075,2 – Bonté / Méchanceté

– Si nous voulons nous convaincre que l’homme n’est pas foncièrement bon, ou bien de la réalité que recouvre la notion de péché originel, observons un instant une cour d’école, ou même le parc d’une crèche. 

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« La politique saisie par la morale … Dérive de l’humanitaire, inflation du discours moral, et hypertrophie du droit … La ‘terreur de la vertu’, ‘le ressort du gouvernement est à la fois la vertu et la terreur, ‘notre gouvernement ressemble au despotisme comme le glaive qui brille dans les mains des héros de la liberté ressemble à celui dont les satellites de la tyrannie sont armés’ (Robespierre) …Une politique de la vertu se dispense d’affronter la contingence : elle se donne la triple illusion d’une maîtrise du temps, d’une maîtrise du cœur, d’une maîtrise de l’agir … Kant repère les conséquences extrêmes de la confusion entre la tâche politique et l’exigence éthique … Savonarole qui voulait faire descendre sur terre la cité parfaite … Ce que dit Machiavel, c’est que la volonté du bien est tout aussi anti-ou apolitique que la volonté du mal et parfaitement inopérante s’il s’agit de résister au mal  … ‘Dans l’action historique la bonté est quelquefois catastrophique  … Qu’est-ce qu’une bonté qui serait incapable de dureté ? Qu’est-ce qu’une bonté qui se veut bonté ? Une manière douce d’ignorer autrui et finalement de le mépriser … Le dur politique aime les hommes et la liberté plus que l’humaniste déclaré’ (Merleau-Ponty). » (Myriam Revault d’Allonnes) – Voilà où nous en sommes arrivés avec nos flots d’hypocrites émotions, nos tsunami de compassion, notre lâcheté érigée en vertu, etc.

« La loi de l’innocence : plus l’effet est grand, plus petite est la méchanceté requise pour le produire … La loi de l’oligarchie : plus grand est le nombre de victimes, plus petite est le nombre de coupables requis pour opérer le sacrifice … La quantité de haine et de méchanceté requise pour le massacre d’un seul homme par ses prochains est négligeable pour les employés qui sont derrière un tableau de commandes … Appuyer sur un bouton absout du bien comme du mal, on ne doit ni n’a besoin de haïr (aucun des pilotes d’Hiroshima n’a eu besoin de mobiliser la quantité de haine qu’il a fallu à Caïn pour tuer son frère Abel … Et les milliers d’équipages de bombardiers avant et après Hiroshima !) Des faits n’ayant requis aucune méchanceté restent fermés à l’examen moral et inaccessibles au remords. Rendre les coupables parfaitement étrangers à leurs actes … (Truman remerciant Dieu de lui avoir permis d’avoir la bombe) … Si nous ne savons plus que nous faisons quelque chose, si nous ne nous en apercevons plus, nous pouvons par conséquent faire les pires choses … Nous allons périr noyés sous un déluge d’innocence … Nous sommes confrontés à la fin de la méchanceté, ce qui ne signifie pas la fin des mauvaises actions mais leur perfide allégement. Car rien n’est maintenant plus inutile que la méchanceté et si les coupables n’ont plus besoin d’être méchants pour accomplir leurs forfaits, ils perdent toutes chances de réfléchir et de revenir sur leurs forfaits. La liaison entre l’acte et le coupable est détruite. » (Günther Anders) – « L’homme qui appuie sur un bouton est complètement protégé contre les conséquences perceptibles de son acte ; il ne peut ni les voir ni les entendre. Ceci peut expliquer que des gens, pas plus méchants que d’autres et qui ne donneraient même pas une gifle à un enfant, se sont montrés capables de lancer des fusées contre des villes en sommeil ou de les arroser de bombes au napalm … livrant ainsi des milliers d’enfants à une mort horrible. » (Konrad Lorenz)

« La bonté qui paraît au grand jour n’est plus de la bonté, même si elle reste utile en tant que charité organisée … La bonté n’existe que si nul ne l’aperçoit, pas même son auteur, quiconque s’observe en train d’accomplir une bonne action cesse d’être bon … ‘Que ta main gauche ignore ce que fait ta main droite.’ » (Hananh Arendt – citant les Evangiles)

