170,2 – Crainte, Peur, Panique

-Il faudrait aussi compter avec ce que Christophe André et Patrick Légeron appellent la peur des autres, l’’anxiété sociale, trac, timidité, la peur de rougir… dans les situations sociales dérangeantes, d’échange et de contact, où il faut s’affirmer, le jugement négatif sur soi, le hit-parade des pensées négatives, la peur du jugement d’autrui, la crainte des réactions d’autrui, l’anticipation anxieuse, les comportements de fuite et d’évitement… (extraits ultra-simplifiés de La peur des autres)

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« La peur est grande de loin et diminue quand on en approche. » (Alain)

« Il faut écouter ses peurs, elles sont un système d’alarme face aux dangers. Mais il ne faut pas s’y soumettre : parfois ce système se dérègle … la peur peut s’emballer et devenir phobie … Une peur normale est une alarme efficacement calibrée dans son activation comme dans sa régulation. Dans son activation, l’alarme de peur ne se déclenche qu’à bon escient, face à un vrai danger, et non à la possibilité ou au souvenir d’un danger. » (Christophe André)

« Dans l’Antiquité, les Grecs disposaient de deux mots pour désigner leurs appréhensions ; ‘deos’, qui signifiait une crainte raisonnée et irréfléchie, et ‘phobos’, qui décrivait une peur intense et irraisonnée accompagnée d’une fuite … La phobie peut être définie comme une peur très intense, incontrôlable se manifestant sous la forme de violentes et déstabilisantes crises d’angoisse et pouvant aller jusqu’à l’attaque de panique. Elle pousse le phobique à éviter des situations  bien spécifiques, et entraîne de ce fait chez lui, du fait de ces évitements, un certain degré de handicap, limitant son autonomie matérielle et psychologique. » (Christophe André) – On voit donc que ce qu’on appelle phobie actuellement n’a rien à voir avec ce que les médecins, les psychiatres appellent phobie, avec la définition technique des phobies. Un homophobe n’apprécie guère les homos certes, mais ni leur évocation ni leur présence n’entraîne chez lui de peur, à plus forte raison de crise d’angoisse, ou pire de panique. L’utilisation actuelle du terme par le gang médiatique et ses sujets ne manifeste une fois de plus que l’inculture touchant à la bêtise profonde..

On distingue : « La peur circonstancielle : face à une circonstance ou situation précise – La peur essentielle : la circonstance ou la situation est vague, mais le besoin manquant, non satisfait, est assez clair ; peur de l’abandon, du rejet, de la solitude, de la foule, de ne pas être aimé, de manquer, de ne pas être à sa place… – La peur existentielle : fonctionne à partir d’un niveau de besoin moins défini, on ne sait pourquoi mais notre vie manque de sens, ne se déploie pas. L’élan vital est brisé quelque part. Peur de la rencontre cœur à cœur par exemple. » (d’après Thomas d’Ansembourg)

« La terreur est l’accomplissement de la loi du mouvement. » (Hannah Arendt – Le système totalitaire) – tous doivent marcher, au pas si possible, le progrès…

« N’use point ta part de vie à te faire des idées sur ce que font les autres. Que les choses à venir ne te tourmentent point. Tu les affronteras, s’il le faut, muni de la même raison dont maintenant tu te sers dans les choses présentes. » (Marc-Aurèle)

« Le mal-être généralisé qui semble s’être emparé des sociétés humaines et menacer leur équilibre … Violences économiques et sociales, violences politiques, violences technologique et de la nature … Peurs comme les violences s’ajoutent les unes aux autres, se combinent les unes avec les autres … La crise née des nouvelles peurs met à bas la vision idyllique de Francis Fukuyama (l’accord sur l’économie de marché et la démocratie représentative) qui se révèle aussi obsolète que la vieille lune de la société sans classes … L’apparition des premiers suicides en entreprise qui remonte à une vingtaine d’années … Ce qui met le monde de la consommation en mouvement c’est dorénavant le renouvellement de l’offre, non celui de la demande. L’innovation technologique ne cesse de créer de nouveaux produits et de susciter de nouveaux désirs vite transformés en nouveaux besoins. » (Marc Augé – Considérations éparses sur les nouvelles peurs – Dont la déshumanisation, l’isolement au milieu de voix métalliques,  suscitée par l’automatisation n’est pas la moindre)

« Le vivant humain n’est pas abandonné, une seule seconde, par la peur. La peur est polymorphe : peur de vivre, peur d’aimer, peur de penser, peur de mourir. » (Kostas Axelos)

« Depuis que l’Occident est massivement riche, il a peur de manquer (et si tout cela venait à disparaître ?) et il vit désormais dans l’angoisse de la perte. » (Olivier Bardolle) –  Et pourtant, il va manquer, beaucoup et vite.

