y surajouter ; il convient qu’il prenne la place de la culture et de la socialité populaire, en occupant le temps et la place qu’elles tenaient. » (Flora Montcorbier)

« Dans les arts, la presse, le cinéma, l’édition, la morale a remplacé le talent et l’esprit de sérieux a censuré la liberté d’opinion … parole cadenassée, écrits surveillés, rire formaté … le conformisme est la règle absolue de survie : ne surtout pas dévier de la ligne majoritaire, consommer les mêmes cochonneries, lire les mêmes âneries, regarder les mêmes inepties, se plier aux injonctions venues d’en haut et s‘ennuyer à mourir … L’aréopage de connards chargés d’établir la liste des meilleurs films français de ces dernières années… » (Thomas Morales)

« La culture c’est ce qui relie les savoirs et les féconde. » (Edgar Morin)

« La culture n’est pas accumulative, elle est auto-organisatrice, elle saisit les informations principales, sélectionne les problèmes principaux, dispose de principes d’intelligibilité capables de saisir le nœud stratégique du savoir. L’aveuglement des esprits parcellaires et unidimensionnels tient à leur défaut de culture. » (Edgaar Morin)

« Le monde qui adore Matisse ou Van Gogh à l’égal de dieux est aussi celui qui est parvenu à retirer toute valeur à ce qui n’est pas vécu en masse … Il n’accorde de valeur qu’à ce qui vient de la multitude ou la rejoint. » (Philippe Muray)

« La droite déculturée est devenue la domestique, la valetaille culturelle de la gauche. Son sous-prolétariat, son quart-monde qui n’a pas de langue pour s’exprimer. L’apparition, il y a deux siècles, des concepts de droite et de gauche permet de dater l’appropriation de la culture par la gauche … Le mot droite sert simplement à indiquer tout ce qui n’est pas cultivé. » (Philippe Muray)

« Le moyen qu’on trouva de créer une véritable égalité entre culture du pays d’accueil et culture importée consista à  dénigrer la première … Seuls les Européens modernes sont heureux de s’autoflageller, au milieu d’un marché international de sadiques … Une culture qui privilégie le doute permanent et le manque de confiance en soi n’a que peu de chances de convaincre les gens de l’intérêt de l’adopter … Nous ressemblons à des gens qui ont perdu tout désir d’inspirer les autres parce que nous n’avons rien d’inspirant. » (Douglas Murray – sur le multiculturalisme)

« L’apprentissage par lequel l’intelligence, au lieu d’être formée ou sacrifiée pour une fin formelle ou accidentelle, un métier ou une profession, une étude ou une science spécifique, est disciplinée pour elle-même, pour la perception de ses propres objets. » (cardinal Newman – définissant la culture qu’on appelle générale)

« Nous n’accumulons plus, nous dissipons les capitaux des ancêtres. » (Nietzsche)

« La culture n’est pas forcément une culture intellectuelle, mais avant tout une formation du regard et de la faculté de bien choisir : comme le musicien qui sait trouver ses doigtés dans l’obscurité. Eduquer un peuple à la culture, c’est essentiellement l’accoutumer à de bons modèles et lui inculquer de nobles besoins . » (Nietzsche) – C’est pourquoi de nos jours, les média, du moins, ne lui montrent que des modèles pourris et on ne lui inculque que de faux besoins.

« Toute culture profonde est œuvre de ruminant … Elle délivre de l’instant. » (Nietzsche)

« Le désert croît. Malheur à celui qui abrite en lui des déserts. » (Nietzsche s’est trompé – l’inculture mène aujourd’hui à la célébrité et à la fortune ; voir le milieu médiatique)

« Nous appartenons à un temps où la culture risque de mourir des moyens de culture. » (Nietzsche)- C’est fait.

« Qu’il y ait eu … une brutale et mystérieuse dénivellation de la production culturelle de la France, c’est une évidence. Mais est-ce mieux ailleurs ? Perry Anderson peut-il citer un seul ‘grand intellectuel’   anglais, espagnol, italien qui rappellerait … Une seule entreprise théorique, un seul mouvement intellectuel, dont l’ambition et le rayonnement dépassent les frontières du pays ? Où sont les grandes cultures nationales ? Qu’est devenu le cinéma italien et même anglais ? Où est passée la tradition de la philosophie allemande ? excepté Habermas … ? Et la situation est-elle plus brillante aux Etats-Unis ? » (Pierre Nora) – Merci la mondialisation anglo-saxonne.

« Chaque homme profite des découvertes de ceux qui sont venus avant lui. Chacun se hisse sur les épaules de ses prédécesseurs. » (Jean d’Ormesson – reprenant l’aphorisme de Newton) – « Nous sommes des nains juchés sur les épaules de géants. » (Bernard de Chartres) – « De nos jours, un esprit moderne (disons un Jacques Attali ou un Claude Allègre) aurait plutôt tendance à considérer que nous sommes des ‘géants juchés sur des épaules de nains’. » (Jean-Claude Michéa)

« Quand j’entends parler de culture, je sors mon carnet de chèques. » (Jean d’Ormesson)

« Quelles cultures ? Il n’y en a plus. Ni chrétienne ni musulmane ; ni socialiste ni scientiste. Pourquoi parler des absents ? » (Mezioud Ouldamer)

 « C’est ma ‘culture’, comme si la culture pouvait relever du possessif, au lieu de le transcender … Une sous-culture n’est pas dangereuse en soi, elle le devient quand elle postule au statut de culture. » (Paul-François Paoli) – Les média évoquent même la culture geek !

« Toute culture est fondée sur une forme de sélection …Si une œuvre culturelle vaut d’être transmise c’est qu’elle a subi l’épreuve du temps La culture dont nous sommes les héritiers n’est pas la culture de masse, cet oxymore, c’est une culture pour ceux qui font l’effort d’y accéder. » (Paul-François Paoli) – et oui, devoir faire quelque effort, c’est bien triste.

