635,1 – Réalité / Apparences ; Sens ; Illusions, Rêves, Songes

– Réel, qui existe d’une manière autonome, qui n’est pas un produit de la pensée.   

– Depuis la dictature du politiquement correct, il convient d’adoucir ou même de nier tout  le réel en n’appelant plus un chat un chat (Boileau). Toute idéologie impose sa ‘réalité’, c’est-à-dire une réalité qui n’existe pas, essentiellement par le double moyen du mensonge obligatoire et systématisé doublé de la vacuité de la langue de bois et par l’interdiction sanctionnée d’évoquer la réalité telle que réellement vécue par les sens, la perception, la connaissance, la fréquentation…  L’idéologie dominante aujourd’hui est, en ces domaines, plus puissante que les idéologies totalitaires soi-disant honnies. « Le réel ne passera pas, tel aura été le mantra de ces années là. » (Elisabeth Lévy – sur l’avant terrorisme) – Mais qu’on se rassure, en tous domaines le réel est toujours aussi pourchassé par nos élites. Après l’élection présidentielle de 2002 qui vit la victoire d’un ensemble hétéroclite uni par sa seule détestation de tout ce qui pouvait remettre en cause ses obsessions et ses privilèges, Philippe Muray écrivait que le réel était reporté à une date ultérieure – « Rien de plus fragile que la faculté humaine d’admettre la réalité … Si le réel insiste et tient absolument à être perçu, il pourra toujours aller se faire voir ailleurs. » (Clément Rosset).

– Ce que nous saisissons c’est notre vision de quelque chose qui nous est externe. Voyons-nous tous la même chose ? Qui peut me dire que le monde est fait comme je le vois. Il nous est connu par les sens, mais par les sens de chacun (voir : 155, 1, fin des remarques), et la sensation est incommunicable.

– Une apparente contradiction de plus : c’est la femme qui, cependant plus portée à la rêverie, s’avère le plus souvent celle qui ramène l’homme au sens des réalités, l’extrait des chimères qu’il chevauche si volontiers, celle qui se révèle la plus réaliste. Ce pourquoi aussi elle s’avère aussi redoutable combattante dans les conflits de couple, notamment. Etrange dualité d’un être aérien avec les pieds fortement ancrés au sol ; la maternité peut-être ?

– Ce qui n’empêche cependant pas certaines d’entre elles d’énoncer sentencieusement n’importe quelle énormité  sur des sujets certes plus éloignés de leur intérêt et de s’abriter à la moindre rectification sous la couverture de : Je pensais que, J’avais entendu dire…

– On peut passer 30 ans de sa vie, et même plus, à côté de ses pompes, par l’étrange attitude qu’on appelle : déni de réalité. Soit le refus inconscient de voir l’évidence d’une situation, d’un contexte, ce par crainte d’affronter, de s’avouer, quelque erreur initiale, des lacunes persistantes ; stratégie de fuite par peur instinctive de se confronter à des problèmes personnels. Ne mésestimons pas notre capacité d’occulter nos fautes, de les ensevelir … S’il nous arrive de pratiquer, et en complète bonne foi, l’oubli complet et parfait d’un épisode existentiel désagréable, d’une action, réaction ou initiative que nous avons eu, parfaitement déplacée et nocive alors, et dont nous n’avons pas lieu d’être fier, il peut même nous arriver, pour conforter ce déni, de nous construire une autre réalité, différente, purement imaginaire, et ce en toute bonne foi.

-Marchons, en laissant en faisant le vide en nous (l’Esprit ne saurait surgir dans un cerveau encombré), en éloignant provisoirement ce confort faux et artificiel, pour que survienne à l’improviste sans lui opposer nos barrières protectrices, l’évidence du réel. Prenons conseil.

« ‘Il faut dire et penser que ce qui est est, car ce qui existe existe, et ce qui n’existe pas  n’existe pas. Tu ne forceras jamais  ce qui n’existe pas à exister’ … L’homme est condamné à la réalité, aux limites de l’existence … Il ne peut refuser le présent au profit du passé, l’ici au profit de l’ailleurs … Exister revient à être soi-même et soi maintenant, ni autre, ni avant, ni après, ni ailleurs … Le surprenant étonnement de Freud à constater que l’Acropole et Athènes existent. Toute réalité en vient à surprendre dès lors qu’elle se présente en direct en son lieu et en son temps. » (Clément Rosset – sur l’existence, l’être et la réalité – citant Parménide – L’école du réel)

– « Le réel, c’est ce qui résiste. » (?)

– « Le réel c’est ce contre quoi on se cogne. » (Jaques Lacan) – Les pieds d’un lit…

« La réalité rigoureuse à étreindre. » (Arthur Rimbaud)

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« Le construit ne supporte plus le donné, considéré comme une contrainte insupportable. Alors que les deux se complètent : le construit se fait à partir du donné, le culturel à partir du naturel, qu’il faut accepter comme tel. » (Charles-Henri d’Andigné) – Quel manque d’ambition. On ne peut plus délirer ! Ainsi, par exemple, un homme, un chien, serait différent d’une femme, d’un chat, d’un éléphant, mais où va-t-on ?

« L’illusion la plus dangereuse est celle qui nous fait croire que la réalité nous est d’autant mieux connue qu’elle est en elle-même plus connaissable et plus intelligible. » (saint Thomas d’Aquin)

« Quand Nietzsche appelait l’ère moderne: ‘L’ère (ou l’école) du soupçon’. Il voulait dire qu’à partir de Descartes au moins l’homme n’est plus sûr de rien, pas même de sa réalité … Mais ce n’est qu’à la fin du XIX° siècle que la conviction de ne pas détenir la vérité s’est installée en tant qu’opinion courante parmi les gens éduqués. » (Hannah Arendt)

 « C’est la présence des autres voyant ce que nous voyons, entendant ce que nous entendons qui nous assure de la réalité du monde et de nous-mêmes. » (Hannah Arendt)

« Aujourd’hui, la liberté se définit dans nos sociétés par le refoulement du principe de réalité et la libération du principe de plaisir, la libération ‘d’eros’. » (Raymond Aron)

« Si je proclame le phénoménisme, c’est-à-dire la réduction de la réalité à des phénomènes du dehors, un génie malin place devant mes yeux un miroir qui me renvoie ma propre image ; si je proclame l’idéalisme, la réduction des phénomènes à la pensée pure et à l’état de conscience, le même génie place devant mes yeux une glace transparente à travers laquelle je vois le monde se peindre. Dans les deux cas mon essai de synthèse échoue devant le déroulement de l’expérience sensible, et j’ai le sentiment de n’y pouvoir échapper que par le secours d’un artifice logique, d’un compromis, dont je suis moi-même l’artisan. » (Lucien Arréat)

« Rapport au monde imagé et abstrait puisque, avertis de tout, nous ne connaissons en général de ce qui nous est dit que ce qui nous en est dit, nous habituant progressivement à discuter de textes et d’images quand nous pensons parler de réalité … Ce rapport à la réalité est médiatisé (tous les faits aujourd’hui sont médiatisés, au sens où ils sont transmis et présentés par les médias ; l’expression ‘fait médiatisé’ est devenu un pléonasme). La médiation de l’image suscite des effets d’abstraction et même d’irréalité spécifiques lorsque des panneaux et des croquis se substituent sur le bord de l’autoroute aux paysages et aux curiosités que nous pourrions voir si nous en sortions. » (Marc Augé)

« La réalité est divinement indifférente. » (Richard Bach)

« Un être privé de la fonction de l’irréel est un névrosé aussi bien que l’être privé de la fonction du réel. » (Gaston Bachelard)

« C’est en méditant l’objet que le sujet a le plus de chances de s’approfondir. » (Gaston Bachelard)

« La réalisation passe la réalité. Cette primauté de la réalisation déclasse la réalité ; Il faut forcer la nature à aller aussi loin que notre esprit. » (Gaston Bachelard)

« C’est le réel et non la connaissance qui porte la marque de l’ambiguïté. » (Gaston Bachelard)

« C’est toujours le même problème avec le réel, on ne l’aime pas, il est toujours trop comme ci, pas assez comme ça, il est décevant. Sauf que c’est le réel … Il s’en fout de vos rêves, de vos délires. » (Olivier Bardolle)

« La mise en cause de la réalité ne vient plus de la pensée philosophique, mais de la Réalité Virtuelle et de ses techniques. Alors que la pensée mettait fin au réel en pensée, les nouvelles technologies y mettent fin en réalité … Le déni de réalité, qui était dans la dimension philosophique une opération mentale, devient avec les technologies du Virtuel une opération chirurgicale. » (Jean Baudrillard)

« ‘Le réel n’existe plus’ … La postmodernité où règne la simulation, soit tous les modes de représentation culturels qui simulent la réalité : la télévision, le cyber espace, les effets spéciaux, les jeux vidéo, la réalité virtuelle … La reproduction sociale a remplacé la production … ‘Extermination du réel par son double’. » (Jean Baudrillard – par Alain de Benoist)

«Le virtuel, ultime prédateur et déprédateur de la réalité …  La réalité est devenue la proie de la réalité virtuelle … L’effacement de Dieu nous a laissé face à la réalité. Qu’en sera-t-il de l’effacement  de la réalité ? … Peut-être préférons-nous être dominés par des machines que par des hommes, peut-être préférons-nous une domination impersonnelle et automatique … Dessaisissement, indifférence sans illusion à une économie mentale proche de celle des machines ; elles aussi parfaitement irresponsables … Ce n’est pas un choix, il n’y a plus assez d’énergie pour cela … La violence faite à l’image : son exploitation à des fins de documentation, morales, politiques, publicitaires … l’image de synthèse où le référent n’existe plus,  la multiplication des images sans référent, la déferlante numérique…  (Jean Baudrillard – sur la baisse tendancielle du taux de réalité – comme la profusion de l’information correspond à une baisse tendancielle du taux de connaissance)

« La déréalisation de nos vies, la perte, frénétiquement imposée, du simple sens de ce qui est. Condition de la survie très provisoire d’une modernité … Le processus de déréalisation est processus d’inversion du réel, conduisant à affirmer en permanence le contraire de ce qui paraît pourtant devant les yeux de tout un chacun. » (Matthieu Baumier) 

« La réalité n’est pas une construction artificielle ; mais elle ne nous saute pas pour autant aux yeux : il faut pour la voir une culture qui nous ait appris à la contempler. » (François-Xavier Bellamy) – Vu le niveau de la culture actuelle, on comprend que toute réalité échappe, d’autant plus que média et autorités s’entendent pour la cacher.

