005,1 – Action, Activité, Activisme ; Engagement, Militantisme

– Avant toute action (comme avant d’émettre toute remarque) : penser au tamis de discernement de Socrate « Est-ce Vrai, Bien ou Bon, Utile ? »  Ensuite prendre quelques minutes pour ordonner ses démarches avec logique évite beaucoup de dépense d’énergie et de mécomptes.

– Un péril bien connu : trop peu en faire. Un péril méconnu : trop en faire ; le fléau de la suractivité.

– Défions nous de nos initiatives, ou de celles que nous suggèrent autrui, surtout peut-être si elles semblent nous convenir, soit convenir à notre obsession actuelle. Dormons dessus. Une heure de marche futile. Laissons du temps au temps. Toute hâte impatiente, renferme un piège existentiel. Elle risque souvent plus de nous dévaloriser comme être irréfléchi, de nous faire commettre des impairs, de nous contraindre à de pénibles reculades que de nous valoir honneur et reconnaissance. On risque tellement plus de se déconsidérer par action que par omission.

– Le Grand œuvre des alchimistes ne fut pas la production de l’or, mais l’accès à la vérité. (d’après Emmanuel Berl)

– Le terme collaboration qui évoque le concours qu’apportent plusieurs personnes à la réalisation d’un but doit être utilisé avec précaution. En effet, l’expression est piégée et il convient de s’en méfier pendant les siècles des siècles. De même du terme réaction, l’action est toujours noble et bien sûr désintéressée, mais la réaction et les réactionnaires sont comportements et gens plus que suspects, haïssables. Agir, mais ne jamais réagir, sauf évidemment pour une bonne cause, qui ne saurait être celle de la hideuse réaction.

– Sens de l’action, intention de l’acteur conscientes et inconscientes, (indiscernables, même souvent par lui-même), résultats non voulus, bien autres qu’escomptés…

– « Nous ne cherchons qu’à nous perdre dans ce que nous faisons. » (Jean d’Ormesson)

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« Le secret de l’action c’est de s’y mettre. » (Alain)

« L’homme s’ennuie du plaisir reçu et préfère de bien loin le plaisir conquis … Il aime agir et conquérir, il n’aime point pâtir ni subir ; aussi choisit-il la peine avec l’action plutôt que le plaisir sans action … Le plaisir reçu ne paie jamais ce qu’il promettait, alors que le plaisir d’agir, au contraire paie toujours plus qu’il ne promettait. » (Alain)

« Les conséquences de nos actes se manifestent éternellement à travers l’espace et le temps. » (Anaxagore)

« L’action  nourrit, façonne, construit l’estime de soi. » (Christophe André)

« Il faut se donner le droit : – De se tromper – De s’arrêter – De changer d‘avis – De décevoir – D’arriver à un résultat imparfait. Surtout quand cette capacité à renoncer et à se désengager concerne des engagements pris devant autrui. » (Christophe André)

« La distinction des actions intentionnelles et de celles qui ne le sont pas, est la possibilité de se demander ‘pourquoi ?’ Si la réponse est possible, alors l’action est intentionnelle et la raison donnée représente la raison d’agir de l’agent. » (Elisabeth Anscombe – citée par Michela Marzano)

« Chaque relation instituée par l’action, dans la mesure où elle lie des hommes agissants,  s’inscrit dans un réseau de liens et de relations où elle libère de nouvelles relations ; ainsi elle modifie de façon décisive la constellation des rapports déjà existants et elle s’étend toujours plus loin en mettant davantage de choses en connexion et en mouvement que n’aurait jamais pu le prévoir celui qui agit. » (Hannah Arendt)

« L’opposition de la pensée et de l’action, qui, privant la pensée de réalité et l’action de sens, les rend toutes deux insignifiantes. » (Hannah Arendt)

« L’action humaine, projetée dans un tissu de relations où se trouvent poursuivies des fins multiples et opposées, n’accomplit presque jamais son intention originelle … Quiconque commence à agir doit savoir qu’il a déclenché quelque chose dont il ne peut jamais prédire la fin … Le sens ne s’en révèlera pleinement que lorsqu’elle s’achèvera … Par opposition à la fabrication … la lumière qui éclaire les processus de l’action, et par conséquent tous les processus historiques, n’apparaît qu’à la fin, bien souvent lorsque tous les participants sont morts … Pour l’acteur, le sens de son acte ne réside pas dans l’histoire qui suit et qu’il ignore le plus souvent … L’agent semble aliéner sa liberté dans l’instant qu’il en fait usage … Le fardeau de l’irrésistible et de l’imprévisible d’où le processus de l’action tire toute sa force … Celui qui agit ne sait jamais très bien ce qu’il fait, il sera ‘coupable’ de conséquences qu’il n’ a pas voulues ni même prévues. » (Hannah Arendt)

« La rédemption possible de la situation d’irréversibilité (on ne peut défaire, alors même que dans l’acte on ne savait pas ce qu’on faisait), c’est la faculté de pardonner (évitant de nous voir enfermés dans un acte unique, à jamais victime de ses conséquences) … Suppression de ce qui a été fait (analogue à l’acte de détruire l’œuvre du fabricant) … Réaction qui agit de manière inattendue, non conditionnée par l’acte qui l’a provoquée … A cet égard le pardon est exactement le contraire de la vengeance, qui agit en réagissant contre un manquement originel et, par là, loin de mettre fin aux conséquences de la première faute, attache les hommes au processus et laisse la réaction en chaîne dont toute action est grosse suivre librement son cours … Le châtiment est une autre possibilité … ayant ceci de commun avec le pardon de mettre un terme à une chose qui, sans intervention, pourrait continuer indéfiniment. » (Hannah Arendt)

« L’imprévisibilité que l’acte de promettre dissipe au moins partiellement … qui vient des ‘ténèbres du cœur humain’ (faiblesse des hommes qui ne peuvent jamais garantir aujourd’hui qui ils seront demain) et de l’impossibilité de prédire les conséquences d’un acte dans une communauté d’égaux où tous ont la même faculté d’agir … Pouvoir de stabilisation de la promesse … Alliances … Domination sur l’obscurité de l’avenir … Si nous n’étions liés par des promesses, nous serions incapables de conserver nos identités, nous serions condamnés à errer sans force et sans but … dans des ténèbres que rien ne peut dissiper … Les deux facultés dépendent de la présence et de l’action d’autrui, car nul ne peut se pardonner à soi-même, nul ne se sent lié par une promesse qu’il n’a faite qu’à lui-même … Pardon et promesses : Contrecarrer les risques énormes de l’action, mécanismes régulateurs au sein même de la faculté de déclencher des processus nouveaux et sans fin. » (Hannah Arendt)

« Tout acte, envisagé non pas du point de vue de l’agent, mais dans la perspective du processus dans le cadre duquel il se produit et dont il interrompt l’automatisme, est un ‘miracle’, c’est-à-dire quelque chose à quoi on ne pouvait pas s’attendre. » (Hannah Arendt)

« L’action qui n’a point de nom, point de ‘qui’ attaché à elle, qu’elle soit bénéfique ou maléfique, n’a aucun sens. » (Hannah Arendt) – Il faut, pour se rassurer, trouver à tout prix, un sens, un ‘qui’, (un responsable), un ‘quoi’ (une cause) ; en un mot : une raison.

« La découverte de Max Weber à propos des origines du capitalisme est d’avoir démontré qu’une activité strictement mondaine est possible sans que le monde procure la moindre préoccupation ni le moindre plaisir, cette activité ayant au contraire pour motivation profonde le soin, le souci du moi. » (Hannah Arendt – se référant à L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme) – Les activistes forcenés concentrés sur eux-mêmes plus que sur l’action qui n’est que moyen secondaire de satisfaire le moi.

 « Le commencement est beaucoup plus que la moitié de l’objectif. » (Aristote)

« Tout acte humain est choix entre des possibles, réponse sollicitée, mais non contrainte à une conjoncture : la suite des actes est intelligible sans être nécessaire. » (Raymond Aron)

« L’action a une vertu en elle-même ; elle fortifie nos bonnes tendances ; ou aggrave nos mauvaises. » (Lucien Arréat)

« L’activité permanente, l’urgence succédant à l’urgence deviennent ainsi les gages d’une vie bien remplie ou d’une carrière ‘réussie’, seules preuves de l’accomplissement de soi dans un monde où les références à un au-delà se sont évanouies et où l’existence, avec sa finitude, demeure la seule certitude … Dans l’action, l’homme pense à court terme, à ce qu’il y a à faire dans un avenir immédiat et proche … Mais l’action n’est souvent qu’une ‘fuite en avant’, fuite de soi, remède à l’angoisse. » (Nicole Aubert) – « J’ajoute que plus l’action est intense, plus sa puissance thérapeutique sera fiable. Plus on se plonge dans l’urgence d’une tâche immédiate, plus l’angoisse s’éloigne. » (Zygmunt Bauman)

« Le petit métier que tu as appris, aimes-le et donne-lui tout ton acquiescement. » (Marc-Aurèle)

« N’accomplis aucun acte au hasard, ni autrement que ne le requiert la règle qui assure la perfection de l’art. » (Marc Aurèle)

« On n’est pas moins fautif en ne faisant pas ce qu’on doit faire qu’en faisant ce qu’on ne doit pas faire. » (Marc-Aurèle)

« Vivre, c’est agir, et agir, c’est poursuivre des fins par des moyens appropriés. » (Jean Baechler)

« Les critères des trois activités humaines ont le même statut … Le ‘faire’ est sous la juridiction de l’utile et du nocif, le ‘connaître’ sous celle du vrai et du faux et ‘l’agir’ sous celle du bien et du mal … Les contradictoires ne sont pas interchangeables … les uns sont préférables aux autres du point de vue de l’humain et du vivant, les seconds sont des négations et des privations des premiers et les humains inclinent et aspirent naturellement à l’utile, au vrai et au bien, en dépit de leurs faux pas répétés dans le nocif, le faux et le mal .. Les rapports de la personne avec les activités humaines révèlent sa nature … La personne en tant qu’elle connaît recherche les réponses justes … la vérité … quantifie si possible … se considère comme une étape, un maillon d’une chaîne … se méfie du reçu, du dominant, du fracassant. La personne vouée au faire cherche à donner une matière à une forme ou une forme à une matière … elle considère utilité, efficacité, adéquation. La personne agissant vise des objectifs à travers l’incertitude perpétuelle des circonstances et des conséquences … elle oriente ses actions sur les fins de l’homme … elle agit à la place et dans l’état qui convient le mieux à ses capacités et à ses inclinations. » (Jean Baechler)

