390,1 – Hasard

-Le hasard, dit-on,  est la rencontre de deux séries indépendantes.

« Balzac disait que le hasard est le plus grand romancier du monde. » (Jean Borie)

– Peut perturber les plus savantes combinaisons. Ainsi le biologiste soviétique, Lyssenko, ennemi acharné du règne du hasard, et trouvant que la science génétique n’était pas assez propice au délire harmoniste des sociétés nouvelles et évoluées, voulait le bannir de la biologie et transformer les espèces végétales par bonds dialectiques, par saut d’une espèce en une autre (du blé en seigle, du pin en sapin…). La nature fut rétive et l’agriculture soviétique connut l’effondrement que l’on sait. Lyssenko, et son protecteur, génial père des peuples, auraient dû écouter Mallarmé (cf ci-dessous)

– Le hasard fait parfois bien les choses, ainsi la concomitance temporelle d’une élection présidentielle que François Fillon était tout à fait en position de gagner et l’atterrissage au Canard Enchaîné d’un volumineux dossier parfaitement ficelé sur les accommodements financiers de son couple (accommodements que, d’ailleurs, beaucoup de politiques pratiquent joyeusement) ainsi que l’empressement des média toujours pondérés et de la justice toujours indépendante d’en faire des tonnes au plus vite (il est vrai que le temps électoral pressait). Bienheureux hasard.

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« Rencontre de deux séries causales indépendantes ou rencontre d’un système et d’un accident, soit l’intrusion d’une nouvelle causalité indépendante … Qu’une tuile soit décrochée d’un toit par grand vent est intelligible en fonction de lois connues, que telle personne passe sous le toit pour se rendre à ses occupations est encore intelligible, que la tuile tombe sur la personne est une rencontre à la fois nécessaire et irrationnelle … nécessaire car résultant des déterminismes qui gouverne les séries, irrationnelle car n’obéissant à aucune loi. » (Raymond Aron – reprenant la théorie de Cournot sur le hasard) – Constatation policière : Il s’est trouvé au mauvais endroit au mauvais moment.  « Pour que le hasard intervienne il faut que  l’effet ait une signification humaine. » (Bertrand Vergely)

« Si les choses vont au hasard, ne te laisse pas aller, toi, au hasard. » (Marc-Aurèle)

« N’accomplis aucun acte au hasard, ni autrement que ne le requiert la règle qui assure la perfection de l’art. » (Marc Aurèle)

« Rien de plus triste qu’une vie sans hasard. » (Balzac)

« A Paris, seuls les gens ayant de nombreuses fréquentations peuvent compter sur le hasard ; plus on a de relations, plus les chances de succès augmentent, le hasard est lui aussi du côté des bataillons les plus forts. » (Balzac – Illusions perdues)

« Le hasard ne conçoit pas, n’ajuste pas, n’organise pas. Il ne fait que de la bouillie. » (René Barjavel)

« Le hasard est indépendant ; il n’aime pas qu’on compte sur lui. » (Anne Barratin)

« Le hasard nous laisse respirer : nul ne l’a voulu, quel soulagement ! … Produire du hasard afin que toutes choses ne s’enchaînent pas nécessairement et sans discontinuer, ce qui, dans le bonheur ou dans le malheur, serait intolérable aux hommes. Produire du hasard afin que les hommes puissent jouer et croire à la chance ou à la malchance, ce qui les allège de toute culpabilité. Importance vitale de la croyance en la possibilité de l’accident, de l’occurrence purement accidentelle, donc insignifiante, indifférente ou irresponsable (la mort d’un ami, revers de fortune…) …. Si ces choses-là doivent en plus être imputées à une volonté, à une malignité objective ou subjective, fût-elle celle de Dieu, quelle charge, quel fardeau, quel surcroît de responsabilité et de faute … Ainsi c’est Dieu qui nous accorde le hasard dans  son immense pitié. » (Jean Baudrillard)

« La vie est hasard … Ce mariage (de molécules) aurait pu n’avoir pas lieu, mais il succède à un nombre quasiment infini de combinaisons avortées. En un sens les chances de la vie étaient … très faibles. En un autre sens, dés lors qu’elles existent, le nombre quasiment infini des coups de dés, que joue la nature, réduit à l’extrême leur improbabilté … les exceptions deviennent quasiment inévitables, puisque toute règle en comporte et que le jeu continue jusqu’à ce que l’exceptionnel se produise … Si un orateur parle interminablement, il n’évitera pas le lapsus. » (Emmanuel Berl)