« Contre les projets ambitieux, au nom d’un lendemain incertain, la ‘réalité’ a acquis un véritable statut ontologique : elle est maintenant la seule vérité, nos actes sont dictés par elle, le rêve est condamné … Le réalisme démocratique et anti-utopique est une vision totalisante ‘ici et maintenant’. » (Miguel Benasayag)

« ‘Ils sont là quelques justes qui m’empêchent de dormir’ disait le réaliste de ses anciens docteurs. » (Julien Benda) – Du temps où on respectait des valeurs.

« Lorsque Hegel affirme ‘Le réel est rationnel’, les intellectualistes traduisent par : ‘C’est la réalité qui doit se rendre à la raison’ ; les pragmatiques par : ‘C’est la raison qui doit s’adapter aux réalités’. » (Alain de Benoist) – sur les différences entre Latins et Anglo-Saxons)

« Le réalisme est dans l’œuvre quand l’idéalisme est dans l’âme, et c’est à force d’idéalité seulement qu’on reprend contact avec la réalité. » (Henri Bergson)

« Les idées vraies et fécondes sont autant de prises de contact avec des courants de réalité … Il ne s’agit pas simplement de s’assimiler les faits marquants ; il en faut accumuler et fondre ensemble une si énorme masse qu’on soit assuré, par cette fusion, de neutraliser les unes par les autres toutes les idées préconçues et prématurées … Ainsi seulement se dégage la matérialité brute des faits connus. » (Henri Bergson)

« Réaction à l’insignifiance (avènement de discours et de pratiques qui ne signifient plus rien, qui ne renvoient plus à rien), retour de la réalité. » (Harold Bernat)

« L’option philosophique qui est la base du système (système totalitaire) porte un nom … l’idéalisme. Il postule qu’il n’y a pas de réalité en dehors de la conscience ; ‘Je vous dis, Winston, que la réalité n’est pas extérieure. La réalité existe dans l’esprit humain et nulle part ailleurs’. » (Alain Besançon – citant Georges Orwell et 1984) – Refrain trop entendu.

« Le réel rempart contre l’illusion, l’auto-intoxication à quoi sont en train de céder les sociétés occidentales éprises d’une ‘réalité’ euphorisante qui viendrait aplanir les aspérités de l’existence humaine. » (Françoise Bonardel)

« Voir les choses comme elles sont et non comme on voudrait qu’elles soient. » (Bossuet)

« Pour Sénèque, si nous pouvons parvenir à la sagesse, c’est en apprenant à ne pas aggraver l’obstination du monde par nos propres réactions : accès de colère, apitoiement sur soi-même, anxiété, amertume, présomption, etc. … La tâche de la philosophie est de préparer pour nos désirs l’impact le plus doux possible sur le  mur inébranlable de la réalité. » (Alain de Botton)

« L’information a désormais pris nettement le pas sur la réalité et a fini par devenir plus réelle qu’elle … Ce que constate Karl Kraus est que l’humanité avait en un sens plus besoin d’un découvreur du pôle Nord que de la découverte elle-même … ‘Ce monde aime les faits accomplis et il va dormir en toute tranquillité en se disant : soyons heureux d‘avoir un découvreur du pôle Nord’. » (Jacques Bouveresse – sur Karl Kraus – à propos d’une nouvelle de 1909)

« Surréalisme. Automatisme psychique pur par lequel on se propose d’exprimer, soit verbalement, soit par récrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale. » (André Breton – définition du surréalisme –  Manifeste 1 du surréalisme ) 

« La surréalité, résolution future de deux états en apparence si contradictoires que sont le rêve et la réalité. » (André Breton – Manifeste 1 du surréalisme )

« En l’absence de tics contractés au commerce des autres, l’homme peut spontanément se prononcer sur un petit nombre de sujets ; il n’a pas besoin pour cela de  ‘tourner sept fois sa langue’ ni de se formuler à l’avance quoi que ce soit. Qui a pu lui faire croire que  cette faculté de premier jet n’est bonne qu’à le desservir ? … Il n’est rien sur quoi il devrait se refuser à parler, à écrire. S’écouter, se lire, n’ont d’autre effet que de suspendre l’occulte … Je ne me hâte pas de me comprendre. Si telle ou telle phrase de moi me cause une légère déception, je me fie à la phrase suivante pour racheter ses torts, je me garde de la recommencer ou de la parfaire. Seule la moindre perte d’élan pourrait m’être fatale … Ce n’est pas à moi de favoriser des mots aux dépens d’autres. C’est à une mystérieuse compensation d’intervenir, si elle intervient. » (André Breton – Manifeste 1 du surréalisme )

 « La réalité tend à être ce qui est constitué comme tel par le champ politico-journalistique et ce qui est important pour les médias tend à devenir important en soi pour comprendre ce qui est également désigné par les médias comme étant les grands problèmes de société de notre temps. » (Patrick Champagne)

« Depuis quand les images et les reflets prouvent-ils quelque chose contre la  réalité des objets et de la lumière ? » (Père Teilhard de Chardin)

« Depuis quand les images et les reflets prouvent-ils quelque chose contre la réalité des objets et de la lumière ? » (Père Teilhard de Chardin)

« Notre illusion relève moins de l’erreur de perception, de confusion entre l’imaginaire et le réel, de croyance fallacieuse, comme on l’entend habituellement … Les illusions se rapportent ici aux fausses vérités qui nous arrangent, nos songes et nos mensonges qui nous offrent un ‘substitut hallucinatoire aux satisfactions’ qui se dérobent à nous dans la réalité présente … Dans cet ordre d’idées, selon Clément Rosset, le processus d’illusion s’enclenche lorsque la réalité devient déplaisante. Dans ce jeu de tromperie, de création d’une fausse réalité qui nous arrange, nous sommes à la fois victimes et coupables, dupes et responsables… nous ne traiterons jamais les causes qui nous dérangent. » (Louis Chauvel – La spirale du déclassement)« La réalité c’est ce qui, quand on cesse d’y croire, ne s’en va pas. » (Philip K. Dick)

« Les gens les plus intelligents surtout s’ils sont imaginatifs, tombent facilement dans une erreur fâcheuse ; celle de croire que plus une idée est générale au sens d’étendue, plus elle est profonde au sens d’importante et véridique. C’est toujours la même erreur initiale : parce que l’on croit à la généralité de la fiction plutôt qu’à la précision de la réalité. » (Chesterton)

« Nous n’attribuons quelque réalité à autrui que dans la mesure où nous en découvrons en nous-mêmes. » (Emil Cioran)

« Le réel me donne de l’asthme. » (Emil Cioran)

«  La grande désertion du réel …  aura aussi signifié la montée de la barbarie. » (Jean Clair)

« Si les dénominations ne sont pas correctes, les discours ne sont pas conformes à la réalité, et si les discours ne sont pas conformes à la réalité, les actions entreprises n’atteignent pas leur but. » (Confucius – cité par Jean-Claude Michéa) – Tel est le résultat de l’accumulation actuelle de mensonges (par action et par omission).

« Le propre d’un régime idéologique est de se radicaliser au moment où on le conteste … Moins le réel adhère à la doctrine, plus cette dernière doit le désavouer, en construisant un monde parallèle qui double la société existante et doit l‘éclipser. » (Mathieu Bock-Côté) – Comme on le voit aujourd’hui en France où le gang ne peut continuer à mentir qu’en usant de procédés totalitaires – « Pousser un homme à répéter que 2 + 2 = 5 consiste à le briser mentalement. » (même auteur)  – Avantage annexe du totalitarisme.  

« Là où le monde réel se change en simples images, les simples images deviennent des êtres réels, et les motivations efficientes d’un comportement hypnotique. » (Guy Debord)

« Les résistants au totalitarisme insistent sur le fait que le premier acte de dissidence consiste à oser décrire la réalité telle qu’elle se présente, telle qu’elle est vécue chaque jour … préparer la destruction de la doxa, qui ne vit que par son mensonge … Notre contemporain a organisé tout un monde d’esquive … Où on ne parle que des gens beaux et bien portants, où la moindre ride … où la mort est cachée et la maladie … où nombre d’adultes, déjà presque rassis, passent leur temps à faire les idiots sur des plateaux, où les noms des réalités fâcheuses et embarrassantes ont été supprimés et remplacés par des euphémismes. » (Chantal Delsol) – Les pouvoirs ainsi règnent sur des aveugles, des sourds et des lâches. Rires de télévision, rires de cadavres.