« L’hyperactivité, l’agenda bien rempli de multiples rendez-vous, le téléphone qui ne cesse de sonner, tels sont les principaux antidotes au sentiment de vide qui s’installe à fleur de conscience dés que l’occidental moyen se pique de réfléchir à sa condition … Comment regarder le vide en face ? » (Olivier Bardolle)

« L’effet pervers (théorisé par Raymond Boudon) désigne les répercussions non intentionnelles d’actions humaines intentionnelles. L’idée est que le résultat déborde toujours l’intention, et qu’il n’y a jamais adéquation parfaite entre les deux choses … Désirable ou indésirable, il est toujours au départ non désiré, et c’est en cela qu’il est dit ‘pervers’ … Il est invisible au moment où le projet prend corps, et il peut d’ailleurs le rester longtemps après la réalisation du projet … Un exemple en est l’autoréalisation des prédictions, qui consiste, en gros, à ce que l’attente d’un événement suffit à produire l’événement (psychose de hausse des prix et hausse effective par anticipation d’achats). » (Yves Barel) – Nous ne connaissons jamais les conséquences de nos décisions. Nul n’aura de mal à trouver dans sa vie et dans ses initiatives personnelles des  exemples d’effets pervers – « Résultats d’actions humaines mais non de desseins humains. » (Friedrich von Hayek) –  « La croyance en l’insolvabilité des banques et la multiplication des retraits spontanés qui entraîne leur insolvabilité réelle … Les coûts d’élimination d’un effet pervers : les feux rouges qui permettent la circulation devenant encombrée (action) … La demande individuelle d’éducation et l’accentuation des inégalités de revenus (voir le livre pour démonstration) …Les effets non explicitement voulus peuvent être positifs, négatifs ou à la fois positifs et négatifs pour certains ou pour tous. » (Raymond Boudon)

« Elevons nos pensées, nos actions les suivront. » (Anne Barratin)

« Nos actions sont des pensées que nous mettons sur des jambes. » (Anne Barratin)

« Les rois fainéants ont peut-être été les meilleurs des rois. » (Anne Barratin)

« Aucun humain ne connaît la valeur ultime de ce qu’il fait. ‘Tous les actes sont essentiellement inconnus’. » (Lytta Basset – citant Nietzsche)

« L’action est tout entière dans la dépendance du projet. » (Georges Bataille)

« Le ‘savoir-faire’ est progressivement, mais inexorablement, remplacé par le ‘savoir-être’ (qui consiste à développer un réseau de communication dont on occupe le centre, à multiplier les liens sans engagement, à voyager léger et à être constamment en mouvement…) » (Zygmunt Bauman)

« Justesse morale et justesse esthétique, sens des proportions, de la mesure, de la symétrie des actes et de la beauté des gestes … Un acte juste est toujours également un beau geste. » (Bruce Bégout – sur la décence ordinaire de George Orwell)

« Agir signifie déployer quelque chose de son essence de sa nature … Le non-agir oriental est souvent très mal compris des Occidentaux. Il signifie ‘ne pas agir selon l’accident’, ne pas être dans l’agitation, dans le ré-agir. » (Miguel Benasayag)

« Le taoïsme dit que l’efficacité se mesure au fait d’agir peu et de produire beaucoup d’effet. On peut considérer le ‘plus de moyens’ comme le garant de l’efficacité, ou au contraire y voir le signe d’une inefficacité caractérisée, car impliquant la séparation de l’acteur avec la situation … Le signe de l’efficacité n’est pas que nous produisions beaucoup d’activités, mais que, par ces activités, nous développions beaucoup de puissance. » (Miguel Benasayag, Angélique del Rey)

« Quotidiennement bombardés d’informations, ayant à notre disposition un vaste univers de connaissances, nous sommes en principe conscients des multiples problèmes qui menacent nos sociétés. Et pourtant, nous n’arrivons pas à réagir … Dans ce qu’on appelle l’Occident, les sociétés n’arrivent plus à agir. Les voies de l’agir, de la conscience aux actes paraissent coupées … Comment éviter l’impuissance ? … Nos sociétés ont construit un homme unidimensionnel dont les caapcités de ressentir s’éteignent progressivement, à l’unisson de ses capacités d’agir … Toute tentative de renouer avec l’agir, part d’une ‘désubjectivisation’ radicale de notre compréhension du monde, renouer avec nos ‘paysages’, qui ne sont pas un décor, soit avec les multiples réseaux et processus dont chacun d’entre nous n’est qu’un pli. » (Miguel Benasayag – Connaître est agir) – Cesser de nous regarder et regarder plutôt le monde tel qu’il est.

« Une éducation et une culture centrée sur la méfiance envers les sens, et qui donnent une place privilégiée aux mécanismes de la conscience, finissent par produire aussi un refoulement de nos sensations, de nos connaissances… » (Miguel Benasayag) – Il ne  s’agit pas là du sens profond mais de nos sens physiques.

« Avant même de céder face à la complexité des menaces, nous nous dérobons, nous les évitons. Bref, on refoule, car l’immédiat sature nos mécanismes perceptifs … mécanismes de ‘mise à distance’ de connaissances que nous savons fondamentales mais qui ne le sont pas dans l’orientation de notre vie, organique et quotidienne (‘ça n’arrive qu’aux autres’, ‘je m’épanouis’, ‘il ne peut rien m’arriver’, ‘la science trouvera la solution’, ‘tel politique résoudra’), réponse rassurante sans rapport avec le danger  évoqué. » (Miguel Benasayag)

« Un même acte n’a pas le même sens selon celui qui le commet … La ligne de partage entre le bien et le mal ne passe pas par le cœur de chaque homme, elle passe entre l’un et l’autre des deux camps … Il y a les bons et les méchants : les uns ne sauraient mal faire, les autres ne sauraient bien faire … Aux uns un statut qui garantit l’innocence, aux autres des rôles qui se prêtent à une ‘diabolisation’. Le processus est en marche dès que s’estompe la distinction entre les actes et les acteurs, dès que les ‘valeurs’ s’incarnent dans une catégorie d’hommes. La nature des actes s’efface derrière … Celui qui est dans le bon camp peut se permettre ce qu’il incrimine chez ses ennemis. » (Philippe Bénéton – sur notre idéologie et notre pratique)

« La raison est dépossédée de toute judicature sur les activités humaines (sinon à titre procédural en vertu des droits formels), en conséquence, les activités qui visent à la conquête de la nature, à la transformation des choses, sont affranchies de toute subordination et de toute limite : tout est faisable, tout est manipulable, tout est montrable … Nulle conception du tout, du donné naturel, des finalités proprement humaines, nulle distinction vitale ne viennent y faire obstacle. L’action humaine est coupée de l’être, le monde de l’avoir lui est livré … La raison instrumentale est la raison utilitaire (cantonnée dans l’ordre de l’avoir) qui s’attache à l’efficacité des moyens au service d’un but qu’elle ne questionne pas … Son seul principe ‘more is better’. » (Philippe Bénéton)

« Le point de repère de l’action n’est plus la réalité, ce sont les réactions présumées des autres. On en arrive à une domination de l’opinion. » (Benoît XVI)

« Agir en homme de pensée et penser en homme d’action. » (Henri Bergson)

« Il y avait chez Fénelon quelque chose de très attrayant qui était l’idée : ne faites donc rien puisque ce que vous ferez sera des bêtises … Laissez faire Dieu, laissez faire le monde extérieur : Ne courez donc pas après les filles, attendez qu’elles viennent, ne courez pas après les idées, attendez que ça vienne. D’autant plus que si vous n’espérez rien, tout ce que vous ferez sera autant de plaisirs. » (Emmanuel Berl)

« Le démon de notre cœur s’appelle : A quoi bon ! » (Georges Bernanos)

« Je ne suis pas responsable de ce que j’ai créé. » (Georges Bernanos – humble et lucide comme pour s’excuser, à propos du Journal d’un curé de campagne)

« Dans l’ancienne logique (en cours de liquidation), pour ne pas être n’importe qui, il s’agissait de ne pas faire n’importe quoi, de prouver, dans un faire conséquent … la valeur de son être, sa réalité propre … les nouvelles logiques, économiques, publicitaires, festives, ne pouvaient se contenter trop longtemps de cette preuve par le faire, inadaptée  au marché. Elles se sont mises à promouvoir un autre type de preuve de l’être : ‘je suis parce que je peux aussi faire n’importe quoi’ … surcroît d’adaptabilité. » (Harold Bernat)

« Accomplissement : la fin de l’effort et le début de l’ennui. » (Ambrose Bierce)

« Si l’homme avait commencé par penser au lieu d’agir le cycle de son histoire serait clos depuis longtemps. » (Gustave Le Bon)

« Pensée sans action, vain mirage ; action sans pensée, vain effort. » (Gustave Le Bon)

« La manie de ‘faire’ est essentiellement celle des petits esprits, le goût de conserver est est le caractère des bons esprits. » (Louis-Ambroise de Bonald)

« Les sociétés industrielles modernes, en gagnant en complexité, me paraissent s’éloigner plutôt que se rapprocher de l’idéal (ou du repoussoir) de la ‘programmation’. Demain les possibilités de manipulation génétiques détruiront peut-être le quasi équilibre entre les sexes qu’assumait la nature… Le progrès technique et des effets pervers de type nouveau, type : la pollution… » (Raymond Boudon)

« Nous vivons dans un monde où la gestion tend à remplacer l’action. » (Rémi Brague)

« Un événement a une cause, une action a une raison. La cause explique ce qui est déjà présent, la raison concerne ce qu’on doit pouvoir faire advenir dans le futur. Si l’on pouvait trouver la cause d’une action, cette action ne serait plus une action libre, elle ne serait plus une action du tout, elle serait plutôt un mécanisme. »  (Rémi Brague)

« Nous sommes plus prompts à regretter les conséquences d’une action que celles d’une inaction. Et lorsque celle-ci a des implications morales, les regrets anticipés pèsent encore plus lourds … L’immoralité de l’inaction est moins perceptible que l’immoralité de l’action … Les conséquences de l’action sont généralement visibles alors que celles de l’inaction ne sont que supposées … la crainte des conséquences morales de l’action inhibe la prise en compte des conséquences morales de l’inaction. » (Gérald Bronner)

« Il faut en France beaucoup de fermeté et une grande étendue d’esprit pour se passer des charges et des emplois,  et consentir ainsi à rester chez soi à ne rien faire. Presque personne n’a assez de mérite pour jouer ce rôle avec dignité, ni assez de fond pour remplir le vide du temps. » (La Bruyère) – Engagés, activistes, politiques seraient donc des médiocres ? Probablement, en plus d’être souvent des rapaces.

