090,2 – Causes comme origine

– Suivant Aristote, l’explication d’un phénomène peut être un critère de type causal ou de type final. Dans le premier cas on cherche une cause dite efficiente, quels sont les mécanismes qui ont conduit au phénomène étudié (circonstances antérieures). Dans le second cas, on donne une explication en vue du but vers lequel il tend ou auquel il contribue (intention future d’un Dieu, d’un artisan, tendance d’une situation…).

– Raison est proche de cause, mais, utilisé hors du contexte purement matériel, le premier terme sous-entend une sorte de justification morale.

– Toutes les formes de vengeance reposent sur l’établissement d’une raison par une cause. La réalité de celle-ci n’empêche pas le mécanisme d’être pervers, nuisible. Ne pas transformer les causes en raisons (soit en justifications). Les deux domaines sont autres, les enchaîner dans sa tête fait retourner à l’animalité et se transformer en robot mécanique. Tout terroriste utilise cette argumentation : opprimé – qu’il prétend être – il pose des bombes. L’argument secondaire (tourné alors non plus vers le passé ou le présent mais vers un futur idyllique) étant tiré du vieil adage des fourbes : « Qui veut la fin veut les moyens. »

Une cause, un motif, n’est pas une raison La cause peut être une réalité existentielle (on est agi) La raison résulte d’une volonté personnelle (on agit). « La malhonnête rationalisation de masse du motif, justification de la vulgaire excitation pathologique » ( Malcolm Lowry ).

– Il est à remarquer que la modernité, pourtant férue de scientisme de Prisunic, a inventé des phénomènes sans cause, exemples : le racisme, la sauvagerie, la grossièreté et la vulgarité, la fraude fiscale et générale, le mépris des politiques, l’incrédulité sur les élucubrations des média, etc. etc. On n’en finirait pas de citer ces étranges ovnis dont les causes échappent aux plus sagaces investigations de nos brillants experts, ou pire naissent et se répandent parfois sans qu’une cause soit détectable, ou même n’existe, génération spontanée.

– Source de beaucoup de nos erreurs. Exemple classique : Si on n’a jamais vu un chien autrement qu’à la poursuite d’un lapin, on dira facilement que le lapin est la cause du chien.

« Déplorer les conséquences dont on chérit les causes » ou plus qu’une tendance du milieu politico-médiatique, une habitude solidement ancrée permettant un paisible farniente.

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« La natalité n’est pas un fait : c’est une nouvelle puissance de signifier capable de s’investir dans le monde … Elle est faculté des commencements, capacité des hommes à innover, à introduire dans le monde de l’inédit et de l’imprévisible … Un commencement ne détermine pas l’avenir comme une cause détermine ses effets : il ouvre une situation dont le dénouement est indéterminé. » (Myriam Revault d’Allonnes – sur les commencements, bien plus que sur la natalité humaine) 

« Est-ce que les événements qui m’arrivent viennent de moi (attribution interne) ou d’influences extérieures à moi (attribution externe) ? Est-ce que ces événements vont durer (attribution de stabilité) ou seront éphémères (attribution d’instabilité) ? Est-ce qu’on peut en tirer des conclusions générales sur ce que je suis (attribution de globalité) ou ne signifient-ils rien de précis sur moi (attribution de spécificité) ? » (Christophe André) … Le système d’attribution causale du déprimé. « Différentes attributions, : D’abord en cas d’événement positif (ex : réussite à un examen,) ensuite en cas d’événement négatif (échec à l’examen) : D’abord ‘Cela ne vient pas de moi, j’ai eu de la chance’ ensuite ‘C’est de ma faute’ – D’abord  ‘Cela ne durera pas, ne se reproduira pas’ ensuite ‘Ce n’est qu’un début, cela va recommencer’  – D’abord ‘Cela ne veut rien dire, je suis quand même minable’ ensuite ‘Cela prouve bien que je suis minable’. » (même auteur) – Mais si l’exemple ci-dessus est celui du déprimé, tout le monde fonctionne suivant un système d’attribution causale.

« ‘Pourquoi y-a-t-il quelque chose plutôt que rien ?’ Il doit y avoir une cause suffisante à l’existence de ce quelque chose, cause qui elle-même a dû être déterminée par autre chose. A remonter cet enchaînement on en arrive finalement à la ‘causa sui’, chose qui en elle-même est sa propre cause, ce qui fait que la réponse de Leibnitz débouche sur la cause ultime appelée ‘Dieu’ ou le ‘moteur immobile’ d’Aristote … qui sauve la raison humaine du coup d’œil  muet et éperdu jeté dans l’abime du néant.  » (Hannah Arendt – commentant la phrase célèbre de Martin Heidegger, ou de Leibniz) – « Etonne-toi de ce qui existe. » (Déjà avant eux Clément d’Alexandrie) – Qui ou quoi a déclenché le Big-Bang.