« Quand une réalité est insupportable à l’opinion dominante, il est interdit de la prononcer. Chacun doit faire comme si le contraire était vrai (procès d’un parlementaire pour avoir dit qu’un couple d’homosexuels ne pouvait pas procréer). Puisqu’un jour ce sera possible, ‘tout étant possible’, le discours ne doit pas refléter la réalité présente, mais la réalité future, et même il peut la faire advenir ! Il est non seulement faux, mais meurtrier pour la démiurgie présente, de prononcer des impossibilités de cette sorte … A force de mensonges officiels répétitifs et imposés, qu’est-ce qui est réel finalement ? … Monde déjanté … Nous n’aimons pas la réalité qui se donne. Nous n’aimons que la réalité inventée par nous selon nos désirs. »  (Chantal Delsol)

« Si vous le permettez, je vais vous montrer le bout d’un tunnel. Rares sont ceux qui dans le réel ont vu le bout d’un tunnel ! D’ailleurs, dans un tunnel, il n’y a que le bout d’intéressant ! » (Raymond Devos)

« La réalité c’est ce qui, quand on cesse d’y croire ne s’en va pas. » » (Philip K. Dick)

« Pour affronter une réalité mouvante, on a besoin de concepts stables. Pour affronter une réalité complexe, on a besoin d’idées simples. » (Jean-Marie Domenach) – « Face à la masse  et à la vitesse des informations, il est nécessaire de prendre du recul, de distinguer l’essentiel du superflu, de savoir trier et hiérarchiser. » (Jean-Pierre Le Goff) – Comme nos dirigeants n’ont plus ni concepts (stables ou pas) ni idées (sauf celles de garder leurs privilèges), il n’est pas surprenant que la réalité leur échappe complètement.

Les trois critères de la réalité selon Emile Durkheim : « l’objectivité, l’extériorité et le pouvoir de sanction. »

« La seule réalité effective qu’il (l’homme moderne) rencontre est celle de son écran de télévision. Tout ce qui passe dessus et qu’il prend pour réel n’est jamais qu’un pointillisme de signaux électriques. Mais il le prend pour la réalité effective … cette réalité étant par ailleurs infiniment surévaluée par rapport à celle que l’on peut vivre effectivement. C’est ce qui est montré à la TV qui devient la réalité importante, ce qui est vécu n’a plus d’intérêt … Je ne puis strictement rien sur ce monde artificiel, il se fait hors de moi … sans responsabilité, sans action, sans dialogue, sans pouvoir … Nous ajoutons foi à ce qui passe par ce moyen, nous recevons nos valeurs de ce spectacle. » (Jacques Ellul)

« Nous considérâmes à nouveau les concepts de notre cerveau du point de vue matérialiste comme étant les reflets des objets réels, au lieu de considérer les objets réels comme les reflets de tel ou tel degré du concept absolu. » (Friedrich Engels)

« Le chef pervers, c’est celui qui ne voit la situation qu’à travers des plans, des programmes, des indicateurs économique et sociaux qu’il a élaborés. La réalité doit se conformer au modèle construit. Si elle est différente, ce n’est pas le modèle qui est inexact, c’est la scène du réel qui se trompe … Et il ne peut en être autrement pour lui puisqu’il possède le ‘savoir’ … C’est lui qui peut définir ce dont l’autre a besoin … quel genre de vie il doit mener … Prenant en charge le destin des autres en contrôlant toutes les sources d’information et les réseaux de décision, c’est-à-dire en les mettant en situation d’aliénation totale … la vérité c’est la technologie dans tous les domaines, la ritualisation de toutes les conduites … Tous les aspects de la vie seront envahis par le calcul … le résultat étant un produit humain standardisé, rationalisé, systématiquement surveillé … Le pouvoir pervers, c’est celui de l’économie comme seule réalité vitale, celui de la réification des rapports humains … C’est un pouvoir serein, sans sentiment de culpabilité, scrupuleux (comme Eichmann) … la démocratie sera la règle des sociétés perverses … n’acceptant pas la division, visant l’uniformité, la résolution anticipée des conflits, la suppression des différences dangereuses. » (Eugène Enriquez)

« Pensez-vous que le retournement de la réalité en image tient à ce que les hommes n’ont plus à sortir de chez eux pour aller vers l’extérieur ? » (Raphaël Enthoven)

« La réalité récalcitrante finira bien par obéir à la juste conscience, pourvu qu’on chauffe suffisamment les gens, continue manifestement d’être le credo de la gauche, toute désorientée, ce en flagrante contradiction avec ses pères fondateurs, et en dépit de la faillite retentissante qu’ont valu au socialisme les mensonges dont il s’est lui-même bercé pendant des décennies. » (Hans Enzensberger – phare littéraire de la gauche, mais allemande !)

« Ce qui trouble les hommes, ce n’est pas la réalité, mais les opinions qu’ils s’en font. » (Epictète)

« Sans doute notre temps préfère l’image à la chose, la copie à l’original, la représentation à la réalité, l’apparence à l’être. Ce qui est sacré pour lui ce n’est que l’illusion. » (Ludwig Feuerbach) – Dés 1841 !

« L’abrogation du monde réel par la bien-pensance. » (Alain Finkielkraut)

« Voici venu le temps où chacun est à même de devenir ce qu’il veut : l’homme, une femme ; la femme, un homme, et pourquoi pas les deux ? Par la grâce de la technique ‘le noyau de l’impossible à transformer s’érode chaque jour’. Il n’y aura bientôt plus de réalité distincte, seulement des changements, des passages, des hybridations, d’incessantes métamorphoses. » (Alain Finkielkraut – citant Jean-Claude Milner)

« Nul n’aborde le monde avec des yeux absolument neufs. Les mots précèdent les choses ; les récits, les événements … On arrive sur scène en ayant déjà répété. On a des répliques et des personnages plein la tête, mais le texte de la pièce ne correspond qu’exceptionnellement à celui que nous soufflent le rêve, la sagesse, la mémoire, l’histoire et toutes les pensées qui battent la campagne ; on est, le plus souvent, à côté de la plaque, on se fourvoie, on fait faux bond à cela même que l’on croit et que l’on veut le plus ardemment rejoindre. Le monde est indocile. La réalité excède perpétuellement l’image qu’on en forme ou l’idée qu’on s’en fait. Les circonstances les plus décisives n’ont presque jamais la tête de l’emploi. » (Alain Finkielkraut – commentant Lord Jim de Joseph Conrad)  

« Si la réalité ne se conforme pas au discours, eh bien, c’est la réalité qu’il faut changer ! » (Jean-Paul Fitoussi) – Médiocrité des performances du système : à l’Est jadis, nos pays ne sont pas suffisamment communistes, à l’Ouest, nos pays ne sont pas suffisamment libéraux (au sens du libéralisme économique)

« Au-delà d’un certain seuil mimétique, l’objet de la réalité disparaît. » (René Girard)

« Le vrai but des préciosités déliquescentes de notre fin de siècle (le XX°), l’ambition suprême du postmodernisme et autres déconstructions, c’est d’éliminer une fois pour toutes le réel, de le dissoudre, de le liquider, de le vaporiser. » (René Girard) – Le rêve des élites dominantes, ainsi la voie est libre pour faire tout avaler.

« Les plans du pouvoir ne correspondent pas à la réalité, encore moins la reflètent-ils puisque le pouvoir tient justement à faire plier la réalité jusqu’à ce qu’elle réponde aux plans. » (André Glucksmann)

« Les médias ont à leur disposition des moyens autrement efficaces que le mensonge pour cacher la réalité : il leur suffit de ne pas la montrer … Ce n’est pas la vérité qui est cachée, c’est la réalité. » (Christian Godin)

« Un conformisme individualiste de masse se présentant sous les traits de l’anticonformisme, de la fête et de la rébellion qui vit à l’abri de l’épreuve du réel et de l’histoire tout en se prenant pour le centre du monde. C’est tout un monde à part qui s’est créée… » (Jean-Pierre Le Goff) – Le monde angélique, fictif, virtuel des bobos.

« Dans l’univers flottant où la réalité tend à s’évaporer dans un flux ininterrompu d’images, de mots, de commentaires qui s’étalent à l’infini, peut-on encore faire la part des choses entre le réel et cette bulle imagière et langagière qui le recouvre aussitôt. » (Jean-Pierre Le Goff)

« Rien n’est plus trompeur que le sentiment d’avoir une représentation neutre de la réalité, comme si les mots ne venaient qu’après coup pour dépeindre la situation qui tombe sous notre regard … ‘L’homme se comporte comme s’il était le créateur et le maître du langage, alors que c’est celui-ci au contraire qui est et demeure le souverain’ (Martin Heidegger) … Il nous semble que notre pensée précède le langage, qu’elle trie les mots … mais nous cherchons des mots avec d’autres mots. Le langage est la matrice et non l’outil de la pensée … La principale menace qui entraverait toute possibilité de désaliénation provient d’une acceptation sans réserve de nos habitudes linguistiques que l’idéologie tend à faire passer pour une condition universelle et transcendantale … Quand nous n’arrivons pas à trouver un autre terme que ‘gérer’ ou ‘structurer’ pour qualifier …  nous expérimentons une forme d’enfermement de la langue dans la barbarie technocratique et technico économique … La langue dirige aussi nos sentiments, elle régit notre être moral d’autant plus naturellement que nous nous en remettons  inconsciemment à elle. Et qu’arrive-t-il si cette langue est constituée d’éléments toxiques. Les mots peuvent être comme de minuscules doses d’arsenic ; on les avale sans y prendre garde … Chacun croit qu’il joue son propre rôle, qu’il participe à des scénarios sociaux dont il se croit l’auteur alors qu’il n’en est que le figurant. » (Roland Gori et Pierre Le Coz)  – Sans même avoir lu Orwell et la novlangue de 1984, tous les  systèmes politiques savent que ; qui dirige la langue dirige  la pensée et  la conduite des locuteurs. 

