015,3 – Négation

– Sa forme la plus redoutable, le déni. Pendant des années, refuser la situation (sociale, affective…) où on se trouve et où nous ancre notre comportement, laquelle est cependant la réalité, ce, en se réfugiant derrière une fausse explication qui nous arrange psychologiquement, en s’abritant derrière une fausse version qui nous convient. Ne pas voir  la réalité pour ne pas la voir, inconsciemment et en toute bonne foi, plus d’ailleurs par aveuglement que par confort. Attitude individuelle, et aussi attitude des sociétés. « Nous courons sans souci vers le précipice, après que nous avons mis quelque chose devant nous pour nous empêcher de le voir. » (Blaise Pascal)

– Son apothéose, la tyrannie du ni-ni, sommet de la lâcheté et de l’impuissance.

– Forme redoutable de négation, même pas le rejet du réel mais « Le réel n’existe pas, la vision de don Quichotte » (Michel Onfray). C’est exactement la perspective qu’adopte la clique dictatoriale politico-médiatique pour refuser l’existence même de certains aspects du réel et rejeter dans les enfers ceux qui osent les évoquer, ce au profit d’une position doctrinale imaginaire.

– « La pensée, en vérité, c’est essentiellement la négation de ce qui est immédiatement devant nous. » (Hegel)

« La fonction de la pensée dialectique consiste à briser l’assurance et le contentement de soi du sens commun , à saper la confiance funeste dans la puissance  et le langage des faits ; à démontrer que la non-liberté est établie au cœur des choses et que le développement de  leurs contradictions  internes conduit nécessairement à un changement qualitatif , à l’explosion et à la dissolution de l’état de choses en place. » (Herbert Marcuse)

« La fonction de la pensée dialectique consiste à briser l’assurance et le contentement de soi du sens commun , à saper la confiance funeste dans la puissance d et le langage des faits ; à démontrer que la non-liberté est établie au cœur des choses et que le développement de  leurs contradictions  internes conduit nécessairement à un changement qualitatif , à l’explosion et à la dissolution de l’état de choses en place. » (Herbert Marcuse)

– Deuxième (l’antithèse) et troisième (la négation de la négation, ou synthèse) phases du processus dialectique. Il faut qu’une conviction autre vienne nier la mienne pour que je trouve enfin tous les arguments pour la défendre, sans force de négation la force d’affirmation ne peut donner toute sa mesure  (tiré de Hégel. ) Exemple tiré de l’Anti-Dürhing d’Engels : le grain est nié par la plante qui en émerge, puis celle-ci est niée à son tour par l’épi qui en découle, apportant de nouvelles graines, mais plusieurs au lieu d’une, donc sans retour à la situation antérieure. La loi niée par le crime et le châtiment qui nie l’erreur et rétablit le droit par négation de la négation.

– Le fameux Je préférerais ne pas… sans jamais d’explication de Bartleby (d’Herman Melville) ou la forme de négation (au sens refus) absolue, irréfragable.

– Dans le cadre de la lutte forcenée contre tout négationnisme, des furieux et des furies proposent d’interdire l’émission de propos climatonégationnistes. On n’arrête pas la nouvelle inquisition. Jadis, il fut un moment interdit d’interdire !

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« Le pessimiste préfère toujours une certitude négative à l’incertitude. » (Christophe André)

« Apprendre à dire ‘non’ de façon affirmative et non agressive … Entendre le besoin de l’autre sans se croire immédiatement obligé de le satisfaire … ‘Que ton oui soit oui, que ton non soit non’ (Evangiles). » (Thomas d’Ansembourg)- – Ce qui exclut le : En même temps d’Emmanuel Macron ou le : Je sais bien mais quand même…

 « L’entendement humain est davantage mis en branle par les affirmatives que par les négatives alors que en bonne règle, il devrait se prêter également aux deux …Tout au contraire, lorsqu’il faut établir un axiome vrai, la force de l’instance négative est plus grande. » (Francis Bacon – Novum Organum)