« Le principe de causalité avec son double axiome central : tout ce qui existe a une cause et la cause est supérieure à l’effet quel qu’il soit, repose entièrement sur des expériences du domaine de la fabrication, dans lequel le producteur est supérieur à ses produits … Le tournant de l’histoire intellectuelle de l’époque moderne fut le moment où l’image du développement organique, dans lequel l’évolution d’un être inférieur, par exemple le singe, peut causer l’apparition d’un être supérieur, par exemple l’homme, vint remplacer l’image de l’horloger (Dieu) forcément supérieur à toutes les horloges dont il est la cause. »  (Hannah Arendt)

« Nous ne croyons rien connaître avant d’en avoir saisi chaque fois le pourquoi, c’est-à-dire saisi la première cause … C’est la connaissance de la cause par laquelle une cause ‘est’ qui nous donne la science de cette chose d’une manière absolue et non pas accidentelle. » (Aristote)

« Qu’un événement soit effectivement intervenu, nous le savons lorsqu’il est passé, mais nous ne savons pas s’il a été l’effet de la conjoncture … ou de tel incident imputable à une personne ou une rencontre de séries. Quand nous affirmons une relation causale entre une conjoncture et un événement du passé notre affirmation n’est pas plus incontestable qu’une prévision d’un événement de même sorte … Jugements de causalité adéquate : une conjoncture rendait un événement (presque) inévitable. Jugements de causalité accidentelle : l’événement n’était pas déterminé par une conjoncture, il a été provoqué par un fait parcellaire, rencontre ou personnalité … Il va de soi que ces deux sortes de jugements sont complémentaires. » (Raymond Aron)

« Tout ce qui vient à la suite est toujours de la famille de ce qui vient avant ; car, en effet, il n’en est pas ici comme d’une série de nombres ayant séparément et respectivement leur contenu nécessaire, mais c’est une continuité logique. » (Marc-Aurèle)

« Une condition est ce qui doit être donné pour qu’une actualisation puisse survenir. Sans elle, rien ne se passe … La condition n’est pas une cause, elle se contente de rendre actuellement possible une actualisation éventuelle. Celle-ci a encore besoin, pour passer de la possibilité à l’actualité, que des facteurs et des causes soient réunis … La présence d’eau est une condition de l’irrigation, mais les causes sont à chercher du côté de l’agriculture, du climat et de la capacité des communautés agricoles à s’organiser … L’accumulation d’épargne, condition d’une économie capitaliste ne débouche pas d’elle-même sur cette forme d’économie. » (Jean Baechler)

« D’ordinaire, en politique, les effets sont aperçus quand ils commencent à se produire : c’est-à-dire quand il est trop tard … On ne contrôle, on ne soigne utilement, que les causes et non les effets. » (Jacques Bainville)

« Sans cesse de nouveaux privilèges et de nouveaux titres de gloire que les hommes avaient attribués à la ‘cause première’ revenaient aux causes secondes. Et ainsi une part toujours plus grande de ce qui paraissait ‘connu de Dieu’ revenait au monde … Le dépassement d’une pensée cosmologique ouvertement ou secrètement religieuse par une pensée anthropologique n’est pas autre chose. » (Père Hans Urs Von  Balthasar)

« On peut aimer sans savoir pourquoi ; on ne déteste pas sans cause. » (Anne Barratin)

« Dans la sphère économique, un acte, une habitude, une institution, une loi n’engendrent pas seulement un effet, mais une série d’effets. De ces effets, le premier seul est immédiat ; il se manifeste simultanément avec sa cause, ‘on le voit’. Les autres ne se déroulent que successivement, ‘on ne les voit pas’ ; heureux si on les prévoit. » (Frédéric Bastiat)

« Le hasard nous laisse respirer : nul ne l’a voulu, quel soulagement ! … Produire du hasard afin que toutes choses ne s’enchaînent pas nécessairement et sans discontinuer, ce qui, dans le bonheur ou dans le malheur, serait intolérable aux hommes. Produire du hasard afin que les hommes puissent jouer et croire à la chance ou à la malchance, ce qui les allège de toute culpabilité. Importance vitale de la croyance en la possibilité de l’accident, de l’occurrence purement accidentelle, donc insignifiante, indifférente ou irresponsable (la mort d’un ami, revers de fortune…) …. Si ces choses-là doivent en plus être imputées à une volonté, à une malignité objective ou subjective, fût-elle celle de Dieu, quelle charge, quel fardeau, quel surcroît de responsabilité et de faute … Ainsi c’est Dieu qui nous accorde le hasard dans  son immense pitié. » (Jean Baudrillard)

« Les histoires de réversibilité sont toujours les plus drôles, ainsi celle du rat et du psychologue : le rat raconte comment il a fini par conditionner parfaitement le psychologue à lui donner un bout de pain chaque fois qu’il relève le clapet de sa cage. » (conté par Jean Baudrillard)

« L’amont n’est pas cause de l’aval, l’antécédence n’est pas la détermination. » (Alain Besançon – distinguant en psychanalyse le repérage d’un fantasme et le fait de lui assigner une fonction causale)

« Effet : le second de deux phénomènes qui apparaissent toujours ensemble et dans le même ordre ; le premier appelé cause génère l’autre. Ce qui n’est pas mieux démontré que par cette personne qui n’ayant jamais vu de chien auparavant qu’à la poursuite d’un lapin, déclare que le lapin est la cause du chien. » (Ambrose Bierce)

« Le savant est souvent embarrassé pour déterminer les causes d’un phénomène ; l’ignorant ne l’est jamais. » (Gustave Le Bon)

« Dieu se moque des hommes qui se plaignent des conséquences alors qu’ils en chérissent les causes. » (Bossuet)

« Le sociologisme : la doctrine selon laquelle les intentions et actions de l’agent social devraient toujours être considérées comme des effets et jamais comme des causes. » (Raymond Boudon – sur les gourous démagos) – L’irresponsabilité institutionnalisée.

« Saint Thomas prévient l’objection qui naît inévitablement de la disproportion totale de l’effet par rapport à la cause en faisant remarquer que la preuve n’a nullement pour ambition de conclure de la nature de l’effet à la nature de la cause, mais uniquement de la présence de l’effet à l’existence d’une cause. » (Jacques Bouveresse reprenant la théorie de saint Thomas d’Aquin sur la disproportion entre notre connaissance intuitive de Dieu et Celui-ci) – Pas d’effet sans cause. Proposition généralisable hors du champ de la théologie.