« La bonté ne veut être ni vue ni entendue … Dès qu’une bonne œuvre se fait connaître, devient publique, elle cesse d’appartenir spécifiquement au bien, d’être accomplie uniquement pour le bien … La bonté n’existe que si nul ne l’aperçoit, pas même son auteur ; quiconque s’observe en train d’accomplir une bonne action cesse d’être bon, il est tout au plus utile. » (Hannah Arendt)

« La banalité du mal … La plupart du temps, le mal est le fait de gens qui n’ont jamais pu se décider à être bons ou méchants, à accomplir ou non le mal. » (Hannah Arendt)

« Les temps sont mauvais ? Soyez bons et les temps seront bons. Car nous sommes le temps. » (Saint Augustin)

« Nos bonnes actions sont souvent plus troubles que nos péchés. » (Marcel Aymé)

« Les bienfaits trop conscients ont une physionomie de créanciers. » (Anne Barratin)

« J’ai vu des gens s’attendrir eux-mêmes sur leur bonté. » (Anne Barratin)

« La bonté n’a pas de remords, mais elle a des repentirs. » (Anne Barratin)

« Ce qu’on aime dans la bonté, c’est plus que sa main, c’est son regard. » (Anne Barratin)

« Il est crucial pour l’avenir que l’art reste une zone incontrôlable par l’Empire du bien … J’aime les moralistes, je hais les moralisateurs … Pourquoi  les êtres les plus humanistes et les plus progressistes finissent toujours par réclamer la censure, l’effacement, l’interdiction ? … Il fait se méfier de la bienveillance car elle a toujours dégénéré en délire sécuritaire … tant qu’il y aura des gentils sauveurs de l’humanité qui voudront imposer leur bonté  à ceux qu’ils auront désigné comme les malveillants. Depuis l’Antiquité, la bienveillance est l’autre visage de l’autoritarisme. » (Frédéric Beigbeder)

« Un même acte n’a pas le même sens selon celui qui le commet … La ligne de partage entre le bien et le mal ne passe pas par le cœur de chaque homme, elle passe entre l’un et l’autre des deux camps … Il y a les bons et les méchants : les uns ne sauraient mal faire, les autres ne sauraient bien faire … Aux uns un statut qui garantit l’innocence, aux autres des rôles qui se prêtent à une ‘diabolisation’. Le processus est en marche dès que s’estompe la distinction entre les actes et les acteurs, dès que les ‘valeurs’ s’incarnent dans une catégorie d’hommes. La nature des actes s’efface derrière … Celui qui est dans le bon camp peut se permettre ce qu’il incrimine chez ses ennemis. » (Philippe Bénéton – sur notre idéologie et notre pratique)

«  Car la bonté, c’est la générosité d’un principe de vie qui se donne. » (Henri Bergson) – « Y a-t-il un geste de bonté qui ne soit pas beau ? La réponse est donnée par l’expression ‘un beau geste’. » (François Cheng)

« La nausée particulière que donne le souvenir des actions mauvaises. » (Emmanuel Berl)

« Plus on va, plus facilement on se contente de mettre d’un côté les bons, de l’autre les mauvais, pour ceux-ci pas la moindre circonstance atténuante ; pour ceux-là, pas la moindre réserve, pas la moindre  réticence. » (Emmanuel Berl) – Le manichéisme du troupeau des imbéciles n’a fait qu’empirer.

« Qui vole un œuf ferait mieux de voler un bœuf. » (Francis Blanche)

« Faire du bien autour de soi, dit-on. – Question de périmètre. Moins il est étendu et plus on se fait de bien à soi-même … D’ailleurs, il ne faut humilier personne et, en même temps, observer toutes les distances, très soigneusement… » (Léon Bloy – Exégèse des lieux communs – 2, XXI)

« Entre deux maux il faut choisir le moindre, dit-on. – Là-dessus, pas d’incertitude. Les personnes les plus charitables reconnaissent que le mal du prochain est toujours le ‘moindre’ et que c’est bien celui-là qu’il faut choisir. Les moralistes ont remarqué depuis longtemps qu’on a toujours assez de force pour supporter les peines d’autrui… » (Léon Bloy – Exégèse des lieux communs – 1, CLXVIII)