« Tous vivent avec la sourde intuition d’une catastrophe imminente … Le sentiment dominant est que la ‘machine s’est emballée’ et que plus personne n’a de prise sur les événements … L’humanité va dans le mur, et ne sait plus utiliser la pédale de frein, au contraire, dans sa panique elle accélère … L’individu se comporte un peu comme un participant au jeu des chaises musicales. Pour l’instant la musique joue encore et tout le monde s’agite autour des places … Le fatalisme a gagné les esprits de telle sorte que chacun se contente de barboter dans sa piscine … faute de croire à un Au-delà prometteur, l’humanité veut à tout prix vivre son paradis personnel ici-bas, et le plus tôt possible … L’atmosphère générale est au sauve-qui-peut et l’avenir ne semble pas radieux … Cette peur n’est pas de nature millénariste, elle n’est pas spontanée mais suscitée délibérément et entretenue en tant que mode de fonctionnement. Elle permet à la domination de s’exercer librement … Il ne s’agit plus pour les cadres d’entreprise d’exprimer une quelconque volonté de puissance mais plus prosaïquement de sauver leur peau … Le but lui-même est secondaire, il n’est plus pensé comme finalité. On ne sait plus trop pourquoi on fait les choses mais on les fait bien … On se grise à l’efficacité. » (Olivier Bardolle)

« Les craintes font parfois plus de mal que les réalités qui les justifient. » (Anne Barratin)

« La peur est un de ces sentiments qu’on n’avoue pas. » (Anne Barratin)

« Le présent liquide favorise l’émergence d’individus peureux, hantés par la crainte de l’insécurité. » (Zygmunt Bauman) – Présent où plus rien n’est stable, constant, assuré, prévisible…

« D’abord, la ‘survalorisation’ des individus libérés des contraintes imposées par un réseau dense de liens sociaux. Une seconde rupture suivit de près : la fragilité, la vulnérabilité sans précédent de ces individus dépouillés de la protection jadis offerte très naturellement … Perspective séduisante bientôt suivie par la peur de l’inadéquation …. Les peurs modernes naquirent au cours de la première fournée de dérégulation/individualisation, lorsque furent relâchés ou brisés les liens de parenté et de voisinage resserrés par les nœuds de la communauté ou de la corporation … Substitution d’équivalents artificiels tels que associations, syndicats … La solidarité allait succéder à l’appartenance comme principal bouclier … La seconde dérégulation ne se fit pas par choix mais sous la pression de forces planétaires incontrôlables, et sans déboucher sur de nouvelles formes sociétales de gestion de la peur et de l’incertitude… la concurrence remplaçait la solidarité. » (Zygmunt Bauman)

« Le capital-peur : la sécurité personnelle (ou plus précisément corporelle) est devenue l’un des principaux arguments de vente … dans toutes sortes de stratégie marketing … La peur est là, qui sature l’existence humaine au quotidien lorsque la dérégulation attaque les fondements, lorsque les bastions défensifs de la société civile s’écroulent … C’est l’insécurité du présent et l’incertitude quant à l’avenir qui engendrent … les moins supportables de nos peurs. » (Zygmunt Bauman – Le présent liquide – Tirant les conséquences de la ‘liquidité’ de nos sociétés dans lesquelles plus rien n’est stable, constant, assuré, prévisible, voir à Zygmunt  Bauman, rubrique société, 115,2 ) – D’où la boulimie de réformes pour tenter de compenser l’angoisse.

« La peur de l’avenir a remplacé les ‘lendemains qui chantent’ .» (Alain de Benoist)

« Je savais bien, fit-elle. Tu ne crains pas l’enfer et tu crains ta femme ! Es-tu bête ! » (Georges Bernanos – Sous le soleil de Satan, histoire de Mouchette)

« La peur de la peur … Il faut savoir risquer la peur comme on risque la mort, le vrai courage est dans ce risque. » (Georges Bernanos – Dialogues des carmélites)

« Est-ce le résultat des attentats djihadistes ? Le résultat de la précarité sociale, des nouvelles tensions géopolitiques ou des multiples dérèglements climatiques. Quoi qu’il en soit, la peur est là, à la fois multiforme et solide. » (Jean Birnbaum)