« Un événement a une cause, une action a une raison. La cause explique ce qui est déjà présent, la raison concerne ce qu’on doit pouvoir faire advenir dans le futur. Si l’on pouvait trouver la cause d’une action, cette action ne serait plus une action libre, elle ne serait plus une action du tout, elle serait plutôt un mécanisme. » (Rémi Brague)

« Corrélation et causalité (confusion nourrissant de nombreuses théories du complot)… Deux phénomènes concomitants seraient nécessairement liés par une relation de cause à effet (A apparaît en même temps que B, donc A est cause de B. » (Gérald Bronner)

« Biais d’intentionnalité : des individus sont plus portés à attribuer des événements (par exemple, accident, incendie…) à des causes intentionnelles de préférence à des causes non intentionnelles … vers des intentions supposées … La logique conspirationniste est précisément celle qui ne parvient pas à se confronter à la complexité d’un monde beaucoup plus désordonné qu’elle ne l’imagine. (Gérald Bronner)

«  Le biais d’auto-complaisance. Nous avons tendance généralement à nous attribuer nos succès, tandis que nos échecs nous semblent attribuables à des facteurs externes (éléments internes à l’entreprise contre situation économique générale ou concurrence déloyale ; victoires et échecs d’équipes sportives ;  etc.) … Théorie déterministe : quel type de comportement auriez-vous si on arrive à vous persuader que vous êtes si déterminés par le structures sociales que l’on ne saurait vous imputer vos actes ? … Dévitalisation des notions de  mérite, de responsabilité ou de moralité … Idéal pour expliquer ses défaillances, ses fautes ou ses échecs par l’action fatale de causes (sociales, psychologiques ou biologiques) sur lesquelles il n’y a pas de prise. » (Gérald Bronner, Etienne Géhin) – Conduites très actuelles dans notre société débordante de lâcheté

« La causalité signifie la régularité d’une consécution dont la nécessité est exprimée par une loi universelle … représentée par la reproductibilité en principe indéfinie de la consécution considérée. » (Cornelius Castoriadis)

« Grandeur des conséquences et petitesse des causes. » (Chateaubriand – à propos des révolutions)

« La recristallisation en masse des inégalités, la mobilité descendante, l’écrasement du pouvoir d’achat des salaires relativement au prix des biens immobiliers (accroissement de l’écart revenu / patrimoine), la paupérisation de cohortes entières de jeunes surdiplômés et la globalisation porteuse d’une montée aux extrêmes de la concurrence forment ensemble une spirale de déclassement aux effets potentiellement dévastateurs … Le processus collectif de déni de la réalité sociale (imposé dictatorialement par les élites politico-médiatiques dominantes) retire aux individus la possibilité de comprendre que leur échec n’est pas le signe d’une insuffisance personnelle mais résulte d’un dysfonctionnement collectif … L’échec est ainsi vécu le plus souvent sur un mode personnel, alors qu’il s’agit avant tout d’une spirale du déclassement systémique d’une société à la dérive. »  (Louis Chauvel – La spirale du déclassement) – Cette stratégie de déni de la part des dominants aboutissant ainsi à diminuer les intéressés, à les culpabiliser, et à déminer toute velléité de rébellion. D’où, à titre de compensation la « psychologisation du mal-être social … La pratique du ‘projet individualisé’ qui remet entre les mains des individus la responsabilité de construire le monde dans lequel ils vivent. »  (François Sicot)

« Le clapotis des causes secondes. » (Paul Claudel) – Qui empêche de discerner la cause majeure, efficiente. Donc permet de la dissimuler. Spécialité médiatique.

« L’énergie des mobiles est inversement proportionnelle à leur qualité. » (la loi d’Auguste Comte – sur les motivations des personnes)

« Parfois une cause est plus haïssable que la conséquence, pourtant c‘est souvent la conséquence qu’on abomine. » (Michael Connelly)

« Une cause est un événement qui produit un événement qui est son effet. » (Donald Davidson)

 « Il a une raison d’avoir telle croyance, mais cette raison n’est pas une cause : c’est un souhait ou un désir, provoqué par le caractère désagréable de la pensée opposée … Confusion du vocabulaire psychologique des raisons avec le vocabulaire physique des causes. » (Donald Davidson)

« Plus nous pénétrons profondément dans le système d’actions, de motifs et de caractères qui est l’objet de notre expérience vécue, plus la possibilité d’une éthique semble reculer devant nous. Ce n’est que pour nous-même que nous disposons d’une expérience de première main ; en ce qui concerne les autres individualités, nous découvrons leur vie intérieure à la lumière de l’analogie … Même pour des actions présentes, l’impulsion consciente n’est pas toujours celle qui est réellement efficace. Ici également, comme dans la vie, les forces les plus efficaces aiment demeurer à l’arrière-plan. Les connexions entre caractère, motif et action ne sont lumineuses que dans les personnages poétiques ; dans la vie réelle elles échappent à notre intuition. » (Wilhelm Dilthey – Le monde de l’esprit)

« L’universalité du jugement pratique se paie de l’attribution à autrui d’attitudes ou d’états mentaux qui n’appartiennent qu’à lui et dont la singularité et le caractère privé vont dans certains cas jusqu’à faire de lui l’étranger absolu … Dans le cas du terroriste l’action insensée devient rationnelle dés qu’on l’attribue à des croyances insensées. » (Jean-pierre Dupuy)

 « Nous sommes très fortement portés à expliquer toute modification d’une structure donnée par une cause modificatrice extérieure à cette structure … L’interdépendance des besoins et des intentions d’une multitude d’individus soumet chacun d’entre eux à des effets inévitables qui n’étaient dans les intentions d’aucun d’entre eux … La société, née de multiples projets, mais sans projet, animée par de multiples finalités, mais sans finalité. » » (Norbert Elias – sur les dynamiques proprement internes des sociétés humaines dues à la continuité d’interdépendance entre les hommes)

« Les notions de cause et d’effet se concentrent et s‘entrelacent dans celle de l’interdépendance universelle au sein de laquelle la cause et l’effet ne cessent de changer de place. » (Friedrich Engels) – Et tout est dans tout et rien n’est dans rien !

