265,1 – Envie, Jalousie

– Sujets tabous, aussi bien dans la conversation quotidienne que dans la recherche scientifique.

– L’envie porte sur les choses, indirectement sur les personnes qui en jouissent. La jalousie porte sur les personnes, leurs statuts, leurs qualités, la préférence qu’elles suscitent.

– Sans envie, institutionnalisé même, pas d’achat compulsif et irrationnel, moins de consommation, réduction de l’accroissement du Capital, ce qui signifie chute de la sacro-sainte Croissance, seule divinité de nos politiques. On voit donc l’importance pour les publicistes et le système médiatique aux ordres de promouvoir ce qui n’est rien d’autre qu’un vice (l’envie), quitte à favoriser ainsi directement l’accroissement de la délinquance ; et en utilisant fréquemment le levier de la jalousie éprouvée pour des personnes-images.

– Sans envie, institutionnalisé même, pas d’achat compulsif et irrationnel, moins de consommation, réduction de l’accroissement du Capital, ce qui signifie chute de la sacro-sainte Croissance, seule divinité de nos politiques. On voit donc l’importance pour les publicistes et le système médiatique aux ordres de promouvoir ce qui n’est rien d’autre qu’un vice (l’envie), quitte à favoriser ainsi directement l’accroissement de la délinquance.

– Néanmoins, l’envie peut être  un moteur  de l’ambition et du .progrès personnel.

-France, pays de l’envie.

– « ‘Il vaut mieux faire pitié qu’envie’. Ce renversement du dicton populaire est la maxime de notre époque. » (Elisabeth Lévy)

– « La jalousie n’est déclenchée que par la menace de transfert d’un bien, par sa  mutation, mais le bien lui-même n’est pas remis en question. L’envie, elle, refuse souvent de penser à la valeur intrinsèque du bien considéré … Avec la jalousie, le sujet estime avoir un droit de propriété sur le bien en question , il peut revendiquer légitimement le bien en question ; ; l’envie, elle, fait peu de cas du droit :elle trouve désirable le bien qui lui est refusé , ou tout simplement, l’envieux ne supporte pas qu’un autre profite du bien envié. …Les sentiments du jaloux tournent autour du possesseur (il m’a dérobé…), ceux de l’envieux sont plus ou moins en rapport avec la possession (on peut envier la célébrité…). » (Helmut Schoeck)

« L’envie porte sur ce qu’on n’a pas, la jalousie sur ce qu’on a ou ce qu’on partage … Une midinette peut envier une vedette de cinéma ; seules les actrices peuvent en être jalouses … Le positif dans la jalousie est l’attachement à ce qu’on a … l’envie, au contraire, est un sentiment presque exclusivement négatif. » (André Comte-Sponville)

On pourra voir aussi à la rubrique Ressentiment, 125, 2   

Des rapprochements existent entre Besoins, Désirs et Envies, etc. ; d’où considérer également la rubrique Désirs, Besoins, 200,1 

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« On envie ce que l’on n’a pas, mais seulement si on pense ne pas être capable de l’obtenir par nous-même. » (Christophe André)

« Qui donc a jamais douté que les misérables rêvent de violence, et que l’opprimé ‘rêve en permanence’ de s’installer à la place de l’oppresseur, que le pauvre rêve d’avoir ce que possède le riche, que le persécuté rêve ‘d’abandonner son rôle de gibier pour prendre celui de chasseur’, et rêve en fin de compte du royaume où ‘les derniers seront les premiers et les premiers seront les derniers’. » (Hannah Arendt – citant Frantz Fanon)

« L’envie est, de toutes les passions humaines, la plus constante. » (Francis Bacon)

« L’envie naît plus entre égaux qu’entre inégaux. » (Jean Baechler) – Les sociétés modernes seront dynamitées par l’envie féroce.

« Seule l’envie ne semble pas pouvoir être tournée au bien, cette passion qui se nourrit du regret des avantages d’autrui et du souhait qu’il les perde. La malédiction de l’envie vient de ce qu’elle est entièrement négative et de ce que l’on ne peut rien bâtir de positif avec du négatif pur. Cette négativité est si intégrale que l’envie punit l’envieux de son envie : il n’y a pas d’envieux joyeux ni heureux. » (Jean Baechler)

« La jalousie est démocratique. Elle est aveugle. La chaumière envie la maison bourgeoise, la maison bourgeoise envie le château. C’est le mécanisme de tous les progrès à gauche. » (Jacques Bainville)

« En proclamant l’égalité de tous, on a proclamé la déclaration des droits de l’Envie. » (Balzac)

« Les Européens s’ennuient à périr et n’ont de cesse, à seule fin d’échapper à ce mortel ennui européen, de se mêler à tout instant et en tout lieu, des affaires de e qu’on appelle le ‘tiers-monde’. Ce côté missionnaire… » (Thomas Benrhard) – Et aussi pour se faire valoir, hypocritement. 

« ‘L’envie est de tous les péchés le pire puisqu’il ne donne aucun plaisir intrinsèque, au contraire, de la luxure, de la gourmandise, de la paresse, et même de l’orgueil … L’envie vous installe dans le mal pur, désintéressé, sans plaisir… » (Alain Besançon)

« Mieux vaut faire envie que pitié, dit-on. – Il est bien naturel de préférer la gloire humaine qui rapporte de l’argent et qui fait courir les jolies femmes, à la gloire de Dieu, qui ne procure, on l’a beaucoup vu, que la misère et l’humiliation. Nous garderons la lumineuse pitié pour nous-mêmes, considérant avec sagesse qu’il vaut mieux tenir que courir… » (Léon Bloy – Exégèse des lieux communs – 2, XXVIII)

« Si la jalousie, l’envie et la haine pouvaient être éliminés de l’univers, le socialisme disparaitrait le même jour. » (Gustave Le Bon) – Il y a quand même quelques autres raisons moins méprisables, au moins chez certains jeunes socialistes et à la base. Mais elles disparaissent si vite.