« Cette capacité que nous avons de nous envoûter nous-mêmes au point de mettre le réel entre parenthèses, de le refouler, de l’effacer pour conférer à l’irréel la consistance, la prégnance, la cohérence de la réalité. Nous ne sommes jamais si tenus par la réalité que nous n’ayons la liberté de nous en délier, serait-ce seulement par l’imagination, le rêve, le jeu ou la folie. » (Nicolas Grimaldi)

« Si attentif que je sois aux plus minimes détails de la réalité, je n’en puis jamais percevoir qu’une infime partie. De toutes parts, la réalité présente déborde à l’infini ce que j’en puis observer. Toujours … je manque quelque chose … D’où, par rapport à la richesse infinie du réel, ce sentiment de l’infinie pauvreté de ce que nous en percevons. » (Nicolas Grimaldi)

« Dans la réalité … tout choix est irréversible : elles ne seront jamais présentes et nous ne les connaîtront jamais ces autres vies, ces autres rencontres, ces autres professions, ces autres amours qui étaient pourtant possibles … Parce que toute réalité est exclusive d’une autre. » (Nicolas Grimaldi)

« Même Dieu ne peut pas faire que deux fois deux ne fassent pas quatre. » (Grotius) – Non négation de Dieu, mais affirmation d’une signification et cohérence du monde, que justement Dieu nous a livré pour que nous puissions le comprendre.

« Pas d’objectivité sans accrochage au réel. » (Père Anselm Grün)

 « Patauger dans un marécage émotionnel. » (Père Anselm Grün) 

« On sait que seul le principe de réalité admet les modifications, les transformations, les aménagements. Il est lié à l’intégration de l’analité qui implique un rétrécissement des limites, un renoncement (partiel) à l’infini. » (Béla Grunberger, Janine Chasseguet-Smirgel)

« Comme le contestataire veut tout avoir gratuitement sur un mode narcissique, il doit refuser la réalité …  il doit détruire la maison familiale pour n’avoir rien à construire. Puisque son bonheur doit être réalisé  contre la réalité, c’est de la disparition de celle-ci que ce bonheur surgira. »  (Béla Grunberger et Janine Chasseguet-Smirgel)

« La matière … n’est plus seulement de la matière. Il y a en elle un langage … L’information génétique est immatérielle, elle est un langage … La spécificité d’un gène, ce n’est pas son aspect substantiel … mais le message qu’il est capable de transmettre. » (Jean-Claude Guillebaud)

« La pensée ne peut rendre compte du réel qu’en utilisant, non pas du noir sur du blanc, mais du gris sur du gris. » (Hegel)

« Nous n’observons pas la nature elle-même, mais la nature soumise à nos méthodes d’investigation, seulement à travers nos instruments. » (Heisenberg) – « La réalité est une construction, elle n’est pas donnée de façon absolue mais relative, elle dépend du regard que nous posons sur elle. » (Jean-Jacques Witezaele)

« La réalité est ce dont il faut le moins se soucier, car elle est déjà assez ennuyeuse par sa continuelle présence, alors que des choses bien plus belles et plus nécessaires réclament notre attention et nos soins. La réalité est cette chose qui ne peut en aucun cas nous satisfaire et qui ne peut être implorée ni révérée en aucune circonstance, car elle n’est que le résultat d’un hasard, le déchet de l’existence. » (Hermann Hesse)          

« Le sujet doit consacrer toutes ses énergies à être ‘dans le mouvement des choses’ … Auparavant, la réalité était confrontée, opposée à un idéal … Elle était censée être façonnée conformément à cet idéal … Aujourd’hui, la pensée progressiste facilite, à son insu, l’élévation de la réalité à la dignité d’idéal … L’adaptation devient la mesure de tout type concevable de conduite. » (Max Horkheimer) 

« Le fait de croire en des choses irréelles nous aide à supporter la vie réelle. » (Nancy Huston)

« La réalité sensorielle est de plus en plus recouverte par des injonctions programmées à voir, à entendre  à goûter. » (Ivan Illich) – A manger cinq fruits par jour, à marcher au moins une heure par jour, à boire de l’eau par temps caniculaire, etc.  Merci, merci de nous prendre pour des c…

« ‘L’écart entre expérience et attente ne cesse de grandir dans les temps modernes’ (Reinhart Koselleck) … La modernité se caractérise par une distance grandissante entre la réalité et les attentes. » (Eva Illouz)

« Voir de trop haut, c’est très souvent voir de trop loin. » (Joseph Joubert)

« Le réel se présente à elle comme un procès, régulé et continu découlant de la seule interaction des facteurs en jeu (à la fois opposés et complémentaires : les fameux ‘Yin’ et ‘Yang’). » (François Jullien – sur la pensés chinoise)

« Rien ne devient réel avant qu’on en ait eu l’expérience. Même un proverbe n’est pas un proverbe avant que votre vie n’en ait donné un exemple. » (John Keats – cité par Pierre le Vigan)

« Dans les réunions publiques où se rencontrent les gens sérieux, on ne vénère que la sage prudence avertie de la réalité. » (Kierkegaard)

« On se passionne de plus en plus pour des fragments de réalité de plus en plus minuscules. » (Arthur Koestler)

« Les conforts de la double pensée … Je réagis au choc brutal de la réalité sur l’illusion d’une façon caractéristique du vrai croyant. J’étais étonné, éberlué, mais … j’avais des yeux pour voir, et un esprit conditionné pour éliminer ce qu’ils voyaient. Cette ‘censure intérieure’ est plus sûre et plus efficace que n’importe quelle censure officielle. Cela m’aidait à surmonter mes doutes et à remodeler mes impressions dans la forme désirée. La censure intérieure chez le vrai croyant est aussi tyrannique que l’obéissance imposée … L’homme terrorise lui-même sa conscience, il a un rideau de fer dans le crâne pour protéger ses illusions contre l’irruption du réel … Je vivais dans un monde mental qui était un ’univers clos’. » (Arthur Koestler – sur la  censure et ses réactions de communiste lors d’un voyage en URSS au début des années 1930 et au spectacle des villages déserts, des foules misérables et affamées dans les gares, des nourrissons squelettique après la grande famine qui suivit la collectivisation forcée des terres.) – Combien de nos politiciens, de nos journalistes, de nos prétendues élites vivent aujourd’hui dans un univers aussi clos ?

« Tandis que la réalité n’a aucune honte à se répéter, la pensée, face à cette répétition, finit par se taire. » (Milan Kundera)

« J’ai rêvé cette nuit de la réalité. Quel soulagement quand je me suis réveillé ! » (Stanislas Jerzy Lec)

« Ceux qui admettent une réalité, un ‘monde réel ’s’opposant à un ‘monde du désir’, passent pour répressifs et par conséquent pour ‘fascistes’. » (tiré de Henri Lefebvre)

« Les femmes ne comprennent pas que la séduction représente la maîtrise de l’univers symbolique, alors que le pouvoir ne représente que la maîtrise de l’univers réel … le domaine des apparences, des codes, des règles du jeu leur appartient. Elles sont en ce domaine législatrices (selon Stendhal), si elles ne l’admettent pas, elles en ont parfaitement conscience et en jouent. » (Bérénice Levet)

« C’est dans la vision panoramique du réel qu’est la vérité et qui donne toute satisfaction à l’esprit. » (Emmanuel Levinas)

« En démocratie d’opinion, le réel est fabriqué par le complexe économico-médiatique. C’est lui, Bien incarné, qui décide ce qui  ‘fait sens’ et ce qui ‘ne le fait  pas’, ce qui est noble et ce qui est sordide. Une procession de cinquante féministes et autant de « people », par exemple, est rien moins qu’ ‘historique’. En revanche, cent mille ouvriers, artisans, employés qui défilent pour réclamer de mieux vivre de leur travail et d’exercer effectivement le pouvoir, c’est au mieux étrange, au pire fascisant. » (Nicolas Lévine)

« Pour changer le réel, il faut subvertir le langage : inventez le mot et la chose adviendra. » (Elisabeth Lévy)

« Puisque le réel leur déplaît, le réel sera frappé d’inégalité. » (Elisabeth Lévy) – Aux donneurs de leçons. « C’est vrai, mais on ne peut pas le dire. »

« L’euphémisation de la réalité, expurgée de tous ses aspects susceptibles de troubler le simplisme du noir et blanc. » (Elisabeth Lévy)

« La vérité est toujours à propos de quelque chose, tandis que la réalité est cela même dont parle la vérité. » (C. S. Lewis)

« Accrochez-vous à la réalité. Si vous pouviez absolument saisir ne fût-ce qu’un fragment de réalité, si modeste soit-il, dans son irréductibilité concrète et singulière, vous prendriez enfin appui sur le terrain solide du vrai. » (Simon Leys – sur une réponse d’un maître bouddhiste) – D’intérêt pour les dangereux idéalistes fumeux.

«  Le raccord au réel nécessite l’activité de la personne, l’usage des cinq sens, l’action sur les choses et le rapport direct avec les autres. » (Liliane Lurçat) – Il ne peut donc entièrement émaner des média (surtout la télévision passive) ni même des livres. Il ne s’épanouit pleinement que dans l’action.

