435,5 – Débat

– L’insulte par la clique politico-médiatique remplace avantageusement cet exercice. Ne reste plus que l’ironie. Le bon présentateur est celui qui sait ricaner à tout propos, couper la parole à ceux qui ne pensent pas bien (rarement invités) et laisser s’épancher longuement les laquais de service chargés non même pas d’expliquer, mais d’édicter,  ce que le bon peuple doit savoir et faire.

– Remplace économiquement la prise de décision. Outil indispensable à l’exercice de la démocratie participative et au divertissement des masses voyeuses. Version moderne des jeux du cirque antique, l’héroïsme en moins (sauf pour certains uniquement invités pour être raillés, insultés et lynchés).

– Dans le meilleur des cas, confrontation cacophonique non de points de vue mais d’ego.

– Spectacles préfabriqués. Montés par la police de la pensée pour imposer ce qu’elle a décidé, accessoirement pour ridiculiser, enterrer sous les insultes les plus basses, les audacieux qui se risqueraient à avancer toute autre opinion.

– Pour les média, comme pour la plupart des participants, il ne s’agit pas d’éclairer une question, surtout dans le domaine moral ou celui des mœurs, mais de pulvériser l’adversaire et d’imposer, même pas le point de vue (ce serait trop dire), mais la solution officielle, donc la plus étroite et, le plus souvent, la plus nocive.

– Les gagnants sont ceux qui ont visé au-dessous de la ceinture, ceux qui ont réussi à interrompre le plus les autres et à les empêcher de parler, ou à les ridiculiser (avec l’aide précieuse du présentateur qui n’ignore pas pourquoi il a été nommé). De toute manière, ils sont désignés d’avance comme dans les anciens matchs de catch suivant leur appartenance à l’idéologie totalitaire dominante et leur soumission.

– A l’intention des jeunes désireux de débuter dans les média, rappelons trois règles à respecter pour être conforme au politiquement correct, et donc faire une brillante carrière – Pas de discussion sur le fond susceptible d’éclairer l’auditoire, seulement des bons sentiments, mais alors, au tuyau d’arrosage – Ne jamais inviter des personnes mises à l’index pour le restant de leurs jours (Renaud Camus et mille autres), sans difficulté, la liste est dans la tête de tous les journalistes – Ne pas aborder de sujet tendancieux : immigration, intégration, assistanat, identité, libéralisme outrancier, insécurité, indemnités des élus et dignitaires, corruption politique sauf si elle concerne un vilain-méchant, choix de politique étrangère, classement officiel des gentils et des vilains, décadence et déclin du pays… se limiter aux sujets bateaux et sans intérêt (qui aura le ballon d’or en 201x ? les Césars, et la vision des veaux béats, les prévisions astrologiques…), ou alors être absolument certain que le présentateur saura aider à ridiculiser l’opinion et la personne de celui qui n’est pas l’invité laquais chargé de diffuser la bonne pensée (avec l’aide de l’un des trois ou quatre pseudo-intellectuels stipendiés de service depuis vingt ans), ou au moins saura empêcher l’émission de toute idée non-conforme au mensonge officiel en coupant rapidement la parole au perturbateur, et en le ridiculisant tout en le couvrant d’insultes.

– Procédé infaillible pour saboter élégamment un énoncé qui vous insupporte, risque de s’écarter dangereusement de la vision officiellement admise, et y mettre fin  : désarçonner le mécréant par une interruption la plus futile possible, par exemple : Attention, xxxx se prononce yyyy dans telle province … ou bien : On ne dit pas ceci mais cela (par exemple : extroverti, mais extrav) … ou bien : Untel dit le contraire … Cela vous évitera d’avoir peut-être à le traiter de fasciste ou de l’accuser de faire le jeu de quelqu’un de peu recommandable, et peut même vous permettre de manifester votre savoir linguistique, et de toute façon, au pire on n’y verra que légèreté et insouciance et non pas muflerie, mépris affiché et sabotage délibéré.

– Dernière nouveauté : un Grand Débat avec des questions à ras de terre ; sans compter les sujets interdits.

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« La liberté d’opinion est une farce si l’information sur les faits n’est pas garantie et si ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui font l’objet du débat. » (Hannah Arendt.)

« Les imbéciles se croient victorieux après chaque débat. » (Kostas Axelos)

« Décider que certaines questions ne doivent pas être débattues, c’est exercer sur les citoyens un droit de censure arbitraire qui définit la tyrannie. » (Jean Baechler) – Comme si on pouvait laisser les gens parler de tout !

« Les figures imposées : – La domination : paternalisme, élitisme, ‘racisme de classe’, ‘racisme de l’intelligence’, condescendance – La dépolitisation : le ‘fait-divers’ qui fait diversion et réduit toute question sociale, la personnalisation à outrance, la présentation politicienne de toutes les questions politiques et la présentation technicienne de toutes les questions économiques – La promotion : les renvois d’ascenseur, complaisances et connivences, constitution d’une élite à laquelle le peuple devrait rendre des comptes de son ‘irrationalité’ et de son ‘populisme’ – La dépossession : L’art de priver de parole ceux-là même à qui on la donne, micro-trottoirs, débats, sondages… » (Normand Baillargeon – Petit cours d’autodéfense intellectuelle) – Ce qui ne dispense pas si le besoin s’en manifeste de recourir aux indispensables attaques sauvages ad hominem, accompagnées des indispensables réductions ad Hitlerum ou ad facismum.

« « Le débat a laissé place au combat … Le débat intellectuel contemporain est structuré par deux principes antagonistes : le relativisme et l’intolérance aux opinions d’autrui … Conséquence du paradigme de la victimisation, il faut être le plus faible pour avoir raison. Un trait majeur du débat d’idées contemporain est donc que chaque faction veut se dire minoritaire et opprimée par les autres … La bataille idéologique est gagnée par celui qui se plaint le plus fort …  Hyperspécialisation et hystérisation et surmédiatisation et archipellisation. caractéristiques du débat d’idées actuel … ‘Voici le temps de la philosophie réconfort, celle du self-service intellectuel parfaitement en phase avec le coaching généralisé’ (Gilles Lipovetsky) … ‘L’intellectuel français est de venu un exorciste, il aurait troqué la recherche de la vérité pour le ring, le temps long pour l’instantanéisme, la controverse pour l’altercation, la soumission à une grande idée pour le narcissisme moral … Indignation et déclamation systématiquement surjouées … Moins une guerre des idées qu’une guerre des sentiments. Il ne s’agit pas de faire taire une opinion que l’on considère comme divergente mais de réduire au silence une personnalité, de l’effacer (cancel culture) … Radicalité toute nouvelle, plus subjective que politique, nouvelle intolérance, incapacité de tolérer dans l’espace public le discours de quelqu’un qui ne pense pas comme vous. » (Eugénie Bastié – quelques considérations éparses sur le débat d’idées)

« Le débat public, dans toutes les démocraties, comporte sa part de tabou. Mais, en France, c’est le fait d’aborder les difficultés du pays qui est tabou. » (Nicolas Baverez) – Peut-être parce qu’elles sont énormes.