« Le rapport dialectique entre culture de la classe dominante et culture de la classe dominée ne serait plus possible là où la culture de la classe dominée aurait disparu, ayant été éliminée, abrogée … Le consumérisme peut rendre non modifiables les nouveaux rapports sociaux exprimés par le nouveau mode de production, en créant comme contexte de sa  propre idéologie hédoniste, un contexte de fausse tolérance et de faux laïcisme ; c’est-à-dire de fausse réalisation des droits civiques. » (Pier Paolo Pasolini- Lettres Luthériennes – 1975) – Fin de tout conflit ; mort. Sorte de fin de l’histoire.

« La culture de masse est directement liée à la consommation qui a des lois internes et une autosuffisance idéologique capables de créer automatiquement un pouvoir qui ne sait plus que faire de l’Eglise, de la Patrie, de la Famille et autres semblables lubies. » (Pier Paolo Pasolini)

« Dans un pays civilisé, où le progrès n’aurait pas été simplement le développement, c’est-à-dire la destruction mécanique et irréversible des valeurs … La révolution capitaliste, d’un point de vue anthropologique, c’est-à-dire  quant à la fondation d’une nouvelle ‘culture’ exige des hommes dépourvus de liens avec le passé (qui comportait l’épargne et le moralisme). Elle exige que ces hommes vivent, du point de vue de la qualité de la vie, des comportements et des valeurs, dans un état d’impondérabilité, ce qui leur permet de privilégier comme seul acte existentiel possible, la consommation et la satisfaction de  ses exigences hédonistes … Sa caractéristique la plus intransigeante réside dans son pouvoir de destruction, sa première exigence est de faire place nette d’un univers ‘moral’ qui l’empêche de s’étendre. » (Pier Paolo Pasolini – sur le nouveau capitalisme – Lettres luthériennes)

« La classe dominante, dont le nouveau mode de production a créé une nouvelle forme de pouvoir et en conséquence une nouvelle forme de culture, a procédé ces dernières années en Italie (mais pas que là) au génocide des cultures particularistes (populaires) … Les jeunes sous-prolétaires romains (mais pas qu’eux) ont perdu leur ‘culture’, c’est-à-dire leur manière de se comporter, de parler, de juger la réalité. On leur a fourni un modèle de vie bourgeois (consumériste) … ils ont été classiquement détruits et embourgeoisés. Leur connotation de classe est maintenant purement économique et non plus ‘également’ culturelle. » (Pier Paolo Pasolini)

« La production ne produit pas seulement de la marchandise ; elle produit en même temps des rapports sociaux, de l’humanité. Le ‘nouveau mode de production’ a donc produit une nouvelle humanité, c’est-à-dire une nouvelle ‘culture’, en modifiant anthropologiquement l’homme. Cette  ‘nouvelle culture’ a cyniquement détruit les cultures précédentes … En produisant de la marchandise on produit en fait de l’humanité (des rapports sociaux) … Les besoins induits par le vieux capitalisme étaient au fond très semblables aux besoins primaires. Au contraire, les besoins que le nouveau capitalisme peut induire sont totalement et parfaitement inutiles et artificiels. Voilà pourquoi, à travers eux, le nouveau capitalisme ne se limiterait pas historiquement à changer historiquement un type d’homme, mais il changerait l’humanité elle-même. » (Pier Paolo Pasolini – Lettres luthériennes) – Pas besoin d’être marxiste pour connaître le lien de cause à effet entre mode de production et les conditions d’existence au sens large.

« L’automatisme intellectuel a une incroyable force. Vieillis avant l’âge par la fausse culture, les esprits automatiques ne répondent plus. » (Charles Péguy)

« Se moquer est devenu le centre nerveux de notre culture, le fondement de notre République … L’insulte et la caricature nous tiennent lieu de combat culturel, face à la révolution islamique et au capitalisme mondialisé .  » (Patrice de Plunkett – cité par Basile de Koch)

 « La tradition française du commerce apaisé entre les sexes ne peut que s’éteindre avec la destruction de la culture classique sur laquelle elle s’appuyait. Lui succèdera une ère d’indifférence ou de méfiance entre les sexes, toutes deux aussi fatales au désir comme au plaisir. » (Natacha Polony) – Le but de la destruction organisée de l’étude de ce qu’on appelait les Humanités est bien de pourrir tous les rapports harmonieux entre les êtres qui s’étaient peu à peu édifiés, pour les livrer à la concurrence sauvage.

« Orwell craignait ceux qui interdisaient les livres. Huxley redoutait qu’il n’y ait même plus besoin d’interdire les livres car plus personne n’aurait envie de lire … Orwell craignait qu’on nous cache la vérité. Huxley redoutait que la vérité ne soit noyée dans un océan d’insignifiances. Orwell craignait que notre culture ne soit prisonnière. Huxley redoutait que notre culture ne devienne triviale. Huxley avait compris qu’il n’était pas nécessaire de cacher quoi que ce soit à un public insensible et anesthésié par les divertissements technologiques. » (Neil Postman) – C’est Huxley qui a gagné. Même s’il subsiste quelque poussière qu’il vaut quand même mieux dissimuler en la mettant sous le tapis.

« Quand une population devient folle de fadaises, quand la vie culturelle prend la forme d’une ronde perpétuelle de divertissements, quand les conversations publiques sérieuses deviennent des sortes de babillages, quand le discours sérieux se dissout en gloussements, quand, en bref, un peuple devient un auditoire et les affaires publiques un vaudeville … la mort de la culture menace. » (Neil Postman) – Et derrière, la mort de toute civilisation.

