540,1 – Passions, Addictions

– Les dieux opposés, et complémentaires, autant la figure d’Apollon met l’accent sur la raison, autant celle de Dionysos exprime les passions (au sens vitalité effervescente, énergie débridée, chaos, ombre…)

– Ce qu’on appelle les passions ne sont pas toujours à considérer négativement, voir : la citation de Jean-Joseph Goux ci-dessous, la Fable des abeilles de Bernard Mandeville (Vertus, 740,1), la Ruse de la raison de Hegel (Raison, 630,1). Elles sont aussi moteurs de l’action.

– « Passion, au sens péjoratif, désigne l’aveuglement, état passionnel, voire pathologique, au sens positif, désigne eu état d’enthousiasme, un état du désir. » (Bertrand Vergely)

– Dans notre société d’obsédés aliénés, il faut être passionné pour réellement exister, c’est-à-dire engagé dans une cause au service des dominants (mondialisation, compassion-bidon, migration sans restriction, bouleversement de tout, rejet de toute tradition et de tout sens, démolition, déconstruction, persécution de tout ce qui est sain…). La sagesse, la raison, la simple indifférence sont vilipendées, traquées par la meute hurlante.

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« Ceux qui sont en passion, c’est-à-dire en difficulté avec eux-mêmes. » (Alain)

« Le passionné est un acteur : il commence toujours par jouer un peu au-dessus de son ton naturel ; il force, et il y est pris ; il y est pris parce qu’il s’en croit maître. » (Alain)

« Les passions font moins de mal que l’ennui, car les passions tendent toujours à diminuer, tandis que l’ennui tend toujours à s’accroître. » (Barbey d’Aurevilly)

« Les intérêts transigent toujours, les passions jamais. » (un avocat)

« Une passion est une donnée immédiate de l’énergie vitale, qui ne peut ni se justifier ni se réfuter, elle ne peut qu’être réalisée ou se perdre. » (Jean Baechler)

« Les passions définies par la stratégie de la domination poussent les humains à vouloir occuper des positions qui leur donnent le sentiment et l’illusion d’échapper à l’insécurité. Les passions s’individualisent en passions du pouvoir ou ambition, du prestige ou vanité et orgueil, et de  la richesse ou cupidité et avarice. Les stratégies de la dépendance adoptent la démarche inverse et cherchent la sécurité auprès de ceux qui détiennent le pouvoir, le prestige et la richesse … Nous retiendrons la soumission, l’amour et l’admiration, qui présentent la particularité remarquable que, si les stratégies échouent, elles se transmuent en des passions diamétralement opposées, que l’on appellera la révolte, la haine et l’envie. » (Jean Baechler – ne traitant là que des passions sociales, non des addictions personnelles.)

« Les passions, seules, amènent à l’extase (sortie de soi). Passion amoureuse, passion du jeu, passion de Dieu, de l’art, de la vitesse, et que sais-je encore. Toutes apportent avec elles le soulagement suprême. Toutes sont euphorisantes, mais leur prix est exorbitant. Seule la passion de soi ne coûte rien, il est vrai qu’elle n’entraîne aucune extase. En définitive, il se pourrait qu’elle soit la plus chère de toutes. » (Olivier Bardolle)

« Passion, je te connais et je te hais, va-t-en ! » (Baudelaire)

« N’importe quelle passion est une insulte à l’indifférence générale. Celui qui, par sa passion, démasque votre indifférence, votre pusillanimité ou votre tiédeur, celui qui, par la force de sa présence ou de sa souffrance, démasque votre peu de réalité, celui-là doit être exterminé. » (Jean Baudrillard)

« Des boucles de fonctionnement qui établiront des dépendances et des addictions, qui feront que toute la puissance de l’être reste enfermée … Hommes et femmes piégés dans leur rapport avec l’argent ou avec le pouvoir … Leur être tout entier est pris dans une boucle autonome et ils ne peuvent donc agir que de façon réactive … le fonctionnement de ces éléments devient exclusif et étouffe l’ensemble dont ils font partie … ‘Marionnettes de leurs passions’ … même, quand elles ont, comme c’est souvent le cas, une apparence d’utilitarisme. » (Miguel Benasayag)

« Une humanité qui, manquant de tout point de repère moral, ne vit plus que dans l’ordre passionnel et dans la contradiction qui le conditionne. » (Julien Benda)

« Les passions politiques ont même acquis cet attribut si rare dans l’ordre du sentiment : la continuité. Elles atteignent, chez celui qu’elles possèdent, à un degré de prépondérance sur ses autres passions absolument inconnu autrefois. » (Julien Benda)

« Rien de plus monotone que la passion, et qui se répète si misérablement. César nous fait comprendre tel ambitieux de chef-lieu de canton et tel fonctionnaire colonial nous ouvre l’âme de Néron. La passion prend tout ce qu’on lui cède et ne rend rien. » (Georges Bernanos)

« Freud peut dire comme Hegel, que ‘dans l’histoire universelle il résulte des actions des hommes quelque chose d’autre que ce qu’ils ont projeté et atteint, que ce qu’ils savent et veulent immédiatement’. Mais la non-concordance entre ce que les hommes font et ce qu’ils croient et disent faire, c’est le rôle de la ‘rationalisation’ de la masquer. La passion laisse agir à sa place la raison : c’est une ruse de la passion. » (Alain Besançon – inversant à la suite de Freud le sens, la direction, de la ruse de la raison hégélienne)