« Le ninisme : Il s’agit là d’une mécanique de la double exclusion … On fait le compte des méthodes avec une balance, on en charge les plateaux, à volonté, de façon à pouvoir apparaître soi-même comme un arbitre impondérable doté d’une spiritualité idéale, et par là-même juste comme le fléau qui juge la pesée … Le réel est d’abord réduit à des analogues ; ensuite on le pèse ; enfin, l’égalité constatée, on s’en débarrasse … On fuit le réel intolérable en le réduisant à deux contraires. » (Roland Barthes –sur la pratique politique du  Ni-Ni)

« En éliminant l’autre sous toutes ses formes (maladie, mort, négativité, violence, étrangeté) sans compter les différences de race et de langue, en éliminant toute singularité pour faire rayonner une positivité totale, nous sommes en train de nous éliminer nous-mêmes. Nous nous sommes battus contre la négativité et la mort, en extirpant le mal sous toutes ses formes. En éliminant le travail du négatif, nous avons déchaîné la positivité, et c’est elle aujourd’hui qui est devenue meurtrière. » (Jean Baudrillard)

« Il y a une conséquence terrifiante à la production ininterrompue de positivité. Car si la négativité engendre la crise et la critique, la positivité hyperbolique engendre, elle, la catastrophe. Toute structure qui traque, qui expulse, qui exorcise des éléments négatifs court le risque d’une catastrophe par réversion totale … Au train où vont les choses, tout mouvement de l’âme un peu négatif retombera bientôt dans la clandestinité. Déjà la moindre allusion spirituelle devient incompréhensible. Bientôt il deviendra impossible d’émettre quelque réserve que ce soit. Il ne restera que le dégoût et la consternation. » (Jean Baudrillard) – La dictature féroce de l’optimisme béat des bien-pensants, bien pourris.

« Les théoriciens de la nouvelle utopie (la société de communication) soutiennent que la négation est un ‘brouillage’ dans la communication. La personnalité valorisée est celle de l’homme positif. La critique, la négation comme outil de la réflexion et de la connaissance sont diabolisées et renvoyées à l’univers malin du désordre entropique. » (Philippe Breton) – Ou comment fabriquer des laquais.

« L’idée de ‘déni’ est une des plus belles trouvailles du XX° siècle. C’est la clé pour comprendre notre temps : crainte de nommer les choses, soif d’amoindrir les faits, penchant pour le jugement moral, devoir de détourner les yeux devant la réalité réputée infectieuse. Oui, la réalité est sale et par conséquent les mots doivent être changés, tels des pansements ; c’est la conviction d’une époque hygiéniste. » (Stéphane Breton)

« Aux rares esprits chagrins qui s’alarmeraient comme moi de cet effacement systématique de toute trace de négativité, l’époque n’a aucune peine à opposer un impressionnant échantillonnage de déviances, de révoltes, rébellions et perversions en tout genre. On pourrait même dire qu’elle les cultive. » (Annie Le Brun) – Pour masquer son vide.

« L’espèce de dénégationnisme auquel se livrent les sociologues de cour … pour établir scientifiquement que ce qui arrive n’arrive pas, que tout cela est dans votre tête, un ‘sentiment’. » (Renaud Camus)

« La recristallisation en masse des inégalités, la mobilité descendante, l’écrasement du pouvoir d’achat des salaires relativement au prix des biens immobiliers (accroissement de l’écart revenu / patrimoine), la paupérisation de cohortes entières de jeunes surdiplômés et la globalisation porteuse d’une montée aux extrêmes de la concurrence forment ensemble une spirale de déclassement aux effets potentiellement dévastateurs … Le processus collectif de déni de la réalité sociale (imposé dictatorialement par les élites politico-médiatiques dominantes) retire aux individus la possibilité de comprendre que leur échec n’est pas le signe d’une insuffisance personnelle mais résulte d’un dysfonctionnement collectif … L’échec est ainsi vécu le plus souvent sur un mode personnel, alors qu’il s’agit avant tout d’une spirale du déclassement systémique d’une société à la dérive. »  (Louis Chauvel – La spirale du déclassement) – Cette stratégie de déni de la part des dominants aboutissant ainsi à diminuer les intéressés, à les culpabiliser, et à déminer toute velléité de rébellion. D’où, à titre de compensation la « psychologisation du mal-être social … La pratique du ‘projet individualisé’ qui remet entre les mains des individus la responsabilité de construire le monde dans lequel ils vivent. »  (François Sicot)