« Nous n’envions que ceux qui nous paraissent semblables  à nous … que les membres de notre groupe de référence … que les gens que nous considérons comme nos égaux. » (Alain de Botton) 

 « Comment expliquer que A envie la 504 de son voisin de droite mais non la Jaguar de son voisin de gauche, si on ne sait pas que A peut espérer se hisser au niveau de son voisin de droite mais non à celui de son voisin de gauche ? … On ne désire que ce qu’on peut raisonnablement obtenir … c’est la notion de ‘plausibilité’ (‘feasibility’) … ainsi que la notion de groupe de référence (groupe qu’on peut envier parce qu’on s’en sent proche sans tout à fait en faire partie ; on n’envie pas des gens appartenant à des groupes très distincts et lointains) … Ce qui éclaire la célèbre loi de Tocqueville selon laquelle l’amélioration du sort de tous peut augmenter plutôt que diminuer le mécontentement général. ‘Lorsque la prospérité croît … le mécontentement public s’aigrit ; la haine contre toutes les institutions anciennes va croissant … On dirait que les Français ont trouvé leur position d’autant plus insupportable qu’elle devenait meilleure’ … Tout se passe comme si, à une mobilité ascendante objectivement plus grande, correspondait une satisfaction globale plus faible … La loi de frustration relative de Durkheim selon laquelle la satisfaction éprouvée par l’individu dépend moins de l’abondance des biens mis à disposition par la collectivité que de l’aptitude de cette dernière à inspirer à l’individu des désirs bornés à ce qu’il peut espérer obtenir … Le niveau de frustration global n’est pas nécessairement décroissant avec les espoirs de gain : augmenter les chances de promotion de chacun peut avoir pour effet d’augmenter les attentes de promotion encore plus rapidement … Lorsque les différences de ressources entre les individus s’atténuent, on observe une augmentation des cas de frustration querelleuse. » (Raymond Boudon – simplifié et citant Alexis de Tocqueville et Emile Durkheim) – La société de consommation et son alliée la démagogie politique créatrices d’envie débridée. Les révolutions naissent aussi souvent à partir de l’abondance relative que de la misère (1789, Le bouleversement de 1968…).

 « Il importe de briser l’idée sotte, mais répandue, qui fait que l’on identifie (positivement ou négativement) le péché au plaisir … La réduction du péché au plaisir, et au plaisir sexuel, est un phénomène datable. Il ne vient pas du christianisme (qui ne fait guère là que de reprendre les lieux communs philosophiques ou médicaux de l‘Antiquité classique ou du monde médiéval : Dante place le péché de la chair, comme le moins grave de tous, au tout début de son ‘Enfer’.) Ladite réduction coïncide avec la rationalisation de l’esprit occidental lié à l’économie capitaliste et aux Lumières : il fallait promouvoir le sérieux du travail, l’épargne, ne pas mettre sa santé en péril .… La réduction du péché à la sexualité est un des signes de l’effrayant manque d’imagination de l’homme moderne : ne pas trouver de péché plus intéressant que les excès sexuels me semble le symptôme d’une grave platitude d’esprit … Le péché ne coïncide nullement avec le plaisir par rapport auquel il est indifférent … Il est des péchés dont l’exercice même est un déplaisir, le meilleur exemple est sans doute le péché d’envie, lequel n’a rien de subalterne (il figure dans les sept péchés capitaux). » (Rémi Brague)

« Légitimation des envies les plus folles … On est plus tourmenté par les biens qu’on ne détient pas encore, les droits dont nous devrions bénéficier que par ceux que nous possédons. Ce qui est n’est jamais assez, le trop est encore trop peu. » (Pascal Bruckner –  la démocratie,  régime de la plainte autorisée)

« Pas de pire dressage que celui que s’infligent les individus en compétition lorsqu’ils aspirent collectivement aux mêmes buts. L’envie, le ressentiment, la jalousie et la haine impuissante, avant d’être de vilains défauts de la nature humaine sont les conséquences directes de la révolution démocratique. » (Pascal Bruckner) 

« La jalousie de l’amour n’est qu’un sentiment exacerbé de propriété. » (Paul Brulat)

« L’envie est le ver qui s’attaque aux racines des démocraties. » (Paul Brulat)

« Plus le désir porte à l’imitation des dominants et plus vacille ce qui contribuait à nourrir le sentiment d’une identité propre et qui permettait de tenir en espérant les égaler. » (Alain Caillé) – L’envie est destructeur d’identité.

« L’envie, véritable cancer des sociétés. » (Albert Camus)

« Les peuples modernes peuvent se sauver par le développement des forts. Non par la protection des faibles. » (Alexis Carrel) – La protection des faibles n’est nullement à exclure à condition que la castration des forts n’en soit pas la contrepartie ; comme c’est actuellement le cas dans le régime d’envie généralisé.

« L’égalité, notre passion naturelle, est magnifique dans les grands cœurs, mais, pour les âmes étroites, c’est tout simplement de l’envie. » (Chateaubriand) – C’est évident. Il suffit d’observer sans se laisser prendre aux discours.

« Démocratiser les aspirations …. sans donner les moyens qui vont avec est une source majeure de déstabilisation sociale … Proposer un modèle d’émancipation sans les moyens de l’assumer, produit au sein des classes populaires une déstabilisation profonde, voire génère des envies sans assouvissement possible, ou de profonds ressentiments. » (Louis Chauvel) – Mais ces frustrations qu’ils imposent font jouir les membres tordus du gang dominant.