« On domine plus facilement les peuples en excitant leurs passions qu’en s’occupant de leurs intérêts. » (Gustave Le Bon)

« Nos passions ont cessé d’être républicaines ou nationales, elles sont culturelles, commerciales ou privées. » (Pascal Bruckner)

«  Que dire des néosféministes  ? Que dire de leurs passionnants efforts pour dépassionner la vie ?… ‘La passion est en voie d’extinction, le vertige sensuel aussi’ (Elisabeth Badinter – s’en félicitant) . » (Annie Le Brun)

« Le désir des honneurs et de la gloire suspend toutes les autres passions, et donne momentanément les apparences de toutes les vertus. » (La Bruyère)

« Rien ne coûte moins à la passion que de se mettre au-dessus de la raison : son grand triomphe est de l’emporter sur l’intérêt. » (La Bruyère)

« Les passions sont dangereuses, pour l’Etat… Les moralistes se sont demandés comment combattre les passions les unes par les autres et ont abouti à la conclusion que la passion la plus forte, devant laquelle les autres devaient céder, est celle de l’intérêt (Descartes écrit encore un ‘Traité des passions’ et non un ‘Traité de l’intérêt’), qui deviendra l’intérêt presque exclusivement économique que nous connaissons … Certes … Mais la dificulté, dans le cas de l’utilitarisme, est qu’il repose sur le postulat que si les hommes sont intéressés, égoïstes et calculateurs, c’est par nature. » (Alain Caillé)

« La passion est une obsession positive, l’obsession est une passion négative. » (Paul Carvel)

« Découvrir la passion qui domine le plus ; celle qui fait réagir immédiatement, qui t’empêche de réfléchir et d’être humain. » (saint Jean Cassien – conseil à ses moines)

« Passions : la mobilisation quasi totale de l’affect sur un ‘objet’ » (Cornelius Castoriadis)

« L’homme, dans l’état actuel de la société, me paraît plus corrompu par sa raison que par ses passions. Ses passions (celles qui appartiennent à  l’homme primitif) ont conservé, dans l’ordre social, le peu de nature qu’on y retrouve encore. Les passions font ‘vivre’ l’homme, la sagesse le fait seulement ‘durer’. » (Chamfort)

« Plus les peuples avancent en civilisation, plus l’état du vague des passions augmente. Le grand nombre d’exemples qu’on a sous les yeux, la multitude de livres qui traitent de l’homme et de ses sentiments rendent habile sans expérience. On est détrompé sans avoir joui ; il reste encore des désirs, et l’on n’a plus d’illusions. L’imagination est riche, abondante et merveilleuse, l’existence pauvre, sèche et désenchantée. On habite, avec un cœur plein, un monde vide, et, sans avoir usé de rien, on est désabusé de tout. » (Chateaubriand)

« L’adage brahmanique est irréfutable : ’Chaque fois que l’on se crée un nouveau lien, c’est une douleur de plus qu’on s’enfonce, comme un clou, dans le cœur’. Une passion est par elle-même un châtiment. Celui qui s’y livre, se croit-il l’homme le plus comblé, expie par l’anxiété son bonheur réel ou imaginé. » (Emil Cioran)

« Dés qu’on s’adonne à une passion, noble ou sordide, peu importe, on est sûr de passer de tourment en tourment. » (Emil Cioran)

« A peine avons-nous perdu un défaut qu’un autre s’empresse de le remplacer. Notre équilibre est à ce prix. » (Emil Cioran) – « j’ajoute quant à moi qu’il faudrait en dire autant de toute sottise, de toute folie, de toute passion : qu’aucune ne disparaît sans ouvrir le chemin à une autre qui s’empare aussitôt de la place laissée vacante. » (Clément Rosset)

« La clef qui délivre. Ce n’est point celle qui ouvre, mais celle-là qui ferme. » (Paul Claudel)

« Suis moins ta passion, règle mieux tes désirs. » (Corneille – Horace)

« Qu’un oiseau soit retenu par un lien de fer ou le fil le plus léger et le plus délicat, il ne pourra prendre son vol. Il restera prisonnier ou captif tant que l’un ou l’autre lien n’aura pas été rompu. » (saint Jean de la Croix – sur le nécessaire détachement des passions humaines) 

« Les passions fatiguent l’âme, l’obscurcissent, la tachent, l’affaiblissent. » (saint Jean de la Croix)

« Le feu s’éteint dès que le bois est consumé, tandis que nos tendances ne diminuent pas quand on a travaillé à les réaliser et que leur objet s’évanouit ; bien loin de diminuer, à l’exemple du feu qui a consumé son aliment, … leur faim s’est accrue. » (saint Jean de la Croix)

« Il est toujours plus facile d’épouser une lubie que d’en divorcer ; et douloureuse peut être une séparation de corps. » (Régis Debray)

« L’horreur des ‘populismes’ provient de la crainte de voir ressurgir les passions chaudes (vanité, peur, héroïsme) qu’on avait crues définitivement remplacées par les passions froides (intérêt, calcul, commerce )… Mais la raison froide engendre les passions froides, qui ne sont pas moins dangereuses parce qu’elles suscitent des déterminations et des fantasmes où le sentiment n’ a pas sa place et où l’on cause les plus grands torts au nom de la raison universelle. Si les premières nuisent par un trop grand amour de soi , les secondes nuisent par une trop grande certitude de leur bon droit … Les passions chaudes (vanité qui étale, peur qui rassemble, etc..) sont créatrices d’identité … tandis que les passions froides (intérêt, confort, sécurité, etc.) sont créatrices de  cette abstraction  rationaliste dans laquelle les identités se défont, et d’un fanatisme de l’indétermination  . » (Chantal Delsol – Le crépuscule de l’universel)