« Seule la pratique du débat démocratique, de l’argumentation et de la contre-argumentation prémunit ceux qui y participent ou qui les suivent des influences inconscientes … Notre démocratie a peu à peu annihilé le débat public, le débat citoyen, au profit d’une nourriture  pour individus faite d’idées mixées, de personnalisation (et même de pipolisation), ne laissant de place qu’aux idées ou égoïstes ou tièdes, mais toujours manipulées ; les tenants d’un vrai débat y font figure de pédants ou d’emmerdeurs … Dans ces conditions, une démocratie d’opinion ne peut être qu’une démocratie de médias, de publicitaires, une démocratie d’idées préformées et manipulées par les propagandes glauques et le marketing politique. » (Jean-Léon Beauvois – Les influences sournoises)

« L’un des principes sacrés du débat contradictoire était de supprimer au maximum les facteurs susceptibles de faire pencher la balance dans un sens ou dans un autre, pour ne pas risquer de mettre en cause la sacro-sainte liberté d’opinion du citoyen  … On assistera bien souvent à une opposition stérile d’opinions n’exprimant aucun point de vue concret, sans aucune chance de s’influencer réciproquement. » (Miguel Benasayag, Angélique del Rey) – Vacuité. S’agissant des rares débats honnêtes, et non des débats truqués pour écraser un opposant, le museler, le ridiculiser, et son point de vue et sa personne.

« Le ‘C’est vous qui le dites’ n’oppose pas des raisons à d’autres raisons, il soustrait la question au débat … Ne rien dire qui porte atteinte à l’égale liberté de  choix … J’ai ma propre opinion, je ne dois rien à personne, je suis votre égal … L’opinant ne bois qu’à sa propre fontaine … Mon jugement vaut celui de tout autre, je détermine moi-même ce qui donne du  sens. .. L’opinion est un avoir qui dit que je suis autonome au même titre qu’autrui. » (Philippe Bénéton)

« Je ne me souviens plus à quel moment je me suis réveillé d’un rêve si doux, ni quand exactement je suis devenu adulte. Peut être après ma première réunion de copropriété (exemple typique de confusion, d’inefficacité, de mesquinerie, souvent de règlements de comptes…), ou de parents d’élèves ou encore après avoir assisté à la rencontre d’un candidat à une élection locale avec les habitants de la commune. Mais je me souviens avoir éprouvé la même consternation que celle qui m’a abattu quand j’ai regardé l’une des diffusions du grand débat à la télévision. J’ai retrouvé à grande échelle les mêmes petites préoccupations et les mêmes minables doléances. J’ai compris une fois encore combien le besoin d’égalité peut être une passion triste et l’envie de solidarité de l’envie tout court. » (Cyril Bennasar – évoquant le rêve anarchiste de démocratie directe, baptisée parfois de l’expression démocratie participative, et autres fadaises pour gogos)

« Le débat ne sert pas à débattre. Sa fonction, plus subtile, est plutôt de faire croire que tout peut être débattu. » (Harold Bernat) – Poudre aux yeux pour gogos.

« La flagornerie dépensée pour les élus du système médiatique avait pour rançon l’ironie bête et méchante à l’encontre des misérables qui n’étaient invités que pour se faire rosser. » (Philippe Bilger – sur un débat, mais on peut généraliser ; et ne pas regarder les mises à mort)

« Aujourd’hui,  l’idée n’est plus ce qui doit être discuté, ce qui se doit d’être contredit, mais une coulée tiède obligatoire où la moindre et plus sereine dissidence est contrainte de se  justifier … En même temps est baptisé ‘clash’ toute contradiction un peu vigoureuse, ce qui stérilise. » (Philippe Bilger) – Unanimisme, conformisme, lâcheté…

« La culture du débat se trouve chaque fois menacée d’effondrement par ces appels directs à la carte forcée de l’émotion, qui donne aux média un pouvoir de chantage. Contagieuse, l’émotion communique mais elle informe peu ; c’est le circuit le plus court pour ratisser large. » (Daniel Bougnoux) – Ce procédé de pleurnicherie généralisée, pratiqué par les hypocrites présentateurs, permet de ne pas traiter les questions ainsi que de disqualifier ceux qui privilégient la réflexion aux sanglots bidons. Télévision de midinettes (voir d’ailleurs l’assistance dans les gradins).

On débat de tout, du sexe des anges mais « il n’y a eu ni débat sur le passage d’une immigration de travail temporaire à une immigration de peuplement définitif, ni sur le fait de savoir pourquoi l’accueil des immigrés devait se dérouler désormais dans une société ‘multiculturelle’ et non plus dans la France du modèle national d’assimilation, ni sur la concentration dans les quartiers populaires… » (Laurent Bouvet) – S’il fallait parler de tout au peuple, pourquoi pas aussi le consulter !

« La généralisation des formules ‘table ronde’ … animée par un journaliste professionnel … qu’il organise à partir du même lieu commun : ‘Adressez-vous à moi qui n’y comprends rien’. Le résultat est souvent pitoyable, les arguments … hachés menus … aucun élément de connaissance et de réflexion ne peut parvenir au public. L’important est un look médiatique plaisant … La tentation de transformer la connaissance, au moins sa vulgarisation en activité de loisir… » (Philippe Breton) – On voit le résultat : inculture et stupidité.