« Hasard, dit-on ; mais le hasard nous ressemble. » (Georges Bernanos)

« Ce que nous appelons le hasard est peut-être la logique de Dieu. » (Georges Bernanos)

« Le hasard a des caprices ; jamais on ne lui vit d’habitudes. » (Joseph Bertrand)

« Le hasard. Le nom moderne du Saint-Esprit. » (Léon Bloy)

« Un heureux hasard, un hasard providentiel, le hasard a voulu, le hasard a permis, il faut laisser quelque chose au hasard, dit-on. – Donc le hasard est Dieu, tout le prouve, et qu’on y fasse bien attention, il est le seul et dernier Dieu qui obtienne encore, aujourd’hui, l’adoration des imbéciles. Le hasard n’a pas de commandements. Il peut tout, il veut tout et il fait tout, mais il ne s’oppose à rien, ne défend rien. Essayez de dire : le hasard n’a pas voulu, le hasard n’a pas permis, le hasard est offensé, le hasard punit … Vous n’y parviendrez jamais. Avec lui pas d e transgression possible… » (Léon Bloy – Exégèse des lieux communs – 1, CXXVI)

« Je ne parle pas au hasard, dit-on. – C’est ce qui se dit ordinairement quand on veut appuyer du témoignage de sa conscience une abominable calomnie. On donne à entendre par là qu’on sait parfaitement à quoi s’en tenir et qu’on dit exactement ce qu’il faut dire, sans un mot de plus ni un mot de moins … A qui ou à quoi, je le demande, osera-t-on parler, si on ne parle pas au hasard ? Que restera-t-il aux orateurs parlementaires ou non parlementaires, aux prédicateurs de carême, aux avocats, aux conférenciers, aux professeurs de philosophie et de morale, aux historiens, aux savants, aux médecins, aux vétérinaires, aux psychologues, aux sociologues, aux pitres de foire, aux journalistes enfin sans lesquels nous ne pourrions pas vivre ?… » (Léon Bloy – Exégèse des lieux communs – 2, C)

« Chaque fois qu’une chose est accomplie dans un but quelconque et qu’une autre chose que ce qui était recherché se produit, pour une raison ou pour une autre, cela s’appelle le hasard … On croit … que cela est arrivé fortuitement et pourtant, cela ne provient pas de rien … Cela résulte d’un concours de circonstances et non d’une action intentionnelle … On peut donc définir le hasard comme un événement inattendu, résultant d’un concours de circonstances et qui survient au milieu d’actions accomplies dans un but précis. » (Boèce)

« Le vrai lieu est donné par hasard, mais au vrai lieu le hasard perdra son caractère d’énigme. » (Yves Bonnefoy)

« L’argument de Rousseau selon lequel on ne saurait davantage expliquer l’apparition de la vie par le hasard qu’on ne peut espérer récrire ‘l’Iliade’ en combinant au hasard les lettres de l’alphabet conserve une certaine force de conviction. » (Raymond Boudon)

« Le hasard, dit-on, dû à rien, ne présenterait par définition aucun intérêt du point de vue de la connaissance … S’il ne présente guère d’intérêt scientifique, il peut être indispensable pour comprendre un événement, un phénomène, un processus … Certaines de mes actions ne peuvent être comprises que si on voit que je me suis trouvé placé dans des circonstances particulières … L’effet Cournot, la rencontre de deux séries causales indépendantes … la tuile qui tombe du toit et vient assommer un passant : la chute de la tuile prédéterminée, mal accrochée, aussi prédéterminé le passage du passant qui se rendait à ses occupations comme tous les jours … Deux séries causales, mais leur rencontre n’est le produit d’aucune causalité, rien n’imposait que la tuile se détache au moment où l’homme passait sous le toit … ‘il s’est trouvé au mauvais moment au mauvais endroit’ dit-on pour certaines victimes de crimes … Le hasard n’est donc pas rien, forme particulière que peuvent prendre les ensembles d’enchaînements cause-effet. » (Raymond Boudon – citant les revirements de Lénine à partir du Que faire ? passant de l’intelligentsia vue comme assistance du processus révolutionnaire, ce en période d’expansion forte et de dynamique ouvrière ; et ensuite privilégiant le parti-guide et moteur, ce en période de récession et de défensive ouvrière doublée de l’apparition d’une élite, notamment étudiante et agitée)