« Lorsqu’un vieil ordre économique, réputé efficace, se fendille, craque et menace de s’effondrer, il suscite immanquablement dans le champ socioculturel une nébuleuse de signes qui révèlent l’angoisse, le désarroi et les peurs des bénéficiaires de cet ordre … Les films expressionnistes allemands (Fritz Lang) dans les années vingt et la République troublée de Weimar – Les films d’horreur américains des années trente après le début de la grande crise de vingt-neuf, les mots des média d’alors, ‘panique’, ‘peur’, ‘affolement’, ‘stupéfaction’, ‘effroi’ – Les films-catastrophes et leur thème de lutte, d’effort, de héros anonymes, d’anti-héros et d’électivité, de renaissance, d’innocence initiale et de purification fondatrice, de sacrifice et d’ascension, de revanche contre la trahison technologique pondérée cependant par la valeur des appareils d’Etat (police, pompiers…), individualisme et civisme … après la crise du début des années soixante-dix marquées aux Etats-Unis par l’ébranlement de l’omnipotence de l’armée (Vietnam), de l’exemplarité du Président (Nixon), de l’invulnérabilité du dollar, troubles auquel contribuaient également l’approche forcément millénariste de l’an 2.000 et le début des inquiétudes climatiques. » (Ignacio Ramonet)

« Une culture purement positiviste qui renverrait dans le domaine subjectif, comme non scientifique, la question concernant Dieu, serait la capitulation de la raison, le renoncement à ses possibilités les plus élevées et donc un échec de l’humanisme, dont les conséquences ne pourraient être que graves. » (cardinal Joseph Ratzinger) – On commence à voir ces conséquences, et ce n’est qu’un début.

« Parce que la culture populaire était empreinte de tradition, les progressistes ont avalisé sa disparition au profit de la culture de masse, c’est-à-dire des produits pour les masses délivrés par l’industrie du divertissement. » (Olivier Rey) – Progressistes, toujours les idiots utiles (stipendiés quand même) du capital.

« La culture assure la médiation entre le subjectif et l’objectif. Autant dire qu’elle est en fâcheuse posture à une époque qui ne connaît que l’un ou l’autre. » (Olivier Rey)

« Au nom de la culture pour tous a été instituée la culture pour personne. » (Ivan Rioufol) – Tout pour tous !

« La fameuse ‘culture Canal’, mêlant arrogance friquée, ricanements moralistes et conformisme idéologique. » (Ivan Rioufol) – Il aurait été difficile de descendre plus bas dans l’abjection, la prostitution mentale. Représentative de la bassesse Bobo. Heureusement finie.

« Il aura reçu l’habitude de confronter des points de vue divers et des argumentations possibles, rencontré des questions nombreuses, perçu la variété des solutions possibles et la richesse des raisonnements qui les étayent, qu’il y a des arguments de part et d’autre, il aura gardé un peu de cette prudence grave qui va avec l’expérience, aura fait connaissance avec des personnages du passé, avec toutes les émotions possibles, tous les bonheurs et tous les malheurs, toutes les causes d’indignation ou de gratitude et toutes les aventures, compréhension des êtres et des sentiments, des situations et des passions, reçu un monde de sensations , d’idées et de savoirs fruit de siècles multiples et de civilisations diverses, appris à voir les choses, à voir le monde, l’esprit évitera les leurres des idéologies séduisantes. » (Jacqueline de Romilly – sur la lecture et les bénéfices reçus de la pensée des autres)

« Appartenir à la même culture crée un lien profond, comme un lien de famille, comme une connivence naturelle. » (Jacqueline de Romilly)

« Il n’y aura pas de grande culture si l’homme ne se donne pas un nouveau sens du monde. » (Dominique de Roux) – Il n’en prend guère le chemin.

« C’est la culture de l’intelligentsia qui est incertaine, inquiète de son propre avenir, et qui cherche nerveusement des refuges dans les modes esthétiques. Car cette culture est le plus souvent une culture de déracinés, et de déclassés. » (Raymond Ruyer) – Culture de Bobos. Objectif des bouleversements sociétaux continuels, de la mondialisation culturelle : déraciner les gens pour en faire de parfaits laquais.

« Lorsqu’une culture se renie elle-même, elle n’assimile plus rien, elle s’empoisonne (les Eglises chrétiennes, en voulant se mettre au goût du jour, s’intoxiquent à mort). Le métissage aboutit à la complète stérilité. » (Raymond Ruyer) – Excellente vue de la lamentable situation française. Remarque sur les Eglises, l’auteur écrivait au tout début des sinistres années 1970.

« Elle alerte l’attention intéressée, d’une part des commerçants, flairant une clientèle, d’autre part, des démagogues, qui voient là une excellente occasion d’obtenir des gouvernements des crédits et des places pour eux-mêmes, et enfin des idéologues, intéressés d’une autre manière, qui voient dans l’animation culturelle un paravent de l’agitation politique, avec le piment supplémentaire que cette agitation est financée par les gouvernements qu’ils veulent abattre … « Je suis la culture’, le gouvernement doit s’agenouiller même si on le fustige et si on travaille à le détruire … Le courant de culture idéologique est à sens unique, il ‘inculque’, il ‘initie’, il ‘instruit’, et surtout il ‘agite’ … il compte sur les hurlements du public comme accompagnement, mais il ne prend jamais la peine de l’écouter … public intimidé, à qui on interdit toute réaction, esthétique ou politique. » (Raymond Ruyer)

 « Collectivement, à force d’ingurgiter des produits culturels sans réelle substance, nous nous bêtifions d’année en année … j’ai cette impression que le monde s’enfonce dans une nuit qui serait celle de l’ignorance tous azimuts …  il me semble  que plus nous avons accès à un savoir infini et moins nous nous entendons pour nous instruire …  Nos cerveaux s’encrassent d’une quantité infinie de produits dont le seul but semble être de nous divertir, comme si nous étions des enfants turbulents à qui il fallait donner la becquée de peur de les entendre brailler trop. Nous devenons de plus en plus passifs, de plus en plus sages, de plus en plus idiots, occupés que nous sommes à visionner à la chaîne des séries qui, la plupart du temps, reconnaissons-le, sont tout juste d’aimables divertissements destinés avant tout à nous empêcher de réfléchir par nous-mêmes. (Laurent Sagalovitsch – à propos de Netflix notamment)