« L’apparition d’une nouvelle faune intellectuelle, avide et besogneuse, toujours prête à susciter ces ‘débats de société’ qui constituent une des fictions majeures de ce temps où la pseudo-critique s’exerce à loisir pour abuser le menu fretin … quel que soit l’enjeu, leur seule raison d’être étant d’empêcher qu’on aille au fond du problème abordé … Le ‘pour et le contre’ sont devenus un couple aussi célèbre que Laurel et Hardy … Et peut-être même le couple le plus légitime d’une époque qui génère à la demande ‘positivités virtuelles’ et ‘négativités virtuelles’. » (Annie Le Brun)

« Pour une fois on laisserait parler (savants, artistes, connaisseurs, historiens, écrivains, musiciens, philosophes et penseurs…) au lieu de s’ingénier à les interrompre toujours ou en faire en sorte que leurs voix se couvrent réciproquement comme s’il s’agissait d’éviter à tout prix que se produise de la pensée et que son expression dépasse en durée le seuil très bas de l’attention formatée par l’inculture. » (Renaud Camus) – On commencerait par inviter des gens qui connaissent leur sujet, même s’ils ne sont pas des copains du présentateur (échange de services)

« La question qui se pose n’est pas : ‘Ceci est-il vrai ou ne l’est-il pas ?’, mais bien : ‘Peut-on le dire ou ne le peut-on pas ?’ Et le plus souvent on ne le peut pas. La masse de ce qui ne peut pas être dit s‘accroît de jour en jour. Le débat public en devient totalement irréel. » (Renaud Camus)

« On ne débat plus sur des contenus mais sur des postures. » (Bélinda Cannone – La bêtise s’améliore) – La stupidité de notre société médiatique atteint des sommets. Elle ne peut pas ne pas déteindre sur ceux qui regardent l’écran.

« Derrière le paravent de la démocratie ils (les bien-pensants, les nouveaux moralistes) ont réussi ce tour de force d’inventer le ‘débat unique’ où l’on retrouve toujours les mêmes têtes, qui virevoltent d’un média à l’autre pour déverser les mêmes pensées dans le même langage, avec les mêmes codes. ‘L’opinion pense que’, disent-ils la bouche en cœur… l’opinion ? Ou bien l’opinion qu’ils se font, eux, de l’opinion ? » (Jean-Marc Chardon)

« La culture du débat qui vire souvent à la culture du clash. » (Mathieu Bock-Côté) – Deux avantages : gonfler l’audimat (la horde des auditeurs aimant le sang) et permettre d’exécuter tout personnage refusant la soumission obligatoire.

« Un débat se caractérise en bonne partie par les sujets qu’il n’abordera pas. Certaines questions sont considérées tranchées une fois pour toutes. » (Mathieu Bock-Côté)

« Un des problèmes du débat contemporain dans la presse et les médias comme sur les réseaux sociaux, des affrontements verbaux dont, nous Français, sommes si friands, c’est la confusion entre raison et sentiment … L’histoire ne doit pas porter de jugement moral, mais essayer d’établir des faits, de les contextualiser, voire de définir des responsabilités, ce qui n’est pas toujours facile. Mais dans tous les cas il ne peut jamais être question de rendre l’historien moralement complice des faits qu’il énonce. Pourtant, en réaction aux hypothèses historiques de X on constate souvent des propos indignés, des réactions émotionnelles, des condamnations violentes (parfois surjouées) et des jugements moraux sur sa personne. Comme si son point de vue historique le rendait ipso-facto complice. Mais Refuser le débat rationnel sur une opinion, et préférer le combat émotionnel contre la personne qui la porte, c’est évidemment une façon d’éviter toute discussion sur tout ce que propose la personne en question. Aujourd’hui, bien trop souvent, le débat d’idées bascule dans la querelle de personnes, et le sentiment remplace la raison …  ‘Si je pense qu’il faut stopper l’immigration, je n’ai pas de cœur’ … Ne pas accepter la mise en cause argumentée, mais ouvrir tout de suite le parapluie de la posture victimaire, c’est une tactique qui a fait ses preuves et qui aujourd’hui fait florès plus que jamais … La méthode n’est pas nouvelle. Les communistes ont été maîtres en la matière, réussissant à garder pendant toute la seconde partie du XXe siècle une emprise totale sur la grande majorité des intellectuels et des artistes, en jouant systématiquement sur ce type de réaction. A tout argument, à tout écrit, à toute œuvre un peu critique sur l’URSS, sur le Parti Communiste, sur la CGT, sur la révolution soviétique, sur le marxisme, on opposait le couperet moral : ‘tu fais le jeu des réactionnaires… tu es donc contre les ouvriers… tu es pour les exploiteurs… tu es contre la paix… tu es pour les fascistes’ … On ne discute pas, on n’argumente pas, on dit ‘si tu penses ça tu es un salaud‘. Malheureusement cette culpabilisation de l’adversaire fonctionne toujours à plein, au nom d’un humanisme de pacotille. Les gauchistes, les féministes, les anti-racistes, les décolonialistes, les woke de toutes espèces ont parfaitement assimilé la méthode. Cela s’appelle le terrorisme intellectuel. » (Pierre Cretin – considérations éparses sur nos prétendus débats)

« L’interminable série des affrontements dérisoires. » Guy Debord – La société du spectacle)

« Il n’existe plus d’agora, de communauté générale, ni même de communautés restreintes à des corps intermédiaires ou à des institutions autonomes, à des salons ou des cafés, aux travailleurs d’une seule entreprise ; nulle place où le débat sur les vérités qui concernent ceux qui sont là puisse s’affranchir durablement de l’écrasante présence du discours médiatique, et des différentes forces organisées pour le relayer. » (Guy Debord) – Discours entre les mains d’une poignée d’individus.

« Une des multiples utilités du spectacle lui-même est de diriger le grand public vers des débats bien famés et même préfabriqués. » (Guy Debord) – Où tout est bidon, où tout est faux, le thème, sa présentation, les journalistes, les participants autorisés à parler par les précédents.

« Il y  a encore trente ans, les débats télé, les forums, n’étaient pas majoritairement animés par des ignorants, ni engagés par des idiots … On risquait fort de rencontrer des adversaires alertes, des redoutables dialecticiens. Ils n’ont pas disparu mais ils ne sont plus très nombreux sur les écrans. » (Luc Dellisse) – Pour deux raisons : lassitude de se faire insulter par la meute habituelle des chiens et non invitation par la niche médiatique.