« Plus les télescopes seront perfectionnés et plus il y aura d’étoiles. » (Flaubert)

« Assurons-nous bien du fait avant de nous inquiéter de la cause. Il est vrai que cette méthode est bien lente pour la plupart des gens, qui courent naturellement à la cause, et passent par-dessus la vérité du fait ; mais enfin nous éviterons le ridicule d’avoir trouvé la cause de ce qui n’est point. » (Fontenelle) 

« La notion ‘d’attribution causale’ : la façon dont nous construisons pour nous-mêmes les explications des événements qui nous adviennent ou des comportements auxquels nous sommes confrontés (pourquoi ai-je raté… ? Pourquoi m’a-t-elle parlé sur ce ton ? Pourquoi cette rencontre ?), » (Philippe Gabilliet – Eloge de la chance)

« Les causes auxquelles nous devons faire attention pour obtenir un véritable succès : Celles qui préparent – celles qui accompagnent – celles qui agissent simultanément ou comme auxiliaires – celles qui accélèrent – celles qui augmentent la force – celles qui font obstacle – celles qui produisent de nouveaux effets. » (Goethe)

« L’historien  écrit le temps dans un récit linéaire où l’événement qui précède est relié par une chaîne causale à celui qui le suit … L’adage latin, venu du droit canon médiéval, ‘post hoc ergo propter hoc’, ‘après cela donc à cause de cela’ conditionne le récit qui se déroule de manière linéaire … Ce qui n’est qu’une interprétation se donne ainsi comme explication et se veut même scientifique dans certains cas, tels le récit évolutionniste darwinien ou celui, astrophysicien, sur le ‘big-bang’. Cette expression d’une vérité subjective prend l’apparence de l’objectivité. » (Alain Gras) – En Histoire, notamment, on enchaînera causalement les seuls événements qui conviendront à l’idéologie dominante, en omettant ceux qui sont inconvenants.

« La théorie darwinienne répond à la question de l’origine des espèces, de même façon que la thèse du ‘big-bang’ décrit l’origine de la matière … La cause première manque et elle est le point de départ de toutes les spéculations religieuses. La science vit cette clôture de l’horizon théorique comme un véritable échec et n’a de cesse qu’elle n’ait trouvé le chaînon manquant. … La pensée occidentale fait vivre comme une obsession la connaissance de l’origine des choses dans le temps. » (Alain Gras)

« Le sociologue Georg Simmel avait noté … que l’effet sociologique d’une sous-catégorie sociale dépend à la fois de sa propre taille et de la la part qu’elle représente dans la population totale : 100.000 soldats, expliquait-il, peuvent plus facilement garder le contrôle sur 10 millions de personnes qu’un soldat sur 100 personnes, bien que les proportions (1/100) soient les mêmes dans les deux cas. Dans cette perspective on a voulu expliquer la progression d’institutions bureaucratiques… » (Alain Gras)

« Ne suffit-il pas à n’importe quel comportement d’être déterminé par quelque cause pour être rendu, si peu que ce soit, excusable ? » (Nicolas Grimaldi) – C’est la lâcheté qui fait abuser des causes explicatives et justificatives.

« L’affirmation courante que ‘les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets’, affirmation qui, énoncée sous cette forme est proprement absurde, car, en fait, il ne peut jamais y avoir ni les mêmes causes ni les mêmes effets dans un ordre successif de manifestation. » (René Guénon) – Exact, mais un peu puriste.

 « Nous venons de cette triple et formidable interpénétration réciproque de la sagesse grecque, du prophétisme biblique et de l’utopie évangélique … croyants ou pas, la vérité historique nous renvoie irrémédiablement à ces trois généalogies fondatrices … Le plus dangereux, c’est la haine des origines dont on dit parfois qu’elle est l’origine de la haine. »(Jean-Claude Guillebaud) – Une société comme un individu qui  renie toutes ses origines n’est plus qu’un zombie qui devient la risée du monde, telle l’Europe qui a tout renié.

« Le principe d’humanité a pour caractéristique d’être ‘cause de soi’. Il est puissance de se faire, c’est-à-dire de se choisir. » (Jean-Claude Guillebaud)

« Rien n’est sans raison, ou aucun effet n’est sans cause. » (Martin Heidegger – sur le principe éminent de raison et le principe proche de causalité) – Principe scientifique certes, mais qui mène fort loin : cause de l’être ? Rejoint la question essentielle de Leibniz « Pourquoi y-a-t-il quelque chose plutôt que rien ? » – La miraculeuse surpris du il y a

En matière de conduite : « l’optimiste interprète dans un sens favorable ce que nous appelons ‘l’équivoque intentionnelle’, soit que dans l’infinie ambiguïté de l’intention il y a de quoi justifier aussi bien l’optimisme que la misanthropie. » (Vladimir Jankélévitch)

« L’amour est à la lettre ‘causa sui’, ou inversement : l’effet s’explique par lui-même, est à lui-même sa propre cause. » (Vladimir Jankélévitch)

 « Pour que la nostalgie et l’amour soient ‘purs’, ils doivent être sans cause ni raison extrinsèque … ’Les raisons me viennent après’. » (Vladimir Jankélévitch- citant Pascal) – L’inutile recherche des causes.