« La classification brahmanique (purusartha) des ‘buts de l’homme’ distingue quatre buts de l’action humaine, également légitimes, considérés en eux-mêmes, mais hiérarchisés en fonction de leur degré de pureté : Le premier est le plaisir (kama), notamment sexuel – Le second est l’intérêt (artha), subdivisé en intérêts économiques, de pouvoir, de prestige… – Le troisième est l’observation du devoir (dharma), qui incombe à chacun en fonction de la place qu’il occupe dans l’ordre cosmique et social – Le quatrième est la libération (moksa), notamment de celle de l’obligation d’avoir des buts … Traduits en concepts modernes : principe de plaisir, principe de réalité, distinction du bien et du mal et au-delà  des précédents, quête d’a-structuralité et d’a-rationalité. » (Alain Caillé – simplifié)

« Solidarité de la mort et de la vie, de la résistance qui cherche à paralyser tout élan et de l’élan qui s’efforce d’annihiler toute résistance, mais s’épuise par sa propre réussite, du fait qu’en développant son action, il développe en même temps une force qui le freine. » (Roger Caillois)

« La lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir un cœur d’homme. Il faut imaginer Sisyphe heureux. » (Albert Camus)

« Le mal est l’ombre que l’action jette et qui ne veut du mal, se devra condamner à ne jamais sortir de l’impuissance. » (Albert Caraco)

« Agis en primitif et prévois en stratège. » (René Char)

« L’acte est vierge, même répété. » (René Char)

« Seul le dégagement de quelque réalité spirituelle à travers les efforts de la vie peut légitimer notre action. » (Père Teilhard de Chardin) – Evidemment l’auteur ne vise pas des actions banales.

« On croit agir et l’on est entraîné. » (Jacques Chardonne)

« On peut être fier de ce qu’on a fait mais on devrait l’être beaucoup plus de ce qu’on n’a pas fait. Cette fierté est à inventer. » (Emil Cioran)

« Pourquoi les hommes tiennent-ils absolument à réaliser quelque chose ? » (Emil Cioran)

« ‘A quoi bon ? Adage du raté. Quel stimulant quand on commence à en subir la hantise. » (Emil Cioran)

« L’homme n’existe vraiment que quand il ne fait rien. Dés qu’il agit, il devient une pitoyable créature. » (Emil Cioran)

« La sphère de la conscience se rétrécissant dans l’action… » (Emil Cioran)

« Si vous cherchez la pureté, si vous prétendez à quelque transparence intérieure, abdiquez sans tarder vos talents, sortez du circuit des actes, mettez-vus en dehors de l’humain. » ((Emil Cioran)

« L’action se fait oubli de soi, thérapie, moyen de dompter une vie intérieure menaçant, sous l’intensité de ses propres excès, de provoquer un effondrement de l’individu lui-même. » (Emil Cioran –cité par Nancy Huston – sur les positions politiques de jeunesse de Cioran, laquelle écrit aussi « Aragon a peut-être embrassé la cause communiste en raison d’une semblable erreur de l’entropie. »)

« L’excès de délibération gêne tous les actes. Trop disserter sur la sexualité, c’est la saborder … On ne réfléchit pas sans danger sur les actes qui se passent de réflexion. L’orgasme n’a jamais été un événement philosophique. » (Emil Cioran)

« C’est l’action qui nous expose à nous-mêmes et nous révèle les trésors toujours inattendus de notre avoir, de notre joie et de notre puissance … Sortir de ce que je contiens. » (Paul Claudel) 

« Ni l’individu ni l’espèce ne sont destinés à consumer leur vie dans une activité stérilement raisonneuse en dissertant continuellement sur la conduite qu’ils doivent tenir. C’est à l’activité‚ qu’est appelée essentiellement la masse des hommes. » (Auguste Comte)

« Il n’y a que deux buts d’activité possible pour une société, ce sont l’action violente sur le reste de l’espèce humaine, ou la conquête, et l’action sur la nature, pour la modifier à l’avantage de l’homme, ou la production … le but militaire était celui de l’ancien système, le but industriel est celui du nouveau. » (Auguste Comte) – S’il avait vécu, 1914 et la suite l’aurait sans doute convaincu que les deux systèmes vont très bien de pair, au moins pour quelque président américain que ce soit.

« Il n’est jamais trop tard pour ne rien faire. » (Confucius)

« Au tir, il ne s’agit pas de dépasser sa cible mais de l’atteindre. » (Confucius)

« L’homme n’avance jamais avec autant d’assurance que lorsqu’il ne sait pas où son chemin le mène. » (Cromwell) – « Ce sont les hommes qui écrivent l’histoire, mais ils ne savent pas l’histoire qu’ils écrivent. » (Raymond Aron)

« Car en toute action l’intention première de l’agent, qu’il agisse par nécessité de nature ou volontairement, est de révéler sa propre image ;  d’où vient que tout agent, en tant qu’il agit, prend plaisir à agir puisque tout ce qui est désire son être et puisque dans l’action l’être de l’agent est en quelque sorte intensifié, le plaisir suit nécessairement … Donc rien n’agit sans rendre patent son être latent. » (Dante – cité par Hannah Arendt)

« ‘Faire des choses avec des mots’’ –‘Les paroles qui ébranlèrent le monde’ – ‘Les idées qui ont changé l’époque’ –  ‘Les livres qui ont fait la Révolution’  – ‘La puissance matérielles des paroles’ (Edgar Poe) … Comment un placard affiché à la porte d’une église devient-il guerre de religion et Protestantisme ? Comment les quelques feuillets du ‘manifeste du parti communiste’ ont-ils pu se transformer en un système international couvrant un milliard de sujets ?…  Comment une représentation du monde (sonore, visuelle, ou les deux) devient-elle, dans certaines circonstances, une action sur le monde … Souci de l’efficacité symbolique, des embouchures (des résultats) plutôt que des sources (des origines, des raisons) … L’emballage, la découpe, l’énonciation plutôt que l’énoncé … Laconisme, densité du trait, brièveté ingénieuse, fulgurance … »  (Régis Debray – explication succincte de l’approche médiologique)

« Agis peu, si tu veux demeurer dans la sérénité. » (Démocrite)

« Nous sommes maîtres de nos actions jusqu’au moment de leur exécution ; aussitôt exécutées nous en devenons les esclaves. » (Louis Dumur)

« L’homme agit comme s’il ne devait jamais mourir et sans cela il n’agirait guère. » (Louis Dumur)

« Une fois dépassés certains seuils, notre pouvoir de faire excède infiniment notre capacité de sentir et d‘imaginer …  Cet écart irréductible que Günther Anders nomme le ‘décalage prométhéen’. » (Jean-Pierre Dupuy) – Sur notre capacité de verser dans l’atroce ; Auschwitz, Dresde, Hiroshima, et depuis lors !

« Notre capacité d’agir, déclencher des processus irréversibles et qui n’ont pas de fin, lesquels peuvent se retourner contre nous. » (Jean-Pierre Dupuy – sur la science) – « Entre notre capacité de fabrication et notre capacité de représentation un fossé s’est ouvert qui va s’élargissant de jour en jour … Décalage prométhéen … Le ‘trop grand’ nous laisse froid. » (Günther Anders) – Eichmann, comme les atomistes, dépassé ! (je n’ai pas d’autre terme)

« Si tu es juste, tes œuvres aussi seront justes. » (Maître Eckhart)

« La capacité à agir par soi-même est le noyau de la socialisation, l’action en panne le trouble fondamental de la dépression. » (Alain Ehrenberg)

« La bureaucratie réalise la mort de toute action. » (Albert Einstein)

« Plus de paroles, des actes, dit-on. – Avant tout être efficace … Le plus grand effet obtenu avec le minimum de moyens nous paraît être la preuve de la vérité … Plus je dialogue, plus je m’informe, moins je suis capable d’agir et d’intervenir, d’être efficace (le grand souci dans notre société) … Mon choix est alors évident. Plus de dialogue, de confrontation, de modulation. Plus de paroles qui embrouillent tout, mais des actes qui éclaircissent tout. A partir de l’acte, dans l’acte, tout devient simple … L’acte vaut par lui-même … Si tu réfléchis aux tenants et aboutissants de tes actes, tu es perdu. Si tu réfléchis à la signification de tes actes, tu es paralysé. Si tu cherches une raison, tu n’en trouveras pas. Si tu tiens compte de l’homme en face, tu ne passeras jamais. Telle est la profonde sagesse exprimée par ce lieu commun … L’acte et la parole ne se complètent pas. L’acte ne prouve pas la parole, ni la parole n’explique l’acte … L’acte et la parole sont exclusifs l’un de l’autre, ennemis irréductibles … Qui parle se condamne à ne plus agir … Qui agit ne peut plus parler (il peut seulement crier). » (Jacques Ellul  – sur ‘plus de paroles, des actes’  – Exégèse des nouveaux lieux communs) 

« Cette parole implique de la part de celui qui l’a dit l’acceptation à priori de tous les compromis, de toutes les saletés, de toutes les trahisons et de tous les mépris sur l’homme, de tous les avilissements et de tous les génocides ; c’est la parole de lâcheté consentante sous les apparences du courage de l’engagement. » (Jacques Ellul  –  ‘on ne peut agir sans avoir les mains sales’ – Exégèse des nouveaux lieux communs)

« L’ancêtre de toute action est une pensée. » (Ralph Emerson)

« Rien n’est plus rare dans un homme qu’un acte qui vient de lui, en propre. » (Ralph  Emerson) 

« En toute action, examine ses antécédents et ses conséquents, et alors seulement entreprends-la. Si tu ne le fais pas, tu seras au début plein d’ardeur, parce que tu n’as pas songé à ce qui vient ensuite, mais plus tard, quand certaines difficultés apparaîtront, honteusement tu t’en désisteras. » (Epictète)

Les suractifs sont souvent ceux qui « disent et ne font pas. » (Evangiles – sur les Pharisiens)

« Action pure ne signifie pas action aveugle. La règle qui interdit de tenir compte des conséquences quand on doit faire ce qui doit être fait vise les mobiles affectifs individuels (les fruits de l’action, les perspectives de succès ou d’insuccès, de gain ou de perte, celles de plaisir ou de douleur, d’approbation ou de désapprobation d’autrui), et non pas les conditions objectives dont l’action doit tenir compte pour être, autant que possible, une action parfaite , ou, du moins, pour ne pas être vouée à l’échec dés le début. On peut ne pas réussir, ceci est secondaire mais ne doit pas résulter de l’ignorance de tout ce qui conditionne l’efficacité de l’action … les rapports de causalité … la loi des actions et réactions correspondantes. » (Julius Evola)

« On ne fonde en soi l’Être dont on se réclame que par des actes. Un Être n’est pas de l’empire du langage, mais de celui des actes. » (Saint-Exupéry)

« ‘Il ne faut rien se proposer, il ne faut pas faire de plans, il faut suivre des indications.’ L’homme qui fait des plans croit pouvoir tirer la vérité de son propre fonds et plier la réalité à ses modèles. L’homme qui suit des indications subordonne sa pensée au visage que présentent les choses et les événements … Celui qui fait des plans décide de tout, celui qui suit des indications s’attend à tout … Esprit de méthode contre esprit d’aventure. » (Alain Finkielkraut – commentant Péguy)

«  Le primitif ne connaît pas d’entraves à l’action ;  ses idées se transforment immédiatement en actes ; on pourrait même dire que chez lui l’acte remplace l’idée. Au commencement était l’action. » (Sigmund Freud – Totem et tabou) – Et il y a des primitifs dans le monde d’aujourd’hui, et même de plus en plus.