« Souvent la peur d’un mal nous conduit dans un pire. »(Boileau)

« Le seul moyen pour être respecté dans ce monde, c’est avant tout d’être craint. Et de ce côté-là, c’est un succès total ! » (Sébastien Boussois – sur la politique mondiale)

« La peur, bon produit cognitif, très bon produit d’appel sur le marché hyperconcurrentiel de l’information (dérégulation du marché cognitif  dû à Internet) … Conspirationnistes, promoteurs de la peur (crainte des antennes-relais, des vaccins, du contenu de nos assiettes, de l’avenir en général) sont souvent plus motivés que la moyenne de nos concitoyens à faire valoir leur point de vue … l’asymétrie de motivation déterminante pour comprendre la diffusion de la crédulité … Certains votent mille fois dans Internet, d’autres jamais, les croyants et les militants votent beaucoup … les alertes incessantes créent un trop-plein d’angoisses, car démentir prend du temps et les démentis occupent peu de place dans les médias. L’individu accueille donc favorablement les nombreuses incitations au soupçon et à l’effroi … On oublie le cimetière gigantesque des craintes sans objet … Quelques effets secondaires de la vaccination et les immenses bénéfices sanitaires … Dans son ouvrage, ‘Le principe responsabilité’, Hans Jonas a forgé un concept clé destiné à guider nos actions, et qui a inspiré le principe de précaution, ‘in dubio pro malo’, en cas de doute, envisage le pire … Or il y a impuissance à apporter la garantie absolue que réclame Hans Jonas … Intimidation de tous les instants … Nous sommes plus prêts à regretter les conséquences d’une action que celles d’une absence d’action, surtout si celle-là a des implications morales … l’immoralité de l’inaction est moins perceptible que l’immoralité de l’action … les anti-vaccins insistent sur les conséquences (possibles) de l’acte sans rien dire sur celles de l’abstention … De plus, les conséquences de l’action sont généralement visibles alors que celles de l’inaction ne sont que supposées. » (Gérald Bronner – considérations éparses sur la peur) – De plus, à propos des démentis, il faut considérer que les fameux fact-checkers n’ont été créés, ne sont là et ne cherchent le plus souvent, en ergotant sur des détails discutables sans intérêt, qu’à étouffer la voix des opposants et du peuple pour maintenir le pouvoir des prétendues élites (politiques, médiatiques, Bobos et people.) 

« Se faire peur pour apprivoiser la peur, telle est la volupté du roman noir, du film d’épouvante. » (Pascal Bruckner)

« Le dressage à la panique et le doux spectacle de la terreur … La peur avant d’être un instrument de manipulation politique, est un singulier moteur esthétique. Le génie humain  a su faire de ce sentiment si vil une grande source de plaisir. Dès l’enfance … les contes de fées … Il n’est pas surprenant que l’apogée du film d’horreur soit contemporain de l’émergence de l’écologie depuis trente ans. » (Pascal Bruckner)

« Le désastre fascine certains esprits car il a un effet d’éclaircissement : il coupe l’histoire en deux, l’arrache à l’indétermination du quotidien où les choses ne sont ni tout à fait bonnes ni tout à fait mauvaises. Plutôt le chaos que l’indécision. » (Pascal Bruckner)

« C’est des hommes et d’eux seulement qu’il faut avoir peur, toujours. »  (Louis-Ferdinand Céline)  

« Pas de sagesse sans défiance. L’Ecriture a dit que le commencement de la sagesse était la crainte de Dieu ; moi, je crois que c’est la crainte des hommes. » (Chamfort)

« Il ne faut jamais faire peur … On peut tuer don ennemi, mais il ne faut pas lui faire peur. » (Jacques Chardonne)

« La tyrannie du pathos. La peur fait vendre du papier (et assure l’audimat). Au jeu de la crainte irraisonnée les ONG (et autres associations hurlantes) sont très fortes. Le charlatanisme a de beaux jours devant lui. » (Christiane Chavane – à propos de la contestation du glyphosate en particulier et des sempiternels hurlements de précaution en général)

« Nous ne tremblons plus par à-coups; nous tremblons sans relâche. Qu’avons nous gagné au changement de la peur en anxiété ? » (Emil Cioran)