« Souvent la passion nous fait croire certaines choses bien meilleures et plus désirables qu’elles ne le sont ; puis quand nous avons pris de la peine à les obtenir  … la jouissance nous en fait connaître les défauts, et de là viennent les dédains, les regrets et les repentirs. » (Descartes)

« Il suffit qu’on les rende sujettes à la raison, et lorsqu’on les a ainsi apprivoisées, elles sont quelque fois d’autant plus utiles qu’elles penchent plus vers l’excès. » (Descartes) – « La raison règle les passions lorsqu’elle peut les maintenir dans leur fonction instrumentale normale. » (Charles Taylor)

« Il n’y a que les passions, et les grandes passions, qui puissent élever l’âme aux grandes choses. Sans elles, plus de sublime, soit dans les mœurs, soit dans les ouvrages et la vertu devient minutieuse … les passions sobres font les hommes communs … Ce serait donc un bonheur que d’avoir des passions fortes. Oui, sans doute, si toutes sont à l’unisson, établissez entre elles une juste harmonie, et n’en appréhendez point de désordres » (Diderot)

« Chassez un clou par l’autre. » (saint Dominique ? – Pour vaincre les passions)

« Bernard Mandeville est celui qui avant tout le monde a compris que le développement économique passait par la libération des passions. » (Dany-Robert Dufour – à propos de sa célèbre fable des abeilles – voir à la rubrique Vertus, 740, 1) 

« On veut l’intensité sans le risque, c’est impossible. » (Anne Dufourmantelle)

« L’indépendance consiste à s’affranchir des passions, sa science à les connaître, son bonheur à les assouvir. Conciliez cela ! » (Louis Dumur)

« Les trois grandes puissances de l’homme : l’ambition, l’amour-propre et l‘intérêt. » (Louis Dumur)

« La seule passion qui ‘enrichisse’ est évidemment celle de l’argent. » (Tony Duvert)

« La vie quotidienne implique d’innombrables figures de cérémonial, tantôt rituel, tantôt subjectif, mais toujours intégrés à l’ensemble humain dans lequel nous vivons. L’individu a le choix entre adhérer aux règles ou bien en dissimuler la violation. Le contrôle social exerce sa pression, mais la perception de cette obligation suggère d’innombrables ruses … De multiples aménagements ou compromis sont à l’œuvre dans l’action des  groupes et des individus les uns sur les autres … Une ruse qui se joue des postulations apparemment incontournables assouplit l’effet des codes et des impérieuses exigences de la religion ou de l’idéologie … La passion commence lorsque l’un ou l’autre des membres de la  collectivité ne se satisfait plus des interactions autorisées ou clandestines , n’admet plus les règles du commerce des vivants entre eux …  Malgré l’obsession de la cohérence, on mesure combien la vie quotidienne est formée d’équivoques, de compromis, d’ambiguïtés de ruses … Tentations auxquelles s’opposent le rêve utopique et cohérent par quelques penseurs d’une société réglée comme une machine, la ‘liturgie de l’ordre’ qu’Auguste Comte associait au progrès et dont il souhaitait que le gestion soit confiée à quelques penseurs qualifiés ….  Les émotions, les sentiments, les passions ne sont pas identiques entre eux et ne différent pas seulement par la coloration que leur apporte une culture, une religion, une économie. Ils apparaissent comme autant de manière de surmonter tout à la fois les exigences de la nature, les institutions et les obstacles qui limitent, socialement, la libre interaction des êtres entre eux  … Désirer des choses inconnues par les autres ne suscite d’adhésion collective que si les  semences dispensées par l’hérétique peuvent engendrer des formes ultérieures de communauté, de connivence, de solidarité. » (Jean Duvignaud – considérations éparses autour des passions et de la vie en société)

« Une seule étincelle suffit pour allumer un grand feu. » (l’Ecclésiaste – cité par saint Jean de la Croix)

« Ne consultez pas votre passion, mais la raison. Ce que la passion décide est passager, tandis que ce qui est dicté par la raison plaît ordinairement toujours. » (Erasme)

« On va toujours, en fin de compte, par où l’on pèse. » (Saint-Exupéry) 

« J’avoue que les passions peuvent me conduire, mais elles ne sauraient m’aveugler. » (madame de La Fayette – La princesse de Clèves)

« Le charme de la nouveauté, peu à peu tombant comme un vêtement, laissait voir à nu l’éternelle monotonie de la passion, qui a toujours les mêmes formes et le même langage. » (Flaubert)

« Les passions s’étiolent quand on les dépayse. » (Flaubert)

« Tous renonçaient au lot des belles actions – Ils croyaient s’affranchir suivant leurs passions – Ils étaient esclaves d’eux-mêmes. » (La Fontaine – Les compagnons d’Ulysse)

« Ce sont les passions qui font et défont tout ; si la raison dominait sur la terre il ne se passerait rien. Les passions sont chez les hommes des vents nécessaires pour mettre tout en mouvement. » (Fontenelle – chaud partisan du mouvement et du progrès au XVIII° siècle)

