025,4 – Indignation

– Les vociférateurs.

– A remplacé toute réflexion. Le but de ces vagues de piaulements de midinettes étant justement d’empêcher celle-ci. Le plus souvent, festival de l’hypocrisie.

 – Après la légitime indignation sur n’importe quoi qui vous permet de faire semblant d’exister, n’oubliez pas la phase positive : catéchiser.

– Premier commandement du nouveau décalogue à l’usage du parfait citoyen. Forme de révolte à l’usage des enfants de chœur ou des « mutins de Panurge. » (Philippe Muray). Plus un politique est en vue conformément à son ambition, plus il éprouve fréquemment ce sentiment à tel point qu’il ne peut se retenir de le faire savoir aux populations émues de tant d’humanité bêlante.

– Doit être automatique et sans examen, suscitée non par des faits mais par des mots entraînant le réflexe bien connu de Pavlov.

– Si on ne sait trop quand pratiquer ce sport, suivre les indications des média. En tout cas, n’aller jamais contre, vous risqueriez de vous égarer lamentablement.

– « Nous les avons seulement condamnés, en flattant notre conscience avec notre indignation ; plus forte et impertinente était notre indignation, plus tranquille notre conscience. » (Pasolini) – Paix aux mânes de Stéphane Hessel, inventeur d’un groupuscule éphémère de Tartuffes, narcissiques, inévitablement apprentis lyncheurs, mais sans trace d’estime ni à plus forte raison d’admiration.  

– « L’indignation morale est une technique pour donner de la dignité à un idiot. » (Marshall Mac Luhan)

– « L’indignation vertueuse et le vertige de l’indignation hypocrite » (Philip Roth)

– « Festival de pleurnicheries. » (Elisabeth Lévy

-« Le sujet narcissique ayant comme formule de se dire : ‘A part moi, tout est mal !’ » (Bertrand Vergely)

« Exprimer son indignation est une bonne façon d’attirer l’attention sur soi et d’exhiber sa belle âme. » (Gérald Bronner)

« Les professionnels de l’indignation. » (Maurice Bardèche)

« L’indignation permanente des groupes identitaires. » (?)

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« ‘Le moralisme, cette faculté à s’indigner’ qui a coutume de regarder le réel dérogeant à ses principes comme une ‘insolence à son égard’. » (Raymond Aron – cité par Marc Crapez)

« De vaines attitudes de révolte, qui relèvent en fait d’une forme d’exhibitionnisme mental. » (Philippe Baillet) – Mai 68, pire, Nuit debout.

« Qui peut souhaiter devenir un vieux déchaîné, un rebelle gâteux, un révolutionnaire cacochyme ? Passé la cinquantaine, comment peut-on encore s’indigner avec crédibilité ? » (Olivier Bardolle) – Stéphane Hessel, lui pouvait.

« ‘Depuis où t’indigne-tu ?’ … celui qui dénonce se situe d’emblée dans l’imaginaire, il prétend occuper le point de vue de nulle part : il fait tantôt référence à ce qui existait dans le passé, à un paradis perdu, tantôt à ce qui sera, à une société idéale à venir … d’autres encore s’indignent depuis leur supériorité intellectuelle et narcissique. » (Miguel Benasayag)

« Le braillomètre … instrument qui mesure la mobilisation des professionnels de l’indignation, du Syndicat de la magistrature à la Ligue des droits de l’homme. » (Cyril Bennasar – cité par Elisabeth Lévy)

« Je me méfie de mon imagination, de ma révolte, l’indignation n’a jamais racheté personne, mais elle a probablement perdu beaucoup d’âmes … Toutes les bacchanales simoniaques de la Rome du XVI° siècle n’auraient pas été de grand profit pour le diable si elles n’avaient réussi ce coup unique de jeter Luther dans le désespoir, et avec ce moine indomptable, les deux tiers de la douloureuse chrétienté. » (Georges Bernanos) – L’indignation lucide et parfaitement justifiée des Marx-Engels a conduit leurs disciples à l’extermination des Koulaks, à l’enfer du Goulag, aux charniers de Katyn…

« Il s’agit de trouver dans l’histoire un point concret de justification de sentiments nés plus tard et sans rapport généalogique véritable avec l’événement invoqué … A mesure que le deuil s’efface avec  la mort des survivants l’indignation historique prend le pas, laquelle peut être très sincère (on voit des protestants souffrir véritablement au souvenir de la Saint-Barthélémy…). » (Alain Besançon – sur des génocides, l’esclavage, la Shoa… – Problèmes religieux contemporains) – Sincère, et même parfois souhaitable, quand elle entend perpétuer un souvenir pour empêcher le renouvellement…