« Si, par hasard ou par miracle, les mots s’envolaient, nous serions plongés dans une angoisse et une hébétude intolérables … C’est l’usage du concept qui nous rend maîtres de nos frayeurs. Nous disons : la Mort, et cette abstraction nous dispense d’en ressentir l’horreur et l’infini. En baptisant les choses et les événements  nous éludons l’Inexplicable : l’activité de l’esprit est une tricherie salutaire, un exercice d’escamotage ; elle nous permet de circuler dans une réalité adoucie, confortable et inexacte … la réflexion naquit un jour de fuite ; la pompe verbale en résulta … C’est l’abstraction, les sonorités sans contenu dilapidées et boursouflées, qui ont empêché l’homme de  sombrer, et non pas les religions ou les instincts … Lorsqu’Adam fut chassé du paradis, au lieu de vitupérer son persécuteur, il s’empressa de baptiser les choses : c’était l’unique manière de s’en accommoder et de les oublier … Les bases de l’idéalisme furent posées. » (Emil Cioran)

« Il y a la faiblesse inconnue de nous, ou soupçonnée peut-être … la faiblesse, qui peut ne jamais se manifester, observée ou non, redoutée ou virilement méprisée, réprimée ou peut-être ignorée, pendant plus de la moitié de l’existence, celle-là, ,nul d’entre nous n’en est à l’abri … Chacun, s’il est honnête,  devrait avouer qu’il y a, chez les meilleurs d’entre nous, un point … un point quelque part où ‘on lâche tout’. Et il faut vivre en connaissant cette vérité. Dans certaines combinaisons de circonstances, on est sûr que la peur va montrer son nez … Et même chez ceux qui nient cette évidence, la peur est là ; la peur de soi-même. »  (Joseph Conrad – Lord Jim) – Défaillance (subite)  par rapport au courage.

« Ils se sont laissés gagner petit à petit par ce fléau, la peur,, et maintenant ils vivent dans la peur de ce qui pourrait leur arriver. Ils ont peur des étrangers, ils ont peur de leur voisin, ils ont peur du lendemain, ils ont peur de tout. » (Gérard Depardieu) – Sur les Français. Et c’était écrit avant la grande trouille du Covid.

« ‘Si nous nous trouvons en sécurité, le spectacle est d’autant plus attrayant qu’il est plus propre à susciter la peur’ … Il serait présomptueux d’en tirer un jugement quelconque sur le caractère dont nous ferions personnellement preuve, le cas échéant, et ridicule de nous attribuer la moindre noblesse au vu du sublime de nos sentiments. » (Vincent Descombes – citant Emmanuel Kant) – Le succès des films catastrophe.

« La peur et la crainte ne sont pas la même chose. La peur est une impression toute instinctive, un mouvement tout physique ; la crainte est un état d’esprit, un amoindrissement du pouvoir actif de l’être … On peut surmonter la peur, on guérit difficilement la crainte. » (Edouard Drumont)

« Depuis la mythologie grecque, nous donnons un nom à l’effondrement soudain de l’ordre social, lorsque les consciences sont frappées de stupeur, les corps se figent sur place ou, au contraire, se lancent dans des courses effrénées et incohérentes : la panique. » (Jean-Pierre Dupuy) – Les surgissements sauvages et agressifs du dieu Pan.

« C’est l’accès limité aux ressources permettant d’échapper au désastre qui, faisant de chacun un obstacle ou un rival pour les autres, provoque la panique. » (Jean-Pierre Dupuy) – Par ressources, entendre les issues physiques (portes…), ou en matière fiancière, les liquidités bancaires  ou la crainte d’un krach.

« Equilibre de la terreur … expression insensée … puisqu’elle fait de la sécurité la fille de la terreur. » (Jean-Pierre Dupuy – approx.)

« La place accordée à l’inquiétude vérifie la prophétie formulée à la fin des années 40 par le sociologue américain David Riesman. L’individu contemporain se caractérisait d’abord par une angoisse diffuse, qui trouve son origine dans une multitude de causes, au premier rang desquelles on trouve la disparition des certitudes métaphysiques et l’angoisse soulevée par cette liberté nouvelle aux implications anxiogènes. Tout est devenu source   de crainte, le monde public comme le monde intime. » (Guillaume Erner)

« Clairvoyance du tremblement … La peur est bonne conseillère … Loin d’obscurcir notre entendement, elle l’éclaire, elle est plus intelligente que nos désirs. Sachons donc lui faire bon accueil et prêter davantage l’oreille aux prophéties du malheur qu’à la prophétie du bonheur. » (Alain Finkielkraut – reprenant Hans Jonas, sur le clonage et certains soi-disant progrès  de l’homme prométhéen)

« Peur. – Donne des ailes. » (Flaubert – Dictionnaire des idées reçues)