« Car la raison, si elle est seule à gouverner, est une force restrictive ; et la passion livrée à elle-même est une flamme qui brûle jusqu’à son extinction … Reposer dans la raison et se mouvoir dans la passion. » (Khalil Gibran)

« Toute passion se nourrit des obstacles qui lui sont opposés (le noble goût du risque). Comme si tout désir était désir de l’obstacle …  ‘Comment pourrais-je appartenir à un club qui accepterait de me prendre pour membre ?’  (Un Marx brothers). » (René Girard)

« En poursuivant son propre intérêt, l’homme cesse d’être le jouet des passions multiples, effrénées et destructrices. Un seul type particulier de passion, l’appât du gain, l’attrait pour la richesse, le motif pécuniaire, peut exercer sur l’âme un tel empire qu’il dominera toutes les autres passions, l’ambition, le désir de gloire, l’amour du pouvoir ou la concupiscence de la chair. En cela l’avarice n’est plus la passion sordide et anathème qu’elle était … facteur de paix et de progrès … L’avare est réhabilité comme modèle de modération, de travail et de sagesse ; et au-delà de l’avare, sont légitimés la soif de richesse, la recherche du gain. » (Jean-Joseph Goux)

« La passion est l’ennemie juré de la prudence, et par conséquent du bon choix. » (Baltasar Gracian)

« Elles nous incitent à vivre de toutes les forces de notre cœur, au lieu de végéter au ralenti, à l’économie …  Il faut non pas s’en défaire, mais les intégrer à la vie ; elles doivent être à notre service, et non pas nous au leur  … Celui qui vit sans passions est privé de mordant, de force, de la plénitude de la vie … Mais la fréquentation des passions peut être difficile et pénible. Il s’agit toujours de suivre un chemin de crête … Une passion peut prendre d’autant plus de force qu’elle nous fait plus de bien ; mais alors, c’est elle qui nous détermine. » (Père Anselm Grün) – Il s’agit bien sûr de passions positives (enthousiasme…), non d’addictions.

« Priver l’homme de la possibilité de satisfaire un certain nombre d’instincts fondamentaux risque de rendre nécessaire le maintien d’une dictature visant à réprimer la libre décharge de l’énergie pulsionnelle. »  (Béla Grunberger, Janine Chasseguet-Smirgel)

« Rien de grand ne s’est jamais accompli sans passion, rien de grand ne peut s’accomplir sans elle … rien ne se réalise sans intérêt … Les passions constituent l’élément actif … La passion est l’énergie consacrée à la poursuite d’une fin ; c’est un penchant presque animal qui pousse l’homme à concentrer son énergie sur une seule chose sans se disperser sur une multitude d’objectifs … Ce n’est qu’une moralité morte, hypocrite le plus souvent, que celle qui se déchaîne contre la passion comme telle … En poursuivant leurs intérêts les hommes font l’histoire… » (Hegel – La raison dans l’histoire)

« Les individus historiques … Ces grands hommes semblent obéir uniquement à leur passion, à leur caprice. Mais ce qu’ils veulent est l’Universel … La passion est devenue l’énergie de leur moi ; sans la passion ils n’auraient rien pu produire … Pour que l’homme produise quelque chose de valable, il lui faut la passion. C’est pourquoi la passion n’a rien d’immoral. » (Hegel)

« Les verres d’eau ont les mêmes passion que les océans. » (Victor Hugo)

« Pour que l’intelligence puisse prévaloir sur la passion, il faut qu’elle se passionne elle-même … L’intelligence doit être passionnée pour dépassionner la passion … Car seule la passion a prise sur la passion. » (Vladimir Jankélévitch)

« Le talent a-t-il besoin de passions ? Oui, de beaucoup de passions réprimées. » (Joseph Joubert)

« Les passions des jeunes gens sont des vices dans la vieillesse. » (Joseph Joubert) 

« Il y a deux sortes de passions : celles que nous avons et celles qui nous ont. On triomphe quelquefois des premières. » (Alphonse Karr)

« Tout vide spirituel peut provoquer des tempêtes passionnées. » (Arthur Koestler)

« Tiens les brides à tes passions, mais garde-toi de laisser les rênes à la raison. » (Karl Kraus)

« Cette victoire de la passion du profit sur le profit des passions (ou, pour le dire comme Marx, des ‘plaisirs de l’accumulation sur l’accumulation des plaisirs’. » (Serge Latouche – sur le triomphe de l’intérêt matériel sous sa forme d’accumulation illimitée, et donc de renonciation à la jouissance.)

« La société occidentale est la seule société dans l’Histoire qui a libéré ce que toutes les autres ont essayé de juguler, à savoir les passions tristes de Spinoza (l’ambition ,l’avidité, l’envie, l’égoïsme) et les passions agressives de Freud qui leur sont proches et qui sont pour lui responsables du ‘malaise dans la civilisation’ … La modernité a cru que les vices privés canalisés par l’économie, à travers l’intérêt, devenaient des vertus publiques… » (Serge Latouche)

« Ce dont on se garde, c’est de la passion sous toutes ses formes … ‘On déclame sans fin contre les passions ; on leur impute toutes les  peines de l’homme, et l’on oublie qu’elles sont aussi la source de tous ses plaisirs’. » (Bertrand Leclair – citant Diderot)