« Jamais un envieux ne pardonne au mérite. » (Pierre Corneille)

« Il n’y a aucun vice qui nuise tant à la félicité des hommes que celui de l’envie. Car outre que ceux qui en sont entachés s’affligent eux-mêmes, ils troublent de tout leur pouvoir le plaisir des autres. » (Descartes – Les passions de l’âme)

« L’envie : la seule passion qui ne procure aucune jouissance. » (Louis Dumur)

« On est jaloux par tempérament, on est envieux par vocation. » (Louis Dumur)

« On ne se décourage jamais d’être envieux ; surtout lorsqu’on réussit. » (Louis Dumur)

« L’envie est tellement illogique qu’elle s’attaque de préférence à ceux dont les succès nous seraient les plus utiles. » (Louis Dumur)

« L’envie est une force universelle. De son pouvoir destructeur de l’ordre social, toutes les sociétés archaïques et traditionnelles ont cherché à se protéger … Cacher sa bonne fortune, la déprécier, la partager symboliquement ou réellement ; la méthode de ‘l’encapsulation’, c’est-à-dire la division de la société en groupes étanches, castes, ordres ou classes, entre lesquels on ne se compare pas, on ne jette pas de regard oblique. » (Jean-Pierre Dupuy)

« Ce serait faire preuve d’une naïveté inadmissible chez un adulte normalement constitué que de prendre le discours de l’envieux au pied de la lettre … L’envieux est persuadé de sa propre insignifiance, il ne doute pas un instant que l’Autre mérite sa bonne fortune … C’est penser que l’autre mérite sa bonne fortune qui déclenche les tourments de l’envie … Le perdant est le premier à penser au fond de lui-même que son échec n’est que justice … C’est de sa propre envie qu’il convient de se méfier. L’agression ici n’est plus extérieure … elle est purement intérieure, c’est l’effondrement de l’estime de soi, la certitude de sa radicale infériorité, la perte irrémédiable de l’autonomie. De cela il n’est pas possible de convenir, ni vis-à-vis des autres, ni vis-à-vis de soi-même.  L’envie ne s’exprime jamais ouvertement.» (Jean-Pierre Dupuy)  – Suite de considérations éparses sur l’envie.

« Admettre son envie, ce serait admettre son infériorité. ‘L’envie se traduit simultanément par le désir de détruire l’être que l’on envie et par un profond mépris de soi-même’. » (Jean-Pierre Dupuy – citant un psychanalyste)

« La peur de sa propre envie, c’est la peur de s’avouer à soi-même ou de laisser voir que l’on éprouve de l’envie envers un autre … L’envieux est prêt à attribuer ses réactions à n’importe quel autre motif, même peu honorable … Attribuer son infortune à n’importe quelle cause située en dehors de la sphère de contrôle … Les grandes idéologies … du XX° siècle sur l’exploitation de l’homme par l’homme ont pu fournir de telles interprétations. » (Jean-Pierre Dupuy)

« La réprobation morale propre aux sociétés puritaines n’est souvent, affirme Foster, qu’une envie refoulée : en s’attachant rigidement au respect de normes et de règles définies strictement pour justifier son indignation, on cache une envie que l’on a peur de s’avouer et honte de reconnaître envers l’autre qui goûte aux plaisirs interdits … Dans les sociétés protestantes, en particulier, c’est sous la forme de l’indignation morale que s’exprime l’envie. » (Jean-Pierre Dupuy) – Et, évidemment, nous les copions avec notre servilité habituelle.

« Au bras d’un grand soldat brillant,

« Colombine s’en va, moqueuse,

« Et Pierrot, à l’allure honteuse,

« Regarde le couple, riant. » (Paul Eluard – Pierrot trompé)

« Le jaloux cherche moins à posséder sa victime qu’à la priver de ce qu’elle a … Son but n’est pas de savoir, mais de soupçonner, de dévorer, de réduire l’autre à néant. » (Raphaël Enthoven) – Particulièrement vrai en matière fiscale quand on réclame l’imposition d’autrui (exemple : l’ISF)

 « Jalousie. – Toujours suivi de ‘effrénée’. Passion terrible. » (Flaubert – Dictionnaire des idées reçues)

« Assez de bien pour en donner et pas assez pour faire envie. » (Florian)

« Une grenouille vit un bœuf – Envieuse s’étend, et s’enfle, et se travaille – Pour égaler l’animal en grosseur – Le monde est plein de gens qui ne sont pas plus sages – Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs – Tout petit prince a des ambassadeurs -Tout marquis veut avoir des pages. » (La Fontaine – La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf)

« D’où vient que personne en la vie – N’est satisfait de son état ? – Tel voudrait bien être soldat – A qui le soldat porte envie. » (La Fontaine – Le loup et le renard)

« Chacun brille d’un faux éclat aux yeux de quelque autre ; chacun est envié pendant qu’il est lui-même envieux. » (Fontenelle)

« Si tant est qu’on ne peut être soi-même le privilégié, qu’au moins aucun de tous les autres ne soit privilégié. » (Sigmund Freud)

« En période d’expansion, on ne se soucie guère de savoir que d’autres … ont plus d’argent, ou même beaucoup plus. Pour être pertinente une comparaison doit être établie non pas vis-à-vis de ce qu’ont les autres, mais vis-à-vis de la position économique du sujet ; c’est l’amélioration par rapport à la situation précédente qui compte. C’est lorsque la comparaison devient défavorable (chômage, crise…) que l’on se prend à songer au sort plus enviable des favorisés. L’inégalité redevient une question importante. » (John Galbraith – L’ère de l’opulence)

« L’envie, c’est la revanche de l’orgueil bafoué. Elle renvoie au sujet sa médiocrité, sa bassesse, son impuissance, sa mauvaiseté. Contrairement à l’ambitieux qui … mobilise toute son énergie afin de s’accaparer de ce qu’il désire, l’envieux, incapable de l’atteindre, mobilise toute son énergie à détruire l’objet de sa convoitise … L’envie combine la colère de ne pas devenir ce que l’on voudrait être, le sentiment de dévalorisation éprouvé face à celui qui l’incarne, et le dégoût de soi, la honte de se reconnaître impuissant et envieux, d’être habité par des sentiments aussi détestables. » (Vincent de Gaulejac)

« L’envie haineuse ne part pas de l’objet de la rivalité. Elle part du rival et arrive au rival. » (René Girard)

« L’envie est de tous les péchés le plus répandu et le plus difficile à avouer. » (René Girard)