« On sait la mésaventure de l’apprenti sorcier. Comme (n’étant qu’un homme) il n’est qu’un démiurge apprenti, il subira cette alternative à retardement qu’est l’autonomie de sa progéniture. » (Vladimir Jankélévitch)– Et même parfois son hostilité, comme dans tout engendrement. Des effets contraires aux causes, motifs ou simples intentions.

« Le motif, au contraire, est une cause qui fait levier et qui s’enfle à peine pour agir ; quelques indications insignifiantes, un déclic … et voilà notre activité mise en branle … Il n’y a pas tant causalité que décharge ou déclenchement, l’excitation devenant négligeable par rapport à l’énormité des réactions qu’elle déchaîne. » (Vladimir Jankélévitch)

« Avec le petit matin des dieux, la nuit des origines avait reculé. L’incompréhensible s’était comme déplacé vers le haut puisque des dieux on savait qu’on ne saurait jamais tout. Du moins s’exerçait-on à expliquer par de plus hautes causes des effets qui jusqu’alors se manifestaient au ras de l’immédiat. La causalité s’était ainsi enrichie d’une autre dimension. Elle s’était comme magnifiée puisqu’on avait commencé à monter de cause en cause. Un jour on se hisserait jusqu’à la cause première, jusqu’à la cause incausée. La notion avait un bel avenir. » (Lucien Jerphagnon)

« Beaucoup de choses sont des motifs et non pas des raisons. » (Joseph Joubert)

« Poser la question de la ‘ressemblance suffisante’ c’est soulever la question des facteurs déterminants ; on ne saurait attendre les mêmes effets que si les situations comparées se ressemblent par des traits qui ont une forte valeur causale … Nonobstant la présence dans les deux situations de traits semblables qui ont une valeur causale, elles peuvent différer par d’autres traits dont certains peuvent avoir une grande valeur causale. » (Bertrand de Jouvenel – sur le raisonnement par analogie)

« Des explications bien agréables, si l’on peut prédire l’extinction d’un mal odieux à tous comme le sous-produit du succès que l’on obtiendra dans la lutte qu’on a choisi de mener contre telle institution ou telle catégorie sociale que déjà l’on déteste … La guerre présentée comme résultante de l’ambition dynastique des monarchies, ou de l’orgueil de la caste militaire dû à la noblesse de sa composition, ou bien de la lutte des classes laquelle est imposée par les intérêts capitalistes, etc. » (Bertrand de Jouvenel)

« La naissance précède toujours la mort, c’est ce qu’on appelle la contrainte de causalité, c’est-à-dire que la cause précède les faits. » (François Jullien)

« Faute de s’en être pris aux causes en temps utile, ils nous font défiler contre les effets. » (Basile de Koch) – Sur la lâcheté des politiciens

« Les animaux, comme les hommes, sont capables de connaître l’origine des choses. En revanche, la mesure des effets de l’action, et donc la prise en compte de l’avenir, est bien le propre de l’homme. » (Zaki Laïdi)

« Jamais rien n’arrive sans qu’il y ait une cause ou du moins une raison déterminante, c’est-à-dire qui puisse servir à rendre raison a priori pourquoi cela est existant plutôt que non existant et pourquoi cela est ainsi plutôt que de toute autre façon. » (Leibniz – Théodicée)

« Une des erreurs les plus communes est de prendre le résultat d’un événement pour sa conséquence nécessaire. » (duc de Lévis)

« Un danger cesse d’être épouvantable si l’on en connaît les causes. » (Konrad Lorenz)

« La peur de la causalité représente une des raisons d’ordre affectif qui nous font attribuer une si haute valeur à l’insondable (peur de voir bridé notre libre arbitre) … Cependant jamais la connaissance des causes d’un comportement ne peut diminuer le ‘vouloir’, l’empêcher de transformer en actes sa volonté … L’homme qui saurait, comprendrait, l’enchaînement causal de tous les processus de l’univers, y compris ceux qui se déroulent dans son propre organisme, ne cesserait pas pour autant d’avoir une volonté. » (Konrad Lorenz)

« La malhonnête rationalisation de masse du motif, justification de la vulgaire excitation pathologique » ( Malcolm Lowry ).

« Qui ne remonte pas aux causes profondes n’agira jamais en profondeur. » (cardinal Henri de Lubac)

« La croyance en la capacité causante, ou causatrice, si je puis dire, de l’action humaine, en la capacité de l’homme de faire advenir du nouveau et de l’imprévisible. En réalité, dit Durkheim, la vie sociale se développe selon des règles indépendantes de la volonté des hommes … L’erreur d’Aristote, sa ‘superstition’, qui est aussi celle de l’homme d’Etat comme du citoyen ordinaire, qui est celle de tout le monde, à l’exception du sociologue, c’est d’attribuer à l’homme le rôle merveilleux de cause. » (Pierre Manent – sur l’intérêt des philosophes pour l’Etat, le politique)

« Le ciseau du sculpteur est cause ‘instrumentale’ de la statue ; le sculpteur est cause ‘principale’ de celle-ci, mais cause principale ‘seconde’, subordonnée à la causalité de l’architecte qui construit l’édifice que la statue ornera. » (Exemple de Jacques Maritain) – les deux premiers étant dits aussi causes efficientes, l’agent qui produit l’effet.