« Les passions diminuent et s’éteignent lorsque les moyens physique de les satisfaire s’affaiblissent. Mais, l’amour-propre, toujours aux aguets, cherche à faire attribuer à la sagesse ce qui n’est que l’effet de l’âge et de l’impuissance. » (duc de Lévis)

« Qui dit passion, même pour le bien, dit quelque chose de dangereux. » (prince de Ligne)

« La passion ment et calomnie, c’est son métier ; elle n’a ni conscience ni pudeur ; mais dés que l’intérêt s’en mêle, ne craignez pas qu’il se trompe. » (Joseph de Maistre)

« Une ruche industrieuse et florissante. Les abeilles s’activent, mues par ces passions que Stendhal attribuera à l’homme moderne : l’envie, la jalousie, la vanité, la convoitise, l’appât du gain, le luxe, l’orgueil, la haine, la lutte dérisoire pour la gloire et la reconnaissance … Survient un pasteur anglican qui leur enseigne les vertus chrétiennes de générosité, de justice, d’humilité, de tempérance et de charité. Les abeilles se laissent convaincre … N’ayant plus d’incitations à travailler et à produire, elles deviennent indolentes, la pénurie s’installe et la ruche s’éteint dans la misère et le désordre. » (La Fable des abeilles de Bernard  Mandeville)

« La passion masque autrui et n’en use que pour masquer la subjectivité qu’elle affecte … Soit la définition qu’en propose Descartes : la passion qui consiste à se considérer comme formant une partie d’un tout dont l’aimé offre l’autre partie ; toutes les amours ne se hiérarchisent que par les variations de l’importance relative d’une des parties (moi) et de l’autre (l’aimé), la structure ne variant pas entre les amours où je constitue la majeure partie du tout (aimer la bouteille, une femme qu’on force ou l’argent thésaurisé) et celles où je n’en constitue que la part mineure (aimer sa femme, ses enfants, son prince ou  Dieu) … Même dans ce meilleur des cas, représentation confuse et volonté arbitraire … Manque avec la connaissance, autrui lui-même … La passion naît du désir, de l’imagination, de la timidité, de l’admiration, de l’audace, de celui qui aime et elle croît d’autant plus haut que son objet reste lointain, indisponible, manquant, bref n’apparaît pas, voire n’est pas … Le principe de réalité désamorce une passion qui, précisément, se nourrissait de sa seule irréalité (Flaubert). » (Jean-Luc Marion)

« L’art de vivre consiste à sacrifier une passion basse à une passion plus haute. » (François Mauriac)

« Tout sert la passion : le jeûne l’exaspère, l’assouvissement la fortifie ; notre vertu la tien éveillée, l’irrite, elle nous terrifie, nous fascine ; mais si nous cédons, notre lâcheté ne sera jamais à la mesure  de son exigence. » (François Mauriac – Le désert de l’amour)

« La raison, c’est-à-dire l’intelligence modérant, mesurant, pressant toutes les passions. » (Charles Maurras)

« C’est le partage d’une commune passion qui parvient seul aujourd’hui à les rassembler en des communautés réduites ainsi au rang de clubs, au hasard : les motards, les écolos, les  chasseurs, les patriotes, les homosexuels… Les jeunes adorent cette mutation, qui d’ailleurs semble la leur. » (Charles Melman – sur la disparition des valeurs ou autorités, communes, partageables, des moteurs qu’étaient : intelligence divine, volonté politique, intérêt de classe…)

« Les passions sont de plus en plus imaginaires ; au sens où elles font l’économie du corps-à-corps. » (Olivier Mongin – s’inspirant de Marc Guillaume – La contagion des passions) – L’économie de la réalité.

« Sans les passions collectives d’hier on est seul, totalement seul, les passions ne se remettent pas de la mort des idéologies … ‘Avoir quelque chose à l’horizon, avoir une certaine idéologie, ça aide à vivre’.» (Olivier Mongin – citant ?)

« Garder raison dans la passion, garder passion dans la raison … Les passions peuvent être intenses, mais à condition d’être éclairées par une veilleuse qui soit la raison, sinon elles nous conduisent au délire ‘d’homo demens’. La raison doit être non pas froide, mais sensible … Dialectique permanente de la passion et de la raison. » (Edgar Morin)

« La grandeur de caractère ne consiste pas à ne pas avoir de passions ; il faut les avoir au plus haut degré mais les tenir en laisse, et sans que cette domination soit une source de joie particulière, avec simplicité … Un homme ne peut se permettre certaines choses, sans tomber dans la corruption et la décadence, que dans la mesure où il est aussi capable d’y renoncer, de se dominer lui-même à tout moment. » (Nietzsche) – « Un homme ça s’empêche. » (Albert Camus)

« Plus les passions qu’une époque, un peuple, un individu peuvent se permettre, parce qu’ils sont capables de les utiliser comme un moyen sont grandes et terribles, plus leur culture est haute. » (Nietzsche) 

« Le goût de l’ordre est une passion utile, puisque, seule, elle permet toutes les autres. » (Roger Nimier)

« L’un des signes distinctifs des adultes élevés comme des enfants-rois est leur addiction aux jeux … Jeux vidéo à la maison, enfouis dans le canapé, mais également jeux nomades sur le fameux objet transitionnel qu’est le smartphone. » (Michel Onfray)

« Taine montre combien les passions tristes jouent un rôle majeur dans la Révolution française (comme dans toute révolution) , la haine et l’envie, la jalousie et le ressentiment, la convoitise et la rancœur, la malveillance et l’inimitié, la rancune et l’antiphatie, en un mot, la méchanceté. Dans les livres d’histoire, la noirceur du cœur des hommes se trouve souvent recouverte avec la peinture des grands mots, le bleu de la liberté, le blanc de l’égalité, le rouge de la fraternité … Aucun philosophe ne fait le bilan de la Révolution française ‘pour le peuple’ au nom duquel elle a été faite : s’en porte-t-il mieux ? Est-t-il plus heureux ? ses conditions de vie ont-elles changé ? Le régime du capitalisme bourgeois instauré par la révolution lui est-il plus doux que le régime féodal aboli la nuit du 4 août ? » (Michel Onfray) – Pas plus que de la révolution bolchevique plus tard. 