« Dans la logique du désir objectal, il devrait y avoir moins d’envie, moins  de rivalités dans les sociétés égalitaires que dans les autres. Or, clairement, tel n’est pas le cas ! Nous jugeons ‘arbitraire’ toute différence stable, mais nous ne supportons pas l’homogénéité, nous consacrons tous nos efforts à nous distinguer les  uns des autres. » (René Girard)

« Les éclats bruyants de leurs aboiements prouvent seulement que nous sommes à cheval. » (Goethe – Faust)

« De sa main glacée l’envie silencieuse sépare les cœurs les plus nobles. » (Goethe)

« L’envie  a d’étranges yeux : elle découvre de si loin les choses, qu’elle semble plutôt les pressentir que les apercevoir. » (Baltasar Gracian)

« C’est une chose étrange que l’on ne voie jamais dans autrui que des biens sans mélange de maux, et qu’au contraire on ne voie dans soi-même que des maux sans aucun bien. » (Baltasar Gracian)

« L’homme libre n’est point envieux ; il admet volontiers ce qui est grand, et se réjouit que cela puisse exister. » (Hegel)

« Sous la bannière de l’envie marchent la haine, la calomnie et la trahison. » (Helvétius) 

« Fille de la beauté, prends garde à l’envie ! L’envie  a provoqué la chute des anges. » (J. G. Herder)

« L’envieux maigrit de l’embonpoint des autres. » (Horace)

« Il vaut mieux que cela aille mal pour tout le monde. Ou même très mal. … Parce que l’on est jaloux. » (Eugène Ionesco – sur l’égalité)

« Les besoins ne sont pas infinis. Au-delà d’un certain niveau, c’est le jeu social qui les stimule … Chaque couche cherche à imiter la couche supérieure. » (Hervé Kempf – s’inspirant de Thorstein Veblen, Théorie de la classe de loisir – sur la tendance à rivaliser, à se comparer à autrui, à se distinguer d’autrui…) – « Toute classe est mue par l’envie et rivalise avec la classe qui lui est immédiatement supérieure dans l’échelle sociale, alors qu’elle ne cherche guère à se comparer à ses inférieures, ni à celles qui la surpassent de très loin. » (Thorstein Veblen – La Théorie de la classe de loisir est explicitée à la fin de la rubrique  Hiérarchie, Anarchie, 395, 1 )…

« L‘envie est une admiration qui se dissimule. L’admirateur qui sent l’impossibilité du bonheur en cédant à son admiration, prend le parti d’envier. Il tient alors un autre langage où maintenant ce qu’au fond il admire ne compte plus, n’est que bêtise insipide, qu’étrangeté, extravagance. L’admiration es un abandon heureux de soi-même, l’envie une revendication malheureuse du moi. » (Kierkegaard)

« L’envie reçoit plus volontiers les impressions de la calomnie que celles de la vérité. » (August Von Kotzebue)

« La jalousie mobilise entièrement l’esprit. Celui qui est en proie à la jalousie ignore l’ennui. » (Milan Kundera)

« Non seulement les nouveaux mouvements sociaux, le féminisme, les droits des homosexuels, le droit au minimum social, l’agitation contre les discriminations, n’ont rien en commun mais leur exigence vise à être inclus dans la structure dominante plutôt qu’à une transformation révolutionnaire des rapports sociaux. » (Christopher Lasch – cité par Alain de Benoist)

« L’envie décèle la médiocrité ; les grands caractères ne connaissent que des rivalités. » (duc de Lévis)

« Quand on a discrédité tout ce qui dit ‘c’est bien’, il ne reste plus que ‘j’ai envie’. » (C. S. Lewis)

« Envie et jalousie sont cousines germaines. La première est une tristesse liée à ce que les autres ont et que nous ne possédons pas. La seconde est liée à ce qu’ils sont et que nous ne sommes pas. » (Juliette Levivier)

« La jalousie dure plus longtemps que l’amour. C’est que l’amour-propre est le dernier qui s’en va. » (prince de Ligne)

« La consommation en-vue-de-l’autre recule au bénéfice d’une consommation-pour-soi ; la consommation individualiste émotionnelle a pris la relève de la consommation ostentatoire de classe … L’envie suscitée par les biens non marchands (amour, beauté, prestige, réussite, pouvoir) demeure, celle provoquée par les biens matériels décline. » (Gilles Lipovetsky) – C’était exact, il y a 10,15 ans. Qu’en sera-t-il dés demain ?

« Ce ne sont plus tant les différences de richesse qui provoquent les sentiments malveillants que les catégories de biens dont la caractéristique est précisément de ne pouvoir être achetés. Prestige, célébrité, talent, victoire, promotion professionnelle, beauté, séduction, conquête amoureuse, bonheur d’être aimé, voilà ce qui inspire l’envie dans les temps hypermodernes … Ce sont les biens qui ne s’achètent pas qui nourrissent les passions tristes … Nous voici dans une époque postmatérialiste ou existentielle … Ce qui n’empêche nullement la reviviscence des protestations et des critiques radicales du néo-libéralisme : simplement elles se nourrissent davantage d’indignation morale que d’indignation-envie. » (Gilles Lipovetsky) – Belle naïveté – Simpliste, comme si les biens cités ne s’achetaient pas ! – La morale ne fait fonction que de masque à la vulgarité de l’antique envie matériel, surtout de la part de gens totalement amoraux et même pervertis, les bien-pensants donneurs de leçons – L’auteur, souvent pertinent, se révèle parfois tel l’optimiste béat soumis à la doxa de son temps.