 « Je ne me fais pas meilleur que je ne suis, dit-on. – Lorsque le Bourgeois déclare qu’il ne se fait pas meilleur qu’il n’est, on peut être sûr qu’il ne pourrait pas se rendre pire, quand même il le voudrait, et qu’il mijote, séance tenante, quelque rosserie… (Léon Bloy – Exégèse des lieux communs – 1, XLII)

« Plus la piété recule, plus nous pratiquons, avec la ferveur des défroqués, une charité aussi ardente qu’étourdie.  Nous faisons profession de bonté … On répond à un problème politique par une injonction morale. On confond les deux ordres de la décision et de la fraternité. » (Pascal Bruckner – sur l’immigration)

« La plus-value du cœur sous l’œil des caméras est l’engagement favori du show-biz. » (Pascal Bruckner)

« Comme nous nous affectionnons de plus en plus aux personnes auxquelles nous faisons du bien, de même nous haïssons violemment ceux que nous avons beaucoup offensés. » (La Bruyère)

« Un homme bon ne peut être que celui qui, nulle part, n’est considéré comme tel … Il n’existe pas de déguisements pour la bonté ; elle  ne supporte pas les applaudissements. » (Elias Canetti)

« ‘L’homme est bon’ (Rousseau). Phrase insensée, phrase totalitaire. En effet tout ce qui contredira pareille et catégorique affirmation devra être balayé, dés lors, ou forcé, comme on force un membre jusqu’à le briser. » (Jean Cau) – C’est un fait que les plus grandes atrocités ont toujours été, sont et seront, exercées au nom du Bien.

« Quand nous serons devenus moraux tout à fait au sens où notre civilisation l’entend, le désire et bientôt l’exigera, je crois que nous finirons par éclater tout à fait de méchanceté. On ne nous aura laissé pour nous distraire que l’instinct de destruction. » (Louis-Ferdinand Céline) – Et c’est bien ce qui est en train de se passer au milieu de tant d’interdictions, de réprobations, et d’incantations.

« Tout ce qui n’est pas donné est perdu. » (Père François Ceyrac)

« Il y a peu de bienfaiteurs qui ne disent comme Satan ‘Si tu m’adores à genoux’. » (Chamfort – citant les Evangiles)

« Il n’y a que l’inutilité du premier déluge qui empêche Dieu d’en envoyer un second. » (Chamfort – sur la méchanceté)

« Pas de métier qui exige plus de finesse et d’habileté que celui d’homme serviable ; on est toujours sûr de faire des mécontents en cas d’insuccès et des ingrats si l’on réussit. » (Hyacinthe de Charencey)

« Voulons-nous le bien ? … Dans notre perversité c’est le ‘mieux’ que nous voulons et poursuivons : poursuite néfaste … On ne se perfectionne ni on n’avance impunément. »(Emil Cioran)

« La bonté dure vaut mieux que la méchanceté molle. » (Jean Cocteau)

« Un bienfait perd sa grâce à le trop publier. » (Corneille) 

« Autant les attaques, outrages, calomnies qui nous visent révèlent à nos yeux la noirceur d’âme de l’adversaire et l’infamie de l’idéologie qui l’aveugle, autant nous imputons les horreurs que nous proférons à la chaleur des circonstances ou aux nécessités de la concurrence. Intraitables pour autrui, nous nous amnistions très vite sitôt calmés l’exaltation collective et le délire paranoïaque qui font de l’insulte autant un devoir moral qu’un automatisme psychique … Une injure en moins pour aujourd’hui, c’est une rougeur de moins pour demain. » (Régis Debray) – Du moins pour ceux, de plus en plus rares, qui savent encore rougir.