« Alternative, diversité, débat, réception des opinions contraires … c’est bien là ce qu’on refuse aux classes populaires (et donc au populisme qui les exprime) … le débat n’est accepté, bien étroitement, qu’entre les divers partisans de l’émancipation … Le terme ‘populisme’ vise à empêcher le débat en le frappant par avance d’illégitimité. » (Chantal Delsol) – L’entre-soi des élites officielles.

« La plupart du temps, on expédie le sujet pour en arriver à ce qui intéresse la presse people … ça dérive sur Poutine, sur la France, sur l’alcool, sur n’importe quoi.  Ils sont à l’affût. Ils attendent le dérapage, ils le provoquent s’il ne vient pas. » (Gérard Depardieu) – Plutôt sur des interviews que sur de prétendus débats.

« Le débat français ne sert jamais à décider si une idée est valide ou non, mais simplement à polariser ce qui se présente comme des points de vue opposés, en réalité fortement politisés ou militants » (Sebastian Dieguez) – Si ce n’était que cette vacuité. Il s’agit d’imposer, quasiment de force et avec violence, l’option dominante et d’écraser d’éventuels opposants. Pure propagande.

« La vie des animaux, des arbres, des enfants est bien trop précieuse pour être laissée aux hasards d’un débat démocratique. » (Paul Feyerabend)

« La première condition d’un débat intellectuel digne de ce nom, c’est qu’aucune question ne soit écartée d’emblée. Or, l’obsession de la gauche, c’est précisément d’empêcher que l’on parle de certains sujets … le débat, c’est la confrontation des points de vue, l’échange parfois musclé des arguments. Ce qui en tient lieu désormais, c’est l’invective, l’anathème, la chasse à l’homme … Le débat est célébré, la contradiction est proscrite. » (Alain Finkielkraut)

« Il n’y a que les imbéciles qui veulent conclure. » (Flaubert)

« Un certain nombre de décisions importantes – la forme de l’intégration européenne, la mutation du système scolaire, l’ampleur et la forme de l’immigration – ont échappé à la discussion démocratique. » (Marcel Gauchet) – Evidemment la cuisine des élites ne regarde pas le peuple. Démocratie : rigolade générale.

« Plutôt que de débattre sur l’organisation de la cité, la démocratie, le bien-être de la population, les finalités de  l’existence humaine ou le bien commun, on débat sur le taux de croissance, celui des prélèvements obligatoires, le montant des déficits publics, le solde de la balance commerciale, etc. … La maîtrise, la réduction, l’abaissement, la baisse, la hausse – des dépenses, des déficits, des charges, de la masse, du nombre … Autant d’objectifs qui sont l’expression de la ‘chiffocratie’. Faute de pouvoir mesurer le qualitatif, le débat se déplace sur le quantitatif … la dictature du chiffre envahit le champ politique. » » (Vincent de Gauléjac – La société malade de la gestion – sur la crise du politique)

« Questionnements et débats sans limites et totalement désarticulés de l’engagement et de l’action … Pas un domaine … qui ne soit  exhibé, interrogé et soumis à controverse, sans que cela ait un quelconque effet sur le cours des choses. Débats et commentaires sans fin affichés comme les signes ostentatoires de la démocratie. » (Jean-Pierre Le Goff) – Sans limites, à condition qu’ils n’évoquent aucun tabou et restent bien conformes à l’intoxication permanente.

« Se situer toujours du bon côté dans les débats en jouant sur deux tableaux à la fois : celui de la modernité et celui de la morale … Tout opposant peut ainsi être qualifié à la fois de dogmatique, passéiste, nostalgique ou ‘ringard’, d’intolérant, de réac.. Il est d’emblée moralement disqualifié en étant soupçonné d’aller contre les valeurs généreuses dont on se réclame … Revendiquer le mouvement, le changement, l’ouverture, la tolérance, tout en continuant de s’affirmer comme l’héritier légitime de la Révolution française et du mouvement ouvrier. » (Jean-Pierre Le Goff) – Ceux qui n’ont jamais vu un ouvrier de leur vie, sauf pour se faire servir (et les mépriser ouvertement).

« Il faut dire qu’en France, le multiculturalisme et ses effets ne sont pas débattus. La mondialisation et ses effets ne se discutent pas. Non plus. » (Christophe Guilluy) – En effet, pourquoi agiter le bon peuple avec des phénomènes si secondaires ; alors que l’avenir du PSG ou celui de Martine Aubry est autrement plus important. Il y a des masses de choses dont on ne discute pas, un seul exemple ponctuel : pourquoi le contingent français des djihadistes occidentaux est-il de loin le plus important en nombre ?

« Dans le grand marché dérégulé des idées, c’est désormais la foire d’empoigne et tous les coups sont permis. L’opinion la plus discutable peut s’ériger en vérité universelle et imposer sa pression sur toute une société, hors de toute argumentation rationnelle. Le contradicteur n’est plus un adversaire à combattre, mais un ennemi à abattre. Le dialogue est discrédité, car dialoguer, ce serait déjà cautionner la parole de l’autre. » (Clotilde Hamon)

« Les meneurs de jeu des débats télévisés scandés par les questions désordonnées du public comme des journalistes empêchent de réfléchir sérieusement. » (Guy Hermet) – Ce qui serait bien trop périlleux pour la thèse officielle et obligatoire.

« Les média n’interrogent que ceux dont ils savent qu’ils vont répondre d’une certaine façon. » (Lucien Israël)

« Le débat politique se restreignant la plupart du temps aux classes qui détiennent la parole (‘talking’ classes) … devient de plus en plus nombriliste et figé dans la langue de bois … Les idées circulent et recirculent sous forme de scies et de réflexes conditionnés … Dans certains secteurs, l’idée même de la réalité est mise en cause, peut-être parce que ces classes habitent un monde artificiel. » (Christopher Lasch) – De plus les sujets abordés se limiteront à ceux qui intéressent ces classes.