« En politique plus encore que dans les autres ordres de la nature, il n’y a pas de proportion entre un effet produit et ses causes immédiates. Tout y est concours, conjonction,  brusque mise en rapports de ‘réactifs’ d’une imprévisible énergie. » (Charles Maurras)

« Les hommes, aux faits qu’on leur propose, s’amusent plus volontiers à en chercher la raison qu’à en chercher la vérité. Ils laissent là les choses, et s’amusent à traiter les causes. Plaisants causeurs ! » (Montaigne – ironisant sur la prétention de ceux qui cherchent à désigner des causes à tout)

« La plupart des effets arrivent par des voies si singulières, et dépendent de raisons ou si imperceptibles ou si éloignées qu’on ne peut les prévoir. » (Montesquieu)

« Il faut entendre le mot ‘pourquoi,’ comme une demande portant non sur la cause efficiente du phénomène, son explication, mais sur sa cause, finale, son but. Il faut l’entendre comme signifiant ‘en vue de quoi ?’ » (Philippe Nemo)

« Nous pouvons endurer n’importe quel ‘comment’ pourvu que nous en sachions le ‘pourquoi’. » (Nietzsche)

« Toutes choses sont causantes et causées. » (Blaise Pascal)

« Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils continuent de chérir les causes. » (Blaise Pascal) – Tout le monde sait que la fameuse croissance nous mène à l’apocalypse. Néanmoins on implore sa divinité. – « Et de ceux qui se prononcent sur les effets sans s’interroger sur les causes. » (Jean d’Ormesson)

« A la Renaissance, l’Europe a franchi un grand pas quand elle a su séparer la concomitance du rapport de cause à effet, distinguer la concomitance de la causalité. » (Jacques Pimpaneau) – Ex : contre toute logique et en des temps très reculés des hommes (Chine) ont cru à l’influence des étoiles et de la lune sur la croissance des plantes ; apparition des trois étoiles du baudrier d’Orion au printemps (semailles) et réapparition vers octobre (récolte).

« Partout, ce qui meut précède ce qui est mû, ce qui mène précède ce qui est mené, ce qui commande précède ce qui est commandé : matière et cause s’excluent mutuellement. La matière n’a d’action que par le mouvement. Or, tout mouvement étant un effet, il s’ensuit qu’une ‘cause physique’ est un non-sens. La matière ne peut rien … Il ne peut y avoir de causes physiques proprement dites, parce qu’il n’y a point et qu’il ne peut y avoir de mouvement sans un moteur primitif, et que tout moteur primitif est immatériel (comme l’impulsion initiale donnée à la première bille d’une rangée). » (Platon) – Cependant l’attraction, les trous noirs… qui agit ?

« Ce n’est pas parce qu’il y a une rose sur le rosier que l’oiseau s’y pose, c’est parce qu’il y a des pucerons. » (Jules Renard)

« L’une des formes les plus fréquentes de la ‘défaite de la pensée’, à savoir l’interdit qui empêche de rattacher un phénomène à sa véritable cause. Comme jadis, on attribuait un  fléau (peste…) à quelque péché … on isole aujourd’hui un fléau social de ses antécédents historiques, et on lui fabrique une origine compatible avec l’idéologie que l’on a intérêt ou plaisir à faire prévaloir. » (Jean-François Revel) – Mais seulement si on ne peut empêcher de parler du dit phénomène (insécurité, corruption des élites…)

 « ‘Tout ce qui arrive suppose avant lui quelque chose dont il résulte suivant une règle’. La règle désigne à la fois un processus matériel et une exigence de la raison … Elle permet en principe de distinguer la cause de la condition, ou de la corrélation, confusion souvent commise … on intitule volontiers cause d’un phénomène toute condition sans laquelle il ne se serait pas produit … ‘L’effet ne survient pas seulement à la suite de la cause, mais il est posé par elle et résulte d’elle’. » (Olivier Rey – citant Emmanuel Kant) – Tout antécédent n’est pas cause : le jour n’est pas cause de la nuit, l’hiver du printemps… Or, dans la confusion intellectuelle ambiante ! « Des hommes ont jugé qu’un roi pouvait faire de la pluie … aujourd’hui on juge que l’avion, la radio etc., sont des moyens pour le rapprochement des peuples et la diffusion de la culture. » (Wittgenstein, ironique)

« Si nous apercevions les causes avant d’être avertis par les effets, nous prédirions les événements avec quelque certitude, mais, toujours forcé de remonter des effets aux causes, l’homme passe sa vie à raisonner sur le passé, à se plaindre du présent, et à trembler pour l’avenir. » (Rivarol)

« La connaissance des causes n’a pas d’intérêt pour l’action. » (Ferdinand de Saussure) – S’exprimant en linguistique, privilégiant la structure (synchronie) sur l’historique (diachronie).

« Quand on cite un fait comme étant la cause d’un autre uniquement parce qu’il l’a précédé c’est comme si l’on disait que les Romains ont fait la conquête du monde parce qu’ils consultaient les poulets sacrés. Encore faut-il prouver rigoureusement que l’effet est lié à la cause. » (Jean-Baptiste Say)

« Cause : la modification antécédente qui rend nécessaire la modification conséquente. » (Arthur Schopenhauer)