« La négation, elle, équivaut à un programme, elle peut occuper, elle n’est pas vacuité, elle est plénitude, une plénitude inquiète et agressive. Quand on nie, on sait ce qu’on veut.  » (Emil Cioran)

« La négation ne sort jamais d’un raisonnement mais d’on ne sait quoi d’obscur et d’ancien. Les arguments viennent après pour la justifier et l’étayer. » (Emil Cioran)

« Le ‘non’ ayant présidé au morcellement de l’unité primitive, un plaisir invétéré et malsain s’attache à toute forme de négation, capitale ou frivole. Nous nous ingénions à démolir des réputations, celle de Dieu en tout premier lieu ; mais il faut dire à notre décharge que nous nous acharnons encore plus à ruiner la nôtre, en mettant nos vérités en cause et en les discréditant. » (Emil Cioran)

« Naguère, on se définissait par les valeurs auxquelles on souscrivait ; aujourd’hui, par celles que l’on répudie … Sous le faste de la négation. » (Emil Cioran)

« Plus forte que la négation est la néantisation (anti-création), faire en sorte que quelque chose ayant été ou quelqu’un ayant vécu n’ait jamais existé … Car la négation implique toujours la reconnaissance implicite de l’existence de ce qui est nié, ce qui est inacceptable pour un projet totalitaire absolu dans la mesure où c’est ce minimum de réalité qu’il importe d’extirper. » (Jacques Dewitte – s’inspirant de George Orwell  et de son analyse des langues totalitaires) 

« Dans l’heureuse certitude qu’il avait de ses mérites et de son importance, M. Podsnap avait établi que tout ce qu’il décidait d’ignorer cessait ‘ipso facto’ d’exister. » (Charles Dickens) – Et Dickens ignorait alors la profonde faculté de non voyance de nos élites politico médiatiques.

« La positivité dialectique de la négativité. Seul le ‘Non’ est finalement producteur de mouvement et d’avancée. » (Jacques Ellul)

« Il est difficile de ne pas approuver et estimer. » (Marc Fumaroli)

« Il est plus facile de nier un problème si l’on interdit d’en mesurer  l’ampleur … On n’aime pas les réalités fâcheuses. «  (Stéphane Germain) – Voilà pourquoi le gang dominant interdit les statistiques ethniques, etc. Est-ce simple ?

« Toute œuvre d’opposition est une œuvre négative, et la négation, c’est le néant. Il ne faut pas renverser, il faut bâtir. » (Goethe)

« Un de ces hommes d’opposition qui se font un métier de la négation, tout en ne demandant pas mieux que de plumer à l’occasion l’ordre des choses existants. » (Goethe)

« Il y a d’ailleurs des négations qui ressemblent elles-mêmes à de véritables cris de rage, comme par exemple celles des soi-disant ‘libres-penseurs’ à l’égard de tout ce qui se rapporte à la religion. » (René Guénon)

« ‘Ce que l’on admet n’est jamais bien admis, mais ce que l’on rejette est toujours rejeté’. La négation est sans degrés, elle nous paraît plus proche de l’infini, elle donne d’emblée, alors que l’affirmation réclame effort, risque, incertitude. L’attitude de la révolte sur le plan de l’existence traduit l’attitude logique de la négation. Le oui et le non semblent symétriques. Mais dans la négation on atteint l’absolu d’emblée (néant, infini et suicide), dans l’affirmation on ne peut que monter par degrés vers cet infini, on peut oser nuancer, concéder, restreindre. La négation reflète une tendance au paroxysme. On met aisément zéro, jamais vingt. La haine est absolue et le plus fou des amours peut croître encore. La négation nivelle puisqu’elle ne dose pas. .. Il est difficile à l’homme de s’établir dans les régions intermédiaires. Le terrain de la probabilité n’est pas fait pour lui. » » (Jean Guitton – citant Charles Péguy ?)