« Les Occidentaux croient agir, alors qu’ils ne sont plus que fiévreux. » (Julien Freund)

« Tout ce que tu feras sera dérisoire, mais il est essentiel que tu le fasses. » (Indira Gandhi)

« Délibérer est le fait de plusieurs, agir est le fait d’un seul. » (Charles de Gaulle)

« Ne te préoccupe que de l’acte, jamais de ses fruits. N’agis pas en vue du fruit de l’acte. » (Bhagavad-Gïtâ) – Mais « L’éthique du non- attachement à l’acte soulève … l’objection habituelle d’être habitée par une quiétude trop facile … Le reproche général que l’on fait à la spiritualité d’être une sorte de lâcheté ou de désertion. » (Raymond Abellio)

« Tout s’arrangerait bien si l’on pouvait faire les choses deux fois. » (Goethe)

« Si l’idée agrandit, c’est l’action qui vivifie … Au commencement était l’action. » (Goethe)

« Une activité sans bornes finit toujours par faire banqueroute. » (Goethe – à propos de Napoléon)

« Je n’ai fait que courir par le monde, saisissant aux cheveux tout plaisir, négligeant ce qui pouvait suffire, et laissant aller ce qui m’échappait. Je n’ai fait qu’accomplir et désirer encore, et j’ai ainsi précipité ma vie dans une éternelle action. » (Goethe – Le second Faust)

« Puissé-je vous trouver dans une sereine activité, car c’est par là qu’on arrive le mieux et le plus purement à la connaissance et à l’expérience du monde. » (Goethe – à Eckermann)

« L’idée agrandit, mais elle paralyse ; l’action vivifie, mais elle restreint … Au commencement était l’action. » (Goethe – Willhelm Meister)

« Comment pouvons-nous parvenir à nous connaître ? On ne peut y parvenir que par l’action et non par la spéculation. Tâche de faire ton devoir et tu sauras immédiatement quelle est ta valeur … Nos œuvres sont le miroir où notre esprit aperçoit pour la première fois ses exactes proportions … Il faudrait traduire le précepte ‘Connais –toi toi-même’ par  ‘Sache ce dont tu es capable’. » (Goethe – Wilhelm Meister)  – «  Il y a une recherche de soi, un regard jeté en arrière pour mesurer le chemin que nous avons parcouru, qui n’est d’aucun profit ; le seul intérêt est d’aller continuellement de l’avant et de parcourir le plus de chemin possible. » (Thomas Carlyle)

« L’homme d’action est toujours sans conscience ; il n’y a d’homme consciencieux que le contemplatif. » (Goethe)

« Commence par faire ce que tu as à faire, et tu sauras vite ce que tu es. » (Goethe)

« La béquille du temps fait plus de besogne que la massue d’Hercule. » (Baltasar Gracian)

« L’action est le remède à l’angoisse de l’homme moderne, le fruit de sa liberté et son prix. La certitude s’accorde avec la contemplation, l’incertitude non … Accoucheur d’un avenir dont il est le maître d’œuvre alors qu’il n’est pas le maître d’œuvre d’un présent qui s’impose à lui … ‘Où l’homme dont jamais l’espérance n’est lasse, pour trouver le repos court toujours comme un fou’. » (Henri Guaino – citant Baudelaire)

« On n’avait jamais songé à remplacer le projet, la stratégie et la réflexion par le hasard du bricolage. Cette mode du bricoage est inséparable de celle de la réactivité. ‘Réagir’ est le maître mot de notre vie sociale … Réaction instantanée, instinctive, automatique, et non pas action délibérée, réfléchie, en vue d’un but, au service d’un dessein : telle est la nouvelle philosophie… En tout il s’agit de rester branché sur l’extérieur, de capter l’information, de la trier, de l’interpréter. Plus rien ne vient de l’intérieur, plus de stratégie volontariste, plus de savoir-faire spécifique. » (Henri Guaino)

« La disposition naturelle à l’action, existant chez les Occidentaux ne les empêchait pourtant pas de reconnaître la supériorité de la contemplation … L’esprit occidental moderne, qui, non content de proclamer en toute occasion la supériorité de l’action, en est arrivé à en faire sa préoccupation exclusive et à dénier toute valeur à la contemplation, dont il ignore ou méconnaît d’ailleurs la véritable nature ; tombant ainsi dans l’agitation brouillonne qui caractérise l’Occident. » (René Guénon)

« Toute action qui ne procède pas de la connaissance manque de principe et n’est plus qu’une vaine agitation … Le renversement des rapports de la connaissance et de l’action, dans une civilisation (la nôtre) est une conséquence de l’usurpation de la suprématie par le pouvoir temporel (sur l’autorité spirituelle). » (René Guénon)

« Lorsqu’on a cultivé en soi une pensée avare et rabougrie, on ne peut pas aller vers l’action. Et, de même, si l’on a agi sous l’anesthésie de l’action automate, comme l’insecte, on ne sera pas porté à penser. » (Jean Guitton – Apprendre à vivre et à penser)

« L’homme le plus prévoyant est incapable de calculer la portée de ses actes. Une fois que la flèche a quitté l’arc, que la balle a quitté le fusil, que la pierre a quitté la main qui l’a lancée, elles appartiennnent au diable, comme dit le proverbe. » (Eduard von Hartmann)

« L’homme n’est rien d’autre que la série de ses actes. » (Hegel)

« Dans le spectacle que nous offre l’activité (historique), ce sont les besoins, les passions, les intérêts qui apparaissent comme les seuls mobiles … Les lois et les principes (d’ordre supérieur, porteurs de vertu : amour de la patrie, de la famille…) ne vivent pas et ne s’imposent pas immédiatement d’eux-mêmes … Pour que je fasse de quelque chose une œuvre, il faut que j’y sois intéressé … César a combattu ses ennemis poussé par le seul intérêt  d’assurer sa position, son honneur, sa sécurité et les a vaincus… Or, l’accomplissement de son but était en même temps en soi une détermination nécessaire dans l’histoire de Rome (le pouvoir unique) et dans l’histoire du monde … César devait accomplir le nécessaire et donner le coup de grâce à la liberté moribonde … Ce n’est pas l’Idée qui s’expose au combat, au conflit et au danger, elle se tient en arrière … et envoie au combat la passion pour s’y consumer … On peut appeler ‘ruse de la raison’ le fait qu’elle laisse agir à sa place les passions. (Hegel – simplifié)

« Ne pas confondre mouvement et action. » (Hemingway)

« L’âme éprouve dans le corps de la joie à être active et créatrice. » (sainte Hildegarde de Bingen)

« Si je n’agis pas en faveur de moi-même, qui le fera à ma place ? Et si je n’agis qu’en ma faveur, qui suis-je donc ; et si je n’agis pas dans le présent, quand le ferai-je ? » (rabbin Hillel)

« L’effet de contrecoup … qui explique … l’exagération du bénéfice et la sous-évaluation du coût que l’on observe quand une action vient en contrepoint d’une action antérieure qui s’est mal terminée … Déçus par la consommation privée, plus ‘mûrs’ pour l’action collective … Choix amoureux déconcertant expliqué par l’échec d’une autre liaison… » (Albert Hirschman)

« Le drame noue l’action, la comédie l’embrouille, la tragédie la tranche. » (Victor Hugo) – Dans la vie comme au théâtre.

« Jusqu’à la fin des temps l’acte une fois actualisé aura quitté sans retour le royaume des possibles. » (Vladimir Jankélévitch) – L’irrévocable)

« Ce qu’on ne peut défaire, c’est le fait-d’avoir-fait … jamais plus la chose faite pourra devenir non-faite … Et de même on ne peut faire que ce qui a été dit n’ait pas été dit ; mieux encore : on ne peut à la fois avoir eu un jour l’intention et n’avoir jamais eu l’intention… » (Vladimir Jankélévitch – sur l’irréversibilité et l’irrévocabilité)

« L’importance d’un acte n’est pas toujours proportionnée à son ‘volume’. Les caprices du remords, comme ceux de la mémoire, traduisent à leur manière cette espèce de fantaisie profonde qui est propre au monde de la qualité. » (Vladimir Jankélévitch)

« Toute action entraîne dans le monde des conséquences dont l’agent ne s’était pas douté. » (Karl Jaspers) – C’est l’apparition du tragique.

« Notre temps pense en fonction de ‘savoir comment faire ceci’ même lorsqu’il n’y a rien à faire. » (Karl Jaspers)

« Il y a un suprême plaisir, non à bien faire, mais à faire aussi bien qu’on peut. » (Joseph Joubert)

« Les idées claires nous servent à penser ; mais c’est toujours par quelques idées confuses que nous agissons. » (Joseph Joubert)

« Deux types d’action : celles que j’accomplis sous la pression de causes extérieures, sans choix, ni délibération ; celles que j’accomplis en fonction d’un certain résultat que je souhaite obtenir, impliquant une vision de la situation future et d’un ‘chemin’ vers cet objectif. » (Bertrand de Jouvenel)

« Le hasard d’une part, l’art de l’autre, un troisième terme s’interpose pour penser l’action, l’occasion (le ‘kairos’ grec) … Le moment favorable offert par le hasard et que l’art permet d’exploiter … Le temps opportun … ‘Rien ne vaut mieux que de la connaître’ (Pindare) … ‘le meilleur des guides dans toute entreprise humaine’ (Sophocle). » (cité par François Jullien)

« Toute disposition entrave ma réactivité. Car toute disposition par elle-même est enlisante (par perte de dynamisme), réifiante (par perte de possibilité). » (François Jullien – sur la pensée chinoise) – Rester disponible.

« Plus qu’à la transcendance de l’action, les Chinois croient à l’immanence de la transformation … La nature grecque ‘fabrique’, le sage chinois ‘transforme’ … L’agir sans visée est généreux, l’agir concerté est étriqué … Le non-agir est un agir en amont. » (François Jullien) – Voir en fin de cette rubrique. 