« A force de vouloir brider l’indignation par la compréhension, le singulier traumatisant par le pluriel sociologique, on rend possible, plus facile, tout ce qui devrait d’emblée nous révolter. » (Philippe Bilger)

« Le ridicule de ces indignations sportives (Mbappé, Griezmann) et artistiques trop contentes de s’illustrer par un conformisme précipité et ignorant. » (Philippe Bilger) – A  propos  d’une des innombrables vidéos truquées et tronquées destinées à charger la police. 

« L’indignation, par exemple, en un temps sécuritaire où les possibilités de faire preuve d’héroïsme sont devenues si rares, est un bon vecteur collectif où chacun a l’occasion d’exprimer sa belle âme … Les initiateurs de l’indignation étant, c’est bien normal, un peu plus récompensés que les autres.. » (Gérald Bronner)   

« La plupart d’entre nous ont le sentiment d’être moralement supérieurs aux autres, mais encore nous désirons que les autres s’en aperçoivent. »  (Gérald Bronner)

« L’œil sévère de l’indignation ne contribue pas à assainir nos échanges, contribue à l’’épidémie de sensibilité … Le moindre événement, aussi banal soit-il, se transforme en enjeu moral impératif sur lequel tout le monde doit prendre position. Chacun de ces événements donne l’occasion aux individus d’exhiber leur intransigeance morale et la beauté de leur âme … Tartuffes » (Gérald Bronner)

« L’indignation s’émousse au fur et à mesure qu’elle est sollicitée, le pire devient courant. » (Pascal Bruckner – sur la connaissance inutile et le spectateur gavé)

« L’indignation décline. Chose pire, elle s’organise, elle s’exerce à heure fixe et à sens unique. Nos protestataires sont devenus hémiplégiques. Ils choisissent parmi les victimes et décrètent que les unes sont attendrissantes tandis que les autres sont obscènes. » (Albert Camus – Le parti de la liberté) – Camus écrivait avant nos grands rassemblements organisés, fixés pour permettre à chacun de hurler sa haine et servir un groupuscule d’ambitieux sans foi ni loi.

« Plus on a souffert moins on revendique. Protester est signe qu’on n’a traversé aucun enfer. » (Emil Cioran)

« Toute indignation, de la rouspétance au luciféranisme, marque un arrêt dans l’évolution mentale. » (Emil Cioran)

« L’Occidental tourmenté fait penser à un héros dostoïevskien qui aurait un compte en banque. » (Emil Cioran)

« Avoir dépassé l’âge de la révolte et se déchaîner encore, c’est se faire à soi-même l’impression d’un Lucifer gâteux. » (Emil Cioran) – Un vieil indigné récent aurait pu retenir !

« Autrefois c’était pour faire tomber la pluie que les tribus africaines jouaient du tambour et que les dieux d’en haut ‘finissaient par entendre’. » (Jean Clair – à propos de nos manifestations imbéciles d’indignation, exigence, réclamation … Rassemblements, concerts, défilés, œuvres dites d’art, etc. pour exiger qu’au bout du monde on se plie à nos sommations et ultimatums, à nos trépignements)

« L’indignation est alors effectivement le maximum de l’intensité politique à quoi peut atteindre l’individu atomisé, qui confond le monde avec son écran comme il confond ses sentiments avec ses pensées. » (C. N. I.)

« Les médias sociaux ont redonné vie à la foule lyncheuse. » (Mathieu Bock-Côté) –  Le domaine préféré de la horde haineuse des lâches, ou le buzz assassin.

« Les groupuscules qui se comportent comme des professionnels de l’indignation. » (Mathieu Bock-Côté)

« Je suis un subversif, un libertaire, un rebelle, un justicier, je défends la veuve et l’orphelin, je pourfends les tabous. Sur les réseaux sociaux, je tweete, je blogue et je laisse des posts et des commentaires. Je suis engagé, je prends partie en faveur de toutes les causes défendues par les médias et de tous les combats gagnés d’avance. Je suis résolument contre la guerre et la faim dans le monde. Je ne critique jamais les catégories défendues par des nuées d’associations et d’avocats. Je m’attaque aux plus démunis et aux plus déshérités, médiatiquement parlant. Je ne rate pas une occasion de taper sur la ‘droite pop’ et sur les cathos… » (Marc Crapez – profession de foi de l’engagé)

« Je ne suis pas un intellectuel contestataire, mais un paysan médiéval indigné. » (Nicolàs Gomez  Dàvila) – Donc un vrai !