« La planification, c’est du hasard mis en conserve. » (Albert Brie)

« Le hasard est généralement un hôte indésirable dans la pensée humaine, inadmissible surtout face au malheur. »  (Gérald Bronner)

« Nous sommes en délicatesse avec le hasard, parce que nous ne pouvons admettre qu’il existe sans admettre, en même temps, que nous devons renoncer à connaître l’explication de certains événements … De plus, le hasard est un facteur très important de désenchantement. En effet, il n’a pas d’histoire, il n’est pas aisément préhensible par l’esprit, et surtout il va contre le besoin qui nous pousse à donner du sens à toutes choses. » (Gérald Bronner)

« Vu comme le grand pourvoyeur du désenchantement du monde … Indésirable … En effet, une explication fondée sur le hasard suspend les hypothèses du merveilleux et des potentialités d’un monde caché. Elle nous fait voir, au contraire, qu’il n’y a pas d’intention là derrière. Elle nous confronté à un monde partiellement dépouillé de son sens et de son âme … Les théories du complot sont avant tout un anti-hasard. » (Gérald Bronner)

« Le hasard, hôte indésirable de la pensée humaine chassé : lorsque les hommes avaient une vision religieuse du monde (religion comme explication consolatrice) … ou avec le monde mécanisé et déterministe de la science …ou suivant les lois régissant le flux historique (Hegel, Marx, A. Comte…) … Le principe de précaution indique quelque chose de notre sentiment d’impuissance et du retour de l’imprévisibilité et donc du hasard dans le débat public ». (Gérald Bronner)

« L’idée d’un hasard ‘juste’ (d’une justice immanente dans le hasard)  est très ancrée en nous (elle inspire toutes sortes de martingales… par décroissance de la possibilité subjective d’apparition, dit effet négatif de ‘récence’) … Quand bien même aurait-on obtenu face mille fois de suite, pile n’aurait qu’une chance sur deux de sortir lors du prochain jet. » (Gérald Bronner)

« Beaucoup de nos idées fausses nous paraissent confirmées par notre expérience … Nous ne cherchons pas à tester ces idées en recueillant des contre-exemples, mais nous captons et mémorisons facilement tout ce qui affermit nos croyances … qui nous apporte un confort cognitif … D’autant plus si nous y avons intérêt … Lorsque vous êtes en quête de signes ils finissent toujours par arriver. Capacité, ou manie, des êtres humains de conférer un sens aux phénomènes. » » (Gérald Bronner) – Tendance très proche du biais de confirmation. Tendance à ne retenir que les informations qui confirment une idée préconçue.

« Conditionnée par les informations qui nous parviennent … Certains événements qui arrivent ‘en série’ le doivent beaucoup au fait qu’ils furent inaugurés par un acte qui provoqua les commentaires des médias (vocations à propos d’un phénomène social) … Tendance de l’esprit à évaluer  la vérité d’un énoncé en en cherchant des confirmations plus que des infirmations …Le biais de confirmation : ‘Les hommes, infatués des apparences vaines, prêtent attention aux événements, quand ils remplissent leur attente ; mais, dans les cas contraires, les plus fréquents, ils se détournent et passent outre’ … Nous cherchons en général des informations pour affermir une croyance.» (Gérald Bronner – sur la loi des séries – citant Francis Bacon et le Novum Organum) – « Ou qui nous apportent un confort cognitif. » (même auteur)

« Une erreur commune, la confusion entre corrélation et causalité …  Les théories du complot sont avant tout un anti-hasard. » (Gérald Bronner)

Négligence de « la taille de l’échantillon … qui nous fait ressentir comme extraordinaires des phénomènes improbables mais qui sont cependant la production du hasard si on tient compte de la taille de l’échantillon duquel ils sont issus (prédictions astrologiques exactes comparées au nombre des fausses … La nature qui nous paraît si parfaite parce que nous ne voyons que ses réussites, et non la masse titanesque des brouillons enfouis dans une histoire immémoriale.’ » (Gérald Bronner)