« Ce qui prouve que l’homme est bon c’est qu’il lui arrive de faire le bien sans que son intérêt l’y pousse ; jamais le mal. »(Louis Dumur)

« Nous n’appelons cruauté que celle dont nous sommes victime. Celle que nous exerçons nous la baptisons devoir, amour ou droit. » (Tony Duvert)

« L’homme bon et la bonté ne sont rien qu’une seule bonté‚ absolument une, avec la différence que l’une engendre et que l’autre est engendrée. » (Maître Eckhart)

« Il faut absolument que l’homme soit bon, puisqu’il est la mesure de tout, puisqu’il est son propre maître ; puisqu’il prend la direction de toute chose. Ce serait impossible de vivre dans un monde où l’homme a une si grande puissance, s’il était mauvais, puisque mesure de tout, ce serait une fausse mesure. » (Jacques Ellul)

« C’est chose royale que de faire le bien et d’être décrié. » (Epictète)

« Bien avant Lénine et sa multiple descendance, c’est Robespierre qui a, le premier, fondé la terreur sur l’amour des malheureux … Le ‘me voici’ a commis des dégâts … tels ceux qui incombent au ‘moi je’. » (Alain Finkielkraut) – Les rêves délirants d’humanité parfaite ont toujours très mal fini.

« Rien de plus malléable qu’une bonté sans pensée ; rien de plus terroriste qu’une bonté qui s’appuie sur un savoir congelé, sur une pensée irrévocable, et qui prétend avoir réglé, une fois pour toutes, le problème de l’Autre. La première ne délibère pas , mais répond, avec une disponibilité inlassable aux appels qui lui sont adressés : ce qui permet au diable aussi bien qu’à Dieu de la prendre à son service. La seconde a délibéré et ne fait jamais que mettre en pratique ses conclusions morales.  Et c’est parce que la sagesse et l’amour ne sont pas des divertissements … mais des charges lourdes à porter, que l’humanité oscille entre les deux pôles d’une morale sans délibération et d’un impérialisme sans morale. » (Alain Finkielkraut)

« L’homme promu au rang d’auteur, d’artisan de l’histoire doit rendre compte … du mal persistant.  Il ne dispose plus de l’argument théologique du péché originel. Dès lors, il découvre cette figure décisive de l’adversaire, de l’ennemi. Ce qu’on imputait autrefois à l’homme pécheur, on l’impute désormais à l’adversaire … La découverte de la bonté originelle suscite l’émotion et débouche sur la haine … Car si l’homme est bon, le mal ne peut venir que du contre-homme, de l’homme ennemi de l’homme. » (Alain Finkielkraut – s’inspirant de Hannah  Arendt) – Voilà ce que c’est que d’avoir largué nos anciens mythes qui avaient montré leur utilité pendant des millénaires.

« Quiconque ne trouvera personne méchant ne trouvera personne bon … Celui-là n’est bon à rien, qui ne se fâche jamais … La douceur toute seule ne sied qu’aux enfants et aux idiots. » (Baltasar Gracian)

« Elle avait la bonté officielle, ce qui ne fait aucun tort à la méchanceté domestique. » (Victor Hugo – sur madame de Chateaubriand, Céleste) – Hugo, sans doute partial, ne l’aimait pas, pour une futilité.

« Et comme un homme qui a sincèrement pitié puise dans sa propre pitié de grands motifs de satisfaction et savoure la douceur attendrie des larmes, ainsi l’homme qui pardonne sincèrement ne peut pas ne pas connaître aussitôt les délices de la bonne conscience bien contente … La charité et le désintéressement sincère ne sont jamais la résidence habituelle de l’homme : car on ne peut séjourner sur les sommets vertigineux, sur la cime effilée du pardon et de l’amour ; il faudrait des prodiges d’équilibre pour s’y maintenir. » (Vladimir Jankélévitch)

« Celui qui sait abriter ses bons mouvements contre les retours du scrupule (les interminables et infécondes questions sur les motifs cachés de l’agir) prendra confiance dans le désintéressement et la bonté … Avant toute rétrospection dialectique, il existe effectivement une certaine ‘charité prévenante’, un premier mouvement spontané, qui est plus rapide que nos calculs d’intérêt, qui devance l’espoir et la crainte mercenaires … En quoi nos tardifs scrupules enlaidiraient-ils l’impulsion spontanée. » (Vladimir Jankélévitch)