« Le débat désormais, c’est la foire d’empoigne … A qui va parler le plus fort. » (Dominique Lecourt)

« On a de toute façon déjà prévenu les citoyens qui voudraient y participer qu’il faudra rester raisonnable, concret et presque technique. Rien pour le moment sur l’identification des processus de délitement et la restauration de valeurs structurantes. Rien sur un effort de fond qui rendrait furieux – mais tant pis – les ‘people’ pétitionnistes et les groupes de pression dépositaires du ‘Bien’. Rien sur une volonté de s’attaquer aux couches encalaminées de nos renoncements. Et si jamais il venait à l’esprit des contributeurs d’aborder ces sujets, on les laissera aller dans tous les sens et vers tous les excès, ce qui donnera une bonne raison de ne pas tenir compte de leur avis. Encore une occasion manquée. (Thierry Lentz – sur le grand débat) – Mais applicable à tous les débats puisqu’il est des sujets, les seuls importants, qu’il est interdit d’aborder sous peine de se faire traiter de fasciste, l’arme suprême, et  de se faire virer de façon violente.

 « La conception qu’une certaine gauche a du débat intellectuel. C’est très simple : quand on n’est pas d’accord, on ne cause pas, on cogne. Question méthodes, on peut puiser dans un riche héritage. Dénonciation, calomnie, disqualification morale, citations manipulatoires, lynchage en boucle et en meute, appels publics à l’exclusion professionnelle … contre ceux qui s’écartent des opinions admises (comprenez par les détenteurs du pouvoir culturel) tout est permis. Tout sauf les lire et les discuter … Tout point de vue déviant est haché menu pour ressortir sous forme de quelques mots-clefs destinés à tuer … hostile au mariage gay est traduit par ‘homophobe’, ‘conservateur’ par ‘rance’ ou ‘moisi’, ‘nostalgique’ par ‘réac’, ‘facho’, voire ‘nazi’ les grands jours. » (Elisabeth Lévy)

« Dés lors que tout le monde est sommé de penser la même chose au même moment, ce qui revient à ne plus penser du tout, la confrontation de points de vue divergents devient tout simplement inimaginable. » (Elisabeth Lévy)

« L’un des numéros les plus aboutis consiste à rassembler trois ou quatre personnes pensant exactement la même chose pour se déchaîner sur un absent dont on travestit sans vergogne la pensée et les propos. » (Elisabeth Lévy)

« Ce qu’on nous sert en guise de débat politique. De l’émotion, de l’indignation, de l’offuscation, mais pour l’argumentation, macache bono … Plutôt que de fournir de bonnes réponses à de bonnes questions, on décrète qu’il n’y a pas de questions. » » (Elisabeth Lévy)

« Dans tour débat, le meilleur signe que vous avez gagné, c’est quand vous voyez votre adversaire qui commence à s’approprier vos idées, tout en croyant sincèrement qu’il vient lui-même de les inventer. » (Simon Leys)

« Le débat, ne mènera peut-être nulle part, il n’aura peut-être jeté aucune lumière sur le problème posé, du moins, tendra-t-il à révéler ceux qui prêchent pour leur propre paroisse, ceux qui ne visent que leur propre intérêt … L’intérêt d’un débat n’est pas de révéler la vérité sur la controverse mais d’identifier les esprits partisans.. » (Walter Lippman) – Encore faut-il que le débat soit honnêtement mené, et on en est loin !

« Vous contestez ? On va vous faire taire en vous demandant : ‘Quelle alternative proposez-vous ?’ Vous aurez cinq secondes pour répondre et, si vous n’y parvenez pas en une phrase, ce sera la preuve que votre posture d’opposant n’est pas tenable. Vous serez mis K-O … Vous vous contentez de douter, c’est déjà trop, vous serez étiqueté populiste’. » (Corinne Maier)

« C’est là où on décrypte l’actu et où on donne à qui veut (et ne veut pas) des leçons de morale plan-plan. Glorification des droits de l’homme, du modèle social français (que le monde entier nous envie), condamnation des exclusions, sentimentalisme de la moralité, déluge de lapalissades compassionnelles et humanitaires, valeurs exaltées la main sur le cœur ; du ‘soft’, du gnan-gnan. » (Corinne Maier) – Et crachats sur le peuple, les cathos, les gens intelligents, droits et non soumis.

« Pourquoi voit-on toujours les mêmes ‘experts’ sur les plateaux de télévision ? … Ils ont un grand mérite aux yeux des rédactions : ils répondent quand on les appelle … Ils sont faciles à trouver et acceptent de communiquer (comme il y toujours urgence puisqu’il s’agit de traiter l’information à chaud e t i possible le premier) … Evidemment ils ne peuvent être que parisiens, on ne va pas faire venir un ‘expert’ de province pour qu’il arrive au mieux le lendemain. » (Sophie Mazet)

« Il y a désormais une espèce de communauté de pensée, qui n’est articulée nulle part, qui ne se réfère à rien de saisissable, mais qui s’impose à chacun des participants à de tels débats. Si vous n’y adhérez pas, si vous n’êtes pas en phase, vous êtes rejeté. » (Charles Melman – suite à une expérience personnelle) – Mais il n’y a plus que les imbéciles pour regarder ces débats bidons (l’audimat ment outrageusement, comme c’est son intérêt et son rôle)

« On rétorquera que ça n’était pas une émission mais un tribunal où les chroniqueurs se sont grimés en procureurs de la Sainte-Inquisition médiatique. Soit. Mais n’est-ce pas là le lot commun de bien des émissions, à commencer par celles du service public où les représentants du camp national, quand ils y sont invités, sont régulièrement malmenés par des journalistes partiels et partiaux ? » (Jean Messiha)  – A propos d’un de ces soi-disant débat où une meute haineuse et servile et les journalistes de même acabit sont chargés d’exécuter un unique invité convoqué à seule fin d’être lynché et ridiculisé, lui et ses thèses honnêtes et de bon sens, afin de démontrer l’excellence de la pourriture ambiante.  

« On me dit que le temps d’un raisonnement jugé supportable par les présentateurs télévisuels est passé à dix secondes. » (Edgar Morin) – Il faut bien que lesdits présentateurs disposent de temps pour se mettre en valeur.