« Erreur de négligence de la taille de l’échantillon (cas des images et tâches remarquables par leur aspect, des accidents.. ) …Quand nous sommes confrontés à des phénomènes à probabilité d’apparition faible, mais avec un grand nombre d’occurrences, compatibilité entre l’aléatoire et l’extraordinaire …  Nous partons de l’idée qu’une situation ne se produit pas en général si elle est très improbable en particulier … Incapacité à tenir compte du nombre d’occurrences qui ont présidé à l’avènement du phénomène remarquable (dans le cas des voyantes, et dans bien d’autres situations, les succès se retiennent mieux que les échecs)  … Il est probable que chaque année le hasard produise des figures ou des événements qui, en raison des dispositions de l’homme  à percevoir du sens dans le non-sens, de la forme dans l’informe, seront interprétées comme des signes … Les probabilités de chance de gagner 6 numéros au loto sont très faibles, et cependant il y a bien un gagnant (nombre de grilles remplies. » (Gérald Bronner) 

« La tentation est grande de convertir le hasard en verdict et la chance qui nous atteint en signe d’élection. » (Pascal Bruckner) – Capitalisme. L’argent tribunal de la valeur personnelle. La réussite, signe d’élection chez les protestants

« Le hasard n’a jamais rien créé qu’entre les mains des créateurs. » (Paul Brulat)

« Les hommes habiles ne cèdent pas au hasard, mais ils l’attirent, le préparent et semblent presque le déterminer. » (La Bruyère)

« Tant de choses dites l’œuvre du génie qui furent l’œuvre du hasard. » (Chateaubriand)

« Qui obtiendra le premier prix dans un concours de circonstances ? »(Paul Claudel)

« L’indécision rend le hasard décisif. » (Louis Dumur)

« Le hasard primitif (différent de l’aléatoire moderne calculable au moyen des probabilités) a un sens, ce sens assigne la responsabilité de la décision à un extérieur, à une transcendance. Il y a un sujet du hasard, et ce sujet est extérieur à la sphère des hommes … Le partage des terres par tirage au sort, le choix du ‘roi’ du carnaval, qui sera mangé en cas de naufrage. » (Jean-Pierre Dupuy)

« Les hommes ne parviennent pas à concevoir que les choses arrivent par hasard  et leur ‘sainte horreur du hasard’ explique qu’ils aient toujours besoin d’inventer des histoires qui expliquent ce qui est arrivé. » (Umberto Eco)

« Le hasard, c’est Dieu qui se promène incognito. » (Albert Einstein)

« Il n’y a pas de hasards, il n’y a que des rendez-vous. » (Paul Eluard)

« L’accumulation met fin à l’impression de hasard. » (Sigmund Freud)

« Le hasard, c’est peut-être le pseudonyme de Dieu quand il ne veut pas signer. » (Théophile Gautier)

« Il entre dans toutes les actions humaines plus de hasard que de décision. » (André Gide)

« Le hasard prévient si souvent le choix, il décide presque de tout, et de nos amis aussi bien que de notre état ; c’est en partie pour cela que la plupart se plaignent de leur sort. » (Baltasar Gracian)

« Le hasard est le travestissement favori du destin. » (Sacha Guitry)

« C’est ainsi que se modifie la structure interne de la religion du succès à laquelle, par ailleurs,  on tient si fermement. La voie ‘per aspera ad astra’, qui implique des difficultés et des efforts, est progressivement remplacée par l’idée d’une loterie à laquelle il suffit de gagner … Les films soulignent ce hasard (les séries télévisées actuelles) … On  leur assure (aux spectateurs) qu’ils n’ont pas besoin d’être différents de ce qu’ils sont … On leur fait comprendre que l’effort ne sert d’ailleurs à rien du fait que même la fortune bourgeoise n’a plus aucun rapport avec l’effet mesurable de leur propre travail … Une telle liberté est symbolisée dans les différents secteurs de l’industie culturelle par la sélection arbitraire de cas banals. » (Max Horkheimer et Theodor Adorno) – A la loterie, chacun a sa chance, n’est-ce pas ?