 « Le caractère suspect, évanescent, inconsistant, insaisissable par essence de tout bon mouvement (quelque chose de ce genre a-t-il jamais existé ?) ne signifie pas que tout mauvais mouvement doive lui aussi prétendre à la presque-inexistence ! Ce serait trop beau, trop commode ! … C’est entendu : l’intention vertueuse que je m’attribue a quelque chose d’illusoire, d’ambigu et d’éphémère, parfois même de bouffon ; mais ce n’est pas une raison pour extrapoler, et pour étendre cette ambiguïté à l’égoïsme, à la mesquinerie et à la vanité … L’homme doit accepter cette injustice scandaleuse, cette dissymétrie révoltante à ses dépens comme un fardeau qui lui incombe et qui est, à condition de ne pas s’en prévaloir, le verso caché de sa dignité. D’une part la pérennité pour tout ce qui est mauvaise volonté, mauvaise foi, mauvaise intention ; d’autre part l’inconsistance pour tout ce qui est bon mouvement … J’accepte la responsabilité du démérite et je refuse celle du mérite ! Je ne ferai pas servir celle-ci à compenser ou à contrebalancer celle-là. » (Vladimir Jankélévitch)

« Je me sens bien parce que je suis bon … Je me sens bien donc je suis bon … Je suis bon, vous m’aimez, donc vous êtes bon. Donc je vous aime. » (Ronald Laing) – L’auteur joue aussi avec l’adjectif mauvais et/ou les négations adéquates.

« Les progressistes, pour Mumford, croyaient que la nature humaine n’est détournée de sa naturelle bonté que par des circonstances extérieures indépendantes du contrôle des individus. » (Christopher Lasch) – C’est la faute de la société. Les progressistes n’y croient plus depuis longtemps mais font semblant car cette stupidité sert leur objectif de tout pourrir.

« Qu’est-ce que la bonté ? C’est le fait de répondre ‘me voici’ à l’interpellation d’un visage … Quand un être suspend son (propre) mouvement spontané d’exister et se désintéresse de son être pour se préoccuper d’un autre être … Mais, le ‘me voici’ a commis, dans l’histoire récente, des dégâts qui atteignent en intensité et en horreur ceux dont la responsabilité incombe au ‘moi je’. » (Emmanuel Levinas) – Ceux qui veulent le bonheur de l’humanité future ou de l’actuelle humanité souffrante.

« Il n’y a aucune solution au drame humain par changement de régime. Pas de système de salut. La seule chose qui reste, c’est la bonté individuelle d’homme à homme … Ethique sans système éthique. » (Emmanuel Levinas)

« On devrait demander la permission d’obliger ; car si quelques bienfaits dont on ne se soucie pas, d’un homme dont on ne se soucie pas, vous tombent sur le corps, vous voilà obligés à être obligés toute votre vie. » (prince de Ligne)

« Plus la religion du devoir s’amenuise, plus nous consommons de la générosité ; plus les valeurs individualistes progressent, plus les mises en scène médiatiques des bonnes causes se multiplient et font de l’audience … Place aux feux d’artifice, à la télé-charité, à l’excitation procurée par le suspense des scores atteints … Téléthon ‘Olympiade de la bienfaisance’, ‘Marathon du cœur’. » (Gilles Lipovetsky) – Masturbation de Bobos. A donner envie de vomir.

« Il est nécessaire à un prince, s’il veut se maintenir, d’apprendre  à pouvoir ne pas être bon et d’en user ou non selon la nécessité. » (Machiavel – Le Prince) – De quoi faire pleurnicher les bien-pensants.

« La cruauté, c’est comme une maladie, ça s’attrape. » (Claire Martin)

“Jusqu’à un certain point l’idée ou la vue du Malheur mobilise nos meilleurs  sentiments, mais, dans certains cas particuliers, au-delà de ce point elle ne les commande plus. Il serait erroné de croire que ce phénomène soit dû invariablement à l’égoïsme inhérent au cœur humain. Il procède plutôt d’une certaine désespérance de pouvoir remédier à un mal excessif et organique. Pour un être sensible, la pitié, souvent, est souffrance. Lorsqu’on voit finalement que d’une telle pitié ne saurait sortir un secours efficace, le sens commun ordonne à l’âme de s’en débarrasser. » (Herman Melville – Bartleby, le scribe)