« Expliquer, comme ils disent, ce serait déjà justifier. L’indigné doit rester propre. Zorro doit montrer une capacité de révolte intacte, une photo de Bibi dans un champ de décombres suite à une visite éclair n’a que des avantages : économie de preuves et d‘arguments, culpabilisation du spectateur ou du lecteur, désamorçage anticipé des contradicteurs réduits à d’odieux distinguos et à de filandreuses précisions. » (Régis Debray)

« Les ritournelles de l’indignation. » (Chantal Delsol)

« Il semble que l’authentique sentiment d’indignation et ses fonctions sociales aient été détournées à des fins purement personnelles et mercantiles… » (Sebastian Dieguez) – Faire du fric.

« Un de nos bons moyens de nous  dissimuler les injustices que nous commettons, c’est de nous indigner des pires … cherchez à quel intérêt répond l’indignation, vous trouverez l’exaction ; proportionnelle à l’indignation. » (Jean-Philippe Domecq)

« L’indignation est toujours étagée sur l’ignorance. » (Louis Dumur)

« La réprobation morale propre aux sociétés puritaines n’est souvent, affirme Foster, qu’une envie refoulée : en s’attachant rigidement au respect de normes et de règles définies strictement pour justifier son indignation, on cache une envie que l’on a peur de s’avouer et honte de reconnaître envers l’autre qui goûte aux plaisirs interdits … Dans les sociétés protestantes, en particulier, c’est sous la forme de l’indignation morale que s’exprime l’envie. » (Jean-Pierre Dupuy) – Et, évidemment, nous les copions avec notre servilité habituelle.

« Les hauts-le cœur à géométrie variable qui caractérisent notre époque. » (Duverger, Ménard) – On sait que, en France, les vagues d’indignation sont déclenchées sur commande du gang et en fonction de ses intérêts. Les bien-pensants-gogos suivent au coup de sifflet.

« Fais attention à tes représentations, veille bien, car ce que tu as à conserver … c’est la réserve, la fidélité, le calme, l’impassibilité, l’absence de peine, de crainte, de trouble, en un mot la liberté. » (Epictète) – Toutes attitudes incompatibles avec l’excitation hurleuse.

« Il faut être bien renseigné avant de s’indigner de ce qui arrive. Conjecturer et savoir exactement sont deux choses différentes. » (Eschyle)

« Les purs acclimatent le pire, le cœur gonflé par l’émotion de livrer bataille. » (Alain Finkielkraut)

« En voulant réduire, jusqu’à la faire disparaître, la part de l’immaîtrisable et de l’incalculable, on bâtit une société d’esclaves. » (Alain Finkielkraut – sur certaines ambitions révolutionnaires) – Aussi bien que scientifiques d’ailleurs.

« Nul besoin de se vouloir héroïque, l’indignation fait désormais l’affaire … Il invente ainsi le tourisme de l’indignation : une promenade éthique et sans prise de tête. » (Alain Finkielkraut – sur Stéphane Hessel) – Promenade qui convient fort  bien à notre jeunesse de vieillards (voir ses manifestations)

« Vider le monde de sa complexité pour n’y voir que matière à indignation, pétitions, scandale et poses avantageuses. » (Alain Finkielkraut)

« Lorsque la protestation se confond avec l’ivresse du dépassement des limites, parfois même avec la haine, elle perd sa qualité première de construction du social. Lorsqu’elle sert de prétexte à l’agressivité contre des groupes sociaux… » (Jean-Paul Fitoussi)

« Ceux qui se laissaient conduire par le sentiment se montraient peu accessibles à l’argumentation et jugeaient avec le cœur. Ceux-là condamnaient toujours. C’étaient les bons, les purs. Ils ne songeaient qu’à sauver la République et ne s’embarrassaient point du reste …  Ce ne sont pas des hommes, ce sont des choses : on ne s’explique pas avec les choses.» (Anatole France – sur les juges révolutionnaires)