« …Ce n’est pas de très bon augure quand quelque chose ne fait pas débat … Nous voyons aujourd’hui se multiplier les phénomènes, les initiatives, les inventions vicieuses qui ne font pas débat … Et pourtant tout le monde se félicite lorsque des choses ne font plus débat … soit applaudissent bruyamment chaque nouvelle avancée de la mort comme une nouvelle prospérité de la vertu…» (Philippe Muray)

« La plupart des débats débouchent immanquablement sur la réclamation de lois, sur la demande unanime de nouvelles lois, pour n’importe quoi, dans tous les domaines, pour boucher progressivement tous les trous où s’infiltre la vie … ‘Il y a un vide juridique !’, ‘Il faut combler le vide juridique !’. Ce n’est qu’un cri sur les plateaux … La nature contemporaine humaine a horreur du vide juridique … Le rêve consiste à finir par interdire peu à peu et en douceur, tout ce qui n’est pas encore absolument mort … Toutes les délations deviennent héroïques … C’est l’ère du vide, mais juridique … Vive la Loi ! Les Lois ! Vive les punitions ! Encore un tour d’écrou ! Un de plus ! Encore un autre ! Encore ! » (Philippe Muray)

« Le négatif a été si bien ratatiné dans tous les domaines qu’on ne trouve plus de débats qu’entre gens du même avis. » (Philippe Muray) – Surtout si on n’invite que les laquais habituels.

« …Tout leur travail (des médiatiques) en créant des débats de circonstance, consiste à empêcher que l’on jette le moindre regard sur la monstruosité grandissante du cours du temps… » (Philippe Muray – sur les détails sociologiquement significatifs occultés dans les débats)

« Ces émissions-procès où on règle entre soi le compte d’un adversaire condamné d’avance. » (Philippe Muray)

« Le seul ‘genre’ littéraire qui tienne finalement  le coup, de nos jours, remplaçant avantageusement l’épopée, le drame, la comédie de mœurs, la poésie pastorale, la fable, le conte, la nouvelle, le roman et tout le bazar. Le Débat ! … Lavage de linge sale, crêpage de chignons, confrontation… Appelez ça échange d’idées si vous voulez, bataille de chiffres … ‘communication’. Donnez-lui le nom que vous préférez, sans importance ; ce qui est intéressant c’est la furie mise dans le concert … Sans oublier les débats après, autour du Débat,  les débats du Débat … X est-il sorti affaibli, grandi ? Avons-nous assisté à un contre-effet ? La sérénité était-elle dans le camp de X ou dans celui de Y ? » (Philippe Muray)

« Il n’y a pas de débat intellectuel là où il ne s’agit de démêler le vrai et le faux, mais de dénoncer le mal … Pluralisme en carton-pâte. » (André Perrin) – Le mal étant défini comme ce qui trouble le gang des dominants et risque de gêner son entreprise de destruction de tout.

« Dialogue de sourds et foire d’empoigne télévisées où le jeu consiste à couper la parole à l’autre et à couvrir sa voix, le plaçant ainsi dans l’alternative ou de se taire, ou d’imiter cette grossièreté … Les journalistes qui ne laissent pas achever les phrases, montrant par là qu’ils s’intéressent davantage aux questions qu’ils posent qu’aux réponses qu’ils pourraient obtenir ? » (André Perrin)

« La stratégie la plus courante et la plus communément utilisée  pour rendre impossible un vrai débat reste la disqualification de l’opposant par les motivations honteuses qu’on lui attribue, les complicités douteuses qu’on lui découvre et les conséquences désastreuses que son discours est supposé produire. Dans tous les cas on refuse d’admettre que cc discours puisse être déterminé par les raisons qu’il avance et on affirme qu’il ne peut être que l’expression de ‘phobies,’ les principales étant  l’homophobie et l’islamophobie, laquelle déguise le racisme et la xénophobie. » (André Perrin)

« Dans les débats de société vous pouvez dire n’importe quoi à condition de parler plus longtemps que l’adversaire, comme dans les querelles de ménage, c’est l’endurance qui fera la différence. » (Georges Picard)

« Le but véritable du débat médiatique : bétonner de part et d’autre les positions, compter les troupes et ragaillardir son monde en le rassurant sur le bénéfice d’une victoire à terme. » (Georges Picard)

« L’exagération et le lancement d’anathèmes se sont substitués au débat. Il faut disqualifier l’adversaire plutôt qu’accepter de l’affronter loyalement. Le mensonge prime sur l’affrontement d’idées faisant au passage une victime essentielle : le sens de l’action et la confiance dans la parole publique. » (Céline Pina)

« Les danses pour la pluie … étaient peut-être inefficaces, mais du moins elles ne détournaient pas les orages et les averses susceptibles d’advenir et … elles soudaient la population face à l’adversité. En revanche, les débats d’aujourd’hui, non seulement n’aident pas à dégager le consensus qu’ils sont censés produire, mais interdisent sa formation, exacerbent les antagonismes, font progresser l’incompréhension mutuelle … même quand les protagonistes sont honnêtes » (Olivier Rey)

« Ce sont des débats de technocrates et non des débats d’idées … Des débats calibrés … Jamais on n’y prend de hauteur et surtout, jamais on ne se réfère au passé dans la perspective du temps long, sans quoi le couperet journalistique tombe : ‘On ne va pas refaire l’histoire : on est en 2017, là’. » (Ingrid Riocreux)

« Une émission qui repose sur la mise en scène de débats dans le goût qui plaît, c’est-à-dire celui de l’affrontement surjoué et de l’offuscation hyperbolique. Le concept même du débat hystérisé, des réactions outrées, de l’excitation permanente et de la parole sans cesse confisquée, coupée, caricaturée qui me déplaît. «  (Ingrid Riocreux – sur les émissions dites de débat ou de soi-disant divertissement destinées aux voyeurs)

« ‘Jouer le rôle de ‘ … On est invité pour incarner un discours qui nous préexiste et nous classe. Les journalistes n’ayant que faire de la singularité de votre pensée, ils vous sauront gré d’incarner de la manière la plus caricaturale qui soit l’étiquette qu’ils vous ont collée, (et pour laquelle ils vous ont invité) … Ils redessinent votre image … et vous dépossèdent de votre parole. » (Ingrid Riocreux) – L’usage étant également d’inviter un unique méchant, un sulfureux, pour le faire déchiqueter par une meute de laquais convoqués à la curée.