« Il faut toujours que vous partagiez votre confiance entre plusieurs, la jalousie sert souvent de frein à l’ambition des autres. » (Louis XIV au dauphin)

« On a réussi à rendre intolérable l’intervalle entre l’idéal et le réel. » (Karl Marx)

« La jalousie vient de cette insoutenable vision du plaisir qu’une créature aimée reçoit d’un autre et lui prodigue. » (François Mauriac)

 « Le désir de distinction n’opère pas seulement entre classes populaires et classes dirigeantes, mais de proche en proche dans la stratification sociale (dynamique d’imitation et alignement sur les modèles de la catégorie immédiatement supérieure) … L’envie qui, au lieu de se propager sagement de bas en haut en fonction d’une ostentation imposée de haut en bas, part dans tous les sens et toutes les directions … N’étant personne, l’individu n’a d’autre ressource que de s’affirmer comme riche, inoccupé, heureux, et surtout visible … Moins l’individu a de substance, plus il a besoin d’ostentation et d’authenticité pour exister, pus il a besoin de sensations pour se sentir exister.» (Yves Michaud – traitant du luxe)

« Les envieux mourront, mais jamais l’envie. » (Molière)

« Puisque nous ne pouvons y atteindre, vengeons-nous-en à en médire. » (Montaigne) – Pensant à d’autres sans doute, car ce n’était guère son genre.

« L’envie, cette lâcheté : se sentir découragé du bonheur des autres et accablé de leur fortune. » (Montesquieu)

« Tout ce que je fais, je le fais vite et mal, par peur de cesser trop tôt d’en avoir envie. » (Paul Morand – L’homme pressé)

« Le besoin est une nécessité, quelque chose à quoi on ne peut échapper, il est parfois très stressant comme le besoin de faire pipi, parfois moins comme le besoin d’avoir des lunettes … mais nous avons envie de penser que ce dont nous avons envie et qui n’est pas nécessaire est un besoin … Ce que nous sommes prêts à faire passer pour un besoin relève plutôt de ce qu’il est plus juste d’appeler une envie … qui ne vient pas d’une vraie nécessité … avoir quelque chose qui est proposé par les magasins, les copains, l’image … Le souhait ou le vœu, c’est l’aspiration à quelque chose de lointain … Quels sont encore les mots qui disent la tension vers quelque chose ? Le mot ‘vouloir’ qui indique la tension (encore plus que le besoin, l’envie, le souhait…) en même temps que l’idée que ça va s’exécuter parce que je le veux, que la force de ma volonté va faire arriver ce que je veux … en faisant ce qu’il faut pour … A des mots différents correspondent des réalités différentes … Désirer c’est avant tout une disposition de moi plutôt que moi dans un rapport avec quelque chose que je voudrais avoir. Quand je désire, je ne cherche pas à avoir, je suis dans une sorte d’élan … C’est désirer qu’il se passe quelque chose et non pas avoir quelque chose … Etat, disposition, qui est toujours en mouvement, élan, tension … non pas pour avoir quelque chose, mais pour être tout simplement quelqu’un … Ce n’est jamais quelque chose dont on peut dire : ‘ça va, c’est fini, je l’ai’ … Si le désir nomme plutôt l’élan, la passion, elle, nomme plutôt l’intensité dans le désir. » (Jean-Luc Nancy – considérations éparses sur des mots)

« On ne comprend rien à l’envie haineuse si on part de l’objet de la rivalité. Le point de départ de l’analyse, et aussi son point d’aboutissement, doit être le rival, le médiateur. » (Christine Orsini – reprenant les thèses de René Girard) – Le désir est triangulaire.

« La promiscuité démocratique diffuse l’envie comme on le vérifie aujourd’hui avec la banalisation du lynchage médiatique sur les réseaux sociaux, où chacun exprime ses sentiments et ses frustrations à volo. » (Paul-François Paoli) 

« Envier, c’est se reconnaître inférieur. » (Pline le jeune)

« L’émulation est une contention morale  … La jalousie de nos ennemis est un contrepoids à notre négligence. » (Plutarque)

« Cette haine amère qui naît toujours au cœur de l’envieux devant le spectacle d’une excellence à laquelle il ne saurait prétendre. » (E. A. Poe)

« La jalousie n’est souvent qu’un inquiet besoin de tyrannie appliquée aux choses de l’amour. » (Marcel Proust)

« Il est étonnant comme la jalousie qui passe son temps à faire des petites suppositions dans le faux a peu d’imagination quand il s’agit de découvrir le vrai. » (Marcel Proust)

« C’est un des pouvoirs de la jalousie de nous découvrir combien la réalité des faits extérieurs et les sentiments de l’âme sont quelque chose d’inconnu qui prête à mille suppositions. Nous croyons savoir exactement les choses et ce que pensent les gens, pour la simple raison que nous ne nous en soucions pas. Mais dès que nous avons le désir de savoir, comme a le jaloux, alors c’est un vertigineux  kaléidoscope où nous ne distinguons plus rien. »  » (Marcel Proust – cité par Alain de Botton)

« Personne ne renverse plus facilement celui qui monte que celui qui descend, et celui qui s’élève que celui qui tombe. » (Francisco de Quevedo)

« La jalousie d’autrui a, du moins parfois, cet avantage de nous faire découvrir notre propre bonheur. » (Charles Régismanset)

« Les gens envieux sont des gens sans imagination. Il y a tellement de biens à souhaiter en dehors de ceux du prochain. » (Charles Régismanset)

« Le peuple est bien plus indulgent pour les grands que pour les gens de classe moyenne instruits et éclairés … Les grands sont placés trop hauts pour qu’ils leur portent envie ; la jalousie n’a lieu qu’entre égaux. » (Ernest Renan) – Ce qui porte les grands d’aujourd’hui qui n’ont plus ni dignité, ni honneur, ni valeur, à en abuser.