« La valeur d’un hasard est égale à son degré d’improbabilité. » (Milan Kundera)

«  Il n’existe aucun moyen de vérifier quelle décision est la bonne car il n’existe aucune comparaison. Tout est vécu tout de suite pour la première fois et sans préparation. Nous ne pourrons jamais vérifier quelle était la bonne décision et quelle était la mauvaise décision, parce que dans une situation, nous ne pouvons décider qu’une seule fois. Il ne nous est pas donné une deuxième, une troisième, une quatrième  vie pour que nous puissions comparer différentes décisions. … C’est ce qui fait que la vie ressemble toujours à une ‘esquisse’ … encore que celle-ci est toujours l’ébauche de quelque chose, la préparation d’un tableau, tandis que l’esquisse de notre vie est une ébauche de rien, une esquisse sans tableau … ‘Sa rencontre avec Téréza avait été le résultat de six improbables hasards’. » (Milan Kundera – L’insoutenable légèreté de l’être) – Qui de nous ne peut voir l’accumulation de hasards qui l’ont mené là où il est, qui il est, avec qui il est…

« La différence entre la Providence et la croyance au destin ou au hasard consiste en ce que la Providence divine se sert pour atteindre son but universel de la volonté humaine, libre en dépit de sa corruption. La doctrine d’un destin aveugle néglige la dialectique de la nécessité providentielle et de la liberté de la volonté. alors que, au contraire, la doctrine du hasard épicurienne rabaisse la liberté à un simple caprice. » (Karl Löwith)

« Le hasard gouverne un peu plus de la moitié de nos actions, nous dirigeons le reste. » (Machiavel)

« Un coup de dés jamais n’abolira le hasard. » (Stéphane Mallarmé – un poème aussi étrange que célèbre) –Tout devient aléatoire, plus aucun absolu. Allégorie de l’écroulement de l’ordre d’hier et de l’avènement de l’incertitude (allusion à la mort de Dieu ?)  Nul n’est maître des circonstances, jamais le résultat d’une action ne sera garanti comme étant exactement conforme à l’intention – « Toute pensée émet un coup de dés. » (Stéphane Mallarmé) – « Toute action entraîne dans le monde des conséquences dont l’agent ne s’était pas douté. » (Karl Jaspers) – « Il n’y aura jamais un coup de dés qui, par sa perfection automatique, mettrait fin au hasard … Jamais ne sera atteint le point de perfection technique et de prévention absolue tel que l’événement fatal aurait disparu. » (Jean Baudrillard)

« Les décorations comme les obus tombent au hasard, justement ou injustement. » (André Maurois)

« Nous vivons par hasard. » (Montaigne)

« A tout instant le hasard vous envoie promener. En profitez-vous ? » (Paul Morand)

« Essayez de comprendre l’individu humain en éliminant tout hasard, en faisant abstraction de sa propre histoire et de sa pré-histoire. » (d’après Edgar Morin) – Combien de hasards, d’événements fortuits, imprévisibles dans ce qui a bâti notre destinée. 

« Dans tout ce que l’on entreprend, il faut donner les deux tiers à la raison et l’autre tiers au hasard. Augmentez la première fraction, vous serez pusillanime. Augmentez la seconde, vous serez téméraire. » (Napoléon Bonaparte)

« Nul vainqueur ne croit au hasard. » (Nietzsche)

« La force d’un homme se mesure à la somme d’incertitudes qu’il peut porter. » ( Nietzsche) – « La valeur d’un homme se mesure à sa résistance aux chocs de l’imprévisible, c’est-à-dire à la somme des hasards qu’il peut intégrer dans sa destinée. » (Gustave Thibon)

« Disparition du hasard qui conduirait à un monde sans surprise et donc sans saveur. La multiplication des algorithmes prédictifs réduit le champ de notre ignorance et donc, mécaniquement, l’espace dévolu au hasard. » (Denis Olivennes – évoquant les multiples formes récemment apparues de collecte des données)

« Le hasard suffit, en effet, à expliquer tout ce qui relève d’une évolution qui est la clé de la vie. Et à expliquer, au-delà de la vie, l’histoire de l’univers Mais ni l’espace, ni le temps, ni la nécessité ne sont le fruit de l’évolution. Ils sont là. Ils sont donnés. Ils sont massifs et inexplicables. Le hasard règne sur les aléas de la matière, de la vie, de l’histoire. Il ne suffit pas à rendre compte de l’espace, ni du temps, ni de ces lois d’airain qui font tourner l’univers. » (Jean d’Ormesson)

« Le hasard, mais c’est Dieu qui garde l’anonymat. » (Edouard Pailleron)

« Le hasard ne favorise que des esprits bien préparés. » (Louis Pasteur – cité par Yves Michaud – sur l’observation et la découverte scientifique attribuée au hasard)

« Il y a hasard lorsque de petites causes produisent de grands effets. » (Henri Poincaré)