« C’est l’absence de buts demandant un effort pour être atteints  qui engendre l’ennui et que souvent ce dernier, s’il dure, conduit à la dépression …Pour éviter de sérieux problèmes psychologiques, un homme doit donc se donner des buts qui supposent des efforts pour être atteints, et il doit connaître un minimum de succès dans la poursuite de ces buts. Quand les gens peuvent satisfaire sans efforts leurs besoins physiques, ils s’inventent souvent des objectifs artificiels, auxquels ils consacrent la même énergie, avec le même investissement émotionnel que s’il s’agissait d’assurer leur survie … ‘Activités de substitution’ celles-ci désignant une activité dirigée vers un but artificiel que les gens se donnent à seule fin d’avoir un but quelconque à poursuivre ainsi que pour éprouver un sentiment de ‘réalisation’ … C’est par ‘l’auto-accomplissement’ : avoir un but et l’atteindre par un effort autonome que s’acquièrent estime de soi, confiance et sentiment de puissance. Sport, bridge, échec, philatélie, recherche érudite, etc. » (Théodore Kaczynski)

« Ils ont les mains propres, mais ils n’ont pas de mains. » (Kant, repris par Charles Péguy)  – Sur ceux qui contemplent le monde sans mettre les mains à la pâte.

« La coutume et l’usage furent toujours que le résultat vienne en dernier lieu et que, si l’on veut vraiment apprendre quelque chose des grandes actions, il faut justement prêter attention au commencement. Si celui qui doit agir veut se juger lui-même à partir du résultat, jamais il ne parviendra à commencer … On ne connaît le résultat que lorsque tout est terminé … On devient un héros parce qu’on commence. » (Kierkegaard)

« Comme il est souvent si difficile de transformer un acte en pensée ! » (Karl Kraus)

« L’acte ne réussit jamais si bien qu’à rater. » (Jacques Lacan)

« Dès que l’on s’engage du côté de l’action, on tend le flanc à la critique de ceux qui ont choisi le doux confort intellectuel de l’inertie qui jamais ne viendra leur porter la contradiction. » (Cécile Ladjali)

« L’urgence humanitaire devient un simulacre qui évite de trancher … Volonté de ne pas agir sur l’origine ou les conséquences politiques d’une crise … Aide aux victimes, évitement politique … Agir pour ne pas choisir. » (Zaki Laïdi)

« Je le fais, ce que je fais est, le je qui le fait, le je qui le fait est, ce que je fais, ce qui fait le je qui le fait, c’est en faisant le je que je le fais, je suis fait par ce que je fais, en le faisant. » (Ronald Laing)

« Il faut se retirer, de la foule pour penser, et s’y confondre pour agir. » (Lamartine)

« Dans la solitude il faut agir comme si on était vu du monde entier, et quand on est vu du monde entier agir comme si on était seul. »  (Louis Lavelle)

« Le malheur des hommes provient souvent non pas de ce qu’ils n’agissent point assez, mais de ce qu’ils agissent trop ou à contre-temps. Ils introduisent alors dans l’ordre naturel des effets de leur volonté qui, en servant un de leurs désirs présents, en violentent d’autres plus profonds… » (Louis Lavelle) – C’est pourquoi notre époque d’agités introduit le chaos, notamment de la part de dirigeants frénétiques, des pantins hystériques.

« La communication ne fait pas l’action. Elle en est même souvent l’exact contraire. » (Barbara Lefebvre)

« Celui qui agit se rend toujours maître de celui qui ne fait que penser. » (Giacomo Leopardi) 

« Les raisons d’agir sont comme les rouages d’une machine. Plus il y en a, plus la machine est fragile. » (G. Lessing)

« Toute personne est moindre que ce qu’elle a fait de plus beau. » (Paul Valéry) – « Quand une œuvre est réussie, le fait est que ce n’est pas simplement un homme qui en est l’auteur, mais un homme inspiré. » (Hilaire Belloc) – cités par Simon Leys.

« Ce que l’opinion commune flétrit sous le nom de paresse reflète en réalité un jugement plus sûr et requiert plus de caractère que la fuite facile dans l’activisme. Bien sûr, nous devons reconnaître les mérites de Marthe qui s’occupe des besognes ménagères, mais nous savons bien que c’est Marie qui a choisi la meilleure part, simplement assise aux pieds du Seigneur. » (Simon Leys – Evangiles, bien sûr)

« Nous donnons forme à nos actions un peu comme l’aimant donne forme à la limaille de fer. » (Georg Christoph Lichtenberg – sur la croyance à une détermination  libre et volontaire de nos actions)

« Il vaut bien mieux faire et se repentir, que se repentir et ne rien faire. » (Machiavel)

« L’idée d’une action désirable par elle-même a perdu son sens pour nous. Nous faisons ce que nous faisons non pas parce que cela est utile, honnête ou noble, mais parce que cela est nécessaire , parce que nous ne pouvons pas faire autrement … Répondre avec docilité aux indications du marché mondial … Nous nous sommes détournés de Dieu, il est vrai, mais pour nous mettre plus que jamais sous le pouvoir de plus grand que nous. » (Pierre Manent) – Servilité.

« Au terme ‘idéologie’ se rattache désormais ce sens adjacent … irréalité de la pensée … par rapport à la ‘praxis’ … toute idée dénotée comme idéologie échoue au regard de la praxis ; l’instrument véritable qui fraye la voie à la réalité, c’est l’agir ; et, mesurée à ce dernier, la pensée en général, ou dans tel ou tel cas, une pensée déterminée sont néant. » (Karl Mannheim)

« L’action nécessite un minimum de courage. Le courage vient du cœur, qui est lui-même le lieu de la sensibilité et de la décision. » (Renaud Denoix de Saint Marc – cité par Malika Sorel-Sutter – à propos de nos politiciens)

« Se salir les doigts n’est pas se salir les cœurs. » (Jacques Maritain – Humanisme intégral) – Certes, mais on y arrive vite.

« Pour Adam Smith, il n’y a que deux motifs d’action fondamentaux, le désir d’améliorer notre condition qui repose sur l’amour de soi (dérivé de l’instinct d’autopréservation) et le désir de l’approbation d’autrui. » (Christian Marouby) – Et l’action suite à la pulsion sexuelle ?

« Ce qui distingue l’action humaine d’un simple mouvement naturel, c’est la présence de motifs, de préférences, de dispositions, d’intentions, de raisons ; en bref, de tout ce qui peut pousser un individu à faire un choix, à prendre une décision, à accomplir quelque chose … Toute activité humaine poursuit des buts, adopte des règles, cherche à promouvoir des valeurs. Les buts définissent en général l’objet d’une activité, les règles en déterminent la forme, les valeurs permettent de la justifier et de l’évaluer d’un point de vue éthique. » (Michela Marzano)

« Les raisons d’agir. Les raisons explicatives permettent uniquement de rendre une action intelligible … Elles donnent une idée des motivations, mais ne justifient pas pour autant la conduite d’un individu … même en cas de consentement (d’une autre partie) …  Les raisons justificatives permettent de la justifier et de comprendre ainsi si l’action accomplie est ‘légitime’ d’un point de vue éthique. » (Michela Marzano)

« Albert Camus avait remarqué que toute action se heurte tôt ou tard à une limite qui la change en son contraire … Ainsi, à titre d’exemple, de l’indignation qui peut, quand elle s’exaspère perdre tout contact avec la mesure qui l’animait, et, en se voilant de son hypocrisie, ouvrir la voie à toutes les lâchetés. » (Jean-François Mattéi)  

« Comme le ‘bout’ ne se profile jamais, l’activisme s’abîme finalement dans la surtension, le surmenage, l’épuisement et la dépression, ce qu’Alain Ehrenberg a si bien appelé ‘la fatigue d’être soi’ qui vient après le culte de la performance … Là où il fallait patience, endurance, confiance, stoïcisme ou résignation, tout se traite par la désinhibition ; comme on dit sans cesse, ‘il faut faire quelque chose’. Là où on se contentait d’explications  et d’éclaircissements, on recherche à répétition l’allégement. » (Yves Michaud)

« Personne ne prétend que les actions doivent être aussi libres que les opinions. » (John Stuart Mill)

« L’action implique toujours à la fois prendre et rejeter … agir est employer  des moyens pour atteindre des fins … Celui qui accomplit l’action croit que le moyen employé obtiendra l’effet désiré … L’homme est en mesure d’agir parce qu’il est doté de la faculté de découvrir des relations de causalité qui déterminent le changement et le devenir …  ‘Le mobile qui pousse un homme à agir est toujours quelque sensation de gêne’ (Locke). »  (Ludwig von Mises)

« Agir, c’est se limiter : une action réelle exclut toutes les autres actions possibles, celles qui auraient pu être élues à sa place … je ne puis me manifester sans me limiter … La manifestation de ce que nous sommes se confond originellement avec l’individuation, le fait ‘d’être celui-ci’. Ne pas se manifester, c’est ne pas émerger de l’indistinction, c’est ‘ne pas être’.» (Jules Monnerot) – L’action est un choix, et comme tel, elle exclut tous les autres possibles.