« Adieu donc, fi du plaisir – Que la crainte peut corrompre. » (La Fontaine – Le rat de ville et le rat des champs)

« Je suis donc un foudre de guerre ? – Il n’est, je le vois bien, si poltron sur la terre – Qui ne puisse trouver un plus poltron que soi. » (La Fontaine – Le lièvre et les grenouilles

« Quand le mal est certain – La crainte ni la peur ne changent le destin – Et le moins prévoyant est toujours le plus sage. » (La Fontaine – Le cochon, la chèvre et le mouton)

« Et chacun croit aisément ce qu’il craint et ce qu’il désire. » (La Fontaine – Le loup et  le renard)

« La peur c’est le signe du devoir. » (Charles de Foucauld)

« Parmi les services que je vous ai rendus autrefois, la crainte de l’enfer n’était pas la plus mince. La damnation étant seule à redouter, vous n’étiez pas trop effrayé par le reste. Depuis que vous ne craignez plus l’enfer, vous avez peur de tout, et surtout de vous-mêmes. Vous n’avez pas tort. » (André Frossard – faisant parler le diable)

« Mieux vaut se battre qu’avoir peur. » (Gandhi)

« La peur du ridicule obtient de nous les pires lâchetés. » (André Gide)

« Si la peur aurait un objet dont la rencontre inviterait à une réponse adaptée de fuite, l’angoisse serait sans objet et, par nature, indéterminée … Lacan la définit comme la ‘peur de la peur’ » (Roland Gori)

« Nos sociétés sont devenues d’immenses jardins d’enfants dont il faut assurer la constante surveillance. Si les sociétés modernes ont longtemps visé un parfait bonheur qui n’existait pas, elles visent maintenant la sécurité sous tous ses aspects, sentiment qui bien sûr n’est pas moins utopique. Le ‘safe space’ global se déclinera en d’infinies mesures qui, bien que vertueuses, auront pour effet de nous rendre encore plus anxieux. Nous n’avons pas fini de confondre les causes et les effets de notre malheur. » (Jérôme Blanchet-Gravel)

« La croyance dans le fatal libère du remords, de la crainte, on en est d’ailleurs toujours excepté. Le plus dur est rassurant, comme l’excellence demande moins de peine que le médiocre. » (Jean Guitton)

« L’histoire européenne connaît deux formes de terreur : l’une est l’ivresse sanguinaire effrénée d’une masse révolutionnaire déchaînée grisée par sa victoire ; l’autre est la cruauté froide, délibérée, d’un appareil étatique triomphant qui cherche à intimider, à manifester son pouvoir. Ces deux formes sont normalement réparties entre révolution et répression. La première est révolutionnaire ; elle s’excuse par l’émotion, par la rage du moment, par l’emportement. La deuxième est répressive ; elle s’excuse par les représailles à l’encontre des atrocités de la révolution. » (Sébastian Haffner – Histoire d’un Allemand)

« La crainte dont on n’aperçoit pas le pourquoi ou l’objet est appelée ‘terreur panique’. Celui qui ressent le premier une telle frayeur en aperçoit toujours de quelque façon la cause ; mais les autres s’enfuient à cause de l’exemple, chacun supposant que son voisin sait pourquoi. » (Thomas Hobbes)

« Si tous étaient sans crainte, comment le mal pourrait-il être prohibé ? » (Isidore de Séville)

« Comment se fait-il qu’en 1969 la grippe de Hong-Kong (plus d’un million de morts dans le monde et plus de trente mille en France) soit passée inaperçue – juste quelques entrefilets dans la presse – alors qu’elle saturait les hôpitaux et remplissait les morgues ? Peut-être avait-on alors des idéaux (religieux, politiques, esthétiques…) et que le reste paraissait secondaire ? Peut-être sommes-nous devenus vieux et lâches, incapables de regarder la mort en face ? » (Roland Jaccard)

« Quand on a trop craint ce qui arrive, on finit par éprouver quelque soulagement lorsque cela est arrivé. » (Joseph Joubert)

« La peur tient à l’imagination, la lâcheté au caractère. » (Joseph Joubert)

« La peur est un des symptômes de notre temps. Elle nous désarme d’autant plus qu’elle succède à une époque de grande liberté individuelle, où la misère même …  était presque oubliée … Les progrès de l’automatisme et ceux de la peur sont très étroitement liés, en ce que l’homme, pour prix d’allègements techniques, limite sa capacité de décision. Il y gagne toutes sortes de commodités. Mais, en contrepartie, la perte de sa liberté ne peut que s’aggraver. » (Ernst Jünger) – Est soumis à toutes sortes de contraintes et de risques qui lui échappent totalement.