« Envieux par instants, je n’ai jamais eu la patience d’être ambitieux. » (Jules Renard)

 « Les hommes sont avides d’une forme de reconnaissance qui applaudit non leurs actions mais leurs caractéristiques personnelles. Ils ne souhaitent plus tant à être estimés (comme jadis) qu’admirés … Ils veulent être enviés plutôt que respectés. » (Olivier Rey)

« L’envie qui parle et qui crie est toujours maladroite ; c’est l’envie qui se tait qu’on doit craindre. » (Rivarol)

« L’envieux ne varie pas. L’ambition  dicte moins de lois dans les Etats monarchiques que l’envie dans les démocratiques. » (Rivarol)

« La véritable marque d’être né avec de grandes qualités, c’est d’être né sans envie. » (La Rochefoucauld)

« L’envie est plus irréconciliable que la haine. » (La Rochefoucauld)

« La jalousie est conforme à la raison, car elle veille sur un objet que nous possédons, mais craignons de perdre. L’envie, elle, est une rage qui rend insupportable la pensée de tout bien arrivant à autrui. » (La Rochefoucauld)

« L’envie est une passion timide et honteuse que l’on n’ose jamais avouer. » (La Rochefoucauld)

« Notre envie dure plus longtemps que le bonheur de ceux que nous envions. » (La Rochefoucauld)   

« ‘Le désir s’accroît quand l’effet se recule’ (Corneille – Polyeucte). C’est le propre du désir habituel des hommes que de s’accroître à proportion que s’éloigne l’objet convoité. » (Clément Rosset) – Un auditeur sur deux entendant ‘et le désir s’accroît quand les fesses reculent’ .

« Nous passons notre temps à envier des gens que nous ne voudrions pas être. » (Jean Rostand)

« Être envieux c’est en réalité n’avoir aucun désir assez fort. On envie quand on n’a envie de rien. » (Claude Roy)

« L’envie ne naît que si l’effort requis pour mettre en œuvre les moyens d’acquisition échoue en laissant un sentiment d’impuissance. » (Max Scheler)

« Ce sont le plus souvent des traits de caractère innés … qui provoquent l’envie propre au ressentiment : on envie plus fortement la beauté, la noblesse de la race, c’est-à-dire des qualités congénitales, que la richesse, le rang, la célébrité ou les honneurs. De cette catégorie d’envie relève spécialement ce phénomène d’illusion qu’est la dévalorisation des valeurs positives. » (Max Scheler)

« Au moyen âge le paysan ne se compare pas au seigneur féodal, ou l’artisan au chevalier. Tout au plus se compare-t-il à un paysan plus riche … Chacun demeure dans les limites de son état … Chacun se sent établi dans un état et c’est à l’intérieur de cet état que s’exerce le sentiment de ce que l’on vaut et de ce que l’on veut … Dans un système de concurrence, au contraire, l’être des devoirs réels, l’idée de leur valeur est en fonction de la prétention de chacun à être et à valoir plus que n’importe qui. L’état que l’on se trouve occuper n’est plus qu’une étape dans la ruée universelle. » (Max Scheler)

« Contrairement au jaloux, l’envieux n’est pas le perdant d’une lutte pour un bien, un pouvoir … Le jaloux estime avoir un droit de propriété  sur le bien en question, l’’envie, elle, fait peu de cas du droit … Le jaloux  ne se  sent pas, lui, inférieur à son adversaire » (Helmut Schoeck)

« Si l’égalité devant la loi est l’élément vital de la démocratie, elle en est aussi l’écueil. Car elle favorise l’éclosion de ce fanatisme et de ce sentiment d’envie qui exige que tous les hommes soient traités de la même façon dans tous les domaines de l’existence. » (Helmut Schoeck)

« Kant fait entrer l’ingratitude dans ‘la détestable famille de l’envie’. » (Helmut Schoeck)

« On peut se demander si le principe d’égalité n’est pas en premier lieu l’expression de l’envie de tous contre tous, le produit du ressentiment qui nous fait ânonner que l’injustice sociale est le pire des maux’. » (Helmut Schoeck) – « Si l’égalité devant la loi est l’élément vital de la démocratie, elle en est aussi l’écueil. Car elle favorise l’éclosion de ce fanatisme et de ce sentiment d’envie qui exige que tous les hommes soient traités de la même façon dans tous les domaines de l’existence. » (Roland Jaccard)

« Louer le mal, faire silence sur le bien ; méthodes employées par l’envie. » (Schopenhauer)

« L’envie est l’ombre de la gloire et la suit partout. » (Louis-Philippe de Ségur)

« Les sentiments de l’envieux tournent autour de l’objet possédé, ceux du jaloux autour de celui qui le possède. » (Georg Simmel)

 « Un homme peut envier un autre homme de posséder une femme ; mais seul celui qui pense avoir un droit quelconque de la posséder sera jaloux. » (Georg Simmel)

 « Le désir envieux d’un objet, non pas parce qu’il est particulièrement désirable pour le sujet, mais parce que l’autre le possède. » (Georg Simmel) 

« L’aversion pour l’argent des autres, c’est ce qu’on appelle l’envie, dont Tocqueville disait qu’elle est la grande passion démocratique. » (André Comte-Sponville)

« La vanité porte ses regards vers les degrés inférieurs, voilà sa jouissance ; l’envie, au contraire dirige les siens vers le sommet de l’échelle sociale, c’est ce qui fait son tourment. » (baron de Stassart)

« La compétition et l’envie entrent dans nos convoitises pour une plus large part que le désir. » (Gustave Thibon)

« La seule joie possible pour l’envieux, c’est de nous sentir aussi vides, aussi pauvres que lui. » (Gustave Thibon) 

« L’envie désavoue ce qu’elle ne voit que trop clairement. Elle a, dit Victor Hugo, ‘l’éblouissement douloureux’. » (Gustave Thibon)

« Dans une société égalitaire, le sentiment dominant devient l’envie …  L’envie,  la grande passion démocratique !  » (Alexis de Tocqueville)

 « Idéologie de l’envie … Si l’on considère comme une injustice l’existence d’une personne qui réussit mieux que soi et que l’on en fait une philosophie politique, on comprend vite l’enchaînement des idées qui conduit à l’abondance des charniers. C’est aussi forcément une idéologie de la dénonciation. Au nom du bien égalitaire, elle est permise et recommandée. » (Philippe Val) – Voilà où nous en sommes.