« L’agent apparaît comme l’auteur de l’acte (qui n’est pas l’effet inévitable et quasi automatique  d’actes antérieurs). L’originalité de l’acte, et son rapport à l’auteur, permet de constituer la notion de personne … La productivité des actes … Notion que l’homme ‘avance’ par ses actes … Toutes notions occidentales, avancement et sa provocation par des actes … Alors que du côté indien, par exemple, il s’agit de s’arracher au torrent ininterrompu des actes … ‘L’Inde n’a point par elle-même constitué les archives de son passé’ car il ne s’agit point de faire revivre les actes par la mémoire mais au contraire de les exorciser … Ce n’est point le héros épique, ou tragique, ou le grand homme historique qui ‘représentent’ l’homme, c’est l’ascète ou le sage … qui prétend rompre la chaîne ou la trame et sauter hors de l’être … Dans la tradition occidentale, tout doit se passer en une seule vie (l’horizon chrétien ne supprime pas cette nécessité, mais la porte à l’absolu, la sanction vient par la vie éternelle) … d’où l’urgence d’agir, le refus de la passivité, l’Histoire … Positivité des actes, connexion de l’acte et de la personne, démarche de l’homme avançant d’acte en acte, la lucidité de l’homme braquée sur la limitation de l’homme, le résultat étant la décision de l’homme d’agir sans fin. » (Jules Monnerot approx. – Les lois du tragique)

« Un acte n’est rien sur le moment. C’est un objet que vous jetez à la rivière. Mais il suit le cours de la rivière, il est encore là, au loin, bien au loin, toujours là ; il traverse des pays et des pays ; on le retrouve quand on n’y pensait plus, et où on l’attendait le moins … Cette existence interminable des actes. » (Henry de Montherlant – La reine morte)

« Nulle action n’est assurée d’œuvrer dans le sens de son intention …  L’idée que les conséquences de l’action échappent aux intentions de ses initiateurs. … Je sais qu’il ne suffit pas d’avoir de bonnes intentions ni même de bonnes actions pour avoir de bons résultats. … Nulle action n’est assurée d’œuvrer dans le sens de son intention … Je sais que les moyens pervers contaminent les fins, mais je sais aussi que des moyens vertueux peuvent avoir des effets pervers.» (Edgar Morin)

« Il faut se garder de juger la valeur d’un homme d’après un acte particulier. » (Napoléon Bonaparte)

« Nous sommes forcés d’agir et nous ne pouvons que rarement examiner la preuve des faits qui nous contraignent. » (cardinal Newman) – Echo du mot « Nous sommes embarqués. » (Blaise Pascal)

« Quand on a fini de bâtir sa maison on remarque qu’on a, sans s’en rendre compte, appris en la bâtissant une chose qu’il aurait absolument fallu savoir avant de commencer. L’éternel et douloureux : ‘trop tard’. » (Nietzsche)

« Nos actions ne sont généralement pas typiques et elles sont loin d’être comme des résumés de la personne … Actes de circonstances, réactions épidermiques, réponses automatiques à quelque stimulation avant même que la profondeur de notre être ait été sollicitée. Une colère, une empoigne, un coup de couteau : en quoi cela exprime-t-il une personne ? » (Nietzsche)

« Le moindre mouvement importe à toute la nature, La moindre action importe à tout par ses suites. Le moindre mouvement importe à toute la terre. La mer entière change pour une pierre. » (Blaise Pascal)

« Et Krishna … lui donne la leçon suprême : agis, puisque tu ne peux faire autrement, mais ne t’attache pas à l’action, et que l’action ne s’attache pas à toi. » (?) – « Que la barque soit sur l’eau, c’est bien. Mais l’eau dans la barque tu coules. » (Ramakrishna) – cités par Louis Pauwels.

« Il ne faut pas suivre les plans, il faut suivre les indications. » (Charles Péguy)

« Passez suffisamment de temps à confirmer la nécessité d’agir et celle-ci disparaîtra. » (principe de Peter, dit pronostic de Peter)

« Il y a bien des façons de passer à l’acte, se taire en est un. » (Jean-Bertrand Pontalis)

« Nous sommes devenus très grands dans le ‘Faire’, mais il n’en va pas de même dans ‘l’Être’, dans l’art de l’existence. » (cardinal Joseph Ratzinger)

« La foi chrétienne c’est reconnaître que le don précède l’action, sans pour  autant déprécier l’action. C’est parce que nous avons reçu qu’il nous est  possible de ‘faire’. » (cardinal Joseph Ratzinger)

« Si on se tait pour de grandes raisons, on n’agit que pour des petites. » (Jules Renard)

« Ce ne sont pas les actes qui doivent servir de critère, quand on évalue les zélateurs d’un modèle idéal, ce sont les intentions. » (Jean-François Revel – jugeant sévèrement l’absence de critique des bourreaux communistes) – Un peu trop facile. « L’interchangeabilité de l’intention et de l’action, ce bonneteau de la théorie refilée à la place de la pratique. » (Jean-François Revel) – A gauche on nuit mais c’est avec de bonnes intentions, alors qu’à droite, on ne nuit pas, mais les intentions ne peuvent être que perverses (faire le jeu de…).

« Il me faut tellement de temps pour ne rien faire, qu’il ne m’en reste plus pour travailler. » (Pierre Reverdy – sur l’activisme)

« C’est un terrible avantage que de n’avoir rien fait, mais il ne faut pas en abuser. » (Rivarol)

« Il faut faire ce qu’on peut, ce qu’on doit et ce qui convient. » (Rivarol)

« Nous aurions souvent honte de nos plus belles actions si le monde voyait tous les motifs qui les produisent. » (La Rochefoucauld)

« ‘On n’agit jamais seul.’ La personne d’autrui intervient toujours. » (Clément Rosset) – C’est quand justement on l’ignore ou la néglige que notre action est susceptible de générer les plus grandes catastrophes par le biais des effets que l’on qualifie de pervers.

« Attendre d’en savoir assez pour agir, c’est se condamner à l’inaction. » (Jean Rostand)

« La lenteur n’est pas la marque d’un esprit dépourvu d’agilité ou d’un tempérament flegmatique. Elle peut signifier que chacune de nos actions importe, que nous ne devons pas l’entreprendre à la hâte avec le souci de nous en débarrasser. » (Pierre Sansot)

« L’action, quelle qu’elle soit modifie ce qui est au nom de ce qui n’est pas encore. Puisqu’elle ne peut s’accomplir sans rompre l’ordre ancien, c’est une révolution permanente. » (Jean-Paul Sartre)

« L’esprit profondément individualiste de l’Evangile refuse absolument à faire dépendre notre action et notre attitude de l’attitude des autres … entend empêcher l’individu, dans l’action, d’être rabaissé à un niveau inférieur par l’attitude d’autrui, empêcher son action d’être une-réaction. L’action doit s’élaborer vitalement dans la profondeur de la personne même. » (Max Scheler)

« On ne doit rien faire par religion, mais tout avec religion. » (Friedrich Schleiermacher) – Avec sérieux et du mieux que l’on peut.

« L’activité est indispensable au bonheur. » (Arthur Schopenhauer)

« C’est l’indépendance de nos volontés par rapport aux circonstances extérieures qui constituerait véritablement le libre arbitre … Ou bien nos actes résultent de circonstances précédentes comme des effet qui se produisent nécessairement à la suite de leurs causes … Si l’on admet le libre arbitre, chaque action humaine est un miracle inexplicable, un effet sans cause … Comme l’eau reste tranquille et limpide sauf lorsque des circonstances déterminantes l’amènent à un autre état (vent, pente plus ou moins forte, chute verticale, chaleur bouillante ou gel…) ; l’homme n’agit que mû par des causes, ou motifs, et alors il agit comme l’exigent les circonstances correspondant à chaque cas et s’il ne rencontre pas de motif de contradiction impérieux (l’amour de la vie ou la crainte de la mort contrebalançant l’envie de suicide – réticence à tout donner aux pauvres, sauf caractère de sainteté…) … Les motifs opposés ayant sur moi trop d’emprise pour que je ‘fasse ce que je veux’ … Ce n’est que par l’expérience, et à mesure d’occasions, que notre connaissance de nous-mêmes s’approfondit, et c’est sur elle que repose notre confiance et notre méfiance en nos propres moyens … c’est-à-dire sur le caractère acquis (d’ailleurs l’opinion ne blâme pas tellement l’action que l’auteur, considéré comme le vrai responsable : ‘Que voilà un méchant homme, un coquin’), les actes sont le signe de la disposition intérieure  … Les actions individuelles s’enchaînent suivant un rigoureux déterminisme une fois que le caractère est donné … Chaque action individuelle est le produit de deux facteurs : le motif et le caractère individuel … Il faut que la cause active puisse agir sur ce caractère, et que ce caractère soit déterminable par une telle cause … Si la volonté est la cause nécessitante des actes volontaires, elle est nécessairement causée par d’autres choses indépendantes d’elle. » (Schopenhauer)

« Les commencements dépendent de nous. L’issue, elle, est aux mains de la Fortune. » (Sénèque)

« Tout travail humain s’arrêterait si les tentatives malheureuses ne laissaient le désir de recommencer. » (Sénèque)

« Ce qui déclenche l’action d’un individu n’est pas son opinion ou sa volonté, mais son questionnement sur le fait qu’il agirait à condition qu’un assez grand nombre agissent aussi. »  (Pablo Servigne, Raphaël Stevens – traitant de l’action collective)

« La mobilisation est la réponse moderne à la périssabilité de la vie et à l’inégalité des conditions. Grâce à elle, le procès des mécontentements concernant le monde passe en deuxième instance. Les grands mobilisateurs de la modernité sauvent la promesse de vaincre la finitude et la périssabilité de la condition humaine par la mobilisation affranchissante de la condition finie et périssable même. La rapide adoption planétaire de cette impulsion montre  l’obsession avec laquelle la vie à l’époque postmétaphysique cherche à venir à bout de son irréversibilité dans son déroulement vers la mort. A la place des efforts d’éternisation, devenus non plausibles,  elle met en jeu des stratégies modernes de dynamisation … A la peur du mouvement irréversible ne répond plus la fuite dans l’immobile mais la fuite dans le fugitif. Curieusement, par son refus de l’arrière-monde et de l’au-delà, l’immanentisme moderne n’a pas créé un ici-bas solide, mais a transformé l’ici-bas en une apparition fantomatique et l’a mobilisé jusqu’à la volatilisation. » (Peter Sloterdijk – La mobilisation infinie) – Activisme débridé, affolé…

« Notre monde ne vit que dans l’urgence et dans le ‘zapping’, l’obsession du mouvement et de l’action. Tout doit changer et bouger sans cesse : les hommes, les machines, l’information, les idées et les idéaux. Nos sociétés modernes ont développé une religion du mouvement perpétuel … Frénésie qui ressemble à une fuite en avant et à une perte de sens … Course folle, fascination pour l’éphémère et l’événementiel … La cinétique est l’éthique de la modernité. » (Peter Sloterdijk)

« Tout se passe toujours autrement que prévu. Quand tout se passe normalement, tout se passe autrement, voilà l’ancienne expérience pratique de la vie. » (Peter Sloterdijk)

« Ne pas agir demeure un geste libérateur dont la vertu consiste en l’interprétation des mécanismes moralisateurs qui mènent à l’engagement. » (Peter Sloterdijk)

« Quel orgueil que de vouloir changer le cours des choses, de vouloir sauver ce monde qui est un ‘torrent en crue’ … L’homme qui sait qu’il ne peut réussir mais continue ses tentatives. » (cité par Marc de Smedt – reprenant les critiques des Taoîstes contre les Confucéens et les bienfaits du non-agir)

« Ce que je me propose de faire ou de dire est-il Vrai ? Bon ? Utile ? » (le filtre ou tamis de Socrate)

« Mes actes, je les ai subis, et non commis. » (Sophocle)

« Ce n’est pas à des mots que nous confions le soin d’illustrer notre vie, c’est à nos actions. » (Sophocle)

« On peut indéfiniment parler de révoltes sans provoquer jamais aucun mouvement révolutionnaire, tant qu’il n’y a pas de mythes acceptés par les masses ; c’est ce qui donne une si grande importance à la grève générale… » (Georges Sorel) – Il ne peut exister aucune action collective d’importance qui ne soit soutenue par quelque mythe. Quel mythe aujourd’hui ? La croissance, les vacances, les coucheries des peoples et présidents ?