« Son credo (du ministère de la culture), devenu la règle d’or de notre ‘loft’ culturel national : c’est le divertissement. Fête de la musique et du cinéma ! Fureur de lire ! Fête de l’internet ! Rage festivalière ! … Défilés de têtes vides ! Le divertissement à tout prix. La fête tout le temps. Aucun projet culturel aujourd’hui n’a de chance s’il ne donne lieu ou accompagne une fête quelconque … La domestication des individus est devenue aujourd’hui le but même de la vie en société. Car il ne s’agit pas seulement de substituer le divertissement à la culture, et la culture à l’art mais d’expulser toute réalité de l’espace social, de substituer l’exhibition à l’expérience, la télé-réalité au récit. » (Christian Salmon)

« Plus on possède une culture authentique moins on a besoin de dépenser de l’argent pour se divertir le week-end ou pendant les vacances. Si personne ne vous apprend à vous créer des joies de l’intérieur vous devez tout acheter au dehors. » (Fernando Savater)

« Aspirer à la culture, c’est chercher avec une amoureuse ferveur à prendre part et à avoir part ontologiquement à tout ce qui dans la nature et l’histoire est de l’essence du monde et n’est pas seulement existence contingente et modalité accidentelle. » (Max Scheler)

« L’Etat ne vise plus seulement à assurer l’accès des œuvres de culture à tous, d’influer sur la ‘demande’, mais aussi et surtout à favoriser et à encourager la création, soit à influer sur ‘l’offre’ … Il achète et commande des œuvres d’art, attribue des emplois et des ressources aux artistes, consacre leur réputation …  Le ministère de la culture est devenu le ministère des artistes et, plus encore, des professionnels de l’art … ‘Délestée d’un enjeu social crédible et d’un enjeu esthétique … l’action du ministère apparaît clairement pour ce qu’elle est : un système d’allocations des ressources publiques à la vie artistique professionnelle’. » (Dominique Schnapper – citant ?) – Difficile de dire plus clairement qu’il s’agit d’un système de financement des copains doublé d’une volonté d’abêtissement du malheureux public convié à admirer des insanités.

« Ne pouvant faire que tous ceux qui ont de l’esprit fussent nos amis, on fit que seuls nos amis soient en charge de l’esprit. Par sa culture de clan, de clique et de claque, la gauche au pouvoir s’est trop souvent comporté comme un maître d’école circulant entre les bancs des artistes, tapotant les joues, distribuant des retenues ou des sucres d’orge, dispensant des postes et des médailles, avec une largesse et un cynisme… » (Michel Schneider)

 « La culture n’est que la fréquentation lettrée de l’art. La lecture n’est pas une pratique culturelle parmi d’autres, c’est la clé de tout art. L’accès aux œuvres du passé et du présent nécessite d’abord d’offrir les outils de compréhension et réception qui conditionnent cet accès, qui n’est jamais immédiat, contrairement à ce que croit une théorie gauchiste de la réception. » (Michel Schneider) – Donc d’offrir une éducation qui instruise, qui ne soit pas le contraire d’une éducation.

 « Le béton comme remède à l’illettrisme (Grande Bibliothèque et autres Beaubourg) … Pourquoi les mots anciens pour désigner la chose esthétique sont-ils bannis par le ministère de la Culture : art, beauté, œuvre ? On préfère ‘pratiques culturelles’, et surtout, mot rebattu jusqu’à l’ écœurement : ‘création’ … La politique culturelle aura été conçue essentiellement pour qu’on en parle … elle a fait du mot culture un mot-valise … La culture réellement dominante aujourd’hui, n’est pas celle de la classe dominante, mais celle que l’infantilisation massive instaure … la culture dominante est celle des niaiseries qu’on sert au peuple … L’expression même ‘d’aides à la création’ apparaît comme une contradiction fondamentale … La première réorientation serait que l’Etat produise moins de spectacles et plus de spectateurs, qu’il soit moins organisateur de concerts et plus formateur de publics, qu’il se dégage du financement de biens pour un financement des conditions d’accès aux œuvres … La politique culturelle  a réussi ce miracle : que l’art ne soit plus de l’ordre du désir, mais de la demande, qu’il ne soit plus un luxe ni un besoin, mais un passe-temps ou un devoir … On ne veut certainement pas la mort de l’art, mais sa disparition ne gênerait pas grand monde. On n’entend pas l’exterminer, on le laisse s’exténuer de lui-même. L’inanité (l’absence de sens, et même de sa recherche) est le visage rajeuni de la barbarie … Sur la scène, postures et impostures. Dans la coulisse, médiocrité, profit et délation. » (Michel Schneider – ex directeur au ministère de la culture – considérations éparses sur le sujet – La comédie de la culture)

« Trois valeurs critiques de nature à créer un ancrage culturel. Le ‘fil narratif’ … La nécessité pour les individus d’avoir une progression narrative, que les événements inscrits dans le temps s’enchaînent, que l’expérience s’accumule, qu’il en existe un récit possible – L’utilité … avoir un statut, un rang … On possède un statut quand des institutions vous confèrent une légitimité … Être utile dans un cadre, être publiquement reconnu (exemple anglais : travailler en hôpital public plus que dans le privé) – Le métier … Le nouveau monde du travail est trop mobile pour que le désir de bien faire pour bien faire s’enracine dans l’esprit d’une personne au fil du temps … La vertu cardinale du métier : l’attachement, l’engagement désintéressé à bien, correctement, faire une chose, quand bien même elle ne doit rien vous rapporter. » (Richard Sennett)

« La culture : ce qui permet à un honnête homme de n’écraser personne sous le poids de sa culture. » (Michel Serres)

« La culture naît de la rencontre de deux éléments, qui ne la contiennent ni l’un ni l’autre, l’âme subjective et les créations de l’esprit objectif … Elle est synthèse d’une évolution subjective et d‘une valeur spirituelle objective. » (Georg Simmel)