« Il n’y a peu-être aucun phénomène qui contienne autant de sentiment destructeur que ‘l’indignation morale’ qui permet à l’envie ou à la haine de se manifester sous l’apparence de la vertu. La personne ‘indignée’ a pour une fois la satisfaction de mépriser et de traiter une autre personne ‘d’inférieure’ tout en ayant le sentiment de sa propre supériorité et de sa propre rigueur morale. » (Erich Fromm, psychanalyste, et  marxiste)

« Il y a une sorte de fonctionnement judiciaire de l’opinion … On n’y peut à peu près rien et on n’y comprend pas grand-chose. Il y a une mobilisation émotive forte dans l’instant autour de l’indignation envers les coupables et la solidarité avec les victimes sans la moindre projection positive vers le futur … D’où une passivité qui est une des retombées les plus étonnantes de la culture médiatique d’aujourd’hui. » (Marcel Gauchet) – Sachant que, dans certains cas, les statuts de coupables et de victimes sont attribués par les média suivant les critères dominants en vigueur.

« L’indignation à la Stéphane Hessel, c’est parfait : ça ne fait de mal à personne et ça fait des audiences télévisées. » (Marcel Gauchet)

« Il est clair que la protestation passionnelle contribue à l’obscurcissement du présent et nourrit l’impuissance collective. » (Marcel Gauchet)

« Les purs sont sensibles au scandale, ils ont même besoin d’un certain scandale, pour le bien qui se cache dans l’indignation, pour que la conscience démontre qu’elle n’est pas, elle, la proie du mal, pour marquer qu’on est aimé des dieux … Un pur désire (sans se l’avouer) que le scandale arrive, non certes pour le mal, mais pour le bien qui se cache déjà dans l’indignation. »  (Jean Guitton)

« Rien n’est à meilleur marché que l’indignation morale. » (Karl Kraus)

« Les êtres rebelles avides de s’opposer à tout et à tous ne se rendent pas compte à quel point eux-mêmes sont obéissants. Ils ne se révoltent que contre ce qui est interprété, pré interprété, comme digne de révolte. » (Milan Kundera)

« La fin de l’indignation est d’avoir honte de soi. » (Jean-Benjamin de Laborde)

« Devant l’horreur (réelle ou inventée), seules l’émotion, l’indignation et la révolte sont de mise … Communier dans l’indignation. » (Elisabeth Lévy) – Surtout ne pas vérifier les informations, ne pas poser de questions, ne pas chercher à savoir, à comprendre, rejoindre la meute, la machine à indignation, ou être ostracisé, vilipendé, insulté, condamné. « Indignez-vous » (Stéphane Hessel, l’indigent opuscule dans lequel l’auteur réussit à faire passer l’adhésion a l’air du temps pour du courage) – Transformez-vous en carpettes bien utiles.

« Cette production d’indignation à jet continu a pour effet, sinon pour ambition consciente, de proscrire toute tentative de compréhension de ce dont il est question … On exhibe la grandeur de son âme à défaut de la richesse de sa pensée. » (Elisabeth Lévy)

« Elles se nourrissent davantage d’indignation morale que d’indignation-envie. » (Gilles Lipovetsky – sur les protestations et les critiques radicales du néo-libéralisme) – Simpliste, la morale ne fait fonction que de masque à la vulgarité de l’antique envie matériel, surtout de la part de gens totalement amoraux et même pervertis, les bien-pensants donneurs de leçons –  L’auteur, souvent pertinent, se révèle parfois tel l’optimiste béat soumis à la doxa de son temps.

« L’indignation morale est une technique pour donner de la dignité à un idiot. » (Marshall Mac Luhan)

« Alors que le progressisme moderne pensait aseptiser toutes chose, le virus revient en force. Et, parmi les épidémies qui nous menacent, celle qui a trait à l’indignation morale. Il s’agit là d’un ‘fromage’ que se disputent tous ces amuseurs publics que l’on appelle encore, ‘intellectuels. Et les demi-savants, experts en sondages de tout genre, que sont les journalistes ne sont pas en reste. Quant aux politiques dans leur langage de commis voyageurs, ils en font un usage immodéré. La ‘moraline’, comme dirait Nietzsche, est une sécrétion qui se porte bien. » (Michel Maffesoli)

« Flaubert écrivant à Georges Sand qu’il était toujours ‘Hindigné’, avec un ‘H’, comme dans ‘Horreur’. » (Jean-François Mattéi)