« La révolte, la résistance, la protestation, l’insatisfaction, le refus, voire l’engagement, sont des états mentaux, des attitudes, des actions qui n’ont en eux-mêmes aucune valeur morale. » (Monique Canto-Sperber)

« La volonté d’agir ne peut suffire si elle n’est pas informée, orientée par la réflexion normative. C’est à la réflexion qu’il incombe d’évaluer les buts visés par l’action, d’examiner d’autres options … de considérer le contexte … d’envisager les situations … les effets néfastes … La réflexion oblige également à un travail de légitimation, puisqu’il faut expliciter les raisons qui justifient l’action. » (Monique Canto-Sperber)

« Ne pas frapper de dérision les actions humaines, ne pas les railler, ne pas les déplorer, ne pas les maudire, mais les comprendre. » (Spinoza) – Littéralement, son fameux commandement : Non ridere, non lugere neque detestari, sed intelligere.

« Si l’on attend que les conditions soient réunies pour entreprendre quoi que ce soit on ne fera jamais rien … C’est parce que je décide de faire quelque chose que je réunis les conditions de sa possibilité. » (Martin Steffens)

« Bien agir c’est réussir, quel qu’en soit le succès. » (Christine de Suède)

« Tendance des individus à voir le comportement des autres comme intentionnel, une maladresse sera interprété comme une conduite agressive ; le ‘biais d’intentionnalité’ consiste à percevoir l’action d’une volonté ou d’une décision derrière ce qui est fortuit ou accidentel, ‘Le résultat final de l’activité politique répond rarement à l’intention primitive de l’acteur, très souvent le rapport entre le résultat final et l’intention originelle est tout simplement paradoxal.’ (Max Weber). » (Pierre-André Taguieff)

« A côté du noble art de faire faire les choses par les autres, il y a celui, non moins noble, de les laisser se faire toutes seules. Ne pas détraquer par des initiatives intempestives un mécanisme dc choses qui doivent mûrir toutes seules. » (principe taoïste)

« Agir consiste aussi à ne pas agir. Ainsi on n’est jamais sans agir. » (Lao Tseu)

« La vogue des théories de l’action obligatoire. » (Charles Taylor)

« L’Occident a les mains actives et le cœur vide. » (Paul Thibaud)

« Il faut partir de l’absolu dans la pensée pour réaliser le relatif dans l’action. Celui qui, au départ, ne croirait qu’au relatif n’aboutirait qu’à fort peu. L’écart entre l’idéal et l’action étant un fait inéluctable, il faut que l’idéal soit très haut. L’idéal joue le rôle de hausse ; tous ceux qui ont manié des armes à feu savent que, pour tirer loin sur la terre, il faut viser haut dans le ciel. » (Gustave Thibon)

« ‘Ce qui n’a pas pu être miracle devient œuvre ; ce qui n’a pas pu être œuvre devient action’ … Dégradation progressive de l’émerveillement (wunder) à l’œuvre (werk) puis à l’action (tat). » (Gustave Thibon – citant Ludwig Klages)

« L’hyperactivité expulsant l’intériorité. » (Alvin Toffler – Le choc du futur) – Abstraction et désubstantialisation des individus les rendant enfin supportables à eux-mêmes.

« Un voyage de mille lieux commence par un pas. » (Lao-Tseu)

 « L’homme sait souvent ce qu’il fait mais il ne sait pas ce que fait ce qu’il fait. » (Paul Valéry) 

« Que de choses il faut ignorer pour agir. » (Paul Valéry)

« L’action de l’homme dépasse considérablement la conscience qu’il en prend ; la majeure partie de ce qu’il fait n’a pas sa contrepartie de pensée ou d’affectivité. Sinon, on réduirait d’énormes  ensembles ‘institués’ tels que la religion ou la vie culturelle à n’avoir pour contrepartie authentique que des moments discontinus d’émotion de la partie la plus fine de l’âme chez une petite élite. » (Paul Veyne)

« Les hommes font leur histoire, mais ne peuvent savoir ce que cette histoire sera, ce que l’avenir en fera, il faut donc éviter de changer. Agir, c’est créer un désordre dangereux … Car nos options politiques qui se veulent les plus raisonnées ou qui sont les plus raisonnables ont des racines instinctuelles ou, si l’on préfère, caractérielles. » (Paul Veyne – début du propos prêté à…) – Surtout aujourd’hui où l’intérêt dissimulé derrière l’émotion emporte tout et déborde tout sens.

« Au commencement, affirme Goethe, se trouve l’action, non la pensée. La main commence, l’esprit s’adapte … L’obstacle inspire. » (Alexandre Vialatte)

« L’esprit humain est ainsi fait que les actions aboutissent autrement qu’on ne les a calculées. » (Giambattista Vico) – « Négation de la capacité de l’homme à prévoir et à fabriquer son histoire. » (Thomas Molnar)

« ‘Le monde est comme il est’ – Non, le monde est comme on le fait. » (réplique de saint Vincent de Paul)

« Pour tout acte, le considérer sous l’aspect non de l’objet, mais de l’impulsion. Non pas : à quelle fin ? Mais : d’où cela vient-il ? » (Simone Weil)

« Détachement des fruits de l’action. Se soustraire à cette fatalité. Comment ? Agir non ‘pour’ un objet, mais ‘par’ une nécessité. Je ne peux pas faire autrement. Ce n’est pas une action, mais une sorte de passivité. Action non agissante …Transporter hors de soi les mobiles de ses actions. Les motifs tout à fait purs (ou les plus vils : toujours la même loi) apparaissent comme ‘extérieurs’. » (Simone Weil)

« Pas de trace de ‘je’ dans la conservation. il y en a dans la destruction. ’Je’ laisse sa marque sur le monde en détruisant. » (Simone Weil)

« Fondée sur le manque d’imagination, l’action est la ressource suprême des gens qui ne savent pas rêver …Chose la plus simple du monde, elle est aussi le refuge des gens qui n’ont rien à faire. » (Oscar Wilde)

« Toute activité humaine peut-être réduite à la séquence : input-process-output. » (maxime philosophique de haute volée bien digne d’un américain, John Whitmore – rapportée ironiquement par Roland Gori)

« Si telle pierre ne veut pas bouger pour l’instant, si elle est coincée, fais bouger d’abord d’autres pierres autour d’elle … Gratter un mortier est beaucoup plus facile que de mouvoir une pierre. Or il faut faire l’un pour pouvoir faire l’autre ensuite. » (Ludwig Wittgenstein)

« Agis comme s’il ne devait jamais exister de futur. » (axiome)

« Pour agir, il faut être. » (adage scolastique)

« Savoir ne pas agir … Réagir.. » (adage chinois) – Suivant François Jullien, pour la pensée traditionnelle chinoise, le monde n’est pas un objet d’agir, il suffit d’assister le naturel, de se rendre disponible.  Est-ce encore vrai ? et aussi : « A côté du noble art de faire faire les choses par les autres, il y a celui, non moins noble, de les laisser se faire toutes seules. »

« Qui s’arrête se trompe ? » (adage, zen ?)

« L’œuvre reflète l’homme. » (proverbe) – Il vaut mieux ne plus considérer ce dicton, quand on voit certaines réalisations (on ne saurait dire œuvres) contemporaines, que doivent être les auteurs !

« Qui a dix lieue à faire doit compter neuf pour la moitié. » (proverbe)

« Savant sans œuvres, nuages sans pluie. » (proverbe)

« Mieux vaut labourer profond que large. » (proverbe)

« Les jeunes gens disent ce qu’ils font, les vieillards ce qu’ils ont fait, les sots ce qu’ils ont envie de faire. » (?)

« Le Verbe ne vaut que s’il s’incarne. » (?)

« Les seuls combats perdus d’avance sont ceux qu’on ne livre pas. » (?)

« S’occuper exagérément de ‘faire’ nuit beaucoup au verbe ‘être’. » ( ?) 

 Il existe une logique de l’action collective (différente de celle qui régit généralement l’action individuelle) traitée dans un livre de Mancur Olson, Logique de l’action collective, œuvre introduite en France par Raymond Boudon et dont quelques extraits dus à l’un ou l’autre de ces auteurs se trouvent ci-dessous, et dont on retrouvera certains dans différentes rubriques, à savoir : 055,1 Associations ; 375,6 Démocratie ; 565,4 Pensée unique, politiquement correct… C’est la stratégie du Laissez faire les autres.

 « Un groupe inorganisé de personnes ayant un intérêt commun, conscientes de cet intérêt et ayant  des moyens de le réaliser ne fera dans des conditions générales rien pour le promouvoir. La communauté d’intérêt ne suffit pas à provoquer, contrairement à ce qu’affirme Marx, l’action commune permettant de promouvoir l’intérêt de tous … Logique de l’action collective et logique de l’action individuelle ne font pas un mais deux … mais, allergique à l’intérêt dans les grands groupes, l’action collective peut dépendre de l’absence complète de coûts d’implication, comme de cas où une ambiance de loyauté ou une culture de solidarité peut se former (les ‘foules ‘de Gustave Le Bon) … Que les membres d’un grand groupe aient avantage à atteindre leur objectif commun ne veut pas dire qu’ils agiront de manière à y parvenir … Leurs actions importent peu dans un sens comme dans l’autre, leurs relations sont inexistantes … Ils n’entreprendront rien qui permette de se rapprocher de l’objectif commun sinon contraints ou forcés (mesures coercitives) ou si s’offrent à eux certaines stimulations distinctes de la poursuite du but collectif en échange de leur consentement à supporter une part des charges et des coûts (et des risques) qu’entraîne la réalisation des buts du groupe … L’efficacité supérieure des groupes relativement petits, la contribution de chacun deviendra d’autant plus signifiante, les décisions peuvent être prises rapidement, réfléchies, chacun se sent concerné par l’objectif, le bien à acquérir ou à défendre  … C’est pour ces raisons que les organisations se scindent souvent en petits groupes, comités …   Pourquoi les milieux politiques français confondent si facilement l’opinion des groupes d’influence avec l’opinion publique et pourquoi ils accordent davantage d’attention aux premiers … Ce qui menace les démocraties et la démocratie française plus que d’autres, c’est en fait la tyrannie des minorités … Le droit consenti aux associations de se porter partie civile … ce qui leur accorde un pouvoir considérable (notamment de dénonciation, de terreur et une grande motivation à la poursuite de bénéfices financiers). A ce sujet, un économiste et sociologue américain, Mancur Olson, a identifié le mécanisme qui est à l’origine de ce pouvoir … Lorsqu’un petit groupe organisé cherche à imposer ses intérêts ou ses idées à un grand groupe non organisé (majorité silencieuse), il a de bonnes chances d’y parvenir … ‘effet d’exploitation du gros par le petit’. En effet, les membres du grand groupe, non organisé, ont alors tendance à espérer qu’il se trouvera des candidats pour organiser la résistance au petit groupe organisé et à en assumer les coûts (et les coups), profitant ainsi, en quelque sorte, d’une espèce de ‘billet gratuit’C’est la loi d’airain de l’oligarchie (dissimulée derrière la démocratie) qui tend à conférer un pouvoir indistinctement à tous les lobbys … Ces groupes d’influence comportent une forte proportion d’acteurs partiaux (et puissants) … En raison de la concentration du pouvoir qui la caractérise, la France est plus exposée … à l’effet ‘Olson’ … A l’autre extrémité du spectre des groupes d’influence se situent les groupes de connivence… partageant ce que Robert Merton a dénommé une ‘hémophilie de valeurs’. Ainsi nombre de journalistes … partagent largement des vues communes sur le politiquement ou le culturellement correct … Ainsi s’explique la persistance des phénomènes idéologiques même négatifs (lecture globale, pédagogie de type rousseauiste, histoire mythique de la Révolution de 89, diabolisation de l’entreprise, laxisme pénal ; tous phénomènes de pensée unique, de politiquement correct, de terrorisme intellectuel). »  – L’effet Olson joue pleinement pour la chasse aux subventions et exonérations (qui opèrent aux dépens de la grande masse des contribuables inorganisés), comme joint à ‘l’hémophilie de valeurs’ il pousse fortement (et réussit) à bouleverser les sociétés  par les fameuses mesures sociétales – La plupart des politiciens sont issus de ces groupes de pression, leur doivent leur carrière – Cet effet Olson se retrouve dans le phénomène que les sociologues, du travail notamment, appellent le passager clandestin : celui qui profite de l’effort des membres d’un groupe pour bénéficier des avantages sans guère contribuer.