« Quelle est donc la plus grande part de notre culture ? Simplement ceci : nous construisons des moyens pour diminuer les souffrances que nous nous infligeons, pour diminuer les besoins que nous avons-nous-mêmes créés et pour résoudre de manière incomplète les contradictions que nous avons engendrées. Si ces solutions étaient complètes et définitives, il ne serait pas nécessaire d’en changer tout le temps. » (Georg Simmel)

« Chaque époque de la culture tourne autour d’un concept central. Dans la Grèce classique, c’était l’idée de ‘l’être’, unitaire, substantiel, divin … Le Moyen Âge chrétien lui substitua le concept de ‘Dieu’, source et but de toute réalité. .. Depuis la Renaissance c’est le concept de ‘nature’ qui a progressivement occupé cette place supérieure, ce qui est inconditionné, ce qu’on ne doit que représenter … le XVII° siècle a centré sa vision sur le concept de ‘loi de la nature’, ce qui est seul valable, valeur absolue, aspiration et exigence … Puis s’élabore le concept central du ‘Moi’, de la personnalité psychique , l’exigence éthique absolue … Au tournant du XIX° siècle, le concept de la ‘Vie’ tend vers la place centrale… » (Georg Simmel) – l’idée de phases culturelles centrées. Quid au tournant du XX° siècle ?

« Le despotisme culturel moderne dans lequel nous vivons depuis plus de vingt ans et qui nous enveloppe désormais dans ses mailles. » (Raffaele Simone)

« En matière culturelle, trois facteurs de changement de mimétisme : – L’abandon de ses propres traditions sur la base du rattachement à une civilisation supérieure (œcuménisme) – La participation forcée à une hybridation venue d’en haut (impérialisme) – La sécession d’une culture partielle, qui rompt avec la culture directrice sous prétexte de retour aux vrais sources (Réforme et Renaissance). » (Peter Sloterdijk) – Le premier facteur ressemble fort à notre lamentable conversion à la soi-disant culture américaine.

« La menace à l’indépendance que représente la nouvelle électronique en cette fin de XX° siècle pourrait se révéler supérieure à celle du colonialisme lui-même. Nous commençons à comprendre qu’avec la décolonisation et la montée des  entités supranationales on n’a pas mis le point final  aux relations impériales, mais bien jeté un filet géopolitique qu’on tisse depuis la Renaissance. Les nouveaux médias peuvent pénétrer plus profondément une ‘culture réceptrice’ que n’importe quelle technologie occidentale antérieure. Le résultat pourrait être un immense chaos, une exacerbation des contradictions sociales actuelles au sein des sociétés en développement. » (Anthony Smith – cité par Edward W. Said) – L’envahissement par la médiocrité anglo-saxonne, qu’il est bien emphatique  de qualifier du terme de ‘culture’.

« Une société multiculturelle faite de camps retranchés et d’identités figées, un monde où l’empathie n’existe pas et l’ouverture une faiblesse … Voir l’interdiction violente de ‘l’appropriation culturelle’ … qui prend pour seul critère d’excommunication ce que les gens ‘sont’ biologiquement et historiquement, et non pas ce qu’ils pensent ou font… Conception quasi notariale de la culture, l’idée que les biens culturels, matériels ou symboliques, auraient des propriétaires identifiables, exclusifs et immuables … Que les Allemands seraient tous et toujours des descendants d’Hitler et les Israéliens des héritiers de la Shoa. » (Géraldine Smith – Vu en Amérique et bientôt en France)

« Chaque culture traverse les mêmes phases constitutives que l’homme. Chacune a son enfance, sa jeunesse, sa maturité, sa vieillesse. » (Oswald Spengler)

« Chute d’une culture dans la civilisation … La civilisation commence à donner à toutes les formes de sa culture passée une autre marque, un autre sens, une autre application … La culture (acmé d’une société) se fige, elle devient civilisation … Elle ne produit plus, elle ne fait qu’interpréter … Perte de l’âme de la culture qui l’a engendrée … Elle suppose accompli l’acte de création proprement dit … En général, une époque de culture est dominée par le sentiment de l’honneur, celle de la civilisation par l’argent. » (Oswald Spengler)

« Toute homogénéité trop grande de l’offre culturelle, prise en un sens large, peut être source de tyrannie. » (Monique Canto-Sperber)

« Un ‘classique’ survit à toutes les bêtises ; ça survit à la déconstruction, au post-structuralisme, au féminisme, au modernisme…. » (George Steiner)

« Nous savons maintenant que la qualité de l’éducation dispensée et le nombre de gens qu’elle touche ne se traduisent pas nécessairement par une stabilité sociale ou une sagesse politique plus grandes. Nous comprenons maintenant que les sommets de l’hystérie collective et de la sauvagerie peuvent aller de pair avec … une éthique de la haute culture. Nous savons aussi que des qualités évidentes de finesse littéraire et de sens esthétique peuvent voisiner, chez le même individu, avec des attitudes barbares, délibérément sadiques … Que les rapports entre la culture et la société soient désormais ressentis comme faussés, ou du moins paradoxaux, est un fait nouveau et moralement déconcertant. » (Georges Steiner)

« L’homme de la société hyperindustrielle, c’est-à-dire de la société de contrôle, voit une part toujours plus grande de ses comportements sociaux prise en charge par le système techno-économique, en sorte qu’il se trouve toujours plus dépossédé d’initiatives et de responsabilités, tandis qu’il ne cesse d’être infantilisé (et par là même coupé de ses enfants qui ne trouvent plus en lui aucune autorité) par les industries culturelles qui ont pour fonction de lui faire adopter de nouveaux ‘modes de vie’ qui sont essentiellement des ‘modes d’emploi’ remplaçant et court-circuitant ses savoir-vivre. » (Bernard Stiegler)

« L’humanité s’installe dans la monoculture. Elle s’apprête à produire une civilisation en masse, comme la betterave. » (Claude Lévi-Strauss)

« Lorsque l’arc-en-ciel des cultures humaines aura fini de s’abîmer dans le vide creusé par notre fureur… » (Claude Lévi-Strauss) – L’auteur entendait bien que c’était fait, et irréversible.