« La confiance en la bonté d’autrui témoigne pour notre propre bonté. » (Montaigne)

« Le seul contrepoids à la méchanceté de l’homme c’est sans doute sa lâcheté. » (Henry de Montherlant)

« La bonté est comme beaucoup de produits : la vraie guérit, les contrefaçons peuvent tuer. » (Henry de Montherlant)

« Le caritatif a remplacé le qualitatif. » (Philippe Muray)

« C’est toute une histoire la bienfaisance. Une grand épopée jamais écrite … ‘Qu’est-ce qu’on peut faire ?’. » (Philippe Muray)

« Le Bien, tout entier, contre tout le Mal !  … Tout ce qui a définitivement raison contre tout ce qui a tort à jamais. La Nouvelle Bonté a le vent en poupe contre le sexisme, le racisme, les discriminations, les trafics d’ivoire et de fourrure, la xénophobie, le massacre des paysages, la pollution, les responsables des pluies acides, les dangers du cholestérol, le tabagisme, le sida, le cancer… L’hygiène niaise dégouline partout, c’est l’invasion des mièvreries, c’est le grand gala du show du cœur … L’éclipse du principe maléfique, de la ‘part maudite’, du ‘négatif’, est la grande énigme du temps … Le Bien a toujours eu besoin du Mal. Mais aujourd’hui, plus que jamais. Le faux Bien a besoin d’épouvantails… » (Philippe Muray)

« La joie des petites méchancetés nous épargne maintes grande mauvaise action. » (Nietzsche)

« Le jugement de ‘bon’ ne provient nullement de ceux qui bénéficient de cette ‘bonté’. Ce sont plutôt les ‘bons’ eux-mêmes, c’est-à-dire les nobles, les puissants, les supérieurs en position et en pensée qui ont éprouvé et posé leur façon de faire et eux-mêmes comme bons … par contraste avec tout ce qui est bas, bas d’esprit, vulgaire et populacier … A partir de ce sentiment de la distance, ils ont fini par s’arroger le droit de créer des valeurs et de forger des noms de valeur. » (Nietzsche – Généalogie de la morale)

« La haine abyssale, la haine de l’impuissance … Les maîtres sont défaits, la morale de l’homme vulgaire a triomphé … L’insurrection des esclaves  dans la morale commence lorsque le ressentiment lui-même devient créateur et engendre des valeurs ; le ressentiment d’êtres tels que la véritable réaction, celle de l’acte, leur est interdite , qui ne s’en sortent indemnes que par une vengeance imaginaire … L’homme du ressentiment a conçu le ‘méchant comme notion fondamentale, à partir de laquelle  il invente pour finir, et sous forme d’image inversée, de négatif, un ‘bon’, à savoir : lui-même. » (Nietzsche)  – A notre époque d’explosion du ressentiment tous azimuts, les dits esclaves se sont emparés du pouvoir et s’autorisent l’acte (haine ouverte, censure, injures, ostracisme, dénonciations, condamnations…) 

« La bonté n’a pas à atténuer la lucide vision. » (Anna de Noailles)

« Il n’y a que ‘Oui’ en Lui. » (saint Paul – sur Jésus-Christ)

 « Nous sommes bons quand la raison nous gouverne et mauvais quand nous sommes dominés par nos désirs. » (la doctrine morale de Platon, La République)

« Dans l’action historique, la bonté est quelquefois catastrophique et la cruauté moins cruelle que l’humeur débonnaire … Qu’est-ce qu’une bonté qui serait incapable de dureté ? Qu’est-ce qu’une bonté qui se veut bonté ? Une manière douce d’ignorer autrui et finalement de le mépriser … Il arrive quelquefois que le dur politique aime les hommes et la liberté plus véritablement que l’humaniste déclaré. » (Merleau-Ponty) – Oui, mais le premier n’a aucune chance d’être choisi par un électorat de pleurnichard(e)s.