« La source de la peur est dans l’avenir, et qui est libéré de l’avenir n’a rien à craindre. » (Milan Kundera)

 « Il faisait de la peur le principal mobile des actions humaines, en paix comme en guerre. Je voyais dans la peur, pour ma part, un motif mesquin et surestimé ; stimulant sans doute, mais poison aussi, dont chaque injonction ruinait un peu plus l’organisme auquel on l’appliquait. » (T. E. Lawrence – Les sept piliers de la sagesse)

« La plupart des peurs universelles correspondent – ou ont correspondu – à des dangers habituels dans l’environnement d’un chasseur-cueilleur (nos très lointains ancêtres)… les peurs culturelles s’en différencient par leur caractère fluctuant selon les périodes de l’histoire. Elles naissent et disparaissent à certaines époques de l’humanité : peur de la fin du monde, peur du diable, des loups-garous, de  l’impureté suivant des critères religieux, des vampires, des sorcières et des revenants divers … Leur appellation de ‘peur’ est d’ailleurs discutable, Il s’agit plutôt d’inquiétudes psychologiques, avec un contenu physiologique moindre que dans le cas  de la peur … Ces peurs correspondent à l’attente d’un danger à venir plus qu’à sa présence, elles portent sur le futur… » (François Lelord, Christophe André) – Aujourd’hui, peur du réchauffement climatique, de la démographie galopante…

« On nous a tellement demandé si nous avions peur que ça  a bien dû finir par nous faire peur, selon le bon vieux principe de la prophétie autoréalisatrice. » (Elisabeth Lévy – à propos d’une épidémie et du vacarme médiatique) 

« Encore faudrait-il, surtout, que la peur soit proportionnée au danger. Or, elle est désormais érigée en vertu citoyenne cardinale et le masque est son étendard. Si tu n’as pas peur, tu est soit un salaud doublé d’un assassin de malades et de vieux, soit un idiot qui ne comprend rien à la science. J’ai peur donc je suis. » (Elisabeth Lévy – à propos du délire Covid)

« Dans le contexte de sanitarisation, la liste s’allonge des éléments générateurs de peurs et d’anxiétés : ondes du téléphone mobile, OGM, sexe, cannabis, acariens, cigarettes, rayons de soleil, l’air que l’on respire, l’eau que l’on boit, la viande que l’on mange… » (Gilles Lipovetsky)

« Les hommes en général sont plus portés à ménager celui qui se fait craindre que celui qui se fait aimer. » (Machiavel) – Il est rare, et admirable, qu’un lien simplement affectif ou moral puisse tenir contre l’intérêt ou la perspective d’un châtiment.

« Une seule chose peut faire disparaître les peurs imaginaires, la réalité. » (Alexandra Marinina)

« ‘Plutôt une fin effroyable qu’un effroi sans fin’. » (cri humoristiquement prêté par Karl Marx au bourgeois de 1852 face aux désordres d’alors)

« Couardise, mère de la cruauté. » (Montaigne)

« Quand je pourrais me faire craindre, j’aimerais encore mieux me faire aimer. » (Montaigne)

« La crainte ajoute à nos peines comme les désirs ajoutent à nos plaisirs. » (Montesquieu)

« Certains portent leur crainte, d’autres la traînent. » (Henry de Montherlant)

« Le destin, qui toujours nous guette, se jetterait sur nous, s’il flairait ces instants de moindre résistance. » (Henry de Montherlant – à propos de la peur et des faiblesses)

« Il y a une esthétique de la peur. Ce qui nous horrifie dans la réalité nous attire et nous ravit dans la fiction … Volupté de la peur spectaculaire, celle des ‘films catastrophe’ et des films d’épouvante. » (Edgar Morin) –S’abonner au cirque pour voir le dompteur dévoré par le lion.  

« Cette façon libérale, de droite et de gauche, de jouer avec la peur des gens, de faire naître et d’instrumentaliser les angoisses, de terroriser les citoyens, d’abêtir le peuple, d’imbécilliser les foules, de leur faire miroiter un avenir apocalyptique, de les menacer de représailles s’ils ne souscrivent pas à leurs diktats, de déclarer la guerre idéologique à tout individu qui n’acquiesce pas à cette entreprise de terreur, tout en menant la politique qui en crée les conditions. » (Michel Onfray) – Ou comment entretenir la soumission.