« Nous ne vivons plus dans le monde des choses, mais dans celui de l’information … ‘L’ordre terrien est aujourd’hui remplacé par l’ordre numérique’ et celui-ci ‘déréalise le monde en l’informatisant’ … Les choses sont remplacés par ces non-choses que sont les informations qui nous submergent et nous empêchent de voir le monde réel … ‘La masse d’informations qui recouvre la réalité empêche les expériences de la présence’… Le GPS comme fin de la dimension sensible de l’espace, suppression de l’autre et de l’empathie par la prééminence des écrans  et l’abolition du regard … Nous n’habitons plus le ciel et la terre, nous habitons Google earth et le cloud. » (Pierre Lurçat -s’inspirant du coréen, Byung-Chul- Han La fin des choses,  bouleversements du monde de la vie

 « La performativité, en augmentant la capacité d’administrer la preuve, augmente celle d’avoir raison : le critère technique introduit massivement dans le savoir scientifique ne reste pas sans influence sur le critère de vérité … L’amélioration des performances … pourrait valoir comme une sorte de légitimation. Ce serait une sorte de légitimation par le fait. L’horizon de cette procédure est celui-ci : la ‘réalité’ étant ce qui fournit les preuves pour l’argumentation scientifique et les résultats pour les prescriptions et pour les promesses d’ordre juridique, éthique, politique, on se rend maître des unes et des autres en se rendant maître de la ‘réalité’, ce que permettent les techniques. En renforçant celles-ci, on ‘renforce’ la réalité, donc les chances d’être juste et d’avoir raison. Et, réciproquement, on renforce d’autant mieux les techniques que l’on peut disposer du savoir scientifique et de l’autorité décisionnelle. » (Jean-François Lyotard) – Et ainsi la boucle vers la puissance est fermée.

« L’universalité des hommes se repaît de l’apparence comme de la réalité ; souvent même l’apparence les frappe plus que la réalité … Chacun voit ce que tu parais, peu perçoivent ce que tu es. » (Machiavel)

« Souvenons-nous de la formule de Max Weber à propos de la liaison entre l’éthique protestante et l’esprit du capitalisme : on ne peut bien comprendre le réel qu’en fonction de l’irréel. ‘L’irréel’, en la matière l’interprétation théologique proposée par la Réforme, engendre le réel : le capitalisme naissant et la modernité qu’il suscite. … quelque chose de cet ordre est en jeu de nos jours. Le virtuel est en train de structurer un indéniable réel. Celui des multiples possibilités de tribus proposées par la Toile. » (Michel Maffesoli)

« La réalité absolue a été pour vous Dieu, puis l’homme ; mais l’homme est mort après Dieu, et vous cherchez avec angoisse celui à qui vous pourriez confier votre étrange héritage. » (André Malraux – sur l’intensité que les idées créent dans la culture occidentale – La tentation de l’Occident)

« Le propos est très proche, dans le fond, de nombreuses thèses de Jean Baudrillard. Congélation systématique de la pensée et de son mouvement, la valeur ne peut émerger, le concept devient vide, la pensée slogan, le « fake » est roi. Victoire du simulacre qui précède le réel et supprime toute référence à la réalité et à une signification commune de la réalité. Le réel est mort, disparu. Les signes s’échangent alors entre eux dans une valse flottante se référant à elle-même sans rapport avec la chose signifiée, puisqu’elle n’existe plus. La sexualité, le genre, la couleur de peau, la monnaie, la mode, la production, tout n’est plus qu’une flottaison généralisée de signes, réglée par le code de l’équivalence générale. A la limite, c’est le modèle binaire informatique, alternance de 1 et de 0 qui préfigure l’état automatisé de la socialité. Il s’agit de systématiquement détruire le monde naturel et social et de le reconstituer virtuellement via les réseaux sociaux, la communication, l’économie déréalisée, les artefacts intelligents et autres joyeusetés robotiques, la manipulation génétique, jusqu’aux délires transhumanistes de se rendre prothèse de soi-même. C’est l’hyper-réel baudrillardien: le « fake » est roi, il précède le réel. » (Johann Margulies – sur l’irréalité du monde moderne en général et d’Emmanuel Macron en particulier)

« On a réussi à rendre intolérable l’intervalle entre l’idéal et le réel. » (Karl Marx)

« ‘Il n’est de véritable liberté que dans l’acceptation et dans l’amour de l’inévitable, c’est-à-dire de la nature de la réalité’ (principe spinozien) … Il faut donc, afin de bien entendre les voix de la réalité, être silencieux et écouter avec une grande réceptivité. Il faut donc, si l’on veut permettre aux faits de nous révéler leurs obligations, apprendre une certaine écoute que l’on peut appeler  taoïste (calme, non directive, réceptive, patiente, respectueuse et courtoise envers la question). » (Abraham Maslow – Être humain)

« Le voyage est une espèce de porte par où l’on sort de la réalité comme pour pénétrer dans une autre réalité inexplorée qui semble un rêve. » (Maupassant)

« Notre incapacité à appréhender la situation avec la tyrannie des bons sentiments, avec la politique de l’émotion et de la compassion, avec la vision morale du monde ; avec la tyrannie de la bienveillance. » (Yves Michaud – Contre la bienveillance) – Pays de midinettes pleurnichardes et de faux jetons.

« Image remplace langage … Elle est partout et elle sert à tout … Il faut accompagner le texte d’une image. L’illustration n’illustre plus, elle est légendée par le texte … Plus besoin de faire des descriptions, l’image fat constat et rapport  … d’articuler un récit logique et linéaire, il suffit d’enchaîner les images et de les légender … La prolifération des images est aussi le triomphe du narcissisme. Chacun peut se montrer et se répandre sous mille profils : exhibition de soi, de sa vie, de sa sexualité, de ses relations, de ses réactions … L’essentiel de notre relation à la réalité passe aujourd’hui par l’image qui rend cette réalité de plus en plus inutile. » (Yves Michaud)

« L’aversion que m’inspirait les journalistes venait de l’extraordinaire entreprise de falsification du réel qui se mettait en  place dès cette époque (l1976) et qui visait à redoubler le monde d’une vérité fabriquée à partir des restes de la grande cuisine philanthropique ; la seule qui fut acceptable dans l’édification d’une dictature démocratique universelle, laquelle, avec ses droits de l’homme, son antiracisme, et son sens démesuré de l’expiation, serait une sorte de protestantisme définitivement sorti du christianisme et voué aux seuls intérêts de libéralisme économique. » (Richard Millet)  – Encore quand l’auteur écrivait il pouvait ignorer la cancel-culture, le wokisme, qui expriment  aujourd’hui la volonté hystérique et furieuse de tout détruire.

« Il n’y aura bientôt plus de réalité distincte, seulement des changements, des passages, des hybridations, d’incessantes métamorphoses. Nulle altérité ne résistera à l’arraisonnement, c’est-à-dire à la consommation. Nulle extériorité ne subsistera, rien n’échappera à la prise, tout deviendra fongible, commissible et disponible. » (Jean-Claude Milner – Les penchants criminels de l’Europe démocratique)

« L’artificialité domine car rien n’a de sens dans le grand provisoire environnant.» (Thomas Molnar)

« Il y a deux réalismes. Le premier est de croire que le réel présent est stable, intangible. Il ignore que le présent est toujours travaillé par des forces souterraines … Le second, le vrai, sait que le présent est toujours le moment d’un devenir. Il essaie de détecter les signaux, toujours faibles au départ, qui annoncent des transformations. » (Edgar Morin)

« J’en arrive à l’âge où, comme dit Guéhenno, on ne préfère pas les cérémonies aux réalités. » (Emmanuel Mounier)

« Sans doute, ne peut-on même pas dire qu’au principe de réalité s’est désormais substitué le principe de plaisir. Cette opposition elle-même semble devenue caduque … Ce qu’il faut arriver à penser c’est que le principe de plaisir est devenu le nouveau principe de réalité … et qu’il n’est plus en conflit avec quoi que ce soit. » (Philippe Muray)

« Tout ce qui détourne l’attention de ce qui se passe véritablement a une très bonne chance d’être accueilli avec ferveur … La France ‘d’en bas’ comme on appelle maintenant l’ancien monde réel, sent et sait que l’élitocratie veut tout bonnement sa mort. » (Philippe Muray)

« …Il (l’homme festif moderne) ne fait plus aucun compromis avec le réel. Son sentiment de toute-puissance infantile l’en dispense… » (Philippe Muray)

« …Dans cette dévaluation du vrai et du faux (les mensonges du gouvernement américain), dans la décrédibilisation du beau et du laid en art, comme dans la disparition progressive de la différence sexuelle, peut s’observer une libération fondamentale … par rapport au principe de réalité ; Littéralement, on s’est assis sur la vérité et la réalité… » (Philippe Muray)

« Le réel est une menée antidémocratique qu’il convient de dénoncer. Les faits divers criminels le sont encore davantage de menacer le nouveau monde idéal en train de se mettre en place … C’est le concret que l’on doit dissoudre. Si le concept et la réalité humaine sont incompatibles, il faut détruire la réalité … Toute l’histoire française récente n’aura consisté qu’à interdire, y compris s’il le fallait par des lois ouvertement liberticides, l’accès au monde concret. » (Philippe Muray)

« Ceux qui abandonnant la réalité ont fait leur bonheur des profondeurs de l’apparence pensent que la réalité est laide : ils ne réalisent pas que même la connaissance de la réalité la plus laide est belle. Le bonheur de celui qui cherche à connaître augmente la beauté du monde et rend toute chose plus ensoleillée. » (Nietzsche)

« Rien ne se produit dans la réalité qui corresponde rigoureusement à la logique. » (Nietzsche)

« Parler du réel vous vaut vite le sceau infamant de l’extrême droite. » (Anne-Sophie Nogaret) – Chassons le réel, pour le rêve, tellement mieux. Heureux les bisounours.