« L‘esprit condamne tout ce qu’il n’envie pas. » (Paul Valéry)

« Monomanie de l’égalité : derrière cette recherche de l’égalité d’autres passions ou instincts sont à l’œuvre : l’envie, la jalousie, la haine, le ressentiment qui, pour s’assouvir, se colorent d’apparences trompeuses : justice sociale, droits pour tous, égalité réelle, égalité des chances. Tout cela aboutit à un monde terne et triste à mourir, celui de l’égalité par défaut … d’où la guerre menée sans merci contre toutes les discriminations, y compris les plus légitimes. Ce monde d’envie généralisée a un inconvénient majeur : il est impossible de dégager un bien commun dans une société d’envieux. L’envie est une passion triste, négative, mortifère et toujours insatisfaite. » (Jean-Philippe Vincent, simplifié – évoquant l’une des pathologies françaises telles qu’énoncées dés 1790 par Edmund Burke dans ses Réflexions sur la révolution en France ; toujours actuelles et même en pire)

« Par Thomas Cook, on passe de Baltasar Gracian à Jacques Séguéla. L’élévation personnelle, que Gracian nommait le ‘rehaut’, cède le pas à la compétition statutaire, et avec elle, sort des eaux cet immense continent que Stendhal appelait la ‘haine impuissante’, c’est-à-dire le désir constant d’avoir la même gamelle que son voisin, ce qui suppose de l’observer en permanence avec envie. » (Marin de Viry – à propos du tourisme)

« N’ayant jamais pu réussir dans le monde, il se vengeait par en médire. » (Voltaire – Zadig)

« Le potentiel destructeur de l’envie se trouve au fondement de la distinction de Rousseau entre l’égoïsme ou ‘l’amour de soi’ (lequel est naturel) et ‘l’amour-propre’, la préférence perverse de soi-même aux autres, en vertu de laquelle l’individu consacre ses efforts non pas sur la réalisation d’un objectif mais sur la destruction de l’obstacle qui l’en sépare … On s’occupe plus de l’obstacle pour l’écarter que de l’objet pour l’atteindre … Jouissance purement négative qui ne cherche plus à se satisfaire pour son propre bien, mais seulement par le mal d’autrui … Une mauvaise personne n’est pas une personne égoïste ne se souciant que de ses propres intérêts. Un véritable égoïste est bien trop occupé à prendre soin de son propre bien pour avoir le temps de nuire à autrui. Le principal vice d’une mauvaise personne consiste précisément à se préoccuper davantage d’autrui que d’elle-même. » (Slavoj Zizek)

« L’économie d’assistance ; l’envie la plus réduite pour le plus grand nombre de gens. » (slogan d’un courant économique dans le monde anglophone)

« Qui terre a, guerre a. » (proverbe)

« Le champ du voisin est toujours plus beau. » (proverbe)

« On ne jette de pierres qu’à l’arbre chargé de fruits. » (proverbe) – Dédié au minable politicard Alain Juppé, pour la bassesse (surtout venant d’un tel individu) de sa remarque à l’égard de Benoît XVI  suivant laquelle ce pape « commencerait à poser un problème. »

« Il n’y a de vraiment malheureux que ceux qui envient le bonheur des autres. » (?)

« Toute envie recèle quelque forme de jalousie. » (?)

« L’envie explique la haine. » (?)

Ci-dessous, extraits simplifiés du livre d’Helmut Schoeck, L’envie, une histoire du mal.