« Le potentiel productif d’une culture tient  à ses particularités. Pour que quelqu’un soit producteur il faut, en effet qu’il soit profondément convaincu que ce qu’il fait est non pas meilleur, mieux encore ; convaincu que c’est cela qu’il doit faire, pas le reste. » (Claude Lévi-Strauss) – Voilà pourquoi nous ne produisons plus rien.

« Toute création véritable implique une certaine surdité à l’appel d’autres valeurs, pouvant aller jusqu’au refus, sinon même à la négation. Car on ne peut, à la fois, se fondre dans la jouissance de l’autre, s’identifier à lui et se maintenir différent. » (Claude Lévi-Strauss – Race et culture – sur le multiculturalisme)

« Le parti intellectuels’ affirme dépositaire de la culture et prêche la contre-culture, rend ses arrêts au nom de la morale et proclame la déchéance des valeurs morales. » (Georges Suffert – Les intellectuels en chaise-longue)

« La fameuse ’exception culturelle’’ permet de justifier à peu près toute action politique (et tout privilège) … La symbiose entre l’immense bureaucratie culturelle et les bénéficiaires des largesses que cette bureaucratie dispense … Question de mauvais goût, cette générosité protectrice a -t-elle permis de relever la qualité ? De stimuler la créativité ? » (Ezra Suleiman) – Non, mais d’accroître le degré de servilité certes.

« Il a fallu la finesse, la sobriété, la gaieté, la malice gauloise, l’élégance, l’art et l’éducation du XVII° siècle pour produire un La Fontaine. » (Taine)

« L’extrême difficulté de notre culture à tolérer toute forme de manque. » (Catherine Ternynck)

« Le conditionnement fait des inconditionnels. Le ‘comment’, bien observé et bien manié efface le ‘pourquoi’. Le ‘culturel’, au sens le plus mécanique du mot, abolit simultanément la nature et le surnaturel. » (Gustave Thibon)

« Le manque de culture suffit à frapper de stérilité toutes les données de l’information. Que signifie un événement pris en lui-même, un événement qu’on ne peut pas situer et dont on ne peut pas évaluer l’importance faute de pouvoir le relier à un ensemble de connaissances ? » (Gustave Thibon)

« L’apparition de ce personnage fumeux ‘l’animateur culturel’ (chargé du tintamarre de même signe) aura coïncidé avec la prolétarisation du professeur, le dépérissement des modes de transmission, la dégénérescence des formes de sociabilité et la vacuité intellectuelle des élites sociales. » (Denis Tillinac)

«L’avènement d’une classe culturelle éduquée et nombreuse a créé les conditions objectives d’une fragmentation de la société et provoqué la diffusion d’une sensibilité inégalitaire d’un genre nouveau. Pour la première fois, les ‘’éduqués supérieurs’’ peuvent vivre entre eux, produire et consommer leur propre culture. Autrefois, écrivains et producteurs d’idéologie devaient s’adresser à la population dans son ensemble, simplement alphabétisée, ou se contenter de parler seuls. L’émergence de millions de consommateurs culturels de niveau supérieur autorise un processus d’involution. Le monde dit supérieur peut se refermer sur lui-même, vivre en vase clos et développer, sans s’en rendre compte, une attitude de distance et de mépris vis-à-vis des masses, du peuple, et du populisme qui naît en réaction à ce mépris. À l’échelle d’une classe se produit un phénomène de narcissisation qui mène à une culture d’ordre inférieur parce qu’elle se désintéresse de l’homme en général pour ne plus refléter que les préoccupations d’un groupe social particulier. Le roman, le cinéma sombrent dans les petits soucis des éduqués supérieurs, dans un nombrilisme culturel qui se pense très civilisé mais s’éloigne des problèmes de la société et donc de l’homme ».  (Emmanuel Todd – Après la démocratie)

« Ce qu’il faut craindre et déplorer, c’est la ‘déculturation’, dégradation de la culture d’origine ; mais elle peut être compensée par ‘l’acculturation’ acquisition progressive d’une nouvelle culture … On voit bien la différence entre l’être acculturé, à l’aise dans les deux cultures, et l’être déculturé, qui a oublié sa langue d’origine mais n’a pas appris celle de son pays d’adoption … C’est d’avoir une langue qui est constitutif de notre humanité, non d’avoir telle langue. » (Tzvetan Todorov)

« En matière de culture, je fais mon marché tout seul. Je suis le terrain. Je sais ce qui pousse. » (Roland Topor)

« La technique n’agit que sur la surface de la vie et c’est pourquoi il semble plus facile de l’adopter que de courir le risque de n’être plus maître de son âme … Notion qui consiste à croire qu’en adoptant une technologie étrangère on n’assume qu’une responsabilité limitée … Mais ce changement qui a l’air superficiel, ne le restera pas, et pénètrera en profondeur jusqu’à ce que la culture traditionnelle passe au second plan et que l’ensemble de la culture étrangère se fraye peu à peu un chemin par l’entaille ainsi faite … En Chine, en Corée, au Japon, aujourd’hui, plus d’un siècle après que notre technique occidentale a réussi à s’infiltrer dans ces pays, nous voyons les conséquences révolutionnaires de cette technique sur l’ensemble de la culture de ces pays. Comme les Turcs, ils auraient voulu n’emprunter à la technique occidentale que le minimum nécessaire à leur défense militaire et rien de plus, sans soupçonner les forces secrètes dissimulées dans ce cheval de Troie mécanisé, dont, en plus, l’effet met du temps à se faire sentir … Une religion étrangère agressive sera toujours une menace prise plus au sérieux pour la société à laquelle elle s’attaque qu’une technique étrangère agressive … On peut en déduire qu’un fragment de culture, détaché de l’ensemble et diffusé à l’étranger, rencontre vraisemblablement une moindre résistance et se propage plus loin et plus rapidement que si la culture tout entière était diffusée en bloc … Mais dans les rapports culturels, une chose en amène insidieusement une autre … La puissance de pénétration d’un élément culturel est en général inversement proportionnelle à la valeur culturelle de cet élément. La société attaquée oppose moins de résistance à un élément secondaire qu’à un élément d’importance primordiale, la perturbation sur le mode de vie traditionnel étant moins violente et moins douloureuse (et ressentie moins immédiatement). » (Arnold Toynbee – Le Monde et l’Occident – sur la différence avec laquelle les peuples d’Extrême-Orient (de même en Russie au XV° siècle puis ensuite) réagirent aux intrusions de la civilisation occidentale, du XVI° au XVIII° siècles, la civilisation occidentale leur apparut sous la forme d’une religion étrange, d’où expulsion et rupture, au XIX° siècle, elle survint sous la forme d’une technique étrange (résultat de la révolution industrielle en Occident), d’où acceptation (révolution Meiji au Japon, du Kuomintang en Chine, Pierre le Grand en Russie, Ataturk en Turquie…), d’autant plus que des revers militaires subis leur dictaient la voie à suivre – C’est un peu la version internationale, mondiale, de la subversion par la culture chère à Antonio Gramsci.