« La passion est ce que l’homme a de plus intime. Et c’est elle, pourtant, qui le jette hors de lui avec le plus de brutalité. Ce qui fait bouger les hommes, ce qui les fait agir et essayer de changer le monde, ce n’est pas la pensée, la raison, le doute, le sentiment : c’est la passion. » (Jean d’Ormesson)

« On a brisé les obstacles pour sauver la passion et on a perdu la passion (on a jeté le bébé avec l’eau du bain) … Tous les obstacles à la passion ont perdu de leur poids … Ce qui provoquait des bouleversements, donc des passions, ne pose plus de nos jours que des problèmes matériels … La passion est inversement proportionnelle à la facilité qu’elle a de s’assouvir … Et nous, à force de céder à nos passions, nous nous en sommes aussi parfaitement débarrassés … Ah, donnez-nous des chaînes, des croyances, des œillères, des martyrs pour nous rendre nos passions. Et puis, aveuglez-nous… » (Jean d’Ormesson – principalement sur la passion amoureuse)

« L’illusion passionnelle tant qu’elle dure, a au moins le mérite d’absorber l’être tout entier dans une activité qui lui tient lieu de tout : seuls échappent à l’ennui les fous, les amants, les ivrognes. » (Mona Ozouf – sur madame de Deffand)

« Guerre intestine de l’homme entre la raison et les passions. S’il n’avait que la raison sans passions… S’il n’avait que les passions sans raison… Mais ayant l’un et l’autre il ne peut être sans guerre, ne pouvant avoir la paix avec l’un qu’ayant la guerre avec l’autre ; aussi il est toujours divisé et contraire à lui-même. » (Blaise Pascal)

« Nos passions nous poussent au dehors, quand bien même les objets ne s’offriraient pas pour les exciter. » (Blaise Pascal)

« Réduire à rien les passions collectives, laisser s’épanouir les passions individuelles, voilà pour moi l’idéal politique. » (Louis Pauwels) – Pour réduire les gens à l’état de laquais soumis, on fait exactement le contraire : d’un côté, les endoctriner, les exciter, de l’autre, les brider, les brimer, les châtrer.

« Nous ne connaissons jamais que les passions des autres, et ce que nous arrivons à savoir des nôtres ce n’est que d’eux que nous avons pu l’apprendre. » (Marcel Proust)

« Il y a dans toute passion un point de rassasiement qui est effroyable. » (Pascal Quignard)

« La présupposition commune à Rousseau et à Fourier est que les passions sont des vertus et que la civilisation en a fait des vices. » (Paul Ricœur),

« La nature a mis l’homme sur la terre avec des pouvoirs limités et des désirs sans bornes : c’est cet excédent-là, ce ressort, qui nous porte au-delà du but, qui change les besoins en désirs et les désirs en passions… » (Rivarol)

« Toute passion est une vraie conjuration dont le sentiment est à la fois le chef, le dénonciateur et l’objet. »(Rivarol)

« La passion fait souvent du plus habile homme un sot, et rend quasi toujours les plus sots habiles. »(La Rochefoucauld)

« Si nous résistons à nos passions, c’est plus par leur faiblesse que par notre force. » (La Rochefoucauld)

« Il y a dans le cœur humain une génération perpétuelle de passions, en sorte que la ruine de l’une est presque toujours l’établissement d’une autre … Les passions en engendrent souvent qui leur sont contraires … on est souvent ferme par faiblesse, et audacieux par timidité. » (La Rochefoucauld)

« Passions sans objet concret, comme le sont en définitive toutes les passions, le goût du pouvoir et celui de l’argent ne veulent en aucun cas entendre parler de bénéfice réel … Désir d’aucune chose réelle. » (Clément Rosset)