« Cette passion furieuse pour les idées au détriment de la réalité, cette religion de l’idéal sans souci du réel, ce goût des livres dont on pense qu’ils sont plus vrais que le monde qu’ils sont censés dire. Don Quichotte s’avère être un platonicien emblématique pour lequel l’idée qui dit le monde est plus vraie que le monde dit par cette idée. » (Michel Onfray)

« Il n’y a naturellement pas d’hommes, pas de femmes, la nature n’existe pas … Le réel existe moins en tant que tel qu’à travers les livres qui le disent … La société construit, culturellement, les hommes et les femmes, les homosexuels et les hétérosexuels. » (Michel Onfray –citant Judith Butler et la théorie du genre)

« Vous croyez que la réalité est quelque chose d’objectif, d’extérieur, qui existe en lui-même … Mais je vous dis, Winston que la réalité n’est pas extérieure. La réalité n’existe que dans l’esprit humain, nulle part ailleurs. » (George Orwell – 1984) – Principe couramment utilisé, le sentiment d’insécurité par exemple, toutes les questions dont il est interdit de parler et débattre.

« Le contraire de la sagesse est assurément le déni du réel. »  (Charles Pépin)

« Sans le réalisme des saints, sans leur contact avec la réalité dont il est question, la théologie devient un jeu intellectuel vide. » (cardinal Joseph Ratzinger)

« Au commencement était le Verbe, il semble qu’à la fin tout doive devenir nombre … Les nombres deviennent les ultimes garants de la réalité … L’importance exorbitante prise par les nombres au sein de notre civilisation ; On appelle cela la quantification du monde. » (Olivier Rey)

« L’univers conscient de la pensée rationnelle et analytique y devient suspect, tandis que le monde inconscient du désir érotique, de l’illusion et des rêves éveillés occupe le devant de la scène et devient la réalité (univers des jeux). » (Jeremy Rifkin – sur la modernité)

« Que l’on ait abandonné la question du réel est somme toute logique à une époque où le conte de fées se vend très bien … Voilà qui confirme la béatitude dans laquelle nous plonge le conte de fées moderne … Tout semble organisé pour que l’approbation de la réalité (de l’irréalité) qui est la nôtre aille de soi : spectacularisation avancée, déréalisation médiatique, indifférenciation hystérique, inversion des valeurs, persécution du Mal, intensification du présent, technique incontrôlable, bref, avènement d’une réalité tout à fait inédite, en rupture totale avec ce que l’on pouvait  qualifier, il y  a encore quelques décennies, de civilisation occidentale. » (Oliver Rohe)

« Rien de plus fragile que la faculté humaine d’admettre la réalité, d’accepter sans réserves l’impérieuse prérogative du réel … Cette faculté se trouve si souvent prise en défaut qu’il semble raisonnable d’imaginer qu’elle n’implique pas la reconnaissance du réel à être perçu, mais plutôt une sorte de tolérance, conditionnelle et provisoire, que chacun peut suspendre à son gré, sitôt que les circonstances l’exigent. Le réel n’est généralement admis que sous certaines conditions et seulement jusqu’à un certain point : s’il abuse et se montre déplaisant, la tolérance est suspendue. Un arrêt de perception met alors la conscience à l’abri de tout spectacle indésirable. » (Clément Rosset) – Est-ce le fruit de l’observation du milieu politico-médiatique ? – Le mythe de la Caverne ?

« Parmi différentes formes de refus du réel, je peux, sans rien sacrifier de ma vie ni de ma lucidité, décider de ne pas voir un réel dont je reconnais par ailleurs l’existence … attitude d’aveuglement volontaire … Mais l’attitude la plus commune ne dit ni oui ni non à la chose perçue, ou plutôt lui dit à la fois oui et non. Oui à la chose perçue, non aux conséquences qui devraient normalement s’ensuivre. Je ne refuse pas de voir et ne nie en rien le réel qui m’est montré. Mais ma complaisance s’arrête là. J’ai admis, mais qu’on ne m’en demande pas davantage. Pour le reste, je maintiens mon point de vue, persiste dans mon comportement tout comme si je n’avais rien vu. Coexistent ma perception présente et mon point de vue antérieur. Il s’agit là moins d’une perception erronée que d’une perception inutile. » (Clément Rosset)

« Je puis anéantir le réel en m’anéantissant moi-même : formule du suicide … Je peux également supprimer le réel à moindres frais au prix d’un effondrement mental : formule de la folie … je peux décider de ne pas voir un réel dont je reconnais par ailleurs l’existence : attitude de l’aveuglement volontaire (éventuellement  aisée par l’alcool ou la  drogue)… Oui à la chose perçue, non aux conséquences qui devraient normalement s’ensuivre, perception juste, impuissante à faire embrayer sur un comportement adapté à la perception, pas de refus de voir, pas de négation du réel. Mais ma complaisance s’arrête là,  qu’on ne m’en demande pas plus, perception inutile … Dans le refoulement,, le réel peut éventuellement revenir, mais, dans l’illusion, le réel ne reviendra jamais, puisqu’il est déjà là, l’illusion, art de percevoir juste mais de tomber à côté dans la conséquence. L’illusionné fait ainsi de l’événement unique qu’il perçoit deux événements qui ne coïncident pas, l’événement est magiquement scindé en deux, deux aspects du même événement en viennent  à prendre chacun une existence autonome … D’un seul fait, deux faits divergents, d’une même  idée deux idées distinctes, l’une pénible, mais l’autre ‘toute différente’, comme l’écrit Proust. » (Clément Rosset)  – C’est ainsi que les gauchistes progressistes ignorent la réalité :  on déduit de l’insécurité bien réelle un illusoire sentiment d’insécurité, et ainsi écarte-t-on  toute constatation déplaisante.

« ‘Nous ne sommes jamais chez nous, nous sommes toujours au-delà … Nous pensons toujours ailleurs’ … L’intérêt marqué qui se manifeste pour ce qui est ailleurs étant l’exact et triste reflet de la minceur de l’intérêt porté à ce qui est ici … ‘Peu de chose nous divertit et détourne, car peu de chose nous tient’ … Substitution d’intérêts imaginaires aux intérêts réels … Choix de l’irréel au détriment du réel … Nécessité de se repaître de biens imaginaires, issue d’une incapacité à se satisfaire de biens réels. » (Clément Rosset – citant Montaigne)

« Ces objets qui bénéficient en tant que tels, c’est-à-dire plutôt en tant qu’ils ne sont pas ‘tels’, justement ‘pas comme les autres’, d’un coefficient de différence qui les impose à l’attention et semble les vouer par avance à la faveur publique … ‘Une histoire d’amour pas comme les autres’ (publicité d’un film, ‘Arthur Martin vous en donne plus’ … L’objet du désir se signale d’abord comme objet fascinant … Il peut arriver à un objet de devenir désirable en une sorte d’autotranscendance qui arrache l’objet à lui-même et le transporte soudain dans la sphère des objets qui ne sont pas comme les autres … Qu’un objet ne puisse éveiller le désir qu’à la condition de relever sa simple perception par le condiment d’un effet de fascination … voilà qui en dit assez long sur la pauvreté dans lequel on tient le réel … sur son impuissance présumée à jamais être perçu comme désirable en tant que tel … Ce qui fascine dans l’objet du désir, selon René Girard, le fait qu’il apparaisse comme objet de désir de la part d’une autre personne : l’autre me signalant comme désirable, et par le seul fait qu’il le désire, un objet que je serais incapable de désirer par moi-même … Voilà qui met décidément l’objet du désir à l’écart de toute réalité : non seulement il n’est pas réel mais imaginaire, à la faveur de l’imagination de l’autre (d’un autre jouissant à mes yeux d’un prestige susceptible de rejaillir sur les productions de son imagination, rendant celles-ci crédibles) … Parfois un relais ininterrompu, Sancho copie Don Quichotte, mais Don Quichotte copie Amadis, et ainsi de suite à l’infini, une chaîne de sujets susceptibles de se porter garants de l’objet, sans ‘arrêter à celui-ci … Un relais ininterrompu de fascinations. » (Clément Rosset)

« L’illusion d’une sorte de positivité fantomale … Le prestige fascinant et ambigu de ce qui n’est pas par rapport à ce qui est, de ce qui serait ‘autrement’ par rapport à ce qui est ainsi, de ce qui est ‘ailleurs’ par rapport à ce qui est ici … Comme si le fait de signaler que quelque chose n’est ni ici ni ainsi suffisait à établir que ce quelque chose existe ou pourrait exister. Cette illusion élémentaire qui fait la fortune des charlatans, fait aussi parfois celle des philosophes qui s’y laissent prendre … La force invulnérable de la pensée de l’ailleurs et de l’autrement consiste paradoxalement en son impuissance à se définir elle-même : à préciser ce qu’elle désire et ce qu’elle veut … Les notions négatives prospèrent à l’abri de leur propre vague … C’est pourquoi un propos contestataire est toujours, et par définition, incontestable … L’essence de la négativité n’est pas de dire non mais de ne savoir rien dire, pas même le non auquel elle aspire  » (Clement Rosset – Le philosophe et les sortilèges)

« La réalité se compose, d’une part de ce monde-ci, dont nous pouvons avoir à l’occasion une perception partielle, d’autre part de l’ensemble des mondes dont nous ne pouvons quasiment avoir aucune perception … La nature intrinsèquement douloureuse et tragique de la réalité (le caractère insignifiant et éphémère de toute chose au monde), et aussi le caractère unique, et par conséquent irrémédiable et sans appel de cette réalité qui interdit de la tenir à distance et d’en atténuer la rigueur par  la prise en considération de quelque instance qui serait extérieure à elle … Une réalité pénible est aussi, comble de cruauté, une réalité réelle, une vérité vraie  … L’acceptation du réel suppose soit la pure inconscience, soit une conscience qui serait capable à la fois de connaître le pire et de n’en est être pas mortellement affectée  … de supporter une vérité que l’homme est capable d’entendre mais qu’il est incapable d’accepter… à moins que ne s’en mêle une extraordinaire assistance ( la ‘grâce’ selon Pascal, la joie selon l’auteur). » (Clément Rosset)