« Le ricanement a remplacé la culture. » (Philippe Val)

« L’idée même de pluralisme des cultures … s’est développée au sein d’une culture spécifique, la culture occidentale. » (Gianni Vattimo) – On pourrait même en être fier s’il nous restait quelque fierté.

« Civilisation, culture, tradition, sont des notions voisines au point d’être interchangeables dans le langage courant. La culture est première dans l’ordre chronologique de la fondation. Elle se rapporte à la permanence des mentalités profondes. Elle est créatrice de sens. La civilisation est une culture qui a reçu une forme historique, créatrice d’une ensemble de qualités propres dans l’ordre matériel, intellectuel, artistique et moral. La tradition est l’âme d’une culture et d’une civilisation. » (Dominique Venner) – C’est bien pourquoi, extirper la tradition, c’est tuer et la civilisation et la culture.

« Une culture tombe malade à chaque fois qu’elle se laisse envahir par un processus de désymbolisation. A chaque fois que, renonçant au sens, à la pensée, à l’intériorité, elle se précipite hors de la pensée, dans la technique ou le mythe, soit dans un rapport de violence ou de fusion avec le monde. Une culture, en revanche, guérit à chaque fois qu’elle rentre dans un processus de symbolisation en s’efforçant de faire vivre un sens, à travers une parole, une œuvre, un concept ou une expérience intérieure … La profondeur qui consiste à ne pas chercher à savoir, mais à vivre avant de savoir … C’est la vie vécue de l’intérieur qui fait jaillir du sens et non un sens donné en soi de l’extérieur qui crée sa direction propre …Osons vivre, osons vouloir, et tout aura du sens … A-t-on la connaissance d’une chose parce qu’on en a l’idée ? Ne connaît-on pas une chose quand, justement, on n’en a pas simplement l’idée mais l’expérience ? … Au lieu d’être englué dans la présence captivante des choses, l’homme a conquis la possibilité de mettre celles-ci à distance grâce au symbole qui permet d’ouvrir tel signe, telle image sur une autre signe, une autre image, afin de donner à voir au-delà des choses. »   (Bertrand Vergely – interprétant Ernst Cassirer)

« ‘Il s’agit de briser les derniers tabous’. Le spectacle de l’abjection est constant, mais il est devenu politiquement incorrect de le contester, et ceci au nom de la liberté d’expression. »  (Paul Virilio – citant ? et le mot d’ordre moderne bénissant tout ce qui peut aider à détruire)

« Peut-être l’engouement actuel pour la technique et pour le sport n’est-il qu’une façon de compenser par des certitudes mesurables la bouillie pour les chats dans laquelle nous fait vivre la tolérance culturelle. » (Vladimir Volkoff)

« Le peuple ne refuse pas notre culture parce qu’elle est trop haute, mais parce qu’elle est trop basse. » (Simone Weil)

« Qu’est-ce que la culture ? Formation de l’attention. » (Simone Weil)

« Le degré d’instruction d’une société ne définit pas son niveau intellectuel… Il peut exister une société supérieurement instruite mais faiblement intellectuelle. Nous possédons beaucoup de savants, de fonctionnaires et d’hommes de lettres hautement instruits, mais absolument pas intellectuels et même hostiles à tout ce qui est intellectuel … Jadis, l’instruction chez nous allait de pair avec l’intellectualité, la spiritualité, et je dirais même la moralité. Aujourd’hui, au contraire, l’instruction apporte tout à l’homme soviétique, sauf le niveau intellectuel, culturel, et un certain développement moral de l’esprit que l’on pourrait attendre. L’instruction maintenant mène au professionnalisme et à la stricte défense de petits intérêts professionnels. » (Alexandre Zinoviev) – Ecrit dans les années soixante-dix, du temps de l’homme soviétique. Et chez nous, qu’apportent les écoles de management, les Hec, Essec et autres ENA… ? Voir l’inculture des produits qui en sortent.

« Ce n’est pas le champ qui nourrit, c’est la culture. » (proverbe)

« ‘Tout se vaut’, slogan du relativisme, permet de sortir de la contradiction entre deux ordres de valeur apparemment irréconciliables, l’égalité et la culture. Il suffit d’affirmer que la culture est partout. » (?)

« La culture ne se consomme pas, elle s’assume. » (?)

« La lecture fait l’homme complet, l’éloquence fait l’homme préparé, la rédaction fait l’homme exact. » (?)

« L’un des traits les plus caractéristiques de notre culture est l’omniprésence du baratin. » (?)

« Un esprit cultivé se définit beaucoup plus par ce qu’il peut recevoir que par ce qu’il contient. » (?)

« L’acquisition d’une vraie culture est soumise au temps. Autant dire que de nos jours ! ‘Je veux ma culture tout de suite’. » (?)