« L’envie se développe  probablement chez l’être humain avec l’enfance (envie entre frères et sœurs, entre camarades…). L’envieux  ne veut pas être identifié en tant que tel par la personne qu’il envie, l’envie ne s’avoue pas, on ne se déclare pas envieux, on préfèrera parler de jalousie (de même il est fort peu traité en littérature, en particulier dans les sciences sociales et en philosophie,  il  est alors traité comme une bagatelle ou il est camouflé sous les termes d’ambition, rivalité, jalousie)….L’envieux ne peut assumer moralement le meilleur aspect physique, le bonheur conjugal… de son voisin qu’en enviant son salaire, sa maison… Les biens matériels s’intercalent entre les êtres protégeant les personnes physiques des agressions (plus maintenant !) … L’envieux ne souhaite pas spontanément entrer en rapport avec l’envié, il est rarement  intéressé par un transfert de bien appartenant à l’autre. Ce qu’il souhaite  c’est le voir volé, dépouillé, humilié, mis à mal, que l’autre perde l’objet (fut-il détruit : le jugement de Salomon) ou la qualité ou la position qui le fait envier, plaisir de nuire, sans bénéfice, déplaisir à la vue de la prospérité et des qualités d’autrui, passion foncièrement destructrice (similitude avec ‘le spectacle du malheur d’un ami qui nous réchauffe le cœur’, selon La Rochefoucauld) , tout le monde démuni plutôt qu’un seul enrichi,  porter du tort sans en tirer avantage.  On retrouve l’envie dans le souhait de ne pas apprécier que les conditions soient meilleures d’une génération à l’autre  (l’envie entre générations…)  …  l’envieux est même prêt à se nuire à lui-même si par là il peut infliger un dommage à celui qu’il envie … L’envie est un sentiment dirigé vers un objet, on envie quelque chose, quelqu’un , sans cible, sans victime, il ne saurait naître … Les sociétés fonctionnent comme s’il n’y avait pas à tenir compte des envieux. En effet, l’envieux, inapaisable facteur de désordre, saboteur en puissance, fauteur de troubles … l’envie a  une fonction inhibitrice, ou du moins de frein  (sur les initiatives, les innovations, les apports bénéfiques, envers tout homme essayant d’améliorer sa situation …) … Les sociétés doivent rendre moralement supportables et rationnellement explicables les différences de situation … Parmi les convictions propres à refouler l’envie, la croyance en la déesse aveugle de la chance, au  hasard, à la veine, au sort, à la bonne fortune, parmi les comportements, la modestie, la discrétion, la dissimulation de ses joies, l’évocation des inconvénients d’une réussite, d’un heureux hasard, permettent aussi de tenir l’envie à distance, le conformisme également (crainte des représailles verbales à l’égard de celui auquel on reprochera de se montrer meilleur, individualiste, plus intelligent, plus observateur, plus autonome que le groupe). Ce n’est pas un hasard si, dans tous les peuples, la superstition, les proverbes et les religions  contribuent à faire entrer dans la tête des générations montantes que la modestie est une vertu. … Le mérite de l’éthique chrétienne devant l’Histoire fut d’avoir stimulé et protégé le génie créateur de l’homme, d’avoir rendu possible son épanouissement, grâce au frein qu’elle imposa à l’envie … en imposant à ses victimes de s’abaisser … Devant Dieu tous seront égaux, les pauvres auront même plus de chances d’être admis au ciel (message détourné, sécularisé, transformé en la vision d’une société égalitaire, nivellée dès à présent ici-bas) … Plus on fait de bien à l’envieux, plus il devient mauvais, tenter de désarmer l’envieux ne fait que le rendre plus méchant. ‘Il ne faut pas tenter de contenter les envieux’ (Vauvenargues) – Francis Bacon avait déjà bien vu que rien ne provoque l’envieux …  autant qu’une attitude irrationnelle, que le renoncement à une position de supériorité par rapport à lui dans l’intention de désarmer son envie, plus on fait de bien à l’envieux, plus il devient mauvais  … L’émulation, le désir de faire aussi bien qu’un autre, le désir d’un bien que l’on peut aussi acquérir (sur lequel joue la publicité en utilisant le mot envie privé de son aspect déplaisant) ) ne comporte pas l’aspect malveillant et dissolvant de l’envie, elle ne ressort pas du ressentiment, elle ne comporte pas le sentiment d’impuissance  qui installe l’envie  … Sabotage d’avancement par des supérieurs, imposition des mêmes conditions de vie que celles qu’on a connues jadis, (forme d’envie qui fait obstacle à tout progrès, toute innovation),  taxes écrasantes sur des produits de luxe (tous ceux qui ne payaient pas l’ISF sont pour son rétablissement : expression pure et dissimulée de l’envie primant toute autre considération), l’envie ne s’avoue pas, elle se camoufle maintenant en se présentant comme garante du bien public (toutes les clameurs exigeant l’égalité, la justice sociale, ‘les riches paieront’) … Une inégalité écrasante, surtout si elle comporte un élément inaccessible au commun,  suscite bien moins l’envie qu’une inégalité minime (‘il s’en faut de peu que moi aussi…’), l’envie exige la proximité sociale,, elle ne vise que des personnes avec lesquelles une concurrence a été possible dans la réalité, est visé le compagnon de travail, non le prince lointain. ‘Le portier envie le portier’ (Aristote), en nous comparant à nos voisins, à nos égaux, nous voyons quels furent nos échecs … L’envie naît toujours de la comparaison de deux situations, laquelle mène à un diagnostic : celui de l’infériorité de l’un des deux termes … Irréaliste est la théorie selon laquelle il n’y aurait plus envie ni ressentiment si nous vivions dans une société réellement égalitaire (même une société de moutons satisfaits), il s’agit d’utopie pure. L’envie grandit dans la mesure où l’idée d’égalité est institutionnalisée. Le nivellement est le propre d’une époque dénuée de passion et repliée sur elle-même … Le meurtre, fruit de l’envie (Caïn et Abel…), moins l’individu pourra expliquer de façon réaliste la différence visible entre lui et l’Autre (sociétés dans lesquelles le credo est l’égalité de tous), plus le crime prospèrera , le vandalisme, fruit de l’envie … L’envie s’extériorise peu, l’une de ses armes préférées est l’ironie (le rire rabaissant) … ‘C’est l’effet assuré de l’envie qui explique le grand succès des mouvements inspirés par le socialisme.’ (Raiga) : ‘Réactions des vaincus face aux vainqueurs, des faibles face aux forts, des peu-doués face à ceux qui le sont davantage, des pauvres devant les riches, des humiliés devant les arrogants’.  (Max Scheler).  Il suffit de promettre à l’envieux  la suppression ou la destruction d’un bien que l’autre possède  … L’aspect tragique de la pensée socialiste réside dans le fait de vouloir fonder tout un système d’économie politique et tout un programme de mesures coercitives sur une chimère : celle de fonder une société libre de toute envie. La critique née du ressentiment ne ‘veut’ pas sérieusement ce qu’elle prétend vouloir, elle ne critique pas pour faire cesser un mal, elle l’utilise pour s’exprimer à tout prix … Si l’Etat fait de l’envie une vertu, les esprits envieux n’en seront que de plus en plus encouragés et les politiques seront obligés de dénoncer sans cesse de nouvelles ‘inégalités’ que les envieux ne se lasseront pas de découvrir …  L’’envieux devenu délateur (ne serait-ce que pour créer à sa victime le maximum d’ennuis et de difficultés et parce qu’il sait que les autorités accorderont plus  de foi au délateur poussé par l’envie qu’à la victime clamant son innocence). C’est toujours la faute de l’envié  … Dans une société fortement hiérarchisée l’envie crée moins de problèmes que dans celles où les structures sont plus fluides … L’envieux a un rôle important à jouer dans deux processus sociaux allant par ailleurs dans des directions opposées : d’une part les manœuvres de retardement en faisant échouer les tentatives d’innovation (le progrès, fruit d’imprévisibles déviations individuelles par rapport à la norme du groupe entraînant une certaine dose d’inégalités) et d’autre part les actions destructrices d’une révolution … L’envie étant un sentiment tout relatif, indépendant de la valeur des choses et des inégalités qui le suscitent, rend possible l’alliance de gens bénéficiant de conditions de vie très agréables à des groupes de personnes pauvres de naissance (à chacun ses cibles)  … ‘L’égalité devant la loi favorise l’éclosion du fanatisme et du sentiment d’envie qui exige que tous les hommes soient traités de la même façon dans tous les domaines de l’existence, et elle récuse comme antidémocratiques les différences nées de l’intelligence par exemple.’  (Fritz Fleiner). »

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