« ’ Il faut dire et penser que ce qui est est, car ce qui existe existe, et ce qui n’existe pas n’existe pas’ (Parménide) … La déesse de Parménide fait de L’homme  un condamné à la réalité … ‘S’exposer à être, c’est se condamner à n’être rien d’autre’ (Emil Cioran) … Parménide énonce la difficulté principale et originelle qui affecte … et à laquelle répugne toute chose dès lors qu’elle est chose pensante, comme le dit Descartes de l’homme … Car l’esprit de l’homme est ainsi fait que ceux-ci s’estiment presque toujours trahis et pris de court par une réalité qui s’était pourtant annoncée à l’avance et en toutes lettres …  La principale façon de biaiser avec la formule de vérité énoncée par Parménide consiste à estimer que, s’il est vrai que l’être est, il convient cependant d’accorder une certaine dose d’existence à ce qui n’est pas. L’être est, mais le non-être est aussi … Cette prise en considération de ce qui n’existe pas est … le principe général de toute folie …   La raison des fous ne se limite pas au raisonnable ; elle s’adjuge aussi le domaine de ce qui n’est pas raisonnable et tient pour esprits étroits, voire fanatiques, ceux qui limitent, arbitrairement à son gré, le domaine du raisonnable à ce qui est effectivement raisonnable. La raison du fou est ainsi bien supérieure à celle du sage (sur le pan matériel et quantitatif). » (Clément Rosset  – Principes de sagesse et de folie)

« Il appartenait à la catégorie de personnes dites pratiques qui ne peuvent pas renoncer à une idée dite productive, même quand il s’agit de gens incapables de l’exécuter. Il était ‘réaliste’, ce qui signifie qu’il montrait une obstination … Il ne voyait plus que l’utilité de son projet et vivait dans la conviction que tous les hommes … sont également à même de mener à bien l’exécution de projets utiles. » (Joseph Roth) – Faux réalisme.

« Il faudrait essayer de ne pas accorder trop de réalité à la réalité. Le monde a grand besoin que nous doutions un peu de son existence. » (Claude Roy)

« ‘En Amérique, l’image d’une réalité tend à prendre le pas sur la réalité même’. On juge d’après le reflet, l’emballage, la présentation. » (Raymond Ruyer – citant D. J. Boorstin) – Nous sommes tous devenus américains.

« L’affaiblissement de la transcendance républicaine sous l’effet de l’extension de l’idée et des valeurs démocratiques … La démocratie providentielle se donne pour légitimité d’assurer l’égalité réelle des individus-citoyens. Elle privilégie tout ce qui est ‘réel’, l’économique, l’historique, l’ethnique, la recherche du bien-être, aux dépens de la transcendance civique … Elle tend à refuser toutes les limites … Ce poids accru du ‘réel’ a pour effet d’épuiser les deux types de transcendance collective, religieuse et politique … Les conditions décentes d’existence assurées par l’Etat-providence ne donnent pas par elles-mêmes un sens à l’existence des individus» (Dominique Schnapper) – Que reste-t-il d’une transcendance déjà faiblarde et molle dans le contexte de l’Etat-providence, c’est-à-dire réduit au rôle de simple fournisseur d’allocations ?

« Le fétichisme culturel est caractérisé par sa nature ’standardisée’, sa présentation routinière de matériel prédigéré et son refus de remettre en question son propre statut de marchandise … Le rapprochement du fétichisme de la marchandise et celle de la réification, c’est-à-dire la façon dont les gens perdent leur liberté objective en la plaçant dans des objets extérieurs à eux-mêmes …  Lukàcs prétendait que les gens, dont la liberté était extraite pour être fossilisée en objets, étaient réifiés : leur liberté était transférée et capturée par les objets qui les représentaient … Remplacement de rapports entre sujets par des rapports entre objets. » (Roger Scruton) – Pour expliquer, un peu, l’expression réification, aujourd’hui largement utilisée.

« L’imaginaire déchoit-il ou se renforce quand il se confronte au réel ? Le réel lui-même n’aurait-il pas sa grande saveur et sa joie ? Car ces deux mondes, si étranges l’un à l’autre,  s’attribuent tour à tour la seule existence … L’épisode et la mise en scène du voyage, mieux que tout autre subterfuge, permettent ce corps à corps rapide, brutal, impitoyable et marquent mieux chacun des coups … Par le mécanisme quotidien de la route, l’opposition sera flagrante entre les deux mondes : celui que l’on pense et celui que l’on heurte, ce que l’on rêve et ce que l’on fait, entre ce qu’on désire et ce que l’on obtient … Afin de chercher en quelles cavernes de l’humain ces mondes divers peuvent s’unir et se renforcer, ou bien, si décidément ils se nuisent, se détruisent jusqu’au choix impérieux de l’un d’entre eux, sans préjuger duquel d’entre eux, et s’il faut, au retour de cette équipée dans le Réel, renoncer au double jeu plein de promesses sans quoi l’homme vivant n’est plus corps, ou n’est plus esprit. » (Victor Segalen) – Evidemment il ne s’agissait pas des voyages actuels qui n’impliquent ni efforts ni contraintes ni servitudes.

« Imaginer est bien plus plein d’angoisse que faire … Si tu crains l’eau, mouille-toi bien … L’on s’attache au concret avec ses membres … la nuance est méprisée, la notion pleine du geste, voilà ce qui sert, où l’on se vautre. » (Victor Segalen)

« Dans la confusion actuelle entre réalité et fiction … fiction et fausseté forment un amalgame face auquel nous avons adopté une attitude unitaire : nous sommes globalement positifs et désirants. Nous aimons ce mélange … L’un des piliers de la rationalité occidentale, la capacité de distinguer la réalité de la fiction, s’est gravement fragilisé …  et l’un des symptômes de la psychose est la perte de la capacité de distinguer la réalité de l’imagination … ‘Les masses modernes ne croient à rien de visible, à la réalité de leur expérience ; elles ne font confiance ni à leurs yeux ni à leurs oreilles, mais à leur seule imagination’ (Hannah Arendt). » (Raffaele Simone) – Ce pourquoi il est si facile de les intoxiquer, de les désinformer.

« L’affaiblissement de la transcendance républicaine sous l’effet de l’extension de l’idée et des valeurs démocratiques … La démocratie providentielle se donne pour légitimité d’assurer l’égalité réelle des individus-citoyens. Elle privilégie tout ce qui est ‘réel’, l’économique, l’historique, l’ethnique, la recherche du bien-être, aux dépens de la transcendance civique … Elle tend à refuser toutes les limites … Ce poids accru du ‘réel’ a pour effet d’épuiser les deux types de transcendance collective, religieuse et politique … Les conditions décentes d’existence assurées par l’Etat-providence ne donnent pas par elles-mêmes un sens à l’existence des individus» (Dominique Schnapper) – Que reste-t-il d’une transcendance déjà faiblarde et molle dans le contexte de l’Etat-providence, c’est-à-dire réduit au rôle de simple fournisseur d’allocations ?

« Nous vivons plus dans l’échafaudage de nos représentations que dans la réalité objective. » (Christiane Singer)

« Tout ce qui est créé est entraîné tôt ou tard de l’ordre au désordre. Tout finit par s’affaiblir et se débiliter, tout ce qui était juste devient faux avec le temps, tout ce qui était beau et lisse se craquelle … Mais au lieu de nous en affliger nous devrions voir là la sagesse primordiale de la création qui ne nous livre pas une fois pour toutes un réel achevé, parfait et durable, mais nous invite en permanence à réactualiser, à remettre à neuf ce qui s’étiole, à réinventer des contenants et des contenus, à faire que soit neuf ce qui était hier usé, que soit étincelant ce qui était hier terni … Il faut se répéter sans se lasser que ce qui existe sur terre n’est qu’une ombre du possible, une option entre mille autres. » (Christiane Singer)

« La mission philosophique de Staline consista à révéler le fait … que les prétendues résistances du réel sont en vérité des oppositions. Il n’existe pas de problèmes, il n’y a que des gens qui créent des difficultés. Il n’existe pas de faits, mais uniquement des saboteurs … Un ‘moi’ se dissimule derrière chaque ‘ça’ … ‘Pas d’hommes, pas de problèmes’ (Staline) … Il ne peut plus exister de fautes, uniquement des sabotages … Plus de deuxièmes opinions, uniquement des plans contre-révolutionnaires … Il n’est plus de réunions libres, que des conjurations … Les événements neutres sont inexistants, ils sont tous des actes de sujets agissants  … Pas de difficultés objectives, uniquement les effets d’une volonté hostile … La solution des problèmes est moins importante que la question de savoir qui est responsable qu’ils sont survenus. » (Peter Sloterdijk) – Nos démocraties  niant les problèmes réels et remplaçant si souvent l’action résolue par l’incantation magique ne s’inspirent-elles pas quelque peu d’un stalinisme doux.