« Violence faite à la ‘Dignité’ … Le ‘mouvement naturel d’un homme de cœur’ (Vladimir Jankélévitch) … Non pas devant l’injustice que l’on subit soi-même mais devant le spectacle de l’injustice imposée aux autres … Eclat intermittent qui éveille la conscience au spectacle unique de l’outrage … Le mode d’apparition de l’émotion non intentionnelle est de ‘surgir’, manifestation instantanée … La foi en la justice comme la croyance en la dignité trouvent leur assise plutôt dans le sentiment que dans une raison vacillante  …C’est le bonheur des méchants plus que le malheur des bons qui met en branle la révolte … L’indignation devant la réussite des coupables, indignations qui ne sont plus de nature morale mais idéologique témoigne plus du ressentiment que de l’indignation chrétienne devant les souffrances des victimes (la ‘miséricorde’) … Alors que l’indignation nous porte vers autrui, le ressentiment ne nous livre qu’à nous-même … Sentiment qui ne va pas sans quelque complaisance, la joie maligne lorsque nous savons que nous somme indemnes du mal dont nous sommes indignés … S’élever contre les fautes d’autrui pour mieux goûter sa propre vertu … Comme toute passion, l’indignation est sur le fil du rasoir de l’hypocrisie … la conscience malheureuse garant de la vertu … La fausse indignation qui se soucie moins de justice que de vengeance pour alimenter sa colère, selon Nietzsche, sous le masque généreux de la justice se cache le visage haineux de l’esprit de vengeance … L’indignation est l’ancrage de la loi dans la conscience, alors que le ressentiment est l’ancrage de la vengeance dans l’idéologie … Ressentiment devant la condition humaine elle-même lorsque cette fausse indignation, qui relève du concept et non de l’affect s’en prend au monde entier, Mondialisation, Technique, ou Capitalisme … A s’indigner de tout, on ne se soucie de rien, l’indignation constante que la rapidité des communications répercute d’un bout à l’autre de la terre, passés de la révolution permanente à l’indignation permanente …  Protestations jouées ou commisérations apitoyées qui ne tardent pas à révéler l’idéologie humanitaire qui les anime : on s’indigne en chœur de la violence, de la pédophilie, du profit, en constituant des hypostases, moins des êtres de raison que des êtres de passion … L’indignation collective appelle invinciblement la culpabilité collective et, à terme, la punition collective. L’enivrement s’enivre ici de sa propre force, vertige totalitaire des indignations collectives qui, toute miséricorde oubliée, se livrent à des délices de vengeance sur des abstractions idéalisées, ‘L’indignation s’organise, elle s’exerce à heure fixe et à sens unique’ (Albert Camus)   … L’unanimité n’est pas un indice de vérité …Bien avant l’affaire Dreyfus, Bartolomé de Las Casas et sa ‘Très brève relation de la destruction des Indes’ sur la conduite des Conquistadors envers les Indiens, Voltaire et son ‘Traité sur la tolérance’, les affaires Calas et du chevalier de la Barre … Le danger de l’indignation humanitaire  tient au passage furtif du particulier au général ou de la souffrance personnelle au malheur collectif … Si l’indignation n’est pas le ‘cri spontané d’une conscience outragée par le scandale’ (Georges Bernanos), elle est le faux-semblant d’une conscience hypocrite qui, dans la souffrance d’autrui, ne voit que sa propre justification … Avant d’être sociale et partagée, l’indignation doit être morale et personnelle, sous peine de n’être qu’un masque … Elle n’a pas toujours eu la faveur des moralistes qui ont discerné le visage d’une hypocrisie vicieuse  sous le masque de l’indignation vertueuse … à seule fin de se donner le beau rôle à peu de frais en condamnant tout haut ce qui est pratiqué tout bas … Les indignations idéologiques, provoquées et feintes, sont renforcées par la pression médiatique sous une forme collective et restent indifférentes au sort réel des hommes … les indignations collectives sont celles du ressentiment … Ce sentiment ne révèle la dignité d’un être soumis à une injustice que s’il se dresse spontanément, immédiatement, sans calcul, devant l’indignité infligée à une personne particulière … Les personnalités les plus médiatiques n’ont en effet pas hésité à apporter leur soutien aux protestataires (mouvement dit des Indignés) … L’excès de scandalisation relève-t-il du sentiment d’indignation ou d’une posture sociale à prétention morale (et parfois intéressée) … L’indigné ne voit que d’un seul œil et ne s’indigne que d’un seul cri. L’absence de jugement fait ici bon ménage avec la mauvaise foi … On ne s’indignerait pas de l’indignation si l’on reconnaissait en elle non pas une posture moralisante dérivée propre à se donner bonne conscience, mais une disposition morale originelle … S’élever conte les fautes ou les crimes d’autrui pour mieux goûter sa propre vertu, c’est là le procédé rhétorique de la belle âme ; elle tire son innocence de la culpabilité du criminel et son bonheur de la souffrance de la victime puisqu’elle échappe à l’une comme à l’autre … Descartes affirme que l’indignation est plus affichée chez ceux qui veulent paraître vertueux que chez ceux qui le sont véritablement … Propre aux esprits faible ou chagrins  qui ont peu de considération envers eux-mêmes … afin de complaire aux autres et de retrouver leur bonne conscience dans le regard d’autrui … L’indignation présente le double visage de la vengeance et de la miséricorde … Passés de la révolution permanente à l’indignation permanente, les indignés de profession confondent le salut de l’humanité avec le rachat de leur bonne conscience .. Dés que l’indignation n’obéit plus aux ordres du cœur mais se plie aux décrets de l’entendement, elle trouble sa pureté pour se mettre au service d’une idéologie … La victime doit être la plus lointaine possible afin que la réprobation puisse enjamber la souffrance de l’humanité entière ; et le persécuteur doit être le plus abstrait possible afin que la haine qu’il provoque soit la plus complète possible. » (Jean-François Mattéi – considérations éparses sur l’indignation – De l’indignation