« Que survienne un fait colossal qui provoque des effets inattendus, en dimension ou en nature,, et que dévie, par exemple en direction, le format monotone des règles antérieures, alors nous les appelons  événements (volcanisme, chute et impact d’aérolithe, éruption, rupture du bouchon du Bosphore et création de la mer noire, déluge ?…) … Cause locale, effet universel ; cause physique, effet biologique. Les conséquences bifurquent en nature aussi bien qu’en portée … Or il s’en trouve d’autres où diminue la force des causes jusqu’au minimum et même à zéro et dont, cependant, les effets dépassent toute proportion … Ainsi dévia l’histoire romaine et universelle, à la vue du nez de Cléopâtre, dont César et Antoine … Qui peut prédire la propagation d’une parole, le racontar qui grossit en rumeur, qui se  répand en calomnie ? ‘Le mot tue’, l’efficace d’une annonce, d’un mensonge, d’une vérité ? Qui sait peser la puissance d’un symbole, apparemment sans force (le Vatican…) … Une allumette enflamme des hectares … Une même disproportion peut affecter tout autant les phénomènes inerte et artificiels … Une infime mutation peut entraîner l’émergence d’une espèce vivante dont le nombre occupera le globe … Le concept d’événement devient universel, alors qu’il paraissait si menu et circonstanciel … Ecart entre cause et conséquence. » (Michel Serres – Rameaux)

« Croyant dominer ses productions, ‘Homo faber’ s’étonne lorsqu’elles aboutissent à des conséquences étranges, scandalisé de ce que les choses sorties de ses mains dans telle intention vivent autrement que prévu … Or, il ne les téléguide jamais si aisément … quelquefois, elles dominent non seulement leur auteur, mais l’environnement. Vous aurez du mal à trouver un seul outil dont l’avenir coula dans le canal prévu par son concepteur. La leçon de l’apprenti sorcier gît dans le comportement ordinaire des choses que nous fabriquons … Même Eve et Adam échappent à leur modeleur. » (Michel Serres) 

« La rose est sans pourquoi, fleurit parce qu’elle fleurit,

« N’a souci d’elle-même, ne désire être vue. » (Angelius Silesius – cité par Martin Heidegger, comme contredisant le principe de raison suivant lequel rien n’est sans cause.) « Mais le ‘sans pourquoi’, le ‘pourquoi’ comme demande, dit que la rose n’a pas de raison et le ‘parce que’, le ‘parce que’ comme réponse, dit en gros qu’elle en a une » (Martin Heidegger) – Stop ici, Martin, trop compliqué pour moi ensuite. Alors que Goethe affirme : « Tiens-t’en au ‘parce que’, ne demande pas le ‘pourquoi’. » – Profonde sagesse.

« Comme aucun facteur d’explication ne peut en principe être le dernier, mais que, pour être lui-même compris, il en exige toujours un autre qui le précède, l’unité à comprendre exige, en théorie, d’être prolongée à l’infini ; en pratique, jusqu’au contenu événementiel le plus ancien qui nous soit connu. Si nous supposons que les événements connus de l’histoire s’inscrivent tous dans des enchaînements causaux, seule la totalité de ces événements constitue l’ensemble qui permet de comprendre chacun d’entre eux. » (Georg Simmel)

« Les motifs les plus puissants de l’action humaine ne s’appellent pas plaisir, intérêt, avidité, ni d’un autre côté générosité, amour de l’humanité, sacrifice de soi ; mais : désir de gloire et de considération, honte et culpabilité, crainte du manque d’estime, besoin de reconnaissance, appel au regard d’autrui… » (Tzvetan Todorov)

« Qu’espérer d’une société dont les intellectuels détournent les individus du désir d’élucider les causes personnelles de leur situation ? … La sociologie ne peut rien pour expliquer l’essentiel, à savoir l’échec ou la réussite d’une personne. » (Philippe Val – à propos du sociologisme)

« Quand on dit que les mêmes causes produisent les mêmes effets, on ne dit rien. Car les mêmes choses ne se reproduisent jamais. » (Paul Valéry)

« Le modèle de causalité linéaire est à la base des concepts occidentaux de responsabilité, de justice, et surtout de vérité objective, et donc des notions de vrai et de faux … Mais la séquence des événements n’est pas toujours rectiligne : l’effet peut avoir une rétroaction sur sa propre cause. » (Paul Watzlawick) – Cas des conflits interindividuels qui tournent en rond et dont le point de départ est oublié ou n’a plus aucune importance.

Les prédictions autoréalisatrices où « le modèle de causalité linéaire échoue à rendre compte de la situation … prédiction qui se vérifie d’elle-même, supposition ou prévision qui, par le simple fait d’avoir été énoncée, entraîne la réalisation de l’événement prévu, et confirme par là même sa propre exactitude … la prédiction de l’événement conduit à sa réalisation. » (Paul Watzlawick) – Pénuries annoncées et stockages déraisonnables, comportements hypersensibles et méfiants entraînant rejet et mépris, je fuis parce qu’il (ou elle) me fatigue par ses colères, je suis en colère parce qu’il fuit sans cesse.

« Nous ne pouvons inférer les événements de l’avenir des événements présents. La croyance au rapport de cause à effet est la superstition. » (Ludwig Wittgenstein)

« Ce qu’il y a de fourvoyant dans le point de vue de la causalité, c’est qu’il conduit à dire : ‘Bien entendu, cela devait arriver ainsi’. Alors qu’on devrait penser : cela peut être arrivé ainsi, ou de quantité d’autres façons. » (Ludwig Wittgenstein)

« Petite étincelle engendre grand feu. »(proverbe)

« Quand un anneau est brisé, la chaîne n’existe plus. » (proverbe)         

« Il ne faut pas chercher des causes que l’on transformera forcément en raisons en s’aveuglant ainsi derrière une rationalité protectrice qui n’existe pas toujours dans les conduites humaines » (?)

– Si les Psy. posent une bonne question en interrogeant sur la source, ils rendent un mauvais service en « cherchant des causes que l’autre transformera forcément en raisons en s’aveuglant ainsi derrière une rationalité protectrice qui n’existe pas toujours dans les conduites humaines » (?).