« Je fais tout pour ne pas me trouver en situation inquiétante, car si ma peur démarre, je sais que je ne pourrai rien faire pour la freiner. » (un phobique – cité par Christophe  André) – Peut alors démarrer ce qu’on appelle l’attaque de panique, crise d’angoisse aiguë,  la peur fracassante.

« La peur est un sentiment que les hommes aiment éprouver quand ils se sentent en sécurité. » (Edgar Allan Poe) – Films catastrophes…

« L’angoisse de toutes les angoisses, c’est la peur de ne pas être aimé, la perte de l’amour. » (cardinal Joseph Ratzinger)

« Il y a le peureux qui regarde sous son lit ; il y a le peureux qui n’ose pas regarder sous son lit. » (Jules Renard)

« De toutes les passions la peur est celle qui affaiblit le plus le jugement. »(cardinal de Retz)

« Il y a toujours anarchie ou despotisme quand la crainte n’est que d’un côté (si le peuple craint le roi, il n’y a pas de révolte, et, si les rois craignent le peuple, il n’y a pas d’oppression). » (Rivarol)

« La seule chose que nous ayons à craindre est la crainte elle-même. » (Roosevelt)

« On sait l’importance du sentiment d’incertitude, de doute quant à la nature de ce à quoi on a affaire, dans le déclenchement de la peur. L’objet terrifiant est toujours un ‘quelque chose’ ou un ‘quelqu’un’ auxquels vient à manquer soudain, pour une raison quelconque, une identité assignable et sûre. » (Clément Rosset)

« La peur serait une forme particulière de crainte consistant en une appréhension insolite à l’égard non du réel, mais de l’irréel : crainte du surnaturel, des ombres, des fantômes … Mais il se trouve que la réalité est elle-même toujours insolite, et même la chose insolite par excellence …  Selon Pascal, le pouvoir de l’imagination de susciter une peur à partir de rien … Cet élément virtuellement terrifiant dans l’imagination est l’incertitude. » (Clément Rosset)

« L’homme qui a peur découvre son visage d’homme. » (Louis Scutenaire)

« La peur est plus persuasive que la raison. » (Louis Scutenaire)

« Celui qui craint tout croit tout. » (Louis-Philippe de Ségur)

« Il n’y a aucune raison de vivre … si l’on se met à redouter tout ce qui est redoutable. » (Sénèque)

« Cesser de craindre en cessant d’espérer. » (Sénèque)

 « Tu cesseras d’avoir peur quand tu auras cessé d’espérer … La même chaîne lie le prisonnier à son gardien. Des sentiments si opposés vont de pair … Le souvenir fait revivre la peur qui nous a tourmenté et notre capacité à prévoir l’anticipe. » (Sénèque)

« Soyez donc prudente, la meilleure sauvegarde c’est la crainte. » (Shakespeare)

 « L’expression TW (trigger warning) est désormais employée à tout bout de champ pour prévenir lecteurs ou auditeurs de la présence de contenus violents, pornographiques, sexistes… Avertirr protéger … De même des ‘safe space’, espaces infantilisants pour étudiants refusant  d‘affronter les ‘microagressions’ … génération gâtée infantile, dont l’idée intégrée est que l’environnement devait s’adapter à leurs émotions, et non l’inverse … Dans leurs classes comme dans leur vie privée, ils désapprennent les vertus du conflit (‘soyons d’accord pour ne pas être d’accord’). » (Géraldine Smith – Vu en Amérique et bientôt en France) – Comment fabriquer des minables, des lâches, des déprimés-angoissés, des impuissants (au sens sexuel comme plus généralement).  A Daech, on doit bien rigoler.

« Il n’y a pas d’espoir sans crainte, ni de crainte sans espoir. » (Spinoza) – On n’a jamais l’une sans l’autre. Deux faces d’un même  sentiment.