« L’existence éphémère, le surgissement et l’effacement, telle est la forme de toute réalité, des étoiles, dont le destin échappe à nos calculs, jusqu’au grouillement passager qui couvre notre planète. » (Oswald Spengler) 

« Chaque fois qu’une réalité, spécialement une découverte, une invention, est étouffée ou empêchée de naître, elle ensevelit avec elle tout son cortège de possibles ; mais aussi, chaque fois qu’une réalité naît, elle fait avancer d’un degré son cortège de possibles. » (Gabriel Tarde)

« Quand nous disons à quelqu’un : ‘Vous avez eu une bonne idée’, cette formule s’applique, non à l’idée prise en elle-même, mais à ses heureuses conséquences pratiques. Ainsi l’épreuve du réel constitue l’unique critère de la validité des idées. » (Gustave Thibon)

« Pour qu’un mot existe, il faut que la chose qu’il désigne puisse être mise à distance afin de pouvoir l’évoquer … Le mot de machisme n’existait même pas quand le pouvoir masculin prenait toute la place. » (Philippe Val) – C’est bien pourquoi les pouvoirs autoritaires (ce qui inclut les démocraties actuelles) veillent soigneusement à proscrire l’usage de certains mots (afin de supprimer la chose, la réalité, qu’ils désignaient) ou à en imposer d’autres (afin de créer la chose, la réalité, ou de la gonfler démesurément).

« La tolérance ne peut pas ne pas indiquer un affaiblissement de l’idée même  de vérité et, au bout du compte, de réalité … C’est toute la thématique de la ‘pensée faible’. » (Gianni Vattimo)

« L’intellectuel occidental sait ou croit savoir ce que les autres ne savent pas. Il pense rarement le réel, en tant que tel, par l’observation des faits, par l’expérience …  ce qui serait à ses yeux méprisable. Il le pense en référence à des concepts, à des modèles abstraits … Les faits étant examinés non en eux –mêmes, mais selon leur adéquation avec le concept … Dans la séduction du concept et du raisonnement bien ficelé, le radicalisme des intellectuels trouve l’une de ses explications. Tout est simple et absolu dans l’abstraction, d’autant que s’y ajoute la griserie cassante du discours. » (Dominique Venner) – Contrant cette obsession des Universaux (rubrique 290, 5 début), un cynique précurseur des nominalistes disait : ‘Je vois bien un cheval, je ne vois pas la chevalité’ et Joseph de Maistre ‘voyait bien des hommes, non l’humanité.’ 

« Le nihilisme est négation des valeurs et de l’esprit, mais il est aussi négation de la réalité concrète et vivante …  … Réalisme cynique pseudo-matérialiste et appétit idéaliste de fuite … Qui dresse un portrait sombre et cynique de la réalité veut la fuir. » (Bertrand Vergely)

« L’accélération du réel qui élimine l’accumulation, non seulement des produits mais aussi , des biens, des habitats, des personnes. Avec les délocalisations, c’est la destruction pure et simple de l’appareil productif qui est à l’œuvre. » (Paul Virilio)

« A la ligne d’horizon qui bornait la perspective de nos déplacements, s’adjoint aujourd’hui l’horizon au carré de la télévision ou de la lucarne de l’avion et du TGV. Le défilement optique ne cessant plus, il devient difficile, voire même impossible, de croire à la stabilité du réel, à la fixation d’un visible qui ne cesse de fuir … L’instabilité d’une image publique devenue omniprésente.  » (Paul Virilio – La vitesse de libération)

« L’accélération de la réalité. Non pas une réalité ‘augmentée’ comme disent les virtualistes, mais une réalité ‘accélérée’, ce qui n’est pas du tout la même chose. » (Paul Virilio) – Immédiateté de l’information (plus souvent de la désinformation) et ses conséquences ; Pouvoir aller de Reykjavik à Jakarta est une augmentation, pouvoir s’y rendre en quelques vingt-quatre heures est une accélération, un changement du rapport au temps et à l’espace.

« La croyance selon laquelle il n’y aurait qu’une seule réalité est une illusion dangereuse. Elle devient encore plus dangereuse lorsqu’elle est doublée d’une volonté prosélyte d’éclairer le reste du monde … Oser jeter sur le monde un regard différent, peut alors devenir un ‘délit d’opinion’ au sens d’Orwell. » (Paul Watzlawick) « Confusion par double sens des mots, erreur d’utilisation ou de traduction, par divergence de normes et de comportements culturels (manière de faire sa cour, distances entre individus…) – Privation de perception correcte par personnage autoritaire et abusif (le père alcoolique et brutal se proclamant doux et aimant) – Par exigence de spontanéité – Par illusion sur qui ou quoi est cause de (le rat de laboratoire persuadé que c’est lui qui conditionne l’homme à lui donner à manger, réaction plutôt que récompense à l’initiative du rat) – Opposition de vision du monde, opposition de méthode (Jésus et le Grand Inquisiteur des ‘Frères Karamazov’ de Dostoïevski ont tous deux consacré leur vie à la disparition de la souffrance, et n’en sont pas moins opposés l’un à l’autre) – Désir, ou obligation, de se trouver en accord avec la majorité, avec le groupe, ou tout au moins en non désaccord – La réalité externe d’un objet (comme d’un comportement) et sa signification (le feu de circulation rouge ou vert, l’or, matière brute et valeur) – Evidemment par toutes les tromperies de ce qu’on appelle : la Désinformation. » (résumé très approximatif et très incomplet de La réalité de la réalité de Paul Watzlawick)

 « Réalité de premier ordre : propriétés des objets recueillis par l’observation ou l’expérience … Réalité de second ordre : le cadre dans lequel les faits reçoivent une signification ou une valeur … Attribuer un sens, une signification, c’est construire une réalité particulière. » (Paul Watzlawick) – Constructivisme d’une réalité subjective et relative.

« Un critérium du réel, c’est que c’est dur et rugueux. On y trouve des joies, non de l’agrément. Ce qui est agréable est rêverie. » (Simone Weil)

« Une chose dont on ne parle pas n’a jamais existé. C’est l’expression seule qui donne la réalité aux choses. » (Oscar Wilde)

« Nous supposons que l’acceptation de la réalité est une tâche sans fin, et que nul être humain ne parvient à se libérer de la tension suscitée par la mise en relation de la réalité du dedans et de la réalité du dehors, nous supposons aussi que cette tension peut être soulagée par l’existence d’une aire intermédiaire qui n’est pas contestée (art, religion, etc.) » (Donald Winnicott) – Parallèle avec l’objet transitionnel de la petite enfance.

« La terre, elle, ne ment pas » « la matière, elle, ne ment pas », c’est-à-dire, qu’expressions de la réalité, on ne trompe ni l’une ni l’autre.

« Rien ne peut être représentation de la réalité dans la tête qui n’ait été d’abord perception charnelle. » (axiome latin – cité par Ivan Illich) – Primat de la perception sensorielle sur la conception intellectuelle.

« Prenez vos désirs pour des réalités. » (slogan de mai 68)

« Soyez réalistes, demandez l’impossible. » (slogan de mai 68)

« L’être intérieur ne s’ouvre que par la venue d’une réalité extérieure. » (?)

« La réalité est divinement indifférente. » (?)

« Ce qui compte, c’est de toujours faire entrer le réel dans l’idéologie, quitte à le pervertir. Au besoin, on change de réel, ou on le nie. » (?)

« Une génération est née qui ne distingue plus la fiction de la réalité. » (?)- Merci les jeux. 

Ci-dessous, extraits simplifiés et remanié de l’ouvrage de  Mark Hunyadi, l’homme en contexte (ouvrage fort difficile)

« – Contexte primaire : contexte directement à notre portée en tant qu’il est vécu – Contexte pratique : ensemble des connexions pratiques (actions et habitude acquises)  assurant concrètement notre relation au monde, imposant des manières de faire et d’être – Contexte causal :  facteurs déterminant nos conditions d’existence, déterminant notre contexte pratique – Contexte objectif :  étendue structurée en horizon qui englobe et dépasse tous les contextes à ma portée – Contexte d’arrière-plan : fonds culturel, réserve culturelle, nébuleuse alimentant notre réserve de sens, sans efficacité (sauf symbolique) sur le vécu des acteurs  … L’immense continent obscur de l’arrière-plan contextuellement déterminé des pratiques non réfléchies que présupposent les moindres de nos activités courantes ; marcher sur un trottoir, faire du vélo, tourner une clef dans une serrure (savoir que cela fonctionnera, confiance primaire…) … Stock de savoir … La nécessaire immersion de tout être humain dans un contexte (quelqu’un qui aujourd’hui défendrait l’esclavage passerait pour fou) … Une règle morale qui ne serait pas applicable à son contexte serait simplement dépourvue de signification morale …  Le contexte (notre monde historiquement constitué) est le grand oublié de la philosophie morale … Nous sommes enchâssés dans un contexte pratique qui est le sol de toute expérience possible, de l’agir, du sentir, du pâtir, du parler, du connaître … Contexte objectif au-delà de mon horizon effectif (mon contexte primaire , celui à ma portée) façonnant mon agir, etc. autant que j’agis, etc. … Nos actions de tous les jours où se vit notre connexion pratique au monde et se déploie notre confiance primaire sont déterminées par le vaste contexte causal qui les sous-tend (retirer de l’argent à un distributeur manifeste adhésion à un système indépendant mais imposant une autorité pratique) beaucoup plus étendu que mon contexte primaire (à ma portée) … Brisure du rapport au contexte, réflexion déclenchée par une dissonance, par un dérangement dans le train-train de l’habitude, par un événement déclencheur perturbateur (surprise, déception, désir insatisfait, intention inaboutie, situation inédite) … Changement de régime de conscience, prise de distance réflexive, changement de régime (au sens du régime d’un moteur), de la somnolence à la vigilance, de l’inattention à l’attention, de la dissipation à la concentration, de l’abstention à l’intervention … Changement du mode de relation à la parcelle de contexte considéré … L’événement ne prend son sens d’événement que sur le fonds d’un horizon de référence au nom duquel la réflexion est déclenchée. » 

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