« ‘Lorsque dieu forma les entrailles de l’homme, il y mit premièrement la bonté’. En d’autres termes moins figurés, on peut dire : c’est le fond de notre être que l’amour. » (Félix Ravaisson – citant Bossuet)

« C’est difficile d’être bon quand on est clairvoyant. »(Jules Renard)

« Entre le blâme et la lamentation … Ce qui fait toute l’énigme du mal, c’est que nous plaçons sous un même terme, du moins dans la tradition de l’Occident judéo-chrétien, des phénomènes aussi disparates  que le péché, la souffrance et la mort … Disparité de principe entre le mal ‘commis’ et le mal ‘souffert’ … La souffrance se distingue du péché par des traits contraires. A l’imputation qui centre le mal moral sur un agent responsable, la souffrance souligne son caractère essentiellement subi : nous ne la faisons pas arriver ; elle nous affecte … Au blâme, la souffrance oppose la lamentation ; car si la faute fait l’homme coupable, la souffrance le fait victime ; ce que clame la lamentation … Dan sa structure relationnelle, dialogique, le mal commis par l’un trouve sa réplique dans le mal subi par l’autre. » (Paul Ricœur)

« Pour rendre crédible l’idée que toute souffrance, aussi injustement répartie ou aussi excessive qu’elle soit, est une rétribution du péché, il faut donner à celui-ci une dimension supra-individuelle : historique, voire générique ; c’est à quoi répond la doctrine du ‘péché originel’ ou ‘péché de nature’ … Cette proposition recueille un aspect fondamental de l’expérience du mal, à savoir l’expérience à la fois individuelle et communautaire de l’impuissance de l’homme face à la puissance démonique d’un mal déjà là, avant toute initiative mauvaise assignable à quelque intention délibérée. » (Paul Ricœur)

« Quelques sages s’avancent solitaire sur le chemin qui conduit à un renoncement complet de la plainte elle-même … L’horizon vers lequel se dirige cette sagesse me paraît être un renoncement aux désirs mêmes dont la blessure engendre la plainte : renoncement au désir d’être récompensé pour ses vertus, renoncement au désir d’être épargné par la souffrance, renoncement à la composante infantile du désir d’immortalité. » (Paul Ricœur)

« Il est plus facile d’être bon pour tout le monde que pour quelqu’un. » (Rivarol)

« Nul ne mérite d’être loué de bonté s’il n’a pas la force d’être méchant. » (La Rochefoucauld)

« Il n’est pas si dangereux de faire du mal à la plupart des hommes que de leur faire trop de bien. » (La Rochefoucauld) 

« Nous ne nous donnons pas (aux gens plus puissants que nous) pour le bien que  nous leur voulons faire, mais pour le bien que nous voulons recevoir. » (La Rochefoucauld)

« Ce qui rend l’homme essentiellement bon est de peu se comparer aux autres ; ce qui le rend essentiellement méchant est de tenir beaucoup à l’opinion. » (J. J. Rousseau)

« Tout le mal que j’ai pu faire dans ma vie a été le résultat de la réflexion, et le peu de bien que j’ai été capable de faire a été le résultat de l’impulsion. » (J. J. Rousseau – Le Contrat social)  

« L’essentiel c’est d’être bon aux gens avec qui l’on vit. » (J. J. Rousseau – L’Emile) – A l’opposé de Voltaire, qui était méchant comme un cosmopolite, Rousseau était bon de son naturel.

« ‘Simple, innocent, candide, naïf’, ces mots prennent un sens qui fait sourire au fur et à mesure que les mœurs publiques prennent une tournure qui fait pleurer. » (Père Joseph Roux) – Déjà en 1885 !

« Qui cesse d’être trop bon paraît vite méchant. » (Petit-Senn)

« Quand un homme tue un tigre, c’est du sport. Quand un tigre tue un homme c’est de la férocité. » (G. B. Shaw)

« Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’ils te fassent ; certes, mais les goûts peuvent être différents. » (G. B. Shaw)

« La méchanceté tient moins au contenu de l’acte qu’à l’orientation de la volonté … Être méchant, ce n’est pas seulement faire le mal : c’est le vouloir … Le vouloir en toute connaissance de cause, ‘en tant que mal’ (Kant) … On ne vole pas ou ne tue pas parce que c’est mal, mais pour d’autres motifs concrets, pour un bien que l’on croit tel … La grandeur du Reich, la ‘solution finale’ apparaissaient à Hitler comme des biens. » (André Comte-Sponville) 

« Tout comprendre rend très indulgent et sentir profondément inspire une grande bonté. » (Germaine de Staël) – Dans un exercice d’hypocrisie.