« La négation interdit la graduation, la participation, le jugement sur le plus et le moins. » (Jean Guitton)

« Les gens tombent plus facilement d’accord sur un programme négatif, la haine, l’envie… que sur des buts positifs. C’est presque une loi de la nature humaine. » (Friedrich A. Hayek) – Il n’y a qu’à voir la gauche et son exploitation forcenée de l’envie.

« Tout être porte en lui une puissance de négation qui l’amène à se ‘déchirer’, et, par là même, le contraint à se dépasser. C’est en cela qu’il est vivant. La contradiction est en effet la racine de tout mouvement et de toute manifestation vitale. » (Hegel – approx.)

« La conciliation dialectique n’est-elle pas littéralement ‘réconciliation’, c’est-à-dire pacification et cessation de toute belligérance ? » (Vladimir Jankélévitch)

« Plus la preuve du penchant totalitaire est patente, plus sa dénonciation doit être catégorique, plus les leçons humanistes doivent être ardentes. »  (Claude Jannoud) – De même pour tous les rideaux de fumée.

« Simples négations des qualités : malhabile, maladroit, insensible, incapable, impitoyable. Etc. » (Joseph Joubert)

« Tout ce qui est culturel est bon en soi, parce que tout discours négatif est tabou …  La loi du marché est de vendre, donc de dire du bien de tout le monde … Fermez-la, ou vous êtes réac. » (Pierre Jourde)

« On n’en a jamais fini avec le négatif. Il ne faut jamais succomber à la tentation d’en finir avec le négatif. Car celui-ci est la racine et la rançon de la liberté. Prétendre en finir avec le négatif, vouloir éliminer le ‘vide’, c’est s’acheminer à coup sûr vers le ‘plein’, c’est-à-dire le totalitarisme … Ce n’est pas en donnant le pouvoir aux opprimés qu’on peut détruire l’oppression. » (Jacques Julliard – interprétant Simone Weil)

« En tout ce qui touche aux questions essentielles, l’objection est toujours plus facile que la réponse. L’homme animal se fait toujours plus spontanément entendre que l’homme spirituel, et il manque rarement des subtilités et finesses désirables pour paraître, des deux, le plus intelligent. Mais c’est précis‚ment cette facilité‚ qui m’est suspecte en des sujets ardus; cette clarté, en des sujets mystérieux; cette parole obvie, en des sujets qui demandent ré‚flexion et recherche … C’est cette manière d’être intelligent, en face de problèmes devant lesquels l’homme vraiment grand doit tout d’abord sentir son embarras. »  (cardinal Henri de Lubac)

« Il s’agissait pour nous (la jeunesse de la fin du XIX° siècle) de dire ’non’ à tout.  Il s’agissait de contester toutes les évidences et d’opposer à celles qui s’imposaient la rébellion de la fantaisie, au besoin de la paresse et de l’ignorance. Le mot de scepticisme n’est pas suffisant pour qualifier ce mélange d’incuriosité frondeuse avec le délire de l’examen … Un ‘à quoi bon ? ‘ réglait le compte universel des personnes, des choses et des idées. C’était le néant même, senti et vécu. » (Charles Maurras)

« Je ne connais pas de plaisir plus méprisable que celui de contredire et de tout contester. Approuver, exposer généreusement, admirer des idées dignes d’attention et d’intérêt, voilà, je pense, les voluptés véritables. Un esprit de chicane fait juste le contraire de l’esprit critique. »(Charles Maurras)

« Les mêmes principes d’insurrection de la partie contre le tout qu’on faisait valoir contre le pape devaient nécessairement servir contre les rois, puis contre la partie elle-même. Nogaret est le cousin de Robespierre et de Lénine. » (Charles Maurras) – La négation, le refus sont contagieux. On l’a trop oublié. 