« On pourrait envisager la modernité, sous le regard des victimes, comme un immense concert d‘indignations qui donne prise à un conflit généralisé de revendications. » (Jean-François Mattéi)

« Une telle ‘logique de la pitié’ dispense de penser dans la mesure où elle nous incite à jouer ‘l’émotion contre la raison’ » (Jean-François Mattéi – citant Michel Onfray – à propos d’un incident totalement inventé par la victime, cas de plus en plus fréquent)

« Ce sentiment qui laisse l’âme à nu devant l’outrage, peut, quand il s’exaspère, perdre tout contact avec la mesure …  et, en se voilant d’hypocrisie, ouvrir la voie à toutes les lâchetés. » (Jean-François Mattéi) – D’autant plus aisément que l’indignation est trop souvent déjà l’arme du lâche.

« La dénonciation des camps de concentration des Soviets a été (et est) incomparablement moins pressante que celle des camps nazis … L’horreur ne présente à l’homme qu’un seul profil (celui qui convient aux pouvoirs) – «‘L’amnésie du communisme et l’hypermnésie du nazisme’. » (Jean-François Mattéi – citant Alain Besançon)

« Dés que l’indignation prend la forme d’une accusation publique, portant au général le cas unique dont elle est partie, l’indignation collective appelle inéluctablement la culpabilité collective et, à son terme, la punition collective … ‘Si ce n’est toi, c’est donc ton frère’ … L’adversaire est placé d’emblée dans une catégorie infamante où l’infamie est renforcée par la généralité … La singularité abolie, l’indignation n’est plus qu’un prétexte pour libérer la violence contenue… » (Jean-François Mattéi) – La chasse aux ….istes.

« Le vertige totalitaire qui hante … les indignations collectives qui …. se livrent à des délices de vengeance sur des abstractions idéalisées … Il n’y a pas plus d’indignations unanimes que de culpabilités collectives … Les excès de sensibilité lacrymale, qui font la double économie d’une émotion sincère et d‘une authentique réflexion. » (Jean-François Mattéi)

« Dans les sciences progressistes de l’indignation, dont les lois sont soigneusement codifiées, la rhétorique du ‘Plus-jamais-ça’ autorise ainsi, à peu de frais, tous les ‘morceaux de bravoure’ possibles, tout en procurant, pour un investissement intellectuel minimal, une dose de ‘bonne conscience’, pure et d’une qualité sans égale. Le tout, ce qui n’est pas négligeable, pour une absence à peu près totale de danger à encourir ‘personnellement’ (on songera tout particulièrement, ici, aux merveilleuses processions de pénitents d’avril 20002). » (Jean-Claude Michéa) – Allusion à la fameuse quinzaine anti Le Pen.