« On se demande comment Jacques Chancel a su captiver son auditoire pendant un demi-siècle sans avoir recours à ces procédés comiques que sont le pipi, le caca et le cucul. Heureusement les heures les plus noires de la culture télévisuelle sont derrière nous. » (?)

Quelques considérations sur la culture générale extraite de l’ouvrage de Normand Baillargeon, Liliane est au lycée, titre humoristique pour L’Iliade et l’Odyssée d’Homère ainsi que l’avait compris un enfant !

 « Culture dominante ? La culture générale telle qu’on la promeut généralement n’est-elle pas en effet une culture générale où les accomplissements de la culture populaire sont arbitrairement ignorés, voire méprisées ? … Il est de bon ton de citer les griefs énoncés contre elle : classicisme, sexisme, racisme, élitisme, occidentalocentrisme et ethnocentrisme plus les deux cultures, quelle part à la culture scientifique de base ? … On est tenté de dire que ce sont moins des savoirs relatifs à certains contenus culturels qui caractérisent la personne qui détient de la culture générale que cette seconde nature qui fait que l’on sait d’emblée ce qui convient et ce qui ne convient pas. Cette seconde nature vous apprend comment il faut se tenir dans le monde (est-il permis d’évoquer le football, les films de Woody Allen, les westerns spaghetti, en telle compagnie et, si oui, que convient-il d’en dire là où on peut en parler ?) … C’est se doter des repères ou de la sensibilité qui permettent ou non instantanément de s‘y retrouver dans une classe sociale et de s’y sentir chez soi … Savoir ce qu’il faut dire, sentir et penser sur une quantité de sujets … En somme curieux paradoxe, elle vous dispense de penser … Menaces à la culture générale : – Le divertissement médiatique, cocktail abrutissant,  annihilant l’envie de lire, mettant les spectateurs à la merci des annonceurs – La tentation du  raccourci, façon ‘digest’ – Internet contient certes tout, donc il suffit de développer la faculté d’y chercher, de questionner, de critiquer, de synthétiser, de former des têtes bien faites. Certes oui. Mais sans un riche bagage de connaissances, il n’est pas de pensée critique, créatrice, les faits sont nécessaires mais insuffisants. » (Normand Baillargeon)

Ci-dessous ,extraits du livre de Chantal Delsol, L’âge du renoncement ; placés par défaut à cette rubrique Culture 180, 1

  « La question ‘Comment bien vivre ?’ se substitue à la question ‘Qu’est-ce qui est vrai ?’ … La rupture contemporaine ne nous fait pas passer de la religion au nihilisme, mais de la religion transcendante à la quête de la sagesse, ou du monothéisme au paganisme … Le sacré ne disparaît pas ; il descend … de la transcendance à l’immanent global … Les Stoïciens occidentaux … fondaient le bien moral sur l’utilité et non sur la connaissance d’un bien aléatoire (nous y retournons) … « Depuis la Renaissance s’établit peu à peu la souveraineté de l’utile … Le moment postmoderne marque le remplacement consommé du vrai par l’utile … Ayant abandonné la quête et les certitudes de la vérité, nous sommes tout naturellement retournés dans le monde de l’utilité sociale, qui est le monde naturel de toutes les cultures dans le temps et dans l’espace … La pensée auparavant toute entière tendue vers le futur se redéploye à présent vers les origines … Le vide d’espoir qui creuse le moment contemporain est un double vide. L’espoir s’est effiloché des deux côtés par où il passait. Après avoir évincé l’attente messianique, la croyance dans le progrès indéfini … s’est effacée … Sans extérieur, le monde est voué à la répétition (du temps circulaire) … Ce n’est pas pour rien que la philosophie postmoderne appelle sa pensée ‘déconstruction’ … déconstruction de la structure, des architectures de sens, décomposition, désublimation retrouvant la pensée atomiste des Stoïciens et de sagesses orientales … ‘Là où les choses ont une valeur apparente trop grande, les dénuder, bien voir leur vulgarité, leur enlever tous les détails dont elles se parent’ (Marc-Aurèle) … Nous sommes en train de passer en sens inverse du système de Bodin à celui d’Althusius, d’un monde structuré en entités politiques définies, robustes et comptée, à un monde déstructuré nanti d’innombrables entités superposées, vulnérables et fragiles. Une décomposition politique qui accompagne celle des monuments de la pensée et lui fait écho … L’individu peut se féliciter de sa liberté de choix mais au prix des significations qui se sont  perdues au passage. Il va superposer le clocher au minaret de la même manière qu’il superpose la croyance dans le Christ et la croyance en Bouddha. Il vivra dans un Bric-à-brac et non dans un monde au sens d’un cosmos … Plus d’ensembles, seulement des éléments … Les architectures de sens ont été remplacées par un supermarché du sens, sorte de bazar géant où l’on trouve tout et le reste, et où l’on achète ce qui est utile dans la situation … Ni nihilisme moral, ni chaos, mais monde à structures faibles, évanescentes et aisément remplaçables … De prométhéen, le ‘moi’ va accomplir un mouvement de retrait non pour se dissoudre, mais pour se réfugier dans une bulle personnelle, un lieu à la fois de renoncement et de discernement, une thébaïde … La crainte de l’avenir ne provoque pas notre satisfaction. Bien plutôt, nous nous retrouvons hagards devant ce temps vide de promesses … révoltés … hébétés … Nous ne pourrons pas longtemps nous ouvrir au panthéisme sans bientôt récuser l’inaliénable dignité humaine … courir au consensus sans bientôt désintégrer la démocratie … ruiner l’idée de progrès sans promouvoir ce pragmatisme qui nous dérange … continuer à défendre l’idée d’égalité en prônant des sagesses dont nous ignorons encore le fatal élitisme. Nous vivons aujourd’hui une situation intermédiaire en profitant encore des bienfaits d’un monde que nous sommes en train d’invalider. »

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