« Les parents ne disent plus non à leurs enfants. Ils ne s’y sentent plus autorisés. En effet. Ils ne peuvent plus dire non, tout simplement parce que d’une manière générale, on ne peut plus dire non … Qu’est-ce qui nous dit non encore ? On a tout maîtrisé, on a tout dominé, on a tout fait, on a tout vu, on a tout exploré … Qu’est-ce qui peut encore nous dire non aujourd’hui ? Le terroriste peut-être… » (Charles Melman)

« Déni, désaveu, démenti … ‘Je sais bien … mais quand même’ … ‘Je sais bien que la mort est inéluctable … mais quand même’ … ll s’agit d’une manière à la fois de reconnaître ce qui est et en même temps de ne pas le reconnaître. Dans le contexte social actuel, ce procédé psychique semble prédominant là où, hier, c’était le refoulement que l’on rencontrait le plus souvent. » (Charles Melman)

« Le négatif, désormais, apparaît synonyme de passé ; et, dans cette mesure, il n’est plus susceptible que d’une perpétuelle criminalisation … Notre temps a entrepris d’effacer le négatif … et d’imposer un treizième ou quatorzième commandement qui dit en substance ‘Tu seras positif’. » (Philippe Muray)

« Vous mettez toutes choses sur le même plan. Vous êtes perdus d’orgueil, vous voulez avoir le droit d’être libres contre vous, contre vos amours mêmes. Chaque adhésion vous paraît une limitation. Vous avez immédiatement envie de vous déjuger pour vous démontrer que vous êtes libres de rejeter ce que vous aviez embrassés … ‘je suis l’esprit qui toujours nie…’ (Goethe) … Quand cessera-t-on de  vivre avec l’idée qu’il n’y a de grandeur que dans le refus, que la négation seule ne déshonore pas ? »  (Paul Nizan – sur l’adhésion au parti et l’acceptation de ce qui paraît des erreurs au militant – La conspiration)

« Le déni … un mécanisme qui permet de congédier la réalité de ce que l’on est (quand elle n’est pas belle) au profit de l’idée qu’on se fait de soi (toujours magnifique) … Celui pour lequel le réel n’a pas eu lieu … Ne pas voir ce qui est et préférer voir ce qu’on veut … Le monde tel qu’il est ne convient pas, lui substituer le monde tel qu’il devrait être, autrement dit : obéissant à ses caprices, à ses fantaisies … Dans cette opération de substitution du devoir être à l’être réside le mécanisme de la dénégation, une passion universelle et grandement partagée … Pourquoi le dénégateur nie-t-il ce qui a eu lieu ? Parce que le réel lui renvoie de lui une image qui ne correspond pas à l’idée qu’il se fait de lui-même … La dénégation  pousse comme une fleur du mal sur le fumier d’un orgueil immodéré : on se croit grand, fort, beau … or, on est le contraire : petit, faible, laid … Le monde du dénégateur est un monde de remplacement, un univers dans lequel ce qu’on n’est pas parvenu à être laisse toute la place à ce qu’on aurait voulu être, et qui devient le vrai. » (Michel Onfray – Le réel n’a pas eu lieu) – Le  refus de voir ce qui est est aussi très pratiqué en politique, en fait, dans tous les cas, le procédé fonctionne plus par inexistence de la réalité que par sa négation explicite, car nier serait toujours reconnaître une possibilité. Le déni ne nie pas, il annule.

« Il faut apprendre à dire ‘Non’. » (Octavio Paz)

 « Ce que l’on admet n’est jamais bien admis, mais ce que l’on rejette est toujours rejeté. » (Charles Péguy).

« La négation comme l’abolition des antinomies, le défi se faisant croyance. ‘Tout porte à croire qu’il existe un certain point de l’esprit d’où la vie et la mort, le réel et l’imaginaire, le passé et le futur, le communicable et l’incommunicable, le haut et le bas cessent d’être perçus contradictoirement.’. La négation devient négation de la négation, de l’antinomie et même de la différence. Rechercher le lieu du non-contradictoire, y croire, coûte que coûte, tel est le programme proclamé. » (Jean-Bertrand Pontalis – citant le Second manifeste du surréalisme et André Breton)