« Celui qui est trop occupé à faire le bien n’a pas le temps d’être bon. » (Tagore)

« Etant bon, l’homme doit être libre … Possédant bonté et liberté, l’homme raisonnable possèdera aussi l’égalité, conséquence de la bonté et garantie de la liberté. » (André Tardieu –ironique – sur le délire meurtrier de 1789, dont notre idéologie gauchiste découle encore)

« Les justes ne poursuivent pas le bien mais pratiquent la bonté. » (Tzvetan Todorov) – Ce qui est tout différent.

« Il faut … en finir avec l’essentialisme de ‘la femme’, sa représentation angélique, sa construction idéologique. Le mouvement féministe lui-même s’est bâti sur et acte de foi. Le mythe de l’innocence est dangereux parce qu’il définit une femme hors des réalités, enfermées dans son essence, dans ses propres représentations toxiques, incapables de se penser librement. » (Valérie Toranian)

« Chaque fois que s’effondre un peu plus le mythe de l’innocence et de la prétendue bonté innée des femmes, il faut s’en réjouir …. Notre courage, notre compassion, notre solidarité, notre générosité ne sont pas des qualités innées. Ce sont des choix moraux. D’êtres humains libres. Hommes ou femmes … Dans le pire comme dans le meilleur, il n’y a pas de différence de nature entre les hommes et les femmes. » (Valérie Toranian) – L’auteur reprenant la soldate américaine dans la prison irakienne, les compagnes des Dutroux et les femmes d’Outreau,et l’auteur de ce blog se rappelant des scènes de lynchage des années 1944-45 – « Qui n’a pas vu une femme tuer (et j’en ai vu, lors de la guerre civile à Beyrouth) ignore ce que peut le genre féminin. » (Richard Millet)

« La bonté est la meilleure source de clairvoyance spirituelle. » (Miguel de Unamuno)

« La bonté consiste à aller là où personne n’ose aller par peur de céder quelque chose de soi … Aller chercher les brebis perdues …  … Il n’y a pas besoin d’être bon pour être tolérant, l’indifférence suffit. Il n’y a pas besoin d’être bon pour être solidaire. Un peu de calcul suffit. » (Bertrand Vergely)

« La bonté d’un homme ne le rend victime que jusqu’où il le veut bien. » (Alfred de Vigny)

« L’ostentation des  beaux sentiments est une violence secrète … Histrionisme ou névrose. » (d’après Max Weber –cité par Merleau-Ponty)

« On met à part sans le savoir …La faculté de mettre à part permet tous les crimes … C’est ce qui permet chez les hommes des comportements si incohérents, notamment toutes les fois qu’intervient le social, les sentiments collectifs (guerre, haines de nations et de classes, patriotisme de parti, d’Eglise…). Tout ce qui est couvert du prestige de la chose sociale est mis dans un autre lieu que le reste et soustrait à certains rapports … Et … Nous haïssons les gens qui voudraient nous amener à former les rapports que nous ne voulons pas former. » (Simone Weil) – Ne serait-ce pas une des raisons de la corruption mentale de tant de politiques ?

« Si on a l’intention d’être bon, il faut en faire profession. C’est la plus accaparante profession du monde. » (Oscar Wilde)

« Il faut toujours se méfier de celui qui agit pour le bien des autres. » (adage)

« La méchanceté s’apprend sans maître. » (proverbe) 

« Qui se fait brebis le loup le mange. » (proverbe)

« Les bienfaits accompagnés d’orgueil sont souvent payés de haine. » (?)

« La méchanceté la plus terrible est celle qui est mêlée de bêtise. » (?)

« Magnanime : qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? » (?)

« La bonté, unique source de bonheur et de paix. » (?) – Au moins condition nécessaire si non suffisante.

« La redoutable tentation d’être bon. » (?)

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