 « Là où manque la crainte, la correction n’intervient pas. » (Tertullien)

« Rien n’est autant à craindre que la crainte elle-même. » (Henry David Thoreau)

« Des ressentiments sociaux dignes du XIX° siècle refont surface, la peur des gens d’en haut se nécrose en haine des gens d’en bas, alors que la révolte des gilets jaunes parlait de niveau de vie, puis de la représentation politique des humbles, n’exprimait qu’un pur phénomène de lutte des classes, les macronistes ont œuvré à en faire un mouvement antisémite. » (Emmanuel Todd)

« L’homme est plus sensible aux stimuli négatifs que positifs … Peu de choses peuvent améliorer votre état, mais le nombre de celles qui pourraient l’empirer est illimité. » (Amos Tversky – cité par Richard Sennett)

« Etat constant d’hyper vigilance qui nous fait essayer de lire dans  l’avenir avec un mécanisme d’anticipation des événements sur une tonalité négative. » (Pauline de  Vaux – sur l’anxiété)

« La propagation contemporaine de la peur … Autrefois, la peur était un phénomène lié à des événements localisés, identifiables et circonscrits dans le temps : guerres, famines, épidémies… Aujourd’hui, c’est le monde lui-même, limité, saturé, rétréci, qui nous étreint et nous ‘stresse’ dans une sorte de claustrophobie : crises boursières contaminantes, terrorisme indifférencié, pandémie fulgurante, menaces climatiques … La peur est ‘panique’, au sens de totalité … D’autant plus que les Etats sont tentés de faire de la peur, de son orchestration, de sa gestion une politique. » (Paul Virilio)

« A la peur de l’avenir vient à succéder la peur du passé. Phénomène panique analogue au remords, ce qui devient alors ‘fautif’, ce n’est plus tellement la personne, l’individu isolé, c’est la société et son environnement immédiat … Coexistence d’un passé non seulement présent mais omniprésent et qui fait obstacle  à l’avenir … Travelling-arrière, le recul de l’histoire entraîne le retrait des acquis, la retraite du progrès … Soudain, tout fuit. Les idéaux éthiques et politiques, la pérennité des sociétés et la stabilité de  l’unité de peuplement démographique … Répulsion de l’être ici présent. A l’instar de l’effroi qui produit le retrait du corps, l’effacement de l’espoir en l’avenir provoque la régression de l’esprit, le ressentiment permanent. » (Paul Virilio) – Ce qui nous arrive avec les vagues de repentance délirantes.

« ‘Tremble et obéis !’ La fin de l’équilibre de la terreur nucléaire et la nouvelle suprématie mondiale des Etats-Unis exigeaient le réaménagement du vieux front de la peur. » (Paul Virilio)

« L’instantanéité des moyens de communication, et notamment de la transmission de l’information, a un rôle éminent dans l’établissement de la peur au rang d’environnement global puisqu’elle permet la synchronisation de l’émotion à l’échelle mondiale … On peut ressentir dans tous les endroits du monde le même sentiment de terreur au même moment. » (Paul Virilio)

« Les Etats sont tentés de faire de la peur, de son orchestration, de sa gestion, une politique. » (Paul Virilio – L’administration de la peur) –– « La société du risque est une société de la catastrophe. L’état d’exception menace d’y devenir un état normal. » (Ulrich Beck) – « L’expertise médicale risque de se transformer en censure morale ou en guide normatif des existences … A l’échelle individuelle autant que collective, cet état d’exception et de catastrophe potentielle conduit à un nouveau mode de gouvernance des conduites : un management par la peur justifié au nom du risque … A partir de là, les ‘experts’ se trouvent davantage invités à participer à la définition des risques, à revoir leurs périmètres, à prévoir leur développement et à gérer leurs conséquences éventuelles …  Cette ‘peur de la peur’ qui alimente l’angoisse des sociétés modernes et donne aux gouvernements actuels la légitimité qu’ils peinent à trouver dans les principe politiques et les institutions est indissociable de la désacralisation du monde et de l’effondrement des figures  tutélaires de l’autorité … Dans la société du risque et d e la catastrophe, les craintes sont multiples, polymorphes , elles nourrissent les entreprises sécuritaires et, en retour, ces dernières les cultivent.» (Roland Gori)

« La sécurité : L’âme n’est pas sous le poids de la peur ou de la terreur, excepté par un concours de circonstances accidentelles et pour des moments rares et courts … La peur permanente est une demi-paralysie de l’âme, quelle qu’en soit la cause, c’est un poison presque mortel. » (Simone Weil – L’enracinement)

« La peur a de grands yeux. » (proverbe russe) – Elle exagère, anticipe, interprète, amplifie, imagine.

« Qui te craint en ta présence te nuit en ton absence. » (proverbe)

« Redoute qui te craint. » (proverbe)

« Il y a toujours un diable pour empêcher la procession de passer. » (proverbe)

« Qui a peur du loup n’aille pas au bois. » (proverbe)

« On crie toujours le loup plus grand qu’il n’est. » (proverbe)

« Le timide a peur avant le danger, le lâche pendant, le courageux après. » (?)

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