Ci-dessous quelques remarques (légèrement altérées dans la forme) tirées du livre d’Hubert Krivine, Petit traité de hasardologie.

On pourra aussi voir à la rubrique Erreur, Faute, 270, 1 les extraits  de l’ouvrage de Gérald Bronner,  L’empire de l’erreur      

 « Insistons sur la distinction entre corrélation (événements qui semblent aller de pair ou se succéder systématiquement) et causalité. Les ‘démonstrations’ fondées sur la confusion entre ces deux notions sont la grande spécialité de journaliste et de politiciens … Corrélation ne signifie pas causalité. »

« Toutes les statistiques indiquent que le risque de mourir dans un lit d’hôpital est trois fois plus élevé qu’à la maison. D’où d’après Coluche, il ne faut surtout pas aller à l’hôpital quand on est malade. » – Ce biais des populations étudiées, ce mélange de deux populations (les gens en général et les malades) dont l’une est biaisée porte le nom, chez les statisticiens, d’effet Coluche. 

« Ceux qui pratiquent le jogging a 60 ans ont plus de chance de se trouver en bonne santé à l’âge de 70 ans que la population en général … C’est peut-être vrai, mais ce n’est pas une démonstration, la population qui pratique le jogging a 60 ans est biaisée : elle concentre ceux qui sont déjà en bonne santé … Contrairement à l’opinion reçue, une personne âgée de 90 ans a beaucoup plus  de chance de devenir centenaire qu’un jeune homme disposant d’une santé insolente. Pour atteindre 100 ans il faut déjà avoir atteint 90 ans, ce qui n’est pas donné à tout le monde … Habiter sous une ligne à haute tension et être sujet à plus de maladies certes (Angleterre), mais l’habitat sous ces lignes est plutôt synonyme de pauvreté génératrice de fragilités …  En 1914, l’Armée française, alors très bornée et peu soucieuse de ses hommes, rejetait le port du casque (réservé à ces trouillards d’Allemands !) et fanfaronnait en se targuant de recenser peu  de blessés à la tête (d’où l’inutilité du port de ce fameux casque). Bien sûr, on ne comptait que les survivants, les autres étaient morts. »

« Invalidation de la loi des séries : des nombres aléatoires générés au hasard par une machine présenteront des sortes de groupements, de même de points placés dans un carré par une machine qui se présenteront en forme d’amas et ne seront pas répartis comme le ferait un personnage – Invalidation de la loi d’ennui maximum (LEM) : la tartine qui tombe du mauvais côté, les tables ont une hauteur de 0,75 m. et la tartine, généralement posée sur le côté sec, n’a  que le temps de faire un demi-tour ; on se souvient aussi plus des mauvaises surprises – Les coïncidences miraculeuses : avec un échantillon de 23 personnes seulement, la probabilité d’avoir deux personnes nées le même jour est supérieure à 50%, avec un échantillon de 40 personnes, la probabilité est de 90%. On peut parier. »

« La fantastique accumulation de données digitalisées (big data) va générer un courant opposé à la pensée classique qui exige une théorie pour passer des corrélations à la causalité … ‘Le déluge de données rend la méthode scientifique obsolète … Les nombres parlent d’eux-mêmes et la corrélation supplante la causalité’ (un scientifique). »

« Au-delà de la moyenne, il peut être décisif de connaître les statistiques des valeurs extrêmes : la résistance d’une chaîne est celle de son maillon le plus faible, la résistance moyenne des maillons n’apprend rien sur sa qualité. »

« Le ‘pari de Pascal’ un peu déformé par exagération : faible possibilité de gros gain assortie de grandes  possibilité de petites pertes s’applique parfaitement à la conduite des joueurs de loterie, ‘le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas’ … Le principe de précaution est en quelque sorte le pari de Pascal à l’envers ; il veut nous contraindre à considérer les conséquences très improbables, mais potentiellement catastrophiques de l’introduction de nouvelles technologies. » – Faible possibilité de grosses pertes. Et conduit à s’abstenir.

« Le hasard comme ‘la mesure de notre ignorance’ (Henri Poincaré, le mathématicien) … Quelque chose est ‘arrivé par hasard’, façon de dire qu’on ne sait pas, ou même qu’on ne peut pas savoir – Le hasard dit objectif : débarrassé de toute considération sur le savoir de l’observateur ; ‘La rencontre de deux chaînes causales indépendantes’ (Cournot, le mathématicien), le passant qui reçoit un pot de fleurs sur la tête (indépendance des causes nombreuses du passage de la victime, et des causes aussi complexes de la chute du pot) … Rejoint l’expression se ‘trouver au mauvais endroit au mauvais moment’ – Le hasard dit subjectif par manque d’information ; lancer humain de pièce de monnaie. »

« Malgré Diderot dans ‘Jacques le fataliste’ : ‘Posez une cause, un effet s’ensuit ; d’une cause faible , un faible effet ; d’une cause momentanée, un effet d’un moment ; d’une cause intermittente, un effet intermittent ; d’une cause contrariée, un effet ralenti ; d’une cause cessante, un effet nul’, il n’y a pas de proportionnalité entre la cause et l’effet, de toutes petites différences dans les causes peuvent entraîner de très grosses dans les effets, le chimpanzé et l’homme ont en commun 98% de leurs gênes codants, et pourtant ! L’effet papillon, le battement d’aile de celui-ci a un bout du monde et la tornade à l’autre bout, dont l’énoncé même témoigne de l’imprévisibilité, de l’impossibilité de savoir qui fait quoi

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