« ‘L’anarchiste qui réclame dans une belle indignation le droit, la justice, des droits égaux’. Cette belle indignation lui fait déjà du bien par elle-même … Plaisir de pouvoir injurier … Il y trouve une petite ivresse de puissance … Dans toute plainte il y a une dose raffinée de vengeance, on reproche son malaise, dans certains cas même sa bassesse, comme une injustice, comme un privilège inique, à ceux qui se trouvent dans d’autres conditions. ‘Puisque je suis une canaille, tu devrais en être une aussi’. » (Jean-Claude Michéa – citant Nietzsche) – A l’attention des fameux Indignés.  

« Position de repli … réservée aux cas d’urgence électorale … Lorsque l’écœurement qui s’empare des gens ordinaires devant l’indécence et l’arrogance des élites capitalistes devient trop difficile à disqualifier sur le mode universitaire habituel (déconstruction ironique de la morale et des bons sentiments), il reste possible d’en désamorcer les effets critiques en réinscrivant cette protestation éthique dans le cadre politiquement correct d’une idéologie morale. Le sentiment de colère et d’indignation des classes populaires, sentiment spontané, peut alors tranquillement céder la place à un mot d’ordre citoyen : ‘Indignez-vous !’, voire à une simple posture idéologique génératrice d’une bonne conscience à toute épreuve … Pour professionnaliser un peu plus les sentiments, pourquoi ne pas organiser des fêtes de l’indignation ? (des fêtes de l’écœurement). » (Jean-Claude Michéa)

« Il y a une règle, que nous ne pouvons donner notre charité qu’un peu loin de nous, non tout près. » (Henry de Montherlant)  – Certes, oui. Mais avec cette précision que les charitables officiels, les indignés de profession, les pleureuses médiatiques au chevet des Papous et méprisants de leur concierge se valorisent (à tous les sens du terme) tout en ne donnant rien.     

« Certaines indignations qui sonnent d’autant moins franc qu’elles font chœur. » (Henry de Montherlant)

« Les hystéries collectives qui se prétendent toujours être l’expression d’une juste et vertueuse indignation … laquelle ne peut tenir lieu de pensée. » (Edgar Morin)

« L’indignation sans réflexion ni rationalité conduit à la disqualification d’autrui. Elle est tout enveloppée de morale alors qu’elle n’est le plus souvent qu’un masque de l’immorale colère. » (Edgar Morin)

« Il est très malsain d’avaler les sentiments avec une grande cuiller. » (Robert Musil – évoquant les pleureurs-culpabilisateurs professionnels)

« Nul ne ment autant qu’un homme indigné. » (Nietzsche – Par-delà Bien et Mal

« Lorsque l’anarchiste réclame, dans une belle indignation, le ‘droit’, la ‘justice’, il se trouve sous la pression de sa propre inculture qui ne sait pas comprendre pourquoi au fond il souffre, en quoi il est pauvre ‘en vie’ … il y a en lui un instinct de causalité qui le pousse à raisonner : il faut que ce soit la faute à quelqu’un s’il se trouve mal à l’aise … Cette ‘belle indignation’ lui fait déjà du bien par elle-même. C’est un vrai plaisir pour un pauvre diable de pouvoir injurier, il y trouve une petite ivresse de puissance ? Déjà la plainte, rien que le fait de se plaindre, peut donner à la vie un attrait qui la fait supporter : dans toute plainte il y a une dose raffinée de vengeance … Quelqu’un doit être coupable … celui qui souffre prescrit contre sa souffrance le miel de la vengeance. » (Nietzsche)

« Le spleen de l’égoïste inconscient : le perpétuel imprécateur, le découvreur de péchés inédits. » (George Orwell – sur Carlyle) – Personnages très répandus, et médiatiquement sanctifiés, de nos jours, à l’exemple de feu Stéphane Hessel.

« Le misérisme gauchiste de toujours, où l’on choisit les opprimés en fonction de l’aversion que l’on voue aux oppresseurs … Péguy avait bien vu que ce qui motivait tant de dreyfusards était moins son innocence que la formidable occasion qu’il leur donnait d’agonir d’injures l’Eglise et l’Armée. L’idéologue redresseur de tort est, depuis toujours, moins excité par la misère des victimes que par le profil du bourreau. » (Paul-François Paoli)

« Qui peut encore se permettre le luxe d’être indigné ? Pour être indigné, il faut avoir gardé le sens du digne et de l’indigne, or c’est justement ce sens qui s’est perdu avec la révolution anthropologique en cours … Où se situe la frontière du digne et de l’indigne, du décent et de l’indécent, de l’acceptable et de l’intolérable? » (Paul-François Paoli)

Si la chose choque, ce n’est jamais pour les raisons que l’on trouve après, « on ne trouve ces raisons que parce que cela choque. » (Blaise Pascal)

« Se donner bonne conscience et finalement ne rien changer au réel, si c’était cela le piège de l’indignation ? » (Céline Pina) 

« Mieux que l’approbation de la foule : l’indignation d’un seul honnête homme. » (Sima Quian – cité par Simon Leys) – Bien peu démocrate ce vieux chinois.