 « Le fait que certains groupes parviennent à imposer leur point de vue ‘contre’ la majorité, y compris en démocratie … Lorsque la majorité reste apathique et ne trouve pas assez de motivation pour s’opposer … Lorsque la minorité parle si fort qu’elle arrive à faire confondre la visibilité de son point de vue avec de la représentativité … Confusion entre la visibilité de l’information et sa représentativité. » (Gérald Bronner –sur la tyrannie des minorités) 

 On peut rapprocher de cet effet Olson ce que Jared Diamond appelle La ‘tragédie des communs’.

« Prenez une situation dans laquelle beaucoup de consommateurs partagent une ressource qu’ils possèdent en commun … Si chacun surexploite la ressource, elle diminuera et  finira par disparaître … Mais tant qu’il n’existe pas de régulation efficace (et contraignante), chaque consommateur a raison de se dire ‘si je n’attrape pas ce poisson ou si je ne laisse pas mes moutons brouter cette herbe, un autre le fera, je n’ai donc pas de raison de me retenir. Le comportement rationnel consiste à consommer avant que l’autre puisse le faire. » (Jared Diamond)

 – Ci-dessous considérations (très condensées, simplifiées et réordonnées) sur l’action efficace en Occident et telle que vue par la pensée ancestrale chinoise, suivant le livre Traité de l’efficacité de François Jullien (inspiré par le Clausewitz chinois Sun-Tzu). Certaines expressions, de liaison, ne sont pas de l’auteur.- Considérer également les remarques de François Jullien ci-dessus en même rubrique et notamment aux rubriques : Comportement, 140, 1 : Raidissement de conduite ; Humilité, 330, 3 : Laisser l’effet advenir ; Fins/moyens 335,1 : Sans projeter ; Force, 340, 1 : Puissance de l’eau ; Lois, 480, 1 : Plein et Vide ; Mesure, 490, 1 : L’excès d’effet ; Possibilité, 585,1 : correspondance des choses ; Sagesse, 670,1 : laisser œuvrer.

On pourra voir également L’art de la guerre de Sun-Tzu à la fin de la rubrique Guerre, 535,

« L’Occident agit les yeux fixés sur le modèle qu’il a conçu, marqué d’idéalité … Couplage théorie-pratique … rapport moyens-fin … Même si on n’ignore pas que l’idéal modélisé reste inaccessible en raison de la contingence , qu’il y a difficulté à penser la conduite de l’action  (penser la guerre, même Clausewitz constate l’échec de cette tentative qui porte sur un objet qui vit et réagit, in-modélisable), il n’est pas facile d’échapper aux schémas, aux modèles … La pensée chinoise n’a pas construit un monde de formes idéales, d’archétypes … le réel se présente à elle comme un procès, régulé et continu découlant de la seule interaction des facteurs en jeu (à la fois opposés et complémentaires : les fameux ‘Yin’ et ‘Yang’) … La victoire est à demander non aux hommes, mais à la situation … Prédisposer la situation pour la rendre encline à déployer l’effet … Au lieu d’imposer son plan au monde, on s’appuie sur le potentiel de la situation (sans cesse changeant), sur ce qui y est porteur … Plus que notre investissement personnel et notre effort importe le conditionnement objectif résultant de la situation … Ne s’immobilisant dans aucun plan, ne s’enlisant dans aucun projet, la stratégie est sans fond ; ‘insondable’ pour les autres, ‘inépuisable’ pour le stratège … Celui-ci ne projette ni ne construit, ne délibère ni ne choisit entre des moyens, sa souplesse et sa disponibilité lui permettent de faire évoluer la situation et d’en tirer parti … Pas de terme parfait en soi et perçu d’avance, plutôt la ‘voie’ (le tao) par laquelle on poursuit, qui conduit vers … Le rapport condition-conséquence remplace notre rapport moyens-fin, de la logique de modélisation, on passe à une logique de processus et le succès appartient à celui qui sait profiter de ce dernier … L’Occident conçoit l’action comme une entité isolable dont l’efficacité est directe … La pensée chinoise voit l’efficacité dans la transformation, (de la situation, des conditions, du ‘cerveau’ de l’adversaire…) … La Chine n’a pas bâti un grand récit de la Genèse tel celui de la tradition judéo-chrétienne ou du ‘Timée’, à l’origine pas d’acte intentionnel créateur … L’action, arbitraire, importune, intervenant, s’insérant, s’ingérant rompt le tissu des choses, trouble leur cohérence, suscite des résistances, elle est artificielle, superficielle, vite engloutie, n’a guère d’effet … C’est de la continuité dans la durée de la transformation que procède l’effet, non assignable à une volonté individuelle, ni localisable en un lieu et à un moment, elle n’est pas isolable, ne se démarque pas, ne se voit pas … Plus qu’à la transcendance de l’action, les Chinois croient à l’immanence de la transformation : on ne se voit pas vieillir, on ne voit pas la rivière creuser son lit … Tout l’art du stratège est de détecter au plus tôt les moindres tendances portées à se déployer, de prévoir à quoi elles conduisent, de la fissure à la fente, à la faille, à la crevasse, le devenir est prévisible, plus tôt on agit dans le cours des choses, moins on a à intervenir, à agir sur lui, en amont le réel ne résiste pas … N’intervenant que pour répondre à l’inclination des choses, le sage/stratège ne fait rien de ‘difficile’, et puisqu’il se contente d’amorcer discrètement des processus qui se développeront d’eux-mêmes, il ne fait rien non plus de ‘grand’ … L’occasion, l’accidentel, l’instant fugitif et hasardeux, l’unique pour l’Occident est, pour la pensée chinoise, conséquence inéluctable (les ‘transformations silencieuses’), temps long et durée lente, ni risque, ni inconnu, ni surprise, ni gloire, ni héroïsme … A l’opposé de l’activisme occidental du toujours plus, toujours plus loin… on retranche son ingérence, on réduit son affairement (l‘extrême du non-agir) … Ne pas tirer sur les plantes pour les faire grandir plus vite, mais ne pas se dispenser de sarcler à leur pied pour améliorer, orienter les conditions … Ce qui empêche l’effet de s’exercer est quand le plein n’est plus pénétré de vide et que, devenant opaque, il devient obstacle : formant écran, il conduit le réel, qui se trouve inhibé, à se figer, le vide est ce qui maintient le réel animé, non enlisé (le plein des règlements fait obstacle à l’essor spontané) … Lier l’effet à la force le fragilise, le lier à soi le précarise … Il n’est pas à chercher comme but, mais à recueillir comme conséquence… L’intention le tue, l’assèche et le tarit … Rondeur et mobilité en amont (disponibilité, rien n’a encore pris de forme visible), ‘carré’(décision) et stabilité en aval … Celui qui suit a prise sur celui qui initie et se hasarde … La pensée chinoise se refuse à la mise en valeur du sujet (comme aussi à son double, à son envers ascétique), refuse de penser la personne en l’isolant et l’abstrayant de la situation … L’absence de disposition crée la disponibilité … Elle n’a pas plus explicité la volonté qui, en Occident, se dresse en capacité d’affrontement du monde … Désarmer mentalement l’adversaire avant d’engager le combat, alors déjà gagné … La parole à l’envers : rendre l’autre transparent, tandis qu’on se rend opaque … Le faire ‘s’envoler’ (le louer) pour le ‘pincer’  … Amorcer ce qui tendra de lui-même dans un sens favorable, désamorcer ce qui … Induire plutôt que conduire … C’est de la non-bataille, du non-affrontement, du non-événement, de l’ordinaire en somme, que la pensée chinoise est préoccupée et prétend rendre compte … Être toujours en évolution, sans forme fixe ; qu’on ne peut immobiliser ni cantonner et qui échappe à l’emprise … n’adoptant jamais de forme fixe, le dragon … se soustrait à toute emprise, fait signe vers un continuel au-delà : il est l’image d’un dynamisme qui jamais ne se réifie et par là même devient insondable … L’image d’une énergie Il ne saurait se matérialiser en une configuration définie. Tantôt il apparaît et tantôt il disparaît, tantôt se déploie et tantôt se replie … L’oscillation par alternance, symbolisée par le dragon, est le grand principe régulateur du dynamisme … L’eau est ce qui se rapproche le plus de la ‘voie’ (Tao) … Souplesse et faiblesse la rende plus forte que la force … L’eau accumulée, image de potentiel … Elle suit sa pente pour avancer. Elle se détermine en fonction du terrain et triomphe sans affronter. Elle se conforme et contourne les obstacles … Image de variabilité stratégique … Cours de l’eau, corps du dragon. » – Que va-t-il rester de la vieille philosophie chinoise ?

 

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