« On nous exhibe un enfant mort ou grièvement blessé quand cela paraît opportun. Le petit Aylan envahit les unes en pleine polémique sur l’accueil des réfugiés … La campagne présidentielle de 2017 nous aura appris qu’il y a des questions que l’on n’a pas le droit de se poser (allusion à l’embuscade tendue à François Fillon)… ’Pourquoi maintenant ?’ Il paraît que c’est ‘complotiste’ de se poser cette question … On devrait avoir le droit de s’étonner du moment auquel sort une affaire. On devrait pouvoir se demander qui est à l’origine de telle ou telle fuite … On nous oblige déjà à croire au Progrès continu. Maintenant, on voudrait nous faire croire au hasard permanent … Les journalistes devraient être les premiers à s’interroger … devant tout événement qui arrive trop évidemment à point nommé. Mais ils ne s’étonnent jamais, pire, ils s’interdisent de s’étonner. Ils ont tacitement acceptés d’être manipulés. » (Ingrid Riocreux)

« On ne saurait davantage expliquer l’apparition de la vie par le hasard qu’on ne peut espérer récrire ‘L’Iliade’ en combinant au hasard les lettres de l’alphabet. » (J. J. Rousseau – non textuel)

« Quelque obligation qu’on ait au hasard, on rougit d’en convenir. C’est de tous les bienfaiteurs celui qui fait le plus d’ingrats. » (Baron de Stassart)

« Comme si les humains, toujours en quête d’explications causales, jusque dans l’astrologie, manifestaient de la sorte une ‘sainte horreur du hasard’, selon l’expression d’Umberto Eco … ‘L’attrait irrésistible que l’astrologie a exercé pendant des dizaines de siècles sur l’esprit des hommes ne montre-t-il pas que nous ne sommes pas disposés à regarder notre sort comme le produit du hasard’. » (Pierre-André Taguieff – citant Erwin Schrödinger)

« Le hasard est plus clément qu’on ne croit. Combien de fois avons-nous dû frôler la mort sans nous en douter. » (Edmond Thiaudière)

« Pour que le hasard intervienne (pour qu’on parle de hasard)  il faut que  l’effet ait une signification humaine. » (Bertrand Vergely)

« Nous ne possédons rien au monde – car le hasard peut tout nous ôter – sinon le pouvoir de dire ‘Je’. C’est cela qu’il faut donner à Dieu, c’est-à-dire, détruire. » (Simone Weil)

« Les êtres que j’aime sont des créatures. Ils sont nés du hasard. Ma rencontre avec eux est aussi un hasard. » (Simone Weil)

« A un fidèle qui se croyait maudit parce que sa tartine tombait toujours du mauvais côté, son rabbin, aussi pieux qu’instruit, lui demanda : ‘Mon fils, es-tu sûr de mettre le beurre du bon côté ?’ » (histoire juive – contée par Lucien Jerphagnon)

« Le hasard, loi qui voyage incognito. » (proverbe)

« Le hasard ne choisit pas, il propose. » (?)

« Le hasard défait bien des choses. » (?)

« Le hasard, le plus malin d’entre nous car il prévoit tout. » (?)

Ci-dessous quelques remarques (légèrement altérées dans la forme) tirées du livre d’Hubert Krivine, Petit traité de hasardologie, qui, à la vérité, traite plus des causes et des tromperies statistiques que du hasard pur. Aussi retrouve-t-on les mêmes informations à la rubrique Causes comme origine, 090, 2.

« Le hasard comme ‘la mesure de notre ignorance’ (Henri Poincaré, le mathématicien) … Quelque chose est ‘arrivé par hasard’, façon de dire qu’on ne sait pas, ou même qu’on ne peut pas savoir – Le hasard dit objectif : débarrassé de toute considération sur le savoir de l’observateur ; ‘La rencontre de deux chaînes causales indépendantes’ (Cournot, le mathématicien), le passant qui reçoit un pot de fleurs sur la tête (indépendance des causes nombreuses du passage de la victime, et des causes aussi complexes de la chute du pot) … Rejoint l’expression se ‘trouver au mauvais endroit au mauvais moment’ – Le hasard dit subjectif par manque d’information ; lancer humain de pièce de monnaie. »