« La justice n’est pas là pour satisfaire les professionnels de l’indignation. Toujours les mêmes caractéristiques, hystérie nourrie d’ignorance, mauvaise foi et surtout une inculture juridique et judiciaire consternante. Les aboyeurs ne s’interrogent même pas, il s’agit de brailler et de prendre la pose. Les plus bruyants, ceux qui montent au créneau pour cracher leur venin ne savent rien ni des personnes ni des faits ni des raisons juridiques factuelles et juridiques, les belles âmes qui cancanent à foison sur les plateaux, dans les média et sur les réseaux. » (Florence Rault – à propos d’une décision de justice parfaitement équitable qui a entrainé un torrent d’injures et a même poussé la distinguée politicienne madame Pécresse à déclarer qu’elle la faisait vomir)

« ‘Indignez-vous !’ exhortait Stéphane Hessel, comme on prônerait le whisky à un alcoolique. Notre monde a besoin de tout, sauf d’un surcroît d’indignation … A trop s’exercer, l’indignation devient inoffensive et se  perd dans l’air du temps. » (Olivier Rey) – L’indignation est le jouet inoffensif que les puissants concèdent au troupeau pour qu’il s’amuse et se défoule sans danger. 

« On rentre en indignation comme on rentre en religion. » (Gabriel Robin) – En effet, pour certain(e)s, c’est un passe-temps à temps complet. Pour le gang médiatique c’est une promesse d’audimat renforcé.

« Rares sont ceux avec qui on aurait plaisir à s’indigner. » (Jean Rostand)

« Les horreurs sans nombre qui se produisent quand le paroxysme de l’indignation conduit à exercer des représailles au nom de la justice, et qu’on entre dans le cycle de la vengeance. » (Philip Roth) – Toutes les prétendues Libérations.

« La possibilité de connaître et de juger correctement et du même coup l’habilitation à parler avec les autres et à juger … n’est donnée que par le fait d’avoir partie liée et de participer. » (Carl Schmitt – cité par Karl Kraus) – Aux innombrables donneurs de leçons pérorant dans les média, sur les réseaux…

« La stratégie rentable de l’indignation. La technique des abuseurs publics pour vous refuser la parole, clore tout débat avant qu’il ait commencé, c’est la stratégie de l’indignation. Jouer l’émotion, vous faire taire par des petits cris offusqués afin de se mettre dans la poche, à peu de frais, les âmes simples et généreuses … Petite méthode fasciste qui permet d’appliquer la censure en se donnant des airs de résistant, l’indignation est ‘l’ultima ratio’ des opposants majoritaires, des libertaires liberticides et autres amateurs d’interdits bien-pensants qui, outre l’appel au lynchage… » (Alain Soral)

« L’indignation, si fort en vogue, ne tient pas lieu de lucidité, ni de justice. »  (André Comte-Sponville)

« Le discours moralisateur … le programme plein de promesses et de reproches de tout ce qu’il faudrait changer pour que les choses aillent mieux … la liste, jamais exhaustive, énoncée sur le mode ‘militant indigné’ des bouleversements à opérer d’urgence. » (Martin Steffens)

« Si Dieu n’existait pas, si le chaos était roi de tout, tu ne t’indignerais pas. » (Gustave Thibon)

« Pour 1.000 indignés il n’existe qu’un seul être vraiment digne, et encore. » (Henri David Thoreau)

« L’indignation est une forme honorifique de l’abdication. » (Raoul Vaneigem)

« Que chaque renard prenne soin de sa propre queue. » (proverbe)    

« Je m’indigne, donc je suis. » (?)

« Pour s’indigner, il convient d’abord d’être digne. » (?)

« Source d’horreurs : quand le débordement de l’indignation mène à  exercer des représailles sous couvert de justice, c’est-à-dire à pratiquer des vengeances sans fin. » (?)

« Pas de problèmes, pas de questions, pas de réflexion. Seulement des scandales. » (?)

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