« Chez la plupart des hommes, la vanité innée est accompagnée d’incontinence de langage et d’une malhonnêteté native. Ils parlent avant d’avoir réfléchi … Chacun s’efforcera de faire triompher sa thèse, même lorsqu’elle lui  apparaît pour le moment soit fausse, soit douteuse … Chacun recevra les ressources de son argumentation de son astuce  et de sa perversité personnelles … Il est impossible le plus souvent de dire de quel côté se trouve la vérité, souvent on ne sait pas soi-même si l’on a raison ou non. (Schopenhauer)

‘Ebats narcissiques qualifiés de débats d’idées. » (Michel Schneider)

« Le débat public n’oppose plus les sensés et les insensés, mais les sensibles et les insensibles. On ne pense plus, on éprouve, ce qui ne va pas sans dommages … car, tandis que ‘les convictions s’argumentent, les identités s’affirment’. » (Michel Schneider – citant Alain Finkielkraut)

« La pire des attaques infligées à l’adversaire n’est pas dans le paroxysme de la violence, il est dans la rupture du débat, parce que la rupture du débat est une manière de refuser à l’adversaire d’être un être de raison. » (B ; Sère – Le mot qui tue)   – Muflerie inaugurée par Jacques Chirac, grand spécialiste du mépris, envers J-M Le Pen.  

« Le néant des débats intellectuels d’aujourd’hui face à cette radicale nouveauté : l’autorité sans partage de l’expertise sur ce qu’il convient de penser de chaque sujet de société. » (Alain-Gérard Slama) – Jointe à la terreur que fait régner la nouvelle inquisition.

 « Le propre du discours de ‘l’expertise’, qui considère a priori la conscience individuelle comme défaillante, est qu’il ne connaît pas de limites. Il n’est aucun domaine où l’organisation…» (Alain-Gérard Slama)

« Les sociétés modernes sont organisées comme des bourses à thèmes. On y émet constamment de nouvelles valeurs thématiques qu’on négocie au jour le jour. Le débat public …  forum destiné à régler les affaires que l’on fait avec ces thèmes. Les grands mass-médias … sont engagés dans un combat permanent pour que leurs thèmes aient la cote la plus élevée possible. Et lorsqu’un thème à scandale s’impose dans la société, cela signifie seulement qu’une rédaction est parvenue à émettre une proposition d’émotion  telle  que les concurrents doivent l’imiter à n’importe quel prix, jusqu’au point où toute une société devient quasiment monothématique et se synchronise sur une seule et même émotion … Nous vivons constamment  dans des champs d’excitation collective, dans des épidémies d’opinion dont il est difficile de s’immuniser» (Peter Sloterdijk – Ni le soleil ni la mort)  – C’est ainsi qu’on assiste à la semaine consacrée et obsédée par l’inceste, suivie de la semaine de la catastrophe climatique, suivie de la semaine du remaniement gouvernemental, suivie de la semaine de l’extension de la pauvreté, etc. – « La possibilité d’être contacté en permanence n’est qu’une expression de la mise en réseau ou de la mondialisation Lorsque nous disons ‘globalisation’ ou ‘mondialisation’ … nous parlons de la mise en place du système de stress  synchrone à l’échelle mondiale …  Les thèmes chargés d’une forte énergie emportent presque tout … Passe pour asocial celui qui ne se tient pas disponible en permanence pour le stress synchrone. L’excitabilité est désormais le premier devoir civique. »  (même auteur)

« Dans un débat télévisé, souvent le plus intéressant n’est pas ce qui s’y dit mais la savante composition du plateau : le choix des invités. » (Alain Soral)  – Des habiles aux noms connus pour soutenir la thèse de l’opinion dominante, opposés à des anonymes peu rompus à ce genre d’exercice. Les premiers bénéficiant en plus de la partialité du présentateur et des plans prolongés et avantageux des cameramen.

« On fait dans les discussions comme dans les armées, où le plus faible allume de grands feux et fait un grand bruit pour tromper l’ennemi sur son nombre et sur sa force. » (Jonathan Swift)

« C’est empoigner par les oreilles un chien qui passe, que de se mêler d’un débat qui ne vous regarde pas. » (Ancien Testament – Livre des Proverbes)

« Une nation fatiguée de longs débats consent volontiers qu’on la dupe, pourvu qu’on la repose. » (Alexis de Tocqueville)

« Les trois moments pour s’imposer (et démolir n’importe quelle idée et n’importe qui), ce qui s’appelle ‘le pouvoir sur les idées’, pratiqué essentiellement en appuyant sur la touche sacrée ‘Tolérance’ – D’abord, le ‘Dérapage’, l’interlocuteur parle sur le fond, ‘pinaillons’ sur la forme, pointons des vices de forme, des termes approximatifs, des imprécisions de dates, de lieux, de chiffres. Donnons l’impression que la thèse présente de séreuses lacunes… – Ensuite, ‘l’Ouverture’, il n’y a pas qu’un point de vue. Le monde est divers, multiple, regardons ailleurs, Il existe d’autres thèses. Donnons l’impression que l’interlocuteur est un peu ‘bouché’, légèrement ignare… – En dernier ressort, recourons à ‘l’Humain’, de l’espace passons dans le temps, la vie est changeante, rien n’est fixe. Donnons l’impression que l’interlocuteur est buté sur son idée, qu’il est incapable de changer  d‘avis, de tenir compte de l’époque… » (Bertrand Vergely – simplifié, condensé, interprété et formellement approximatif)

« Personne ne raisonne, tout le monde récite. » (?) 

 « Elever très haut le débat est une façon élégante de le perdre de vue. » (?)

« Le débat c’est plus tranquille quand on est d’accord. » (?) – Aussi vaut-il mieux n’inviter que les laquais habituels qui ne donneront pas de mauvaises idées au pauvre peuple.

« La multiplicité des débats n’a d’égal que leur caractère ‘verrouillé’. Les arguments utilisés ne sortent quasiment jamais du conformisme idéologique régnant, les intervenants sont à peu près toujours les mêmes, les ‘voix’ qui pourraient s’avérer ‘discordantes’ ne sont jamais invitées. L’appareil de la pensée unique régente l’expression… » (?)

Parmi les 38 stratagèmes utilisables énumérés par Schopenhauer pour avoir raison et cités dans son petit ouvrage, L’art d’avoir toujours raison. 