« ‘Ma faim qui d’aucuns fruits ne se régale’ (Mallarmé) … Il me semble que les passions se définissent toujours par la poursuite éperdue d’un objet absent ou irréel (ce qui exclut l’amour qui, du moins sous sa forme la plus courante, est toujours l’amour de quelque chose et, le plus souvent, de quelque personne) … L’objet dont rêve le passionné baigne nécessairement dans une aura d’irréalité, et, dans le meilleur des cas d’inutilité … S’il arrive que cet objet existe (comme l’argent pour l’avare, type même du passionné), ce n’est pas par son aspect réel et concret qu’il attire le passionné, mais par son aspect immatériel et abstrait … L’inutilité foncière de l’objet recherché par le passionné, une fois cet objet acquis … Ambition, haine, goût de perdre ses ennemis, tyrannies domestiques en tous genres, art d’empoisonner la vie de ses proches, obsessions et lubies qui n’ont rien à voir avec l’amour … Pour un ambitieux passionnel, un véritable ambitieux, l’enjeu de l’ambition est très vite dévalorisé (qui rêve d’être évêque se rêvera cardinal, puis pape) … La véritable passion est inapaisable (le jeu) … Son objet étant manquant, elle est assurée de ne jamais parvenir à ses fins … Le vrai collectionneur s’intéresse beaucoup moins aux objets qu’il collectionne qu’à la pensée du caractère complet de la série qu’il s’efforce de rassembler (tourmenté par l’idée qu’il pourrait en manquer un) …  collectionner est ainsi une fin en soi, indépendante de la nature ou de la valeur des objets collectionnés … Ce catalogue des passions que constitue la ‘Comédie humaine’ de Balzac n’accorde qu’une portion congrue à la passion amoureuse, il n’y a guère que ‘Le lys dans la vallée’ … Beaucoup de personnes choisissent la passion comme exutoire à leur souffrance (dépression). Elles peuvent en choisir d’autres : romantisme sous toutes ses formes, engagement politique, militantisme au service d’une cause quelconque. Les modes de reconversion dans l’irréel sont aussi variées que nombreuses, et la passion n’est que l’une d’elles» (Clément Rosset – considérations éparses sur la passion – Le registre des passions)

« Toutes les grandes passions se forment dans la solitude ; on n’en a point de semblables dans le monde, où nul objet n’a le temps de faire une profonde impression, et où la multitude des goûts énerve la force des sentiments. » (J. J. Rousseau)

« Ce qui fait surtout notre misère ce n’est pas la violence de nos passions, c’est la faiblesse de nos vertus. » (Père Joseph Roux)

« Il est difficile de vaincre ses passions, mais il est impossible de les satisfaire. » (madame de la Sablière)

« Les passions croient aussi facilement ce qu’elles désirent que ce qu’elles craignent. » (Louis-Philippe de Ségur)

« Lorsqu’on ouvre le cœur humain à une passion, les autres y pénètrent. » (Louis-Philippe de Ségur)

« Les pathologies de l’excès (on peut maintenant être ‘addict’ à n’importe quoi, du chocolat aux machines à sous, aux écrans et claviers). Le goût de l’excès serait le trait distinctif de l’individu hypermoderne, qui pèche par ‘excès d’inexistence’. Privés de cadres, de grandes valeurs transcendantales, de repères religieux, nous ne sommes plus limités, cadrés comme autrefois. Pour combler ce vide existentiel, nous sombrons dans la dépendance. Libéré de tout, maître de son plaisir, dans quoi tombe l’individu contemporain ? Dans de nouvelles aliénations.» (Jean Sévillia – reprenant une thèse de la psychologue Nicole Aubert)

« La passion s’accroît en fonction des obstacles qu’on lui oppose. » (Shakespeare) – Quatre siècles avant la thèse de René Girard sur le désir mimétique.

«  La tension vers un horizon de transformation n’apparait plus dans les propositions politiques … ‘Les violentes passions politiques ont peu de prise sur des hommes qui ont ainsi attaché toute leur âme à la poursuite du bien-être. L’ardeur qu’ils mettent aux petites affaires les calme sur les grandes’.  » (Raffaele Simone – citant Alexis de Tocqueville) – Tout, et tout tout de suite

« Comme l’a décrit Albert O. Hirschmann, les passions publiques ne s’investissent que lorsque le bonheur privé est défaillant. » (Alain-Gérard Slama) – Militants, tous frustrés ?

« Une affection ne peut être réduite ou ôtée, sinon par une affection contraire et plus forte que l’affection à réduire. » (Spinoza – L’Ethique)

« Ce n’est pas parce que nous maîtrisons nos passions que nous sommes vertueux et heureux mais parce que nous sommes  heureux que nous maîtrisons nos passions et que nous sommes vertueux. » (Spinoza – Ethique)

« Les hommes dans la plupart de leurs actes étant sujets par leur nature aux passions, il s’ensuit que les hommes sont naturellement ennemis. » (Spinoza)

« La pire des passions est celle de l’ascète qui prétend les maîtriser. » (suivant Spinoza)

« Il y a des passions qui augmentent ma puissance d’agir, rencontre avec des corps (situations, corpus d’idées ?…) qui me conviennent, pour arriver à former une notion commune, unificatrice, ce sont les passions joyeuses ; il y a des passions qui diminuent ma puissance d’agir, me freinent, me restreignent, rencontre avec des corps qui me disconviennent, ce sont les passions tristes. (Extrait non littéral, et non garanti, de Spinoza) « Passions tristes, passions dont l’effet majeur réside dans l’affaiblissement de l’existence. » (Robert Redeker )– Délicat, dangereux même de donner une liste, dépend du sujet, du contexte, du moment… Les passions-freins sont généralement des passions dites tristes, mais un effort de restriction, d’ascétisme, dicté par un effort de qualité peut conduire à la joie, ainsi, par exemple, de la morale. A l’inverse, la volonté de puissance (souvent issue de revanche personnelle, toujours impliquant la nécessité de vivre en représentation) fait partie des passions tristes.

« Il y a des passions qui, comme les alizés, prennent les gens à une certaine hauteur. » (Stendhal)

« L’envie, la jalousie et la haine impuissante, ces passions tristes. » (Stendhal – sur la Révolution française, que pourtant l’auteur appréciait globalement) – La révolution est passée, ses traces sont restées.