« L’illusion d’une sorte de positivité fantomale … Le prestige fascinant et ambigu de ce qui n’est pas par rapport à ce qui est, de ce qui serait ‘autrement’ par rapport à ce qui est ainsi, de ce qui est ‘ailleurs’ par rapport à ce qui est ici … Comme si le fait de signaler que quelque chose n’est ni ici ni ainsi suffisait à établir que ce quelque chose existe ou pourrait exister. Cette illusion élémentaire qui fait la fortune des charlatans, fait aussi parfois celle des philosophes qui s’y laissent prendre … La force invulnérable de la pensée de l’ailleurs et de l’autrement consiste paradoxalement en son impuissance à se définir elle-même : à préciser ce qu’elle désire et ce qu’elle veut … Les notions négatives prospèrent à l’abri de leur propre vague … C’est pourquoi un propos contestataire est toujours, et par définition, incontestable … L’essence de la négativité n’est pas de dire non mais de ne savoir rien dire, pas même le non auquel elle aspire  » (Clement Rosset – Le philosophe et les sortilèges)

« Rien n’est plus rare que le discernement dans la négation. » (Jean Rostand)

« On ne doit pas accorder toutes choses, ni à tous. Il est aussi louable de refuser avec raison que de donner à propos. C’est en ceci que le ‘non’ de quelqu’un plaît davantage que le ‘oui’ d’autres. » (marquise de Sablé)

« La négation est refus d’existence. Par elle, un être, ou une manière d’être, est posé puis rejeté au néant. » (Jean-Paul Sartre)

« L’homme est l’être qui peut dire non. » (Max Scheler)

« Pourquoi le négationnisme, défini comme un délit quand il porte sur le nazisme, ne l’est-il pas quand il escamote les crimes communistes ? » (Jean Sévillia) – Si nous ne connaissions l’auteur de cette interrogation nous penserions qu’il n’a rien compris.

« La négation est ce qu’il y a de plus simple. C’est pourquoi les grandes masses dont les éléments ne peuvent s’entendre sur un objectif, s’y retrouvent. » (Georg Simmel)

« Il est élégant d’être partisan de l’opposition et ‘plouc’ de se déclarer favorable à la majorité … Les contestataires ont toujours raison. Tout contestataire est en puissance un héros. » (Georges Suffert) – Et pas qu’en matière politique.

« ‘Je suis l’Esprit qui dit toujours non’ ricane le démon faustien’. » (cité par Gustave Thibon)

« En France ou en Allemagne aujourd’hui le ‘négationnisme’ est puni par la loi ; la négation des crimes communistes, voire l’éloge de l’idéologie qui leur a présidé, est parfaitement licite. » (Tzvetan Todorov)

« Les objections naissent souvent de cette simple cause que ceux qui les font n’ont pas trouvé eux-mêmes l’idée qu’ils attaquent. » (Paul Valéry)

« Je tiens pour contraire à la volonté d’autonomie individuelle le sentiment, nécessairement désespéré, d’être en proie à une conjuration universelle de circonstances hostiles. Le négatif est l’alibi d’une résignation à n’être jamais soi, à ne saisir jamais sa propre richesse de vie. » (Raoul Vaneigem –Traité de savoir-vivre à l’usage des jeunes générations)

« Le monde de la postmodernité fait croire que la rébellion, l’insoumission, la révolte, le doute, le non sont le signe d’un esprit libre ; Il s’agit là d’une farce, d’une fantasmagorie, d’un canular, d’une mystification. On ne peut pas dire non systématiquement. Quand on le fait … on ne dit pas non. On dit oui (à autre chose) sans savoir que l’on dit oui … Alors qu’on croit douter, on ne doute de rien. » (Bertrand Vergely) – Voir le délire hallucinatoire des comiques de la France insoumise, des anti-n’importe quoi hurlants de toutes espèces, plus soumis à des schémas préétablis (en dehors d’eux-mêmes), tu meurs.

 « Ou bien tu es pour, ou bien tu es contre. Qui n’est pas avec nous est contre nous. » (adage du manichéisme quotidien) – « On peut rejeter une idée (hypothèse, croyance, idéologie…) ou bien parce qu’on a un point de vue opposé, ou bien parce qu’on n’adhère ni à cette idée ni à sa négation (exemple de l’athéisme, négation active et de l’agnosticisme, négation passive) … la position intermédiaire n’évite pas pour autant d’être en conflit avec la vision manichéenne et systématique consistant à comprendre le monde en fonction de paires de concepts opposés. » (Paul Watzlawick)

« Quand je fermerais les yeux cela ne détruirait pas le soleil. » (?)

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