 « Insistons sur la distinction entre corrélation (événements qui semblent aller de pair ou se succéder systématiquement) et causalité. Les ‘démonstrations’ fondées sur la confusion entre ces deux notions sont la grande spécialité de journaliste et de politiciens … Corrélation ne signifie pas causalité. »

« Toutes les statistiques indiquent que le risque de mourir dans un lit d’hôpital est trois fois plus élevé qu’à la maison. D’où d’après Coluche, il ne faut surtout pas aller à l’hôpital quand on est malade. » – Ce biais des populations étudiées, ce mélange de deux populations (les gens en général et les malades) dont l’une est biaisée porte le nom, chez les statisticiens, d’effet Coluche. »

« Ceux qui pratiquent le jogging a 60 ans ont plus de chance de se trouver en bonne santé à l’âge de 70 ans que la population en général … C’est peut-être vrai, mais ce n’est pas une démonstration, la population qui pratique le jogging a 60 ans est biaisée : elle concentre ceux qui sont déjà en bonne santé … Contrairement à l’opinion reçue, une personne âgée de 90 ans a beaucoup plus  de chance de devenir centenaire qu’un jeune homme disposant d’une santé insolente. Pour atteindre 100 ans il faut déjà avoir atteint 90 ans, ce qui n’est pas donné à tout le monde … Habiter sous une ligne à haute tension et être sujet à plus de maladies certes (Angleterre), mais l’habitat sous ces lignes est plutôt synonyme de pauvreté génératrice de fragilités … En 1914, l’Armée française, alors très bornée et peu soucieuse de ses hommes, rejetait le port du casque (réservé à ces trouillards d’Allemands !) et fanfaronnait en se targuant de recenser peu  de blessés à la tête (d’où l’inutilité du port de ce fameux casque). Bien sûr, on ne comptait que les survivants, les autres étaient morts. »

« Invalidation de la loi des séries : des nombres aléatoires générés au hasard par une machine présenteront des sortes de groupements, de même de points placés dans un carré par une machine qui se présenteront en forme d’amas et ne seront pas répartis comme le ferait un personnage – Invalidation de la loi d’ennui maximum (LEM) : la tartine qui tombe du mauvais côté, les tables ont une hauteur de 0,75 m. et la tartine, généralement posée sur le côté sec, n’a  que le temps de faire un demi-tour ; on se souvient aussi plus des mauvaise surprises – Les coïncidences miraculeuses : avec un échantillon de 23 personnes seulement, la probabilité d’avoir deux personnes nées le même jour est supérieure à 50%, avec un échantillon de 40 personnes, la probabilité est de 90%. On peut parier. »

« La fantastique accumulation de données digitalisées (big data) va générer un courant opposé à la pensée classique qui exige une théorie pour passer des corrélations à la causalité … ‘Le déluge de données rend la méthode scientifique obsolète … Les nombres parlent d’eux-mêmes et la corrélation supplante la causalité’ (un scientifique). »

« Au-delà de la moyenne, il peut être décisif de connaître les statistiques des valeurs extrêmes : la résistance d’une chaîne est celle de son maillon le plus faible, la résistance moyenne des maillons n’apprend rien sur sa qualité. »

« Le ‘pari de Pascal’ un peu déformé par exagération : faible possibilité de gros gain assortie de grandes  possibilité de petites pertes s’applique parfaitement à la conduite des joueurs de loterie, ‘le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas’ … Le principe de précaution est en quelque sorte le pari de Pascal à l’envers ; il veut nous contraindre à considérer les conséquences très improbables, mais potentiellement catastrophiques de l’introduction de nouvelles technologies. » – Faible possibilité de grosses pertes. Et conduit à s’abstenir. »

« Malgré Diderot dans ‘Jacques le fataliste’ : ‘Posez une cause, un effet s’ensuit ; d’une cause faible , un faible effet ; d’une cause momentanée, un effet d’un moment ; d’une cause intermittente, un effet intermittent ; d’une cause contrariée, un effet ralenti ; d’une cause cessante, un effet nul’, il n’y a pas de proportionnalité entre la cause et l’effet, de toutes petites différences dans les causes peuvent entraîner de très grosses dans les effets, le chimpanzé et l’homme ont en commun 98% de leurs gênes codants, et pourtant ! L’effet papillon, le battement d’aile de celui-ci a un bout du monde et la tornade à l’autre bout, dont l’énoncé même témoigne de l’imprévisibilité, de l’impossibilité de savoir qui fait quoi. »

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