« La passion de la gloire est la dernière dont les sages mêmes se dépouillent. » (Tacite)

« A la révolution française l’envie s’est libéré et avec la haine, la jalousie, l’aigreur, la malveillance … toutes ces passions tristes décrites par Spinoza que notre société porte à son comble. » (d’après Hippolyte Taine – cité par ?)  – A propos du concours de bassesse auquel a donné lieu l’immonde déchaînement de médiocrité suite aux ‘riches’ donnant pour la reconstruction de Notre Dame.

« Les idées et les passions ont beau se heurter en écumant, elles sont toujours moins irréconciliables que les intérêts. » (Gabriel Tarde) – Pas  si sûr.

« Il ne faut pas lutter contre les passions en tant que moteur, il ne faut que leur ôter le gouvernail. » (Gustave Thibon)

« Si la passion conseille parfois plus hardiment que la réflexion c’est qu’elle donne plus de forces pour exécuter. » (Vauvenargues)

« Les passions ont appris aux hommes la raison. » (Vauvenargues) – Par le coût de leurs excès ?

« Il est erroné d’imaginer que la passion est totalitaire. Le totalitarisme est sans passion … La passion à l’inverse est communicative. Elle diffuse son envie de vivre. Elle libère plus qu’elle n’emprisonne. » (Bertrand Vergely) – Qui ne doit envisager ici que les passions saines, vitales…

« Qui veut détruire les passions au lieu de les régler veut faire l’ange. » (Voltaire) – Des cathares aux communistes… tous les idéologues extrémistes ; et « qui veut faire l’ange fait la bête. » (Blaise Pascal)

« La seule différence entre un simple caprice et une passion éternelle c’est que le caprice dure un peu plus longtemps. » (Oscar Wilde)

« La meilleure façon de se débarrasser d’une tentation, c’est d’y succomber. » (Oscar Wilde)

« Le feu le plus couvert est le plus ardent. »(proverbe)

« Il faut beaucoup de sang-froid pour soutenir une grande passion. » (?)

« Il se félicite que la nature ait donné à l’homme des passions, un goût pour la domination et la possession. Sans cela, les hommes resteraient apathiques et aucun progrès ne serait possible. » (? – sur Bernard Mandeville) – Innombrables sont les remarques concernant la nécessité des passions pour le progrès de l’humanité, Hegel lui-même avec sa Ruse de la raison.

Ci-dessous, extraits du livre de Dany-Robert Dufour, La cité perverse.

« Les Anciens avaient distingué trois libidos ou ‘concupiscences’ : non seulement celle qui découle de la passion des sens et de la chair (la libido sentiendi), mais aussi celle qui procède de la passion de posséder toujours plus et de dominer (la libido dominandi), et celle enfin qui touche à la passion de voir et de savoir (la libido sciendi) … Nous sommes entrés dans un monde sans vergogne, dans un monde obscène (la pornographie s’affiche dans la sphère publique comme une activité ordinaire … La pratique sans honte des gains indécents … cynisme décomplexé, affichage de l’égoïsme comme valeur suprême) … Le monde fonctionne sur le principe exclusif de l’avidité … L’amor sui a triomphé de l’amor Dei, la cité terrestre de la cité de Dieu (les deux cités de saint Augustin) … Mandeville a dit la vérité du libéralisme. Le libéralisme, c’est d’abord la libération des  passions/pulsions, sans laquelle il n’y aurait pas eu de développement du capitalisme possible, la main invisible régulatrice d’Adam Smith qui transforme en ‘qualité’ ce que Mandeville appelle ‘vice’ et introduit la logique d’un ‘darwinisme social’ (sélection naturelle des individus les plus aptes à suivre la pente) … C’est cette libération des passions au cours des XVII° et XVIII° siècles qui a permis l’entrée dans le capitalisme … Les sociétés qui ont placé l’amor sui au poste de commande ne peuvent que devenir pornographiques (baptisé du terme soft d’érotisme, plus rassurant) … Le capitalisme n’a su surmonter la grande crise de 1929 qu’en démocratisant la jouissance … Révolution culturelle qui a réussi non seulement à relancer le capitalisme, mais aussi à redéfinir l’être-soi et l’être ensemble … Les industries culturelles (cinéma, télévision, publicité) en charge de la mobilisation des pulsions de façon à pouvoir les exploiter grâce à des objets supposés les satisfaire … La production capitaliste a réussi à rendre hautement rentable une activité aussi vaine que la masturbation (nombre de visites des sites pornos) … ‘De l’automobile à la télévision, tous les biens … servent au renforcement des conditions d’isolement des foules solitaires’ (Guy Debord) … Le fonctionnement pulsionnel sera alors privilégié sur le fonctionnement symbolique … La satisfaction pulsionnelle présentée comme un accomplissement de l’individu … ‘Il y a eu la civilisation athénienne, il y a eu la Renaissance, et maintenant, on entre dans la civilisation du cul’ (Jean-Luc Godard – ‘Pierrot le fou’) … C’est précisément autour de la célébration du cul que se déroulent les plus grandes manifestations célébrées dans les grandes villes du monde moderne : 700.000 personnes à la Gay Pride de Paris … Affronter l’aporie de l’auto-fondation est le prix à payer pour s’être libéré des grands récits qui soutenaient une figure possible de l’Autre, comme ils soutenaient également la fonction paternelle. »

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