« -Tirer de la proposition de l’adversaire de fausses conséquences – Etendre l’affirmation de l’adversaire au-delà de la limite naturelle et restreindre au contraire la sienne ; car plus une affirmation est généralisée, plus nombreuses sont les attaques auxquelles elle s’expose – Retourner son argument, ex. ‘ : il faut être indulgent avec les enfants’, ‘Justement non, il ne fait pas qu’un enfant prenne de mauvaises habitudes’ – Pousser l’argument qui met en fureur l’adversaire ; car il est avantageux de le mettre en colère et parce que l’argument laisse supposer qu’on a touché un point faible – S’abriter derrière des autorités, et même derrière l’opinion commune – Se déclarer incompétent avec quelque ironie, en insinuant qu’il s’agit de niaiseries ou de prétention (ce que déteste tout public), ‘Cela me dépasse…’ – Ranger l’affirmation de l’adversaire dans une catégorie généralement (ou obligatoirement) détestée, ‘Mais c’est du manichéisme, du mysticisme,’ du racisme, du fascisme ! – Faire sentir à l’adversaire que son opinion causerait un tort considérable à ses intérêts, ou aux intérêts de l’assemblée des auditeurs (d’une corporation…) ; car ce qui nous défavorise semble toujours absurde à l’intellect – Essayer de se faire concéder par l’adversaire, au moyen de questions appropriées, des prémisses déterminées d’où seront tirées des conclusions en désaccord avec sa thèse, de façon à le mettre en contradiction avec lui-même – Si on sent qu’on est sur le point de perdre, prendre un ton personnel, grossier, offensant ; s’en prendre à la personne de l’adversaire, mais il faut alors présumer du soutien du public obtenu par consentement tacite, et le plus souvent par tri préalable et par intimidation. » – On reconnaît quelques procédés pratiqués dans le milieu politico-médiatique et un peu plus subtils quand il s’offre le luxe de ne pas recourir au mensonge pur et simple et à l’injure systématique en privant l’adversaire de toute facilité de réplique.

Ci-dessous, extraits simplifiés d’un livre de Philippe Nemo, La régression intellectuelle de la France. Pour abréger, nous n’avons pas repris les nombreux exemples.

 « Au pays de Voltaire et de Beaumarchais règne désormais une ‘pensée unique’ de nature néo-religieuse, qui bénéficie du monopole qu’une certaine famille idéologique est parvenue à établir sur l’école et les médias, et aussi d’un dispositif de censure (loi Gayssot, loi sur la ‘Halde’, lois dite mémorielles…) qui peut être comparé dans son principe à l’Inquisition. On ne raisonne plus dans le pays en termes de vrai et de faux, mais comme dans les sociétés primitives, de pur et d’impur. En conséquence, la France connaît ces années-ci une situation de régression intellectuelle caractérisée, qui empêche le pays de penser rationnellement son avenir. Les processus mythologisants subsistent et semblent même faire retour, dénis de réalité massifs, véritables délires collectifs, phénomènes de ritualisation ressoudant le groupe aux dépens de boucs émissaires, exclusion de certaines vérités déplaisantes. »

« L’école unique, fatale erreur de de Gaulle … Les nouveaux maîtres de l’Education nationale, se rendant compte qu’ils ne pouvaient unifier l’école en l’alignant par le haut, mais ne voulant pas, par idéologie, renoncer au projet même de l’unifier, ont sciemment décidé de l’aligner par le bas …. Au fil des ans la plupart des rédactions des média sont devenues de gauche, et ceci fait, elles n’ont plus recruté que des journalistes de même couleur (résultat d’un cadeau de de Gaulle aux communistes à la Libération) … Le reste subsistant de pluralisme ayant disparu en 1981 quand les socialo-communistes se sont emparés du pouvoir d’Etat … Investissement de l’espace réellement public, l’école et les grands médias. »

« Certains sujets, et non pas seulement certaines thèses, ont été systématiquement exclus du débat public officiel … Vouloir discuter de ces questions est a priori suspect, puisqu’il révèle qu’on ne les considère pas comme résolues … Les lois de censure, dispositif judiciaire présentant des analogies avec le tribunal ecclésiastique et empêchant la libre parole dans tout l’espace public, voire, si possible, dans tout l’espace social … Situation comparable au fameux ‘Ordre moral’ des années 1870 et qu’avait tenté de restaurer ‘Vichy’. »

« N’importe quel groupe d’individus (éventuels sous-marins de partis, de sectes…) peut désormais s’attribuer la capacité juridique d’attaquer autrui pour ses opinions (vu les peines financières exorbitantes laissées libres à l’appréciation des tribunaux, certaines associations … ont un intérêt financier direct à agir et à opérer en officines de délation) … Trois infractions : diffamation, injure et provocation à la discrimination, non publiques … ainsi la vie quotidienne est-elle placée sous surveillance … Pénalisation non d’actes, mais de propos … sanction de conduite privée extrêmement nouvelle … Le but étant d’empêcher le citoyen de parler librement en privé … Il suffit d’ailleurs que le propos, sans être insultant ni même hostile, se contente d’opérer intellectuellement une distinction entre certaines catégories de personnes. »

« On demande donc aux juges cela même qu’on demandait aux théologiens de l’Inquisition, à savoir de vérifier la conformité des pensées de chacun à une certaine orthodoxie. On ne leur demande pas de punir un délit, un crime, mais une dissidence, une hérésie, un péché … sans, en plus, fournir aucun critère intellectuel rigoureux (insécurité juridique et libre cours laissé à l’opinion du juge ainsi transformé en censeur.) »

« Tout débat public libre sur un grand nombre de questions sociétales est ainsi condamné … Il n’y a pas de propos sociologique ou politique qui ne consiste en distinctions, jugements, classements… On n’oppose pas des faits, des arguments, mais une fin de non-recevoir … On veut que certaines personnes disparaissent purement et simplement de l’espace public et que la société soit purifiée de leur présence. Ces prohibitions absolues rappellent certains traits des mentalités magico-religieuses (même le vocabulaire employé : relents, nauséabond, sulfureux…) … d’autant plus que la morale n’a rien à voir dans la plupart des questions interdites … On est dans les phénomènes de ‘tabou’ lesquels ne consistent pas à juger et hiérarchiser les idées selon le critère du vrai et du faux, mais selon celui du pur et de l’impur …»

La régression d’une proportion non négligeable de la classe parlante française au stade mental des sociétés préciviques se marque par deux autres traits ; le rôle croissant de l’imitation moutonnière et le sacrifice rituel de